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» truit que je travaillais à un commentaire sur notre » Ordonnance, qu'il m'offrit, avec une cordialité >> 'rare et un désintéressement peut être sans exem»ple, tout ce que, par une étude assidue et ré» fléchie, il avait recueilli de décisions et d'autorités » convenables à cet objet.

» On conçoit que j'ai dû balancer long-tems à >> accepter des offres de cette nature; je ne m'y suis » enfin déterminé, que parce qu'il a eu le secret de » me persuader que ce n'était que pour son usage >> particulier, qu'il avait fait cette riche collection. Il >> m'en a donc fait passer une copie dont j'ai fait » un tel usage, que presque tout ce que l'on trou>> vera de bon dans ce commentaire, quant à la » partie de la jurisprudence, est en quelque sorte » son ouvrage autant que le mien.

» Je lui devais ce témoignage public de ma > reconnaissance pour un bienfait aussi noble et » aussi gratuit. »

Vingt-trois ans s'écoulèrent depuis le moment où Valin écrivait de la sorte, jusqu'à celui où Emerigon publia son ouvrage. On sent combien, dans cet intervalle, une étude toujours suivie, une expérience constamment exercée, ont dû ajouter aux richesses dont il avait fait part à Valin, avec cette libéralité qui lui a valu de si justes éloges de celui-ci.

Son ouvrage qui fut publié en 1783, est divisé en deux traités, l'un du contrat d'assurance, l'autre

du contrat de prêt à la grosse. Quoique, d'après le titre, il paraisse n'avoir pour objet que ces deux espèces de contrat, néanmoins il donne accessoirement des notions étendues et précieuses sur toutes les parties du droit maritime privé.

Mais le contrat d'assurance a principalement fixé son attention. On est en quelques sorte étonné de l'étendue des connaissances théoriques et pratiques qu'il montre sur cette matière. Il n'est aucun auteur français ou étranger, qu'il n'ait soigneusement étudié, analysé etmis à contribution; il y a joint l'extrait d'une foule d'arrêts, de jugemens, de décisions arbitrales, de consultations, à la plupart desquelles il avait concouru comme défenseur, comme conseil ou comme arbitre. Enfin, appuyé de sa grande expérience, il a recueilli et attesté les règles consacrées par l'usage, qui, comme nous l'avons dit, sont un supplément nécessaire à la loi, dans ce qu'elle n'a pas prévu directement ou indirectement.

Cet auteur qui, quoique répandu en France et dans les pays étrangers, n'a peut-être pas encore, hors de sa patrie, toute la réputation qu'il mérite, est justement regardé par ses concitoyens, comme un oracle presque toujours sûr en matière d'assurance, et est cité devant les Tribunaux, comme une autorité qui fait, pour ainsi dire, loi.

Ce n'est pas qu'il soit exempt de toutes erreurs, ni qu'on ne puisse rien ajouter à ce qu'il a dit. Il

termine lui-même son traité du contrat d'assurance,

dé la sorte:

» M. Valin a ouvert la carrière; ses lumières » ont éclairé M. Pothier; elles m'ont dirigé dans » tout le cours de mon ouvrage, même dans les >> points où j'ai cru devoir m'écarter de l'opinion » de ces deux grands écrivains; ceux qui traite>>ront après moi, la matière des contrats nautiques, >> corrigeront les erreurs dans lesquelles je puis être » tombé. >>

Il ajoute » De nouvelles questions s'élèveront » et s'élèvent déjà de toutes parts; depuis la pu» blication de mon premier volume dont l'im» pression a été finie en janvier 1783, on m'a » proposé plusieurs cas et difficultés qui exigeraient » un long supplément. >>

On trouvera dans des écrits ou jugemens postérieurs à Emerigon, la rectification de quelques une's des erreurs qui peuvent lui être échappées, la solution de quelques unes des difficultés qu'il voyait encore à résoudre. Mais il est toujours, parmi les auteurs qui l'ont précédé ou suivi, Français ou étrangers, le guide le plus sûr et le plus instruit que puisse prendre quiconque voudra acquérir la science du droit en matière d'assurance, et même de tous les autres contrats maritimes.

La publication d'un nouveau Code ne peut diminuer de beaucoup l'utilité de son ouvrage, puis

que, comme nous l'avons déjà observé, comme l'ont dit les rédacteurs de ce Code, il n'a presque fait aucun changement à la législation établie par l'Ordonnance de 1681.

III. Dessein et distribution de cet ouvrage.

J'ai rendu un juste hommage au mérite d'Emerigon; néanmoins, outre les erreurs qui peuvent lui être chappées, on lui a reproché des longueurs et de la confusion; ce reproche fut-il hasardé, son ouvrage peut, même par son étendue et son abondance, n'être pas convenable à tous; il peut surtout ne pas convenir à celui qui commence à s'instruire, et à qui il importe de voir la suite élémentaire des principes et des premières règles, avant de s'appesantir sur les détails. D'après ces réflexions, je m'étais proposé de faire un court traité du contrat d'assurance, dans lequel, supprimant les objets de trop grande discussion et les explications trop étendues ou trop hypothétiques, je me serais attaché aux principes élémentaires, aux règles authentiques et aux conséquences premières et non contestées qui en dérivent. J'aurais voulu néanmoins y faire observer brièvement les erreurs ou les omissions que j'aurais cru appercevoir dans Valin, Pothier, Emerigon, les changemens que la jurisprudence a éprouvés après eux, les solutions qu'elle a données à des questions qu'ils ont laissées indécises; Mais, à la crainte de

ne pas remplir dignement cette tâche, s'est jointe la considération qu'elle l'est déjà, en majeure partie, par Pothier; son traité du contrat d'assurance est, comme celui que je me proposais, un ouvrage élémentaire, un choix de principes et de règles relatives à ce contrat; pouvais-je me flatter d'égaler le discernement, l'ordre, la clarté de cet auteur? A la vérité, quelques erreurs palpables lui sont échapées; il a omis des objets qui devaient trouver place même dans un ouvrage élémentaire; mais on pouvait, par quelques notes et additions, rectifier ces erreurs, suppléer à ces omissions; en m'occupant de ce travail, je rentrais dans mon plan, et je liais à son exécution un auteur d'un mérite universellement reconnu. Je m'arrêtai à cette idée; la circonstance de l'émission d'un nouveau Code me parut y donner un intérêt de plus. En conséquence je l'ai mise à exécution, et voici de quelle manière :

J'ai cru devoir d'abord faire précéder le traité de Pothier, de ce discours préliminaire dans lequel,

comme on a vu,

1.o J'ai donné une idée de l'origine et de l'importance du contrat d'assurance, des chances et des combinaissons qui en sont pour ainsi dire l'élément, des qualités qu'il exige dans l'assureur qui veut le pratiquer avec honneur et succès.

2. J'ai indiqué et apprécié brièvement, autant

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