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civil de V...., le sieur T.... soutient que, le 2 janvier, à 2 heures après midi, il n'avait encore reçu, ni la signification de la saisiearrêt, ni celle de l'ajournement, et qu'en conséquence, son offre réelle est suffisante. A l'appui de cette défense, il produit les deux copies qui lui ont été délivrées des deux exploits du 2 janvier, et il fait remarquer que, dans l'une comme dans l'autre, la délivrance en est datée du 2 janvier, six heures du soir. Après avoir fait comparaître l'huissier Toussaint et le sieur C...., avoué du sieur Degombert, le tribunal rend, le 1er février, un jugement qui, entr'autres choses, déclare que l'avoué C.... a corrompu l'huissier Toussaint, en l'envoyant, le 2 janvier, six heures du soir, porter à T.... deux copies d'exploit dans les quelles l'heure à laquelle la remise était faite, se trouvait en blanc, tandis que, dans les originaux, il était énoncé que cette remise avait eu lieu à dix heures du matin; mais que T.... a forcé l'huissier de remplir, dans ces copies, l'heure à laquelle il les lui avait délivrées, c'est-à-dire, six heures du soir; en conséquence, déclare suffisante et valable l'offre réelle de T...., donne à celui-ci mainlevée de la saisie-arrêt, et suspend le sieur C.... et l'huissier Toussaint de leurs fonctions, le premier indefiniment, le second pendant un mois.

Le sieur Degombert et l'huissier Toussaint acquiescent à ce jugement. Mais le sieur C.... en appelle.

Le 21 mars 1811, arrêt de la cour d'appel de Metz qui réforme, dans l'intérêt du sieur C...., le jugement dont est appel; et faisant droit sur les conclusions du procureur général, ordonne que T.... et l'huissier Toussaint seront poursuivis comme coupables de Faux. Le 9 août de la même année, arrêt de la chambre d'accusation de la même cour qui, renvoie les deux prévenus devant la cour d'assises du département des Ardennes.

Le 14 du même mois, le procureur général dresse, contre les deux prévenus, un acte d'accusation dont le résumé est ainsi conçu : «<< en conséquence, lesdits T.... et Toussaint » sont accusés d'avoir commis le crime de » Faux en écriture authentique, dans une copie de dénonciation de saisie-arrêt, du 2 » janvier dernier, et T.... de s'en être prévalu » la sachant fausse ».

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Le 22 novembre suivant, après les débats, les questions sont ainsi posées par le président de la cour d'assises :

« 10 L'accusé T.... est-il ou non coupable d'avoir commis le crime de Faux en écriture authentique et publique, dans une copie de

dénonciation de saisie-arrêt, du 2 janvier dernier, soit comme auteur, soit comme complice?

» 2o L'accusé T.... est-il ou non coupable de s'être prévalu, dans son intérêt particulier, de cette copie, la sachant fausse?

» 30 L'accusé Toussaint est-il coupable du crime de Faux en écriture authentique et publique, soit comme auteur, soit comme complice?

Les jurés répondent, à la première ques tion: non; l'accusé n'est pas coupable; à la seconde, oui, l'accusé est coupable d'avoir commis le crime, avec toutes les circonstances comprises dans la position de la question; à la troisième, non, l'accusé n'est pas coupable.

Sur cette déclaration, ordonnance du président qui acquitte Toussaint; et arrêt de la cour qui, appliquant à T.... la disposition des art. 148, 164 et 165 du Code pénal de 1810, le condamne aux travaux forcés pendant cinq ans, à la flétrissure, au carcan, à 100 francs d'amende et aux frais du procès.

C.-J. T.... se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

« Des huit moyens de cassation qui vous sont proposés dans cette affaire (ai-je dit à l'audience de la section criminelle, le 30 janvier 1812), les sept premiers tombent d'euxmêmes, et ce serait consumer inutilement les précieux momens de votre audience, que de nous arrêter à en faire une réfutation sé

rieuse.

