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il fallait qu'elle dit en quoi elle était illicite. Autrement il est impossible de vérifier si la cour n'a pas commis un excès de pouvoir en annulant une obligation fondée sur une cause non prohibée par la loi. Il y a là évidemment absence ou défaut de motifs, et, par suite, violation de l'art. 7 de la loi du 20 av. 1810, et fausse application de l'art. 1131 du C. civ.

Le 25 mars 1828, ARRÊT de la section des requêtes, M. Borel de Brétizel, conseiller, président, M. Demenerville rapporteur, M. Mandaroux-Vertamy avocat, par lequel:

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« LA COUR, Sur les conclusions de M. Lebeau, avocat-général; -Attendu que Couture, demandeur en cassation, qui invoque les droits du tiers porteur, a été déclaré par l'arrêt avoir connaissance de l'illégitimitéde la cause du billet litigieux; qu'ainsi l'exception de nullité lui devient personnelle,

» Attendu qu'il résulte de l'arrêt dénoncé que l'exception de cause illicite, présentée par le tireur, était fondée sur ce que le billet avait eu pour objet la garantie d'un transport de marchandises prohibées, saisies avant l'arrivée à leur destination; que dans cet état la cause étant bien déterminée par les conclusions des parties, la cour d'Amiens a suffisamment motivé sa décision, lorsqu'elle a dit qu'il résultait, à suffire des documents et circonstances de l'affaire, que le billet de 5,000 f., souscrit par Jacquet le 25 fév. 1825, à l'ordre de Couvreur, et passé à Couture, avait été fait pour une cause illicite: et qu'ainsi il n'y avait pas lieu de condamner le souscripteur de ce billet à en payer le montant; qu'il résulte de tout ceci que l'arrêt dénoncé n'a point faussement appliqué l'art. 1131 du C. civ., ni violé l'art. 7 de la loi du 20 av. 1810; REJETTE, etc. » S

COUR DE CASSATION.

Lorsque, après la cassation d'un jugement rendu en dernier ressort sous l'empire de la loi du 24 août 1790, les parties ont négligé d'user de la faculté que leur accordait cette loi de convenir d'un tribunal d'appel ou de procéder par voie d'exclusion entre les sept tribunaux les plus proches, la loi du 27 vent. an 8, intervenue depuis, a-t-elle saisi de plein droit la cour royale dans le ressort de laquelle siégeait le tribunal qui avait rendu le jugement attaqué? (Rés. aff.)

Peut-on dire que cette cour est incompétente comme rem

plaçant le tribunal d'appel dont le jugement a été cassé? (Rés. nég.)

La partie qui a obtenu l'arrêt de cassation, et qui a négligé de le faire signifier, peut-elle se prévaloir de ce défaut de signification pour soutenir que la nouvelle instance d'appel n'a pas été reprise, et que, par conséquent, la péremption n'a pu courir? (Rés. nég.)

Est-elle fondée à prétendre qu'il s'agit d'une prescription ordinaire et non d'une péremption d'instance? (Rés. nég.) C. civ., art. 2281.

En principe, la péremption d'instance est-elle acquise après un arrêt de cassation qui ne désigne pas la cour qui doit en connaître, alors que l'instance n'a jamais été reprise, et que les trois années de cessation de poursuites se sont écoulées sous le code de procédure civile? (Rés. aff.) C. proc., art. 397

DELANNOY, C. MARIE QUESNEL.

Sur la demande de Marie Quesnel contre Delannoy, en déclaration de paternité d'un enfant dont elle était accouchée, jugement du tribunal du district d'Amiens, du 20 déc. 1791, qui reconnaît Delannoy père de l'enfant, le condamne à le faire nourrir et élever, et, en outre, à payer 1,000 fr. de dommages et intérêts à la mère. - Delannoy appelle de ce jugement. Après les exclusions de tribunaux déterminées par la loi des 16-24 août 1790, le tribunal de district d'Abbeville se trouve saisi de l'appel qui avait été anticipé par la demoiselle Quesnel. Diverses significations et actes de procédure ayant eu lieu entre les parties devant ce tribunal, jugement par défaut, en date du 17 fév. 1794, qui confirme celui d'Amiens.- Opposition de Delannoy; et, le 6 mai 1794, nouveau jugement du tribunal d'Abbeville qui déclare Delannoy non recevable dans son appel.

