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» Attendu que ces motifs suffisent pour écarter les moyens de cassation proposés par Lefebvre, Martineau et consorts; — REJETTE. »

COUR DE CASSATION.

S.

La novation a-t-elle lieu sans que les parties expriment textuellement qu'elles font novation, et suffit-il que l'intention de l'opérer résulte de l'acte? (Rés. aff.)

Dès lors, les cours royales à qui appartient exclusivement le droit d'interpréter les clauses des contrats sont-elles seules juges de la question de savoir si les parties ont voulu faire novation? (Rés. aff.) C. civ., art. 1273. Celui qui, poursuivi en paiement d'une obligation, prouve que des billets à ordre par lui souscrits ont été substitués à cette obligation, du consentement du créancier, peut-il être déclaré libéré, bien qu'il ne représente aucuns des billets acquittés? (Rés. aff.) C. civ., art. 1271 et 1315. Lorsqu'un créancier déclare dans un acte accepter en paiement de sa créance des billets à ordre souscrits par son débiteur, y a-t-il novation, encore que le créancier ait ajouté qu'il donnait quittance et décharge EN TANT QUE LES BILLETS SERAIENT PAYÉS? (Rés. aff.) C. civ., art. 1271.

MATHELIN, C. ROUSSEAU-SAINT-PHILIPPE.

-

En 1807, l'administration portugaise de l'Ile de Cayenne avait affermé au sieur Rousseau-Saint-Philippe, en l'absence des héritiers du sieur Mathelin, une habitation dépendant de la succession de ce dernier. - En 1812, le bail étant expiré, le sieur Saint-Philippe remit l'habitation à l'administration de la colonie. Le 4 fév. 1817, un jugement de la commission portugaise déclara le sieur Saint-Philippe débiteur, par suite du bail à ferme, d'une somme de 15,455; et, le 31 mars suivant, l'ex-fermier et l'administration passèrent un arrêté de compte qui porte que, a ledit jour, le sieur Rousseau-Saint-Philippe paie la somme de 15,453 fr. en ses 15 obligations à l'ordre de la colonie....., moyennant quoi ledit sieur Saint-Philippe est entièrement quitte et libéré envers l'administration pour le fait de ladite ferme. Pourquoi toute quittance et décharge à ce relative lui est donnée par le présent, en tant que payées soient lesdites obligations. »

Bientôt après, la colonie étant rentrée sous la dominatio française, des poursuites furent dirigées contre le sieur Sain Philippe, en vertu du jugement du 4 fév. 1817, par le sieu Roger, curateur aux biens des absents. Le défendeur a re pondu qu'il avait payé la somme portée au jugement, en ob ligations à l'ordre de l'administration, obligations qu'il ava acquittées; que le jugement se trouvait éteint par la nova tion expresse stipulée dans l'arrêté de compte du 31 mai 1817.

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Jugement du tribunal civil de Cayenne qui accueille cet défense, Attendu que la novation s'opère par la substitu tion d'une nouvelle obligation à une ancienne qui est étein te; - Que, dans l'espèce, il y a eu novation, puisque Sain Philippe à substitué les 15 obligations montant ensemble 15,453 fr., à son ancienne, obligation de pareille somme; Que, dans le règlement du 31 mars 1817 entre l'intenda portugais et Saint-Philippe, il est dit que, les 15 obligatio: une fois payées, ledit Saint-Philippe est entièrement quite et libéré envers l'administration.....;-Que le titre constitu tif de la créance se trouve détruit par le fait de la novatio dont il s'agit; que le titre nouvel, c'est-à-dire les bille souscrits par Saint-Philippe, n'est pas produit, et que led Saint-Philippe déclarant avoir payé lesdits billets, l'on 1 peut le forcer à les payer aujourd'hui, jusqu'à la preuve d

contraire. »