» Mais le huitième nous paraît mériter toute votre attention. Il consiste à dire que se prévaloir, dans son intérêt particulier, d'une piece fausse, ce n'est pas la même chose que d'en faire usage; et que l'art. 148 du Code pénal ne punissant des travaux forces à temps, que celui qui aura fait usage des actes faux, on ne peut pas appliquer cette peine à un accusé qui n'est declaré convaincu que de s'être prévalu, dans son intérêt particulier, d'un pareil acte.

>> Effectivement, Messieurs, s'il est des cas où l'on fait usage d'une pièce fausse, par cela seul qu'on s'en prévaut; il en est aussi d'autres où l'on peut se prévaloir d'une pièce fausse, sans en faire usage.

» Que, dans une plaidoirie ou dans une requête d'instruction, un plaideur se prevaille, c'est-à-dire, cherche à tirer avantage d'une pièce fausse, en la produisant, en la présentant comme un moyen décisif pour sa cause, bien sûrement il en fait usage dans le sens de l'art. 148 du Code pénal; et s'il est, par la

suite, déclaré convaincu d'en avoir ainsi fait usage sachant qu'elle était fausse, il sera jus

tement condamné comme faussaire.

» Mais que, dans une conversation, dans une dispute, un particulier à qui un autre reproche, par exemple, de ne pas lui payer telle dette, allègue qu'il l'a payée et qu'il en a la quittance; on pourra bien dire, si une quittance de cette dette vient à paraître dans la suite, par le fait d'un tiers, et qu'elle se trouve fausse, qu'il s'en est prévalu dans son intérêt particulier; ou, en d'autres termes, que, pour se donner momentanément l'air de ne rien devoir, il s'est vanté d'avoir cette quittance à sa disposition, quoique peut-être il ne l'eût réellement pas; mais on ne pourra pas dire qu'il en a fait usage.

» Tous les jours, on dit d'un homme vain, qu'il se prévaut de sa naissance, de son crédit, de son autorité, et l'on n'entend point par là qu'il fait usage de son autorité, de son crédit, de sa naissance, pour parvenir à des fins illicites ou malhonnêtes; on entend seulement qu'il s'en glorifie, qu'il en fait vanité.

» Se prévaloir, même dans son intérêt particulier, et faire usage, ne sont donc pas synonymes. On ne peut donc pas appliquer la peine portée par l'art. 148 du Code pénal, à celui qui est déclaré convaincu, non d'avoir fait usage, mais de s'être prévalu, dans son intérêt particulier, d'une pièce fausse. L'arrêt qui vous est, en ce moment, dénoncé, a donc fait une fausse application de cet article.

» Mais devez-vous vous borner à casser cet arrêt? Ne devez-vous pas casser également l'acte d'accusation, la position des questions et la déclaration du jury, en ce qui concerne la prévention élevée contre T...., de s'être prévalu d'un pièce fausse?

» Sur ce point, Messieurs, nous ne pouvons rien faire de mieux que de vous proposer votre propre exemple. Le 26 juillet 1811, au rapport de M. Liborel, dans une espèce où, comme ici, il y avait prévention d'un crime bien caractérisé par l'arrêt de renvoi à la cour d'assises, mais où, comme ici, par suite de l'inexactitude avec laquelle un acte d'accusation avait été rédigé, les questions avaient été posées et résolues de manière à rendre impossible toute application de la loi pénale, vous avez cassé, non seulement l'arrêt de condamnation qui était intervenu, mais encore l'acte d'accusation, la position des questions et la déclaration du jury.

TOME VII.

» Et nous estimons qu'il y a lieu, dans l'espèce actuelle, de prononcer de même ».

Ces conclusions étaient rigoureusement calquées sur la loi; et je crois que, toutes les fois qu'il s'agit de peines, surtout de peines afflictives, on ne saurait trop s'attacher aux termes des textes qui les prononcent.