Delannoy se pourvoit en cassation. Le 10 mai 1795, arrêt qui casse ce dernier jugement. L'arrêt de cassation ne fut pas signifié, et les poursuites restèrent suspendues de part et d'autre jusqu'en 1818.

Le 8 av. de cette année, le fils de Marie Quesnel (sa mère était décédée) assigne Delannoy devant la cour royale d'Amiens pour voir déclarer l'instance périmée. Le 5 av. 1824,

arrêt de cette cour qui déclare en effet la péremption acquise. Il est ainsi conçu :

« Considérant que l'arrêt de cassation dont il s'agit a été rendu contradictoirement et sur le pourvoi du sieur Delannoy lui-même; que, par conséquent, celui-ci n'a pu en ignorer les dispositions, ni empêcher (en même temps qu'il en éprouvait le bénéfice) que cet arrêt ne produisit son effet immédiat qui était de renouveler l'instance sur l'appel; - Considérant, en droit, qu'aux termes de l'art. 15 de l'ordonnance de 1563, comme d'après les dispositions de l'art. 397 du C. de proc., toute instance est éteinte et périmée par la discontinuation des poursuites pendant trois ans; qu'en appel cette péremption a toujours frappé sur tous les actes de l'instance, y compris celui d'appel, lorsqu'il a été suiví d'assignation et procédure; Considérant, en fait, que, sur l'appel de Delannoy, un jugement par défaut du tribunal d'Abbeville confirma ce dont est appel; que, sur l'opposition à ce jugement, le tribunal d'Abbeville rendit un nouveau jugement, le 6 mai 1794, par lequel il déclara Delannoy non recevable dans son appel;-Que Delannoy, s'étant pourvu en cassation contre ce dernier jugement, en obtint l'annulation le 21 flor. an 3, ou 10 mai 1795; — Que le tribunal de cassation n'ayant annulé que le jugement du 6 mai 1794. Jaissa évidemment subsister tous les actes de procédure antérieurs, et renvoya les parties devant ies juges qui devaient en connaître; que néanmoins Delannoy, depuis cette époque, a complétement abandonné la poursuite de son appel;-Considérant que Delannoy objecte vainement qu'il n'a point été tenu de suivre cet appel pour éviter la péremption, parce que l'arrêt de cassation, du 21 flor. au 5, ne désignait pas le tribunal qui devait en connaître; que ce tribunal n'avait point non plus été désigné par les parties, en sorte qu'il n'y avait pas selon lui d'instance liée sur l'appel; Considérant que, d'après l'organisation judiciaire de cette époque, et notamment d'après la loi du 17 nov. 1790, sept tribunaux de district étaient compétents pour connaître de l'instance sur appel qui avait d'abord été liée devant celui d'Abbeville; qu'il dépendait de Delannoy de procéder de suite à la désignation de celui des sept tribunaux de district où l'instance serait reprise par l'exclusion des six autres: que c'est ce qu'il aurait dû faire pour empêcher la péremption de courir; — Que les changements opérés dans l'organisation judiciaire, et par la constitution de fruct, an 5 et par la loi du 27 vent. an 8, ne l'ont point dispensé de suivre son appel; Que la dernière de ces lois ordonne, par l'art. 31, que les causes pendantes devant les tribunaux supprimés seront por tées dans l'état où elles se trouveront, et par une simple citation, au tribunal d'appel dans le ressort duquel siégeait le tribunal qui à rendu le jugement dont est appel; Que, par l'effet de cette disposition, la connaissance de l'appel du jugement rendu au tribunal d'Amiens a évi

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demment et de plein droit appartenu à la cour;

Que cependant De

Jannoy n'y a fait faire aucune citation ni acte de procédure quelconque pour obtenir décision, et a laissé écouler un temps beaucoup plus long que celui qui est exigé pour opérer la péremption de son instance et la et déchéance de son appel. »

Pourvoi en cassation de Delannoy. Il présente trois moyens. 1o La cour royale d'Amiens était incompétente pour deux raisons. La première, parce qu'elle n'avait pas été désignée. La seconde, parce que, comme cour d'appel, elle remplaçait le tribunal d'appel d'Abbeville, dont le jugement avait été cassé. Or l'art. 87 de la loi du 27 vent. an 8 prescrivait qu'en pareil cas le jugement cassé fut renvoyé devant une cour aucelle qui avait rendu ou qui était censée avoir rendu le jugement cassé.

