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au saisi par l'huissier, ne contenait pas cette copie?

4o La nullité des notifications d'affiches se couvrait-elle par le silence du saisi avant l'adjudication?

50 L'adjudication était-elle un jugement proprement dit, et devait-elle en conséquence renfermer les quatre parties prescrites par l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 24 août 1790?

6o Lorsque le saisi n'était pas présent à l'adjudication, était-il nécessaire, à peine de nullité, d'en faire mention dans l'acte et donner défaut contre lui?

7o Celui au profit duquel l'adjudicataire a fait une déclaration de command, peut-il intervenir sur l'appel de l'adjudication? Peut-il se pourvoir en cassation contre l'arrêt qui, sur cet appel, a déclaré l'adjudication nulle?

En prairial an 8, la veuve d'Affry, créancière de Pierre Gigot-Garvllle, son père, né Français, mais domicilié, depuis 1788, à Greng, près Morat, en Suisse, lui fait faire des commandemens tendans à l'Expropriation forcée des biens qu'il possède en France, dans l'arrondissement de Gray, département de la Haute-Saône.

Ces commandemens sont suivis d'affiches notifiées au sieur Gigot-Garville, au domicile du commissaire du gouvernement près la cour d'appel de Besançon.

Le 3 fructidor an 8, jour indiqué pour la réception des enchères, le sieur Gigot-Garville se présente et soutient, entre autres choses, que la notification des affiches est nulle, en ce qu'elle n'a pas été faite au domicile du commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Gray.

Jugement du même jour, qui, sans avoir égard aux moyens de nullité proposés par le sieur Gigot-Garville, ordonne qu'il sera procédé à la lecture de l'affiche et à la réception des enchères.

En conséquence, les enchères sont reçues; mais comme elles n'excèdent pas quinze fois le revenu net des biens saisis, le tribunal renvoie l'adjudication définitive au troisième jour complémentaire suivant, à la charge, par la veuve d'Affry, de faire apposer et notifier de nouvelles affiches, dans les formes réglées par la loi.

Le 14 du même mois, de nouvelles affiches sont apposées et notifiées au sieur Gigot Garville, au domicile du commissaire du gouvernement près la cour d'appel de Besançon. Le 16, le sieur Gigot-Garville appelle du

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jugement du 3, qui avait rejeté ses moyens de nullité.

Le 29, la cour d'appel de Besançon confirme ce jugement.

Arrive le troisième jour complémentaire : le sieur Gigot-Garville ne comparaît pas aux nouvelles enchères; mais le tribunal de Gray les reçoit, nonobstant son absence; et sans la constater ni donner defaut, il adjuge les biens saisis à la veuve d'Affry, qui, par acte du même jour, fait, pour la moitié de ces biens, une déclaration de command en faveur de Claude Prinet.

Le 25 frimaire an 9, le sieur Gigot-Garville appelle du jugement d'adjudication. Claude Prinet intervient sur cet appel.

Le 11 messidor suivant, arrêt de la cour d'appel de Besançon, qui déclare l'adjudication irrégulière et nulle, et déboute Claude Prinet des fins de son intervention.

Les motifs de cet arrêt sont que l'adjudication est un véritable jugement; que, dans le jugement du troisième jour complémentaire an 8, on a omis, non seulement d'énoncer les noms et les qualités des parties, mais encore si l'une des parties principales a comparu, ou si elle a fait défaut; que ce manque d'énonciation est une contravention aux lois anciennes et modernes, et notamment à l'ordonnance de 1667, tit. 14, art. 4, et à l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 24 août 1790.

Claude Prinet se pourvoit en cassation, et sa requête est admise.

La cause portée à l'audience de la section civile, le sieur Gigot-Garville soutient que Claude Prinet est non-recevable dans son recours en cassation, attendu que ses moyens ne portent point sur le chef de l'arrêt de la cour d'appel de Besançon qui l'a débouté des fins de son intervention, mais seulement sur le chef qui a déclaré le jugement d'adjudication nul.