Cependant par arrêt du 30 janvier 1812, au rapport de M. Busschop,

« Considérant, sur le premier moyen, que le jugement du tribunal d'arrondissement de V...., du 1er février 1811, n'ayant point été rendu sur la poursuite du ministère public, agissant pour la vindicte publique, on ne peut en tirer, en faveur du condamné, l'exception de la chose jugée contre l'arrêt attaqué;

par les huissiers dans l'exercice de leur mi» Sur le second moyen, que les actes faits nistère, font foi en justice jusqu'à inscription de Faux ; que conséquemment le Faux commis dans ces actes, rentre dans l'application des lois pénales qui prononcent des peines contre les Faux commis en écriture authentique et publique ;

» Sur le troisième moyen, que le fait qui lui sert de base, n'est justifié d'aucune manière ;

» Sur le quatrième moyen, que l'acte d'accusation contient, dans son contexte et dans son resumé, tous les faits qui ont fait la matière des questions qui ont été propo sées aux jurés;

» Sur le cinquième moyen, que la réponse négative du jury sur les questions relatives aux auteurs et complices de la falsification de la pièce arguée, n'exclud point l'usage qui a été fait par le condamné de ladite pièce fausse;

» Sur les sixième et septième moyens, que le condamné n'ayant point été convaincu de complicité dans la fabrication de la pièce arguée de Faux, il ne peut tirer en sa faveur aucun argument des prétendues omissions qui auraient été faites dans la position des questions relatives à ladite complicité;

>> Sur le huitième et dernier moyen, que le condamné ayant été déclaré coupable par le jury de s'être prévalu d'une pièce fausse dans son intérêt particulier, sachant qu'elle était fausse, il est nécessairement convaincu d'avoir fait un usage criminel de cette pièce fausse, et que conséquemment l'art. 148 du Code pénal lui a été justement appliqué ;

» D'après ces motifs, la cour rejette le pourvoi..... ».

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Je n'ai pas besoin de dire qu'un pareil arrêt, fondé peut-être, dans son dernier motif, sur quelques souvenirs peu avantageux au demandeur en cassation, ne doit pas être tiré à conséquence.

S. VIII. 1o Lorsqu'un tribunal institué spécialement pour connaitre des crimes de Faux, et incompétent pour connaître des faits d'escroquerie, se trouve saisi d'une procédure qui présente un fait d'escroquerie commis à l'aide d'un Faux, peut-il prononcer sur les deux délits à la fois ?

20 Peut-il, sans déclarer si le Faux est constant ou non, et en jugeant que les prévenus n'en sont point coupables, les acquitter de l'accusation d'escroquerie?

V. l'article Incompétence, S. 1 et 2.

S. IX. En matière civile, les rapports d'experts sur la vérité ou la fausseté d'une pièce, lient-ils absolument les juges ?

V. l'article Vérification d'écriture.

S. X. De l'inscription de Faux incident.

V. l'article Inscription de faux.

S. XI. 1o Le notaire qui, en recevant un acte hors de son arrondissement, le date du lieu de sa résidence, se rend-il, par là, coupable du crime de Faux?

20 Peut on poursuivre comme coupable de ce crime, le notaire qui, ayant reçu un acte hors de son étude, mais dans son arrondissement, le date de son étude

même ?

I. La première de ces questions s'est présentée à la cour spéciale du département de Vaucluse, le 30 mai 1808, au sujet d'une accusation de Faux intentée par le ministère public contre Simon Delafont, notaire à Montaren, pour avoir reçu, hors de son territoire, un acte de donation entre-vifs, et l'avoir daté du lieu de sa résidence où il était prétendu qu'il l'avait signé avec les témoins instrumentaires, sans que ceux-ci eussent assisté à l'acte, ni vu les parties.

Par arrêt du même jour, « considérant » que Simon Delafont, notaire à Montaren, » est prévenu de Faux en écriture publique » et authentique; que ce délit est classé dans » la loi du 23 floréal an 10, art. 2 » ; la cour spéciale du département de Vaucluse s'est déclarée compétente.