Appel. Mais, le 4 oct. 1825, arrêt de la cour royale la Guyanne française qui confirme le jugement de premiè instance en adoptant ses motifs, et, en outre, « attendu qu le titre 'original n'est pas représenté; qu'on ne produit a cune grosse ou expédition, ni copie en bonne forme de ce titr mais seulement des pièces dont aucune n'a le caractère déte miné par le § 2, art. 1325 du C. civ. ; Attendu que, si gouvernement n'avait pas entendu libérer Saint-Philippe la première dette, il eût conservé par devers lui, indépe damment de la réserve insignifiante qui se trouve au bas l'une des pièces informes représentées, le titre qui seul po vait fonder une action en justice.....;-Attendu que, d'apr l'art. 1271 du C. civ., les obligations s'éteignent par la no vation; qu'il est de principe que la novation s'opère lorsqu le débiteur contracte envers son créancier une nouvel

dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte. » Les héritiers Mathelin se sont pourvus en cassation contre cet arrêt pour violation de l'art. 1522 du C. civ., en ce que l'arrêt attaqué avait refusé effet à un acte non contesté par le défendeur, sous prétexte d'une novation qui n'avait point eu lieu. L'arrêt attaqué, ajoutaient les demandeurs, a en outre violé ou faussement appliqué l'art. 1556 du C. civ., sur l'indivisibilité de l'aveu judiciaire. Le sieur Saint-Philippe reconnaissait qu'il avait été constitué débiteur par le règlement de compte du 31 mars 1817, et il ajoutait qu'il était libéré, parce que les billets à ordre qu'il avait souscrits avaient opéré novation. La cour royale pouvait, sans diviser cet aveu, examiner si, en droit, la souscription des billets à ordre avait éteint la première dette.

Les demandeurs soutenaient en outre que la cour royale avait violé l'art. 1315 du C. civ., d'après lequel celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation, en ce que la cour avait déclaré le sieur Saint-Philippe libéré, bien qu'il ne produisît aucun des quinze billets qu'il prétendait avoir souscrits et acquittés. —Enfin les demandeurs alléguaient une prétendue violation de l'art. 1291 du C. civ., résultant de ce que la cour royale avait décidé qu'il y avait eu novation, quoique la dette ne fût pas éteinte purement et simplement, puisque l'arrêté de compte du 31 mars 1817 portait que quittance était donnée au sieur Saint-Philippe en tant que payées soient les obligations. Cette dernière clause, disaient les demandeurs, indique clairement que les billets à ordre n'avaient été souscrits qu'afin d'accorder un délai au débiteur, et nullement dans l'intention d'opérer novation. Sur ce point on citait deux arrêts de la cour de cassation, des 16 août 1820 et 28 juil. 1825 (1), et M. Toullier, t. 7, no 315 et suiv.

Le 16 janvier 1828, ARRÊT de la section des requêtes, M. Borel de Brétisel, conseiller, président, M. Pardessus rapporteur, M. Guichard père avocat, par lequel:

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LA COUR, Sur les conclusions de M. de Vatimesnil, avocat-général; — Attendu qu'aux termes de l'art. 1273 du C. civ., il n'est nécessaire que les parties expriment textuellement qu'elles font nova

(1) Voy. t. 1o 1824, p. 545; nouv, éd., t. 22, p. 743, Tome 111e de 1828:

Feuille 5o.

pas

tion; qu'il suffit que l'intention de l'opérer résulte de l'acte; que, dès lors, les cours royales, à qui appartient exclusivement le droit d'interpréter les clauses des contrats, sont seules juges de la question de sa. voir si ou non les parties ont voulu faire novation; - Attendu que, dans l'espèce, la cour de la Guyanne, en constatant que le gouvernement portugais fit, lors de la signature de l'acte du 31 mars 1817, remise des titres anciens qui étaient des grosses et autres actes exécutoires; qu'à la créance résultant des fermages, il substitua une créance en billets à ordre souscrits par le débiteur, et quittança en conséquence le titre primitif, a eu juste sujet de voir dans ces circonstances la volonté de faire novation; Attendu que l'art. 1356 du C. civ., sur les effets de l'aveu, n'a pas été violé, puisque le sieur Saint-Philippe a reconnu que, s'il avait été constitué débiteur par le règlement de compte du 31 mars 1817, il ajoutait que, pour s'acquitter, il avait souscrit des billets à ordre, ainsi que le constate cet acte, lesquels billets ne lui étaient pas représentés;