A cet égard, dit-il, le demandeur en cassation s'empare de moyens qui ne lui appartiennent pas; ce n'est point à sa requête que les poursuites et les procédures de l'Expropriation ont été faites. Le jugement d'adjudication lui est étranger, il n'y est pas partie. La déclaration de command faite par la veuve d'Affry, n'a eu et n'a pu avoir lieu qu'après le jugement d'adjudication. Claude Prinet n'a pas pu intervenir devant la cour d'appel de Besançon, pour demander la confirmation d'un jugement de première instance qu'il n'avait pas fait rendre, qui ne le regardait pas, dans lequel il n'était point partie; il ne peut donc être recevable à demander la cas

sation de l'arrêt de la cour d'appel qui a déclaré nul ce jugement de première ins

tance.

Par arrêt du 29 fructidor an 10, au rapport de M. Vergės,

« Considérant que Prinet, en vertu de la déclaration de command faite à son profit par la veuve d'Affry, a eu un intérêt sensible à intervenir dans l'instance sur l'appel du ju-· gement d'adjudication; que cet intérêt lui a donné qualité pour former cette intervention; qu'il est par conséquent recevable à proposer de son chef des moyens de cassation contre le jugement attaqué, qui a annulé l'adjudication et l'a débouté de son intervention, quoique la veuve d'Affry ne se soit pas pourvue;

» Le tribunal rejette les fins de non-recevoir;

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Et statuant au fond,

» Vu les art. 1, 2, 4 et 17 de la loi du 11 brumaire an 7, l'art. 4 du tit. 14 de l'ordonnance de 1667, et l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 24 août 179°;

» Considerant que la loi du 11 brumaire a déterminé les formes qui devaient être observées en matière d'Expropriation forcée, telles que la copie du titre, le commandement, les affiches, les enchères et l'adjudication;

» Que c'est uniquement dans cette loi, qui a introduit un droit nouveau, qu'il faut chercher les formes nécessaires pour la régularité de l'Expropriation;

» Qu'on n'y trouve aucune disposition d'où l'on puisse induire la nullité d'une adjudication, à défaut d'énonciation de la comparution ou de l'absence de la partie saisie;

>> Que néanmoins le tribunal dont le jugement est attaqué, a principalement annulé l'adjudication dont s'agit, sur le fondement de ce défaut d'énonciation;

» Qu'il l'a annulée en outre sur le fondement du défaut d'énonciation des noms et des qualités des parties, quoique même ces noms et ces qualités fussent formellement énoncés et répétés dans les actes;

» Que ce tribunal a fait, sous ces rapports, une fausse application de l'art. 4 du tit. 14 de l'ordonnance de 1667, et de l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 25 août 1790, en assujétissant aux formes judiciaires établies par ces lois, une adjudication sur Expropriation forcée dont la forme était réglée par une loi particulière, indépendante des lois relatives aux formes des procès ordinaires;

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Qu'il a violé, par suite, la loi du 11 brumaire an 7, en prononçant une nullité que cette loi ne prononce pas;

» Que la fausse application et l'excès de pouvoir sont d'autant plus évidens, qu'il résulte même de l'adjudication, qu'il n'y fut procédé que parcequ'il n'avait été formé aucune réclamation;

» Qu'en rapprochant cette circonstance de la notification qui avait été faite à la partie saisie, pour qu'elle se représeutât, il est évident à la fois, et que la partie saisie avait été mise légalement à même de connaître les opérations, et qu'on ne procéda à l'adjudication que parcequ'elle ne se présentait pas, malgré la notification qui lui avait été faite;

» Le tribunal casse le jugement rendu par le tribunal d'appel de Besançon, le 11 messidor an 9, et renvoie les parties sur le fond devant le tribunal d'appel de Dijon ».