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« Le sieur Cousin, notaire à Gouzeaucourt, arrondissement de Cambray, département du Nord, avait plusieurs fois adressé ses plaintes à M. le procureur du gouvernenement près le tribunal de première instance de Cambray, contre le sieur Lefebvre-Gensse, notaire à Fins, canton de Roisel, arrondissement de Péronne, département de la Somme, en venir passer, comme notaire instrumentant, ce qu'il inculpait celui-ci de des actes dans l'arrondissement de Cambray, notamment dans le canton du Marcoing, dont le village de Gouzeaucourt fait partie, et de les énoncer et dater comme passés à Fins.

"Le 27 juillet 1808, le sieur Cousin rendit une nouvelle plainte plus précisée que les précédentes: il accusa le sieur Lefebvre de s'être rendu, le 20 du même mois, vers huit heures du matin, à cheval, à Bantouzelle, arrondissement de Cambray; d'y avoir fait, le même jour, le contrat de mariage du nommé Joseph Deffe, aubergiste à Fins, avec Esther Rucart, de Bantouzelle, dans la maison de cette dernière, au même lieu ; que ce contrat avait été souscrit, comme parens et conseils, par Jean-Baptiste Crépin, ex-juge de paix à Bantouzelle, Mathurin Sorlig, cultivateur à Banteux, et Nicolas Carré, cultivateur à la Vacquerie; que ledit Deffe avait amené ce notaire à Bantouzelle, qu'ils étaient accompagnés de deux des frères et d'un voisin du même Deffe, et que le notaire, après ce contrat fait et signé, était reparti vers cinq heures du soir; qu'il était probable que le notaire Lefebvre (ne pouvant faire autrement) aurait énoncé ce contrat comme fait à Fins, tandis que réellement il avait été fait à Bantouzelle ; et il offrit de prouver que ni la future épouse ni les témoins n'en étaient sórtis ce jour là.

» La chambre de discipline intérieure des notaires de l'arrondissement de Cambray appuya particulièrement cette plainte.

» M. le procureur du gouvernement près

le tribunal de Cambray, ne vit d'abord dans la conduite du notaire Lefebvre, qu'un écart à réprimer par voie de discipline.

» Il adressa la plainte à son collègue à Péronne, qui, remarquant, dans cette conduite, plus qu'une faute de discipline, lui renvoya ladite plainte, attendu que le délit avait été commis dans l'arrondissement de Cambray......

» Le délit imputé au notaire Lefebvre, présentant tous les caractères d'un Faux en écritures publiques et authentiques, un juge de la cour de justice criminelle spéciale fut commis, et une information fut ouverte.

» Il en résulta la preuve évidente de la vérité des faits repris en la plainte du notaire Cousin; et il fut prouvé que le contrat de mariage dont s'agit, quoique daté d'Epchy, arrondissement de Péroune, avait été fait à Bantouzelle, arrondissement de Cambray; que les parties contractantes et les témoins honoraires l'avaient signé à Bantouzelle, et les témoins instrumentaires et le notaire à Epchy,

» De toutes ces circonstances, il parait résulter un double Faux : le premier, parceque ce contrat fait à Bantouzelle, où le notaire de Fins ne pouvait pas instrumenter, est daté d'Epchy, malgré le prescrit de l'art. 12 de la loi du 25 ventôse an 11; le deuxième, parceque les témoins instrumentaires demeurans dans l'arrondissement du notaire, n'étaient pas présens à l'acte.

» En conséquence, un mandat d'amener fut décerné à la charge du notaire Lefebvre.