» 2o Attendu que l'art. 1315 n'a pas davantage éte violé, puisque le sieur Saint-Philippe, poursuivi en paiement et opposant la novation qui avait éteint sa dette en y substituant des billets à ordre, n'avait rien de plus à prouver;

» 3o Attendu que, si la cour royale de la Guyanne, jugeant autrement qu'elle n'a fait, eût condamné Saint-Philippe, elle aurait, au contraire, méconnu le véritable esprit des lois indiquées et commis une injustice, puisque ce dernier, débiteur du montant de ses billets à ordre envers les tiers porteurs, n'aurait pu leur opposer pour sa libération le paiement qu'il aurait fait en vertu du titre primitif remplacé par les billets; - REJETTE. D

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COUR DE CASSATION.

S.

La donation faite par une mère à l'un de ses six enfants, du sixième d'un domaine, en l'absence de ses autres enfants, et aux conditions suivantes : QU'IL NE Pourra rien PRÉTENDRE SUR LES CINQ AUTRES SIXIÈMES DUDIT DOMAINE ́et qu'il aura LA FACULTÉ D'EN PROVOQUER LE PARTAGE QUAND IL LUI PLAIRA, est-elle une donation pure et simple passible du droit de 2 fr. 50 c. par 100 fr., et non un partage anticipé, tel qu'il est autorisé par les art. 1075-1076 et 1078 du C. civ:? (Rés. aff.)

RÉGIE DE L'ENREGISTREMENT, C. JACQUIN.

La veuve Jacquin avait fait donation par acte entrevifs, et à titre de partage anticipé, à Alexis Jacquín, l'un de ses six enfants, du sixième d'un domaine à elle appartenant, porte l'acte, sur le territoire du Salbert, pour en user

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et disposer par le donataire, en pleine propriété, à partir de ce jour, et en provoquer le partage, quand il lui plaira; auquel effet la donatrice s'en dessaisit dès à présent quant à la propriété; mais Alexis Jacquin n'en commencera la jouissance qu'au décès de la donatrice, qui en réserve expressément l'usufruit pendant sa vie, à titre de constitut et précaire, et à la charge par le donataire de laisser ensuivre, au profit des cinq autres enfants de la donatrice ou de leurs représentants, les cinq autres sixièmes dudit domaine à son exclusion, et de n'y rien prétendre. »

Cependant

Le receveur de Belfort (Haut-Rhin), auquel l'acte fut présenté pour le faire enregistrer, n'y vit qu'un partage anticipé fait par une mère à ses enfants, et perçut, à ce titre, un simple droit de un pour cent, aux termes de l'art. 3 de la loi de finances du 16 juin 1824, ce qui, forma, à raison d'un capital de 600 fr., la somme de 6 fr. 60 c. la régie, voyant dans l'acte dont il s'agit une donation pure et simple soumise au droit proportionnel de 2 fr. 50 pour cent, par l'art. 69, § 6, no 2, de la loi du 22 frim. an 7, décerna une contrainte en supplément de droits, de la somme de 19 f. 80 c. Opposition de la part de Jacquin, et, le 24 août 125, jugement du tribunal de Belfort qui annule la contrainte, sur le fondement que l'acte du 18 juil. 1824 est un partage anticipé fait sous la forme d'une donation entre vifs. Pourvoi de la régie pour fausse application de l'art. 3 de la loi du 16 juin 1824, et violation de l'art. 69, § 6, 11o 2, de la loi du 22 frim. an 7. Elle tirait son principal argument des termes mêmes de l'acte, qui ne laissaient aucun doute,. suivant elle, sur la volonté réelle des parties. La veuve Jac

quin donnait le sixième en question à son fils, à la charge par lui de ne rien prétendre sur les cinq autres sixièmes, il pouvait d'ailleurs provoquer le partage quand il lui plairait. Il y avait là assignation précise, et exclusive à toute autre, de l'objet donné;'il y avait, de plus, dessaisissement actuel, du moins quant à la nue propriété, puisque le donataire pouvait provoquer le partage dès le moment même de la confection de l'acte, ce qui constituait bien évidemment la donation par acte entrevifs.

Le défendeur a fait défaut.

Le 23 janvier 1828, ARRÊT de la chambre civile, M. Bris

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