D'après cet arrêt, le sieur Gigot-Garville reprend, devant la cour d'appel de Dijon, les erremens de son appel de l'adjudication du 3e jour complémentaire an 8; et il soutient que cette adjudication doit être annulée,

1o Parceque la notification des procès-verbaux d'apposition des secondes affiches lui a été faite au domicile du commissaire du gouvernement près la cour d'appel de Besançon, tandis que, suivant lui, elle devait l'être au domicile du commissaire près le tribunal d'arrondissement de Gray;

2o Parcequ'il fallait encore laisser, entre cette notification et la délivrance, un intervalle de vingt jours au moins;

3o Parcequ'en tête du procès-verbal d'apposition des secondes affiches, il ne lui a point été donné copie de ces affiches;

4o Parceque le jugement d'adjudication ne contient pas les noms et les qualités des parties;

5o Parcequ'enfin le même jugement n'a pas fait mention de l'absence de l'appelant, et n'a point donné défaut contre lui, comme le prescrivait l'art. 4 du tit. 14 de l'ordonnance de 1667.

Le 30 pluviose an 11,

« Considérant, sur la première nullité, qu'aucune loi nouvelle n'a fixé de mode pour les notifications à faire aux étrangers; qu'ainsi, c'est l'ordonnance de 1667 qui doit servir de règle sur cette matière;

» Que l'art. 7 du tit. 2 veut que ces sortes de notifications soient faites és hôtels des procureurs généraux près les parlemens où ressortissent les appels des juges devant lesquels les étrangers doivent être cités ;

» Que la nouvelle organisation judiciaire ayant établi des tribunaux de première instance et des tribunaux d'appel, il suit que

ceux-ciremplacent aujourd'hui les parlemens; que, dès-lors, c'était au domicile du commissaire du gouvernement près le tribunal d'appel de Besançon, que la dame d'Affry devait notifier à l'appelant les actes de sa procédure; qu'ainsi, elle a procédé régulièrement en suivant ce mode pour la notification des secondes affiches qui avaient été apposées pour indiquer l'adjudication définitive.

>> Considerant, sur la seconde nullité, que, si l'art. 7 de la loi du 11 brumaire exige qu'il y ait au moins vingt jours d'intervalle entre la notification des premières affiches et l'adjudication, l'art. 14 n'impose pas la même obligation dans le cas où il y a lieu, comme dans l'espèce, à de secondes affiches;

» Que les mots dans les formes ci-dessus, qui terminent cet art. 14, se rapportent, non au délai prescrit par l'art. 7, mais seulement aux formalités qu'il prescrit pour l'apposition et la notification des nouvelles affiches;

» Que, s'il en était autrement, il serait impossible de concilier la faculté accordée aux juges de remettre la délivrance à vingt jours, avec l'obligation de laisser au moins ce même délai entre l'apposition et la notification des nouvelles affiches :

» Considérant, sur la troisième nullité, que la loi du 11 brumaire n'oblige pas de donner copie des affiches en tête des exploits de notification des procès-verbaux d'apposi

tion desdites affiches;

» Qu'il n'est qu'un seul cas où elle a voulu que cette formalité fût remplie, et que c'est

à l'égard du commandement dont chaque

copie, suivant l'art. 2, doit contenir en tête la transcription entière du titre en vertu duquel on entend exproprier;

» Que d'ailleurs l'exploit de notification des secondes affiches faite à l'appelant par la dame d'Affry, constate que copie de ces mêmes affiches lui a été laissée, et que cet exploit doit faire foi jusqu'à inscription de faux; que, d'un autre côté, le même exploit indique le jour et l'heure de l'adjudication; que, dès-lors, il ne tenait qu'à lui de s'y trouver; et qu'ainsi, le but de l'art. 4 de la loi se trouve rempli;

» Considérant, sur les trois nullités dont on vient de parler, que, quand même l'appelant serait fondé à les proposer, il y serait aujourd'hui non-recevable, pour ne l'avoir pas fait à l'audience où l'adjudication a eu Jieu ; et qu'à cet égard, l'art. 23 de la loi est infiniment sage, parcequ'un adjudicataire doit penser que la procédure a été régulièrement instruite, lorsqu'elle n'a point été attaquée avant l'adjudication;

