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CHAPITRE VIII.

FINANCES.

Budget. Projet de M. de Germiny, les découverts, la dette flottante, les différents services; discussion dans les bureaux, optimisme et inquiétudes; rapports de MM. Gouin et Passy. Caisses d'épargne. Histoire de l'institution, proposition de M. Delessert, législation nouvelle. Réforme hypothécaire, crédit foncier. Projets divers, rapport de M. Chégaray, avortement. Situation financière, établissements de crédit. Adjudication de rentes; abaissement de l'intérêt des bons du Trésor; situation de la Banque, afflux de l'encaisse; opérations de la Banque et de sa succursale pendant l'année ; opérations de la caisse d'épargne, effet de la loi nouvelle; budget municipal de la ville de Paris, répartition de la contribution foncière, augmentation du contingent imposé à la ville; dépréciation de l'or, commission spéciale, résolution.

Au milieu des préoccupations journalières de la politique, les questions de finances devaient être impuissantes à attirer la sérieuse attention de l'Assemblée nationale. Aussi, n'est-ce qu'en réunissant les discussions tronquées ou mal étudiées de la Chambre, en constatant à divers moments l'état de la fortune publique, que nous pourrons donner au lecteur une idée des finances de la France pendant cette année de luttes et de crise.

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Budget. Le projet présenté par M. Fould, le 4 avril 1850, pour le budget de 1851, avait, on se le rappelle (Voyez l'Annuaire pour 1850 p. 312), porté les dépenses à la somme de 1,284 millions et la recette à 1,292 millions, avec un boni apparent de 8,807,000 fr., l'action de l'amortissement restant encore suspendue. Le résultat final fut une balance de 1,367,000 fr. environ pour les dépenses et de 1,371,000 fr. pour les recettes, mais non compris les travaux extraordinaires montant à plus de 67 millions, et les crédits supplémentaires et extraordinaires.

Ainsi disparaissait en réalité l'excédant de 4 millions dont le vote de la chambre avait consacré l'apparence.

Le 7 février 1851, M. de Germiny présenta ses prévisions pour l'exercice de 1852; elles s'élevaient, quant au service ordinaire, pour les recettes, à 1,382,665,416 fr., pour les dépenses, à 1,372,978,828 fr., d'où ressortait un excédant de ressources présumées de 9,684,588 fr. C'était, sur l'exercice précédent, une - amélioration de 5,547,339 fr. obtenue par des augmentations de recettes montant à 11, 283,688 fr., tandis que les crédits n'avaient été accrus que de 5,736,319 fr.

Les découverts des exercices antérieurs, ajoutés à ceux des années 1848, 1849, 1850 et 1851, s'élevaient à 646,873,600 fr.

Les découverts antérieurs à 1848 s'élevaient à 260,870,600 fr. Le découvert de l'année 1848, estimé d'abord à 72, puis à 19 millions, s'était considérablement atténué par les liquidations finales de l'exercice, et le projet de loi de règlement définitif le portait seulement à 3,005,000 fr. Mais ce n'était qu'au prix de charges extraordinaires imposées à la dette consolidée et à la propriété foncière, que ce résultat avait pu être obtenu.

Le découvert de 1849, porté d'abord à 253 millions, s'étaitréduit, par des plus-values dans les recettes, par des économies réalisées sur divers crédits, par des reports de crédits non employés à 202 millions.

Quant au budget de 1850, au moment où il avait été voté, il semblait devoir se solder par un excédant de dépense de 12,256,000 fr.; les crédits supplémentaires successivement accordés par l'Assemblée ou soumis à son examen, l'augmenteraient de 50,286,000 fr.; mais, d'un autre côté, l'élévation des revenus indirects, le produit des droits additionnels sur le timbre, la négociation d'obligations du chemin de fer de Rouen, montant à 15,392,821 fr. 50 cent., et la plus-value des rentes provenant des caisses d'épargne et du chemin de fer de Lyon, avaient créé des ressources nouvelles qui, compensation faite des réductions survenues dans quelques branches de revenus, s'élèveraient à la somme de 43,301,000 fr. Le découvert du service ordinaire était ainsi ramené à 13,241,000 fr., somme à peu près égale à l'évaluation primitive, et si l'on y ajoutait la dé

pense des travaux extraordinaires autorisée pour 90,066,500 fr. par la loi du 15 mai 1850, et accrue de 2,200,000 fr. par des allocations subséquentes, l'exercice 1850, pris dans son ensemble, révélerait une insuffisance de recette de 105,507,500 fr., situation qui pourrait s'améliorer, d'ailleurs, en règlement d'exercice, par des abandons ou des reports de crédits.