tre

que

2o Fausse application de l'art. 597 du C. de proc. civ.; violation de l'art. 147 du même code. L'arrêt de cassation du 10 mai 1795 n'avait pas été signifié. Dès lors, aucune instance n'avait été reprise, car cette reprise ne pouvait être que l'effet de l'exécution même de l'arrêt de cassation, et par conséquent de sa signification. Dans cet état, le jugement du tribunal d'Abbeville se trouvant anéanti d'une part, de l'autre aucune instance n'ayant été reprise, faute par aucune des deux parties d'avoir signifié l'arrêt de cassation, la péremption d'instance ne pouvait avoir lieu; chacune d'elles rentrait dès lors dans les limites du droit commun, aux termes duquel elles avaient trente ans pour signifier l'arrêt de cassation et pour introduire une action nouvelle.

3o Fausse application, sous un autre rapport, du même art. 397. La cour d'Amiens avait statué comme s'il y avait eu réellement une reprise d'instance; mais il ne fallait pas voir une instance là où elle n'existait pas. Il répugnait en effet à tous les principes que l'art. 597 pût s'appliquer, non pas simplement au cas où il n'y avait pas en constitution d'avoué, mais encore à celui où la juridiction qui devait être saisie n'était ni connue ni désignée. Jusque là cependant il' n'y avait ni procès ni instance; les parties pouvaient se tenir pour satisfaites de l'arrêt de cassation; et leur intention à cet égard ressortait d'une manière évidente du défaut de signification de cet arrêt. Enfin, dans tous les cas, la cour d'A-. miens aurait violé l'ordonnance de 1563, d'après laquelle le

décès d'une partie interrompt la péremption pendant trente ans, et l'art. 2281 du C. civ., qui détermine qne les prescriptions commencées avant sa promulgation seront réglées conformément aux lois anciennes.

La réponse à ces moyens se trouve analysée dans l'arrêt suivant.

Du 18 février 1828, ARRÊT de la chambre civile, M. Brisson président, M. Delpit rapporteur, MM. Valton et Nicod avocats, par lequel :

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par

LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Joubert, premier avocat général; Attendu, sur le premier moyen, que l'appel du jugement rendu par le tribunal du district d'Amiens, le 20 déc. 1791, fut porté par la voie des exclusions (conformément à la loi du 24 août 1790, tit. 5) devant le tribunal du district d'Abbeville, qui, par jugement en dernier ressort, du 17 flor. an 2, déclara cet appel non recevable; que ce jugement ayant été cassé, le 21 flor. an 3, les parties furent remises dans l'état où elles étaient avant que l'appel eut été déclaré non recevable, c'est-à-dire en état d'înstance sur ledit appel; que la loi du 1 déc. 1790 leur donnait la faculté de convenir d'un tribunal d'appel, ou do procéder de nouveau, par voie d'exclusion, entre les sept tribunaux désignés pour les appels des jugements rendus le tribunal d'Abbeville mais que, n'ayant pas usé de cette faculté, et les choses se trouvant en cet état lorsque l'art. 31 de la loi du 27 vent. an 8 attribua toutes les causes d'appel, pendantes devant les tribunaux supprimés, au tribunal d'appel dans le ressort duquel siégeait le tribunal qui avait rendu le jugement attaqué, l'appel dont il s'agit se trouva dévolu de plein droit au tribunal d'appel d'Amiens, parce que les sept tribunaux, quf auraient pu être appelés à statuer sur cet appel, et entre lesquels le choix volontaire ou par voie d'exclusion n'était plus praticable, avaient siégé dans son ressort, de même que celui qui avait jugé en première instance-Attendu que le moyen pris de ce que la cour royale d'Amiens remplace le tribunal d'Abbeville, dont le jugement fut cassé, ne paraît pas avoir été proposé devant cette cour, et qu'il est d'ailleurs mak fondé, puisque le tribunal d'appel d'Amiens, qui (dans le système da demandeur) aurait aussi représenté les sept tribunaux d'appel désignés pour le district d'Abbeville, avait reçu une organisation entièrement nouvelle, et que, loin de lui interdire la connaissance des affaires jugées en dernier ressort par les tribunaux supprimés, lorsque leurs jugements avaient été cassés, la loi du 27 vent. an 8 lui attribuait indéfiniment toutes les causes d'appel des jugements rendus dans son ressort;

Attendu, sur le deuxième moyen, que le demandeur ayant poursuivi et obtenu l'arrêt de cassation qui faisait revivre l'instance sur son appel, c'était à lui a faire les diligences nécessaires pour en recueillir le

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