TOME VII

» Considérant, sur la quatrième nullité, que les noms et les qualités des parties se trouvent et dans l'affiche et dans le procèsverbal de dépôt qui en a été fait au greffe du tribunal de Gray; que, lors de l'adjudication, les juges se sont approprié ces deux actes, et les ont placés en tête de la délivrance du 3e jour complémentaire an 8, comme par suite d'opération; que, dès-lors, le tout n'a plus forme qu'un seul et même acte; qu'ainsi, le but de l'art. 15 du tit. 5 de la loi du 24 août 1790 se trouve rempli;

» Considérant, sur la cinquième nullité, que l'art. 4 du tit. 14 de l'ordonnance de 1667 ne s'applique et ne peut raisonnablement s'appliquer qu'aux contestations en cause, aux instances et procès ordinaires;

» Que l'expropriation forcée n'est qu'une du 11 brumaire a établi une procédure parpure saisie - exécution, pour laquelle la loi ticulière;

» Que, si l'ordonnance de 1667 exige qu'il soit donné défaut, c'est parceque l'ajournemais qu'en matière d'Expropriation, où il ne ment oblige la partie citée à comparaître; s'agit que d'une simple notification d'affiches, le débiteur saisi etant libre de ne point paraître, il n'est pas nécessaire de donner défaut contre lui;

» Qu'au surplus, l'article de l'ordonnance nullité des jugemens qui n'auraient point invoqué par l'appelant, ne prononçant pas la donné défaut contre la partie qui ne se serait pas présentée, cette nullité ne pouvait être la loi du 4 germinal an 2; suppléée par le tribunal, sans contrevenir à

» Le tribunal (d'appel de Dijon), prononçant sur l'intervention de la partie du cit. Bouchard (Claude Prinet), sans s'arrêter à l'appellation interjetée par celle de Jacquinot (Gigot-Garville), de l'adjudication faite par le tribunal d'arrondissement de Gray, le 3e jour complémentaire de l'an 8, ordonne que ladite adjudication sortira son plein et entier effet... ».

Recours en cassation de la part du sieur Gigot-Garville.

« A l'appui de ce recours (ai-je dit à l'audience de la section des requêtes, le 11 fructidor an 11), le demandeur vous représente les mêmes moyens qu'il a fait valoir sans succès devant le tribunal d'appel de Dijon ; et vous avez à examiner, sur les trois premiers, une question préliminaire qui leur est commune, celle de savoir si le demandeur a pu proposer en cause d'appel les prétendues nullités qu'il en fait résulter.

12

» Ces nullités portent sur l'époque et sur la forme de la notification des nouvelles affiches qu'avait ordonnées le jugement du tribunal de Gray, du 3 fructidor an 8.

Le tribunal d'appel de Dijon a pensé que Gigot Garville n'ayant relevé avant l'adjudication, ni la prétendue insuffisance de l'intervalle de la notification des nouvelles affiches à l'adjudication même, ni les prétendues irrégularités de cette notification, était, par cela seul, non-recevable à s'en faire des moyens de nullité en cause d'appel; et il lui a appliqué l'art. 23 de la loi du 11 brumaire an 7, aux termes duquel, le saisi ni les créanciers ne pourront exciper contre l'adjudicataire, d'aucun moyen de nullité ou omission de formalités dans les actes de poursuite, qu'autant qu'ils les auraient proposés à l'audience où l'adjudication a eu lieu.

» Mais cet article était-il véritablement applicable à l'espèce?

» C'est un principe universellement reconnu, qu'en fait d'Expropriation forcée, les affiches tiennent lieu d'assignation, et, par suite, que les maximes relatives aux nullités d'assignation, sont communes aux nullités d'affiches et de notification d'affiches.

» Ainsi, de même qu'une partie assignée qui comparaît sur une assignation irrégulière ou donnée à trop bref délai, sans exciper, soit de l'irrégularité de l'exploit, soit de l'insuffisance du délai de l'ajournement, couvre et efface absolument cette irrégularité et cette insuffisance; de même aussi la partie saisie qui se présente aux dernières enchères, en vertu d'affiches nulles ou mal notifiées, sans en relever la nullité ou le défaut de notification légale, ne peut plus le faire après l'adjudication; et c'est ce qu'a voulu l'article cité de la loi du 11 brumaire.