On ne pouvait encore former que des conjectures sur les résultats de l'exercice 1851. Le service ordinaire, voté avec un excédant de recette de 4,137,200 fr., présentait, dès aujourd'hui, un découvert de 7,866,800 fr., par suite du vote ou de la présentation de divers projets de loi portant ouverture de crédits additionnels, pour une somme totale de 12,004,000 fr. Il y avait lieu de prévoir, en outre, que des besoins supplémentaires viendraient, dans le cours de l'exercice, s'ajouter à cet excédant. Mais, en tenant compte des annulations habituelles de crédits qui s'opèrent en clôture d'exercice, et des plus-values considérables que l'expérience des deux années précédentes faisait pressentir sur les impôts indirects, il était permis d'espérer, disait M. de Germiny, que le budget de 1851, pour le service ordinaire, se réglerait en équilibre.

Quant aux travaux extraordinaires de 1851, les crédits qui avaient été ouverts par la loi du budget pour 67,391,500 fr., s'élevaient maintenant à 67,623,700 fr. par le report d'un crédit non employé.

La situation du Trésor n'inspirait pas d'alarmes à M. de Germiny, et le ministre ne voyait aucun danger dans une dette flottante assez lourde. Cette dette se décomposait ainsi :

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Inutile de dire que l'action de l'amortissement restait encore suspendue.

Dans le projet de M. de Germiny, l'instruction publique récla

mait une augmentation de 1,112,509 fr., dont la plus forte partie avait pour objet d'élever au minimum de 600 fr., conformément au vœu de la loi du 15 mars 1850, le traitement des instituteurs communaux. Une somme de 544,250 fr. serait également nécessaire pour mettre le crédit affecté aux traitements du clergé paroissial au niveau de la dépense qui résultait de l'effectif réel.

C'est dans le ministère des travaux publics que se trouvaient les différences les plus considérables. Diverses augmentations, s'élevant ensemble à 2,149,851 fr., avaient paru indispensables pour la surveillance des chemins de fer, le personnel, les frais de régie, l'entretien des édifices publics, les travaux des routes et ponts, la navigation intérieure. Mais en même temps, et dans la prévision que les chemins de fer exploités par l'État seraient livrés à l'industrie privée, le crédit relatif aux frais d'exploitation avait été abaissé de 7,050,000 fr. ; ce qui déterminait, sur la première section de ce budget (service ordinaire), une réduction finale de 4,900,149 fr.

Au ministère de la guerre, qui, toute compensation faite, présentait une augmentation de 979,441 fr., on remarquait une augmentation de 1,718,999 fr. pour la création de nouvelles brigades de gendarmerie, et diverses indemnités de 1,314,100 fr. pour le remplacement des chevaux dans l'artillerie et les équipages militaires, et enfin de 1,700,000 fr. pour les indemnités d'expropriation et l'extension de la colonisation libre en Algérie. Les diminutions se composaient principalement de 2,147,043 fr. retranchés du crédit de la solde et de l'entretien des troupes, par suite de la réduction de l'effectif et de la non-reproduction d'un crédit de 2,450,000 fr., voté dans l'exercice 1851 pour les colonies agricoles.

Une somme de 460,000 fr. devrait être ajoutée au crédit de l'administration des douanes, afin de lui tenir lieu de la taxe de plombage et d'estampillage dont le commerce était exonéré au profit du cabotage maritime.

Enfin, le département des finances demandait encore, au chapitre des remboursements et primes, une augmentation de 1,179,980 fr., rendue nécessaire par l'accroissement du montant des rôles des contributions directes, et, par suite,

des impositions additionnelles à restituer aux communes. Les dépenses du service extraordinaire étaient évaluées à 74,112,268 fr.

Comparées à celles de l'exercice précédent, elles présentaient les différences ci-après :

Travaux publics, une augmentation de.

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destinée tant à l'établissement des grandes lignes de chemins de fer, qu'aux routes, aux ponts, à la navigation, aux ports.

Marine et cultes, des diminutions montant ensem

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7,050,730

330,000

6,720,630

Les ressources de l'exercice 1852 dépassaient celles du Budget de 1831 d'une somme de 11,283,658 fr.

Les revenus et ventes de domaines fourniraient une augmentation de 2,736,110 fr., par suite de la mise en vente d'un plus grand nombre d'immeubles nationaux, et du rapprochement des termes de payement en exécution de la loi du 15 mai 1850.

Sur les impôts et revenus indirects, M. de Germiny espérait une augmentation de 17,849,883 fr., qui porteraient principalement sur le timbre des journaux, les tabacs, les boissons et d'autres droits divers.

Il y aurait, en outre, une diminution de 2,476,000 fr. sur les sels, et de 2,540,000 fr. sur les postes.

D'après l'état des recettes connues pour 1850, on avait dû abaisser de 2,295,000 fr. le montant des revenus de l'Algérie ; l'appréciation de 2,200,000 fr. avait été maintenue provisoirement pour les produits de douanes, attendu l'impossibilité de préjuger les résultats de la loi récemment votée.

Les chemins de fer de l'Ouest et de Lyon devant être concédés, il y avait lieu de retirer du budget de 1852 les 12 millions qui figuraient, pour cet objet, à celui de 1851.

Enfin, une augmentation de 4 millions environ existait sur les produits de l'amortissement, provenant des arrérages des rentes créées pour la consolidation des réserves.

Lorsque l'Assemblée se réunit pour la première fois (5 mars),

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