» Interrogé, il allégua, pour sa justification, qu'il ne s'était rendu à Bantouzelle qu'à la sollicitation du sieur Deffe, son ami et son voisin, qui avait désiré que son contrat de mariage fût rédigé par lui; que ce contrat de mariage n'avait été rédigé à Bantouzelle, dans la maison de la future épouse, que comme projet ; que les époux y avaient apposé leurs signatures ainsi que quelques assistans; que, quant à celles des deux témoins qui ont remplacé le second notaire, elles avaient été faites à Epchy, dans la maison d'Auguste Quenin; que les deux époux, ainsi que les autres signataires, sans cependant pouvoir assurer s'ils y étaient tous, s'étaient rendus depuis à Epchy; que là, il leur fit la lecture du projet de contrat qui avait été rédigé à Bantouzelle; qu'il crut inutile de recommencer ce contrat qui contenait les véritables dispositions des contractans : et qu'il se contenta d'y faire apposer les signatures qui y manquaient, et la sienne.

>> Le notaire Lefebvre convint donc de tous les faits allégués contre lui; il convint que le

contrat de mariage avait été par lui rédigé à Bantouzelle; que les futurs époux et les témoins honoraires l'avaient également signé en ce lieu, et que lui et les témoins instrumentaires l'avaient signé à Epchy; que par conséquent les témoins instrumentaires n'avaient point été présens à sa rédaction.

» La qualité de projet qu'il donne au contrat, la lecture qu'il prétend en avoir faite depuis aux parties à Epchy, avant l'apposition de sa signature et de celles des témoins instrumentaires, est un conte qui n'a pas même le mérite de la vraisemblance, puisque les futurs époux et les témoins honoraires n'ont pas dit un mot, dans leurs dépositions, de ce voyage à Epchy; et que d'ailleurs, si ce voyage était vrai, comme il n'aurait pas été fait le 20 juillet, jour de la date du contrat, les futurs époux ni les témoins honoraires ne s'étant pas absentés ce jour là de Bantouzelle, il y aurait toujours un Faux, puisque la date et les signatures des futurs époux et des témoins honoraires seraient antérieures à la prétendue lecture et signature du notaire et des témoins instrumentaires.

» D'ailleurs, comme ce contrat a été enregistré le lendemain 21 juillet¦, à Péronne, il s'ensuivrait aussi que la lecture en aurait été faite après l'enregistrement, et que le notaire et les témoins instrumentaires l'auraient également signé après ledit enregistrement, par conséquent après que l'acte eût été revêtu de ses formalités, et qu'il n'était plus possible d'y rien changer.

» De ce qui précède, il résulte qu'il y a contre le notaire Lefebvre Gensse, prévention de Faux en écritures publiques et authentiques, à raison de fausse date et de fausse énonciation, écrites volontairement par lui, dans un acte public et dans l'exercice de ses fonctions; mais cette prévention suffit elle pour fixer votre compétence......?

» La cour de justice criminelle spéciale, lorsqu'il s'agit de fixer sa compétence, examine, comme au cas présent, par exemple, si le Faux a été commis volontairement par un fonctionaire, dans un acte public et dans l'exercice de ses fonctions; ce fait prouvé suffit pour constituer ce fonctionaire en prévention du délit pour fixer la compétence de la cour.

» L'exécution de l'arrêt de compétence estelle ordonnée ? La cour de justice criminelle et spéciale recherche si, par des circonstances particulières, le Faux a été commis méchamment et à dessein de nuire : elle absout ou elle condamne; nous ne croyons pas qu'il soit possible d'envisager le délit imputé au notaire Lefebvre, autrement que comme un Faux

sur la moralité duquel nous nous abstenons de prononcer en ce moment.

» L'arrêt de la cour de cassation, en date du 1er avril 1808, rendu sur une question identiquement la même, le préjuge ainsi et ne permet pas d'envisager la conduite du notaire Lefebvre, comme un écart punissable seulement par voie de discipline.

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D'après cet exposé, nous pensons que la cour de justice criminelle et spéciale doit se déclarer compétente pour connaître du délit de Faux en écritures publiques et authentiques et dans l'exercice de ses fonctions, imputé au notaire Lefebvre Gensse, attendu que ce délit est prévu par l'art. 2 de la loi du 23 floréal an 10 ».