» Mais si la partie saisie ne comparaît pas, et qu'il n'y ait pas eu d'affiches valables, ou que les affiches n'aient pas été notifiées légalement, pourra-t-on lui opposer cet article? C'est demander, en d'autres termes, si l'on peut prendre défaut contre une partie qui n'a pas été assignée ou qui ne l'a pas été valablement. C'est demander si un debiteur peut être exproprié, non seulement sans avoir été entendu, mais sans avoir été mis à portée de se faire entendre.

» La loi du 11 brumaire an 7 prend pour renonciation à toute nullité de forme, le silence que le saisi a gardé avant l'adjudication. Mais elle suppose évidemment, elle suppose nécessairement, que ce silence a été libre de la part du saisi; que le saisi a pu parler, au lieu de se taire; qu'il ne s'est tu,

que parceque, bien informé de tout ce qui s'était passé, il a jugé à propos de n'élever aucune réclamation.

» Si donc le saisi a tout ignoré, ou, ce qui est la même chose, si des defauts de forme dans l'apposition ou dans la notification des affiches, l'autorisent à dire qu'il a tout ignoré, il est imposible de présumer, de sa part, une renonciation au droit de réclamer contre ces defauts de forme.

» En un mot, le silence ne peut passer pour acquiescement que dans le cas où celui qui se tait, a connaissance du véritable etat des choses.

» Il est donc évident que l'on ne peut pas écarter par fin de non recevoir, les nullités que Gigot Garville reproche aux affiches et à la notification des affiches; et que, si ces nullités sont aussi réelles que le prétend Gigot-Garville, le tribunal d'appel de Dijon a dû les accueillir.

» Aussi le tribunal d'appel de Dijon les at-il discutées et jugées, et quoiqu'il ait cru devoir ne le faire que surabondamment, nous n'en devons pas moins applaudir à la détermination qu'il a prise à cet égard.

» Mais en les discutant et en les jugeant, at-il, comme on le soutient, violé la loi? C'est ce qu'il s'agit d'examiner.

» La première de ces nullités résulte, suivant Gigot Garville, de ce que la notification des nouvelles affiches ne lui a été faite, ni au domicile qu'il avait, dit-il, elu en France chez le cit. Guerin, ni au domicile du commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Gray, devant lequel se poursuivait l'Expropriation, mais bien au domicile du commissaire du gouvernement près le tribunal d'appel auquel ressortit l'arrondissement de Gray.

» A cet égard, nous commencerons par observer que, devant le tribunal d'appel de Dijon, Gigot-Garville n'a pas dit un mot du défaut de notification des nouvelles affiches au domicile qu'il avait précédemment élu chez le cit. Guérin; et c'est pour nous, d'après l'art. 4 de la loi du 4 germinal an 2 une raison suffisante de ne pas nous arrêter à ce prétendu défaut de notification.

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» Nous devons donc faire abstraction du domicile elu par Gigot Garville chez le cit. Guérin, et nous renfermer dans la seule question de savoir si c'est véritablement au domicile du commissaire du gouvernement près le tribunal d'appel de Besançon, que la veuve d'Affry a dû faire notifier ces nouvelles affiches.

» Gigot-Garville est force de convenir qu'en les faisant ainsi notifier, la veuve d'Affry a pris pour boussole l'art. 7 du tit. 2 de l'ordonnance de 1667, suivant lequel les. étrangers qui sont hors de France, doivent être ajournés ès hôtels des procureurs généraux des parlemens où ressortissent les appellations des juges devant lesquels ils sont ajournés.

» Et en effet, les commissaires du gouvernement près les tribunaux d'appel exercent dans ces tribunaux les mêmes fonctions

qu'exerçaient ci-devant les procureurs généraux dans les parlemens.

» Il ne faut pas croire d'ailleurs que ce mot parlemens fût, dans l'ordonnance, tellement limitatif, qu'on ne pût pas l'appliquer aux autres tribunaux qui avaient, dans leurs ressorts, une autorité égale à celle des parlemens eux-mêmes. Les procureurs généraux des conseils supérieurs étaient, à cet égard, assimilés aux procureurs généraux des parlemens, et c'est ce que prouve notamment un arrêt de réglement du conseil supérieur de Colmar, du 16 janvier 1745, qui fait défenses au bailli de Delle et à tous autres du ressort, d'ordonner que les assignations seront données aux étrangers aux domiciles des procureurs fiscaux de leurs juridictions.

» Et pourquoi n'appliquerions-nous pas aujourd'hui aux commissaires du gouvernement près les tribunaux d'appel, ce qui, dans l'esprit de l'ordonnance de 1667, était applicable aux procureurs généraux des conseils supérieurs? Pourquoi le même principe, d'après lequel on se croyait obligé d'étendre aux conseils supérieurs la dénomination de parlemens employée dans cette loi, ne nécessiterait-il pas aujourd'hui l'application de cette même dénomination aux tribunaux d'appel?

» C'est, dit Gigot-Garville, parceque l'état des choses n'est plus le même qu'en 1667; c'est parcequ'en 1667, le ministère public était concentré dans la personne du procureur général, dont les procureurs du roi ou fiscaux n'étaient que les substituts; c'est parceque le procureur général seul avait le droit de correspondre avec les ministres pour toutes les causes pendantes dans les juridictions inférieures de son ressort;

» Au lieu qu'aujourd'hui les commissaires du gouvernement près les tribunaux de première instance, sont investis de la plénitude du ministère public pour toutes les affaires dont la connaissance appartient à ces tribunaux; et que, sur tout ce qui concerne ces mêmes affaires, les ministres correspondent directement avec eux.

» Ainsi, continue Gigot-Garville, le motif qui, dans l'ordonnance de 1667, avait fait attribuer au procureur général le droit exclusif de recevoir les assignations données aux étrangers, n'existe plus; et il est de maxime que, ratione legis cessante, cessat lex.

» Mais est-il bien vrai que la disposition de l'art. 7 du tit 2 de l'ordonnance de 1667 ait été motivée par les considérations que vous présente Gigot-Garville? Ouvrons le procèsverbal de l'ordonnance elle-même, voici ce que nous y lisons, page 15:

» Lecture faite de cet article (de l'art. 7 du tit. 2), M. le premier président a dit qu'au lieu de donner l'assignation aux domiciles des procureurs généraux des parlemens, il semblerait plus à propos de s'adresser à leurs substituts les plus proches de la frontière du pays où l'on saurait que la partie se serait retirée.

» M. Pussort a dit que l'on avait estimé ploit à la personne du procureur général qu'il y aurait plus de certitude à faire l'exqu'à celle de ses substituts; QUE SON DOMICILE

SERAIT PLUS UNIVERSELLEMENT CONNU; et l'ordonnance étant publiée, LES ABSENS SAURAIENT A QUI S'ADRESSER.

» Ce n'est donc point à raison de la correspondance directe des procureurs généraux avec les ministres; ce n'est donc point à raison de la subordination dans laquelle étaient à leur égard les procureurs du roi et des seigneurs, que l'ordonnance leur a conféré, exclusivement à ceux-ci, la réception des exploits d'ajournement donnés aux étrangers: c'est uniquement parceque leur domicile est plus universellement connu, parceque les absens sauront plus sûrement à qui s'adresser.

» Or, ces motifs ne subsistent-ils pas encore dans toute leur force? Les commissaires

du gouvernement près les tribunaux d'appel, sont certainement plus connus que les commissaires du gouvernement près les tribunaux de première instance. La raison de la loi n'a donc pas cessé; la loi est donc encore obligatoire; et l'on a d'autant plus mauvaise grâce de venir accuser devant vous le tribunal d'appel de Dijon d'avoir jugé conformément à la loi, qu'il n'a fait, à cet égard, pour la notification des secondes affiches, que ce que le tribunal d'appel de Besançon avait fait, relativement à la notification des premières, par un jugement du 29 fructidor an 8, que l'on n'a jamais osé attaquer.

» Le second moyen de nullité du demandeur est-il mieux fondé? Il consiste à dire,

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