Nonobstant ces conclusions, arrêt du 29 juillet 1809, par lequel,

« Considérant que l'art. 6 de la loi du 25 ventose an 11, en défendant à tout notaire d'instrumenter hors de son ressort, n'a prononcé, contre le notaire contrevenant, que la suspension de ses fonctions pendant trois mois et la destitution en cas de récidive, en

le soumettant au surplus à tous dommages

intérêts;

» Considérant que Claude-André Lefebvre

Gensse soutient que l'acte a été reçu à Epchy, lieu de son arrondissement; mais qu'en sup, posant que le contrat dont il s'agit, a été réellement passé, contre sa teneur, au dehors de son arrondissement, il ne résulterait pas de ce fait, un Faux criminel dans le sens du Code pénal, puisqu'il n'aurait pu avoir pour but que de se soustraire à la suspension ou à la destitution prononcée par l'article de la loi ci-dessus citée; qu'ainsi, on ne pourrait y trouver le caractère de criminalité que la loi exige, le Faux n'ayant pas été commis méchamment et dans l'intention de nuire à autrui;

» Que ces principes ont été consacrés par l'arrêt de la cour de cassation, du 29 décembre 1808, portant annullation d'un arrêt de compétence rendu par la cour de justice criminelle spéciale du département de la Meurthe dans le cas identique à celui dont il s'agit ici (1);

» La cour spéciale se déclare incompétente, renvoie le prévenu par-devant qui de droit, pour être prononcé sur la prévention d'avoir instrumenté hors de son ressort ».

Mais cet arrêt ayant été transmis à la cour de cassation, a été cassé, le 11 août suivant,

en ces termes :

(1) F. ei-après, no 2.

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» Attendu que, d'après ladite loi du 25 ventóse an 11, les notaires n'ont de caractère public que dans l'étendue de l'arrondissement pour lequel ils ont été institués; que, lorsqu'un notaire instrumente hors de cet arrondissement, il n'encourt sans doute, par le seul fait, que les peines de discipline prononcées par l'art. 6 de la susdite loi; mais que, lorsque, dans un acte ainsi passé hors de son arrondissement, il déclare que cet acte a été passé, conformément à la loi, dans l'arrondissement pour lequel il est établi, il commet, par cette fausse déclaration, un Faux caractérisé qui ajoute un crime à la transgression qu'il peut avoir eu pour objet de couvrir ; que ce Faux qui ne peut être commis que sciemment, ayant pour but de tromper et d'éluder la prévoyance et la volonté du législateur, emporte, par cela seul, l'intention et conséquemment la moralité criminelle; qu'il rentre donc immédiatement dans l'attribution spéciale, par l'art. 2 de la loi du 23 floreal conférée aux tribunaux de justice criminelle

an 10;

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s'est

nelle speciale du département du Nord, saisie Que néanmoins la cour de justice crimide la prévention d'un Faux de ce genre, déclarée incompétente pour en connaître, sous le seul prétexte qu'il ne pouvait y'avoir lieu, pour la condamnation, qu'aux peines de discipline prescrites par l'art. 6 de la susdite loi du 25 ventôse an 11;

» Que, par cette déclaration d'incompétence, elle a fait une fausse application de cet article ; qu'elle a violé les règles de compétence établies par le §. 6. de l'art. 456 de la loi du 3 brumaire an 4, et spécialement celles consacrées par l'art. 2 de la loi du 23 floréal an 10 ci-devant transcrit ;

D'après ces motifs, la cour casse et annulle.... ».

II. La seconde question a été jugée dans le sens opposé, par l'arrêt du 29 décembre 1808, sur lequel la cour spéciale du Nord s'appuyait fort mal à propos dans l'espèce qu'on vient de rappeler.

Voici comment cet arrêt est rapporté dans le bulletin criminel de la cour de cassation.

« Le sieur Malhostie avait donné procuration à sa femme pour traiter d'une affaire d'intérêt avec le père de Jean-Nicolas Ferry.

> En vertu de cette procuration, la dame Malhostie avait transigé et accordé mainlevée de l'inscription que son mari avait for

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