Page images
PDF
EPUB

AN

DENIERS DE LOUIS IV, DE GERMANIE,

FRAPPÉS A ANVERS.

ONETA

La Revue de la Numismatique Belge a fait connaitre, dans le temps (année 1853, p. 4 et pl. I, n° 11 et 12), deux intéressantes monnaies impériales frappées à Anvers, par Henri l'Oiseleur (918-936). Depuis la notice de M. R. Chalon, rien n'était venu augmenter la série anversoise, tout au moins pour ces temps reculés, et le monnayage du roi de Germanie, à Anvers, n'était en quelque sorte qu'un accident, un événement isolé.

Aujourd'hui, j'ai la satisfaction d'annoncer au lecteur que j'ai trouvé dans mes cartons deux autres monnaies frappées dans la même ville et dont le travail, le type et les légendes offrent une parfaite analogie avec les deniers d'Henri l'Oiseleur.

Le type est identique, c'est toujours un composé de deux frontons accolés ou pour mieux dire adossés et portant au milieu trois points ou globules posés 1 et 2. Entre les deux frontons, on retrouve, comme sur les deniers publiés par M. R. Chalon, une légende horizontale.

La conservation de ces précieux deniers est assez bonne, mais l'imperfection de la frappe qui n'a pas porté également

sur toutes les parties de la monnaie, produit des lacunes heureusement peu importantes.

Voici la description de ces pièces :

1° AN TVR.... (pensis). Légende divisée en quatre parties par les angles des deux frontons.

Au milieu, sur une ligne horizontale............ (m) ONETA. .... OVICVS IMP. Croix cantonnée de

Au revers

quatre points.

[ocr errors]

2o Sur cette seconde pièce, on distingue les lettres *.. AN TV .... sans pouvoir déchiffrer une seule partie de la légende horizontale.

Au reversLODO.... même type que la précédente. Ainsi, par un hasard aussi heureux que singulier, le revers de ces deux pièces se complète parfaitement et nous livre le nom du prince qui les a fait fabriquer, c'est-à-dire de Louis IV, de Germanie, qui régna de 899 à 912.

Nous voici donc en possession de deux règnes différents pour l'atelier d'Anvers; il faut espérer que des découvertes futures ou une recherche attentive dans les médaillers des collectionneurs nous fourniront les noms d'autres princes encore et viendront compléter la série anversoise.

En attribuant à Louis IV, de Germanie, les deniers que je viens de décrire, je ne crois pas m'être trompé. En effet, le style du travail, le type, la maigreur des lettres qui forment les légendes, le peu de saillie de la gravure, tout se réunit pour indiquer que ces monnaies sont presque contemporaines de celles d'Henri l'Oiseleur.

C'est donc au plus près de ce règne qu'il faut se maintenir dans la recherche d'une attribution précise, et Louis IV, qui n'en est guère séparé que par un intervalle

de six années, m'a paru l'auteur le plus probable des deniers que je publie aujourd'hui.

Dans son article, M. R. Chalon a clairement établi que les pièces portant la légende HENRICVS REX, devaient appartenir à Henri l'Oiseleur; mes deniers confirmeraient encore, si cela était nécessaire, l'hypothèse de mon savant confrère.

On a vu que la légende horizontale de la première de mes monnaies se lit MONETA, tandis que l'un des deniers publiés précédemment (Revue de la Numismatique belge, 1853, pl. I, no 12), porte le mot : CIVITAS. Il se peut que l'autre, figuré au no 11 de la même planche et qui appartient à M. de Coster, ait été mal déchiffré et que les lettres ATAS se rapportent au mot MONETAS ou MONATAS. Cette lecture n'est pas sans exemples, et pour n'en citer qu'un, je rappellerai un denier d'un pays éloigné d'Anvers assurément, et d'une époque moins ancienne, je veux parler de la monnaie si connue de l'évêché de Lausanne, qui porte d'un côté LAVSANE, et de l'autre, MONETAS ou MONHTAS.

....

Il est inutile de reproduire ici les courtes considérations historiques émises par M. R. Chalon, je préfère y renvoyer le lecteur. Seulement, à propos de ces deniers d'Anvers, si remarquables par leur type et leur style, si empreints d'un sentiment marqué de localité, il me semble opportun de dire quelques mots sur les divers systèmes employés pour la classification des monnaies qui portent à la fois un nom de prince et un nom de localité. Je veux surtout parler des monnaies impériales d'Allemagne, mais on pourra étendre mon raisonnement à toutes les autres.

Dans plusieurs collections, je vois les empereurs placés chronologiquement et représentés par des pièces frappées dans des ateliers très-divers; je laisse de côté, pour un moment, les monnaies qui ne donnent pas le nom de la localité.

Dans d'autres, et c'est, je crois, une règle généralement admise en Allemagne, dans d'autres, dis-je, comme par exemple, dans l'immense catalogue de la collection Welzl de Wellenheim, c'est le nom de la localité et non celui du prince qui sert de base à la classification; en un mot, c'est le système géographique.

A mon sens, ce dernier mode est le seul bon et à peu ou point d'exceptions près, c'est à celui-là qu'il faut se ranger. Quel fruit, en effet, l'étude peut-elle retirer de la réunion des deniers fabriqués au non d'Otton II, à Cologne, Magdebourg, Toul, Zurich, Coire, etc., sans parler de l'Italie? Tous ces deniers sont variés et sans autre lien entre eux que le nom du souverain : l'Allemagne, la France, la Suisse et l'Italie, se trouvent là réunies au mépris du type, du style et du poids.

Si, au contraire, on adopte l'excellente classification de l'auteur du catalogue de Welzl de Wellenheim, ces disparates s'évanouissent et une fois les monnaies restituées aux localités d'où elles émanent, on voit pour chaque pays se former des séries plus ou moins complètes, plus ou moins suivies, dans lesquelles apparaissent le style local, les dégénérescences et les transformations des types. On y lit à chaque pièce la succession des destinées politiques de la nation, et les variations du poids et du titre de la monnaie y deviennent palpables.

Les avantages d'un pareil arrangement sont inappré

[ocr errors]

ciables pour l'étude. Aperçoit-on une lacune dans une série, on cherchera à la combler au moyen de quelque pièce indéterminée jusqu'ici. Veut-on déterminer si une pièce appartient à tel ou tel prince parmi ceux du mème nom qui se sont succédé dans la localité? On aura la chance d'y arriver par la comparaison des types, du style et de l'âge de la monnaie.

En présence de tels résultats, il me semble que la question ne peut être un seul instant indécise, et je me reprocherais presque de l'avoir indiquée, si je ne me souvenais d'avoir vu un si grand nombre de collections, même parmi les plus considérables, attachées encore à la vieille routine de la classification dynastique.

Les retardataires de ce genre feront bien, je crois, de ne plus mêler aux impériales romaines les monnaies des empereurs frappées dans toutes les colonies avec des légendes grecques, latines, etc. On fera bien aussi de ne plus mettre dans la suite dynastique de France les monnaies frappées à Milan, Gènes, Asti, Modène, etc., et ainsi du reste.

Cela fait, il y aura encore pour les obstinés la consolation de former une suite trop considérable à mon gré, des monnaies où le nom seul du souverain se lit, sans être accompagné de la désignation de la localité ou tout au moins d'un type local incontestable.

Encore une fois, ces recommandations pourront paraître puériles en Allemagne, mais je les crois utiles et opportunes de ce côté du Rhin et l'on me pardonnera de les avoir si longuement développées.

A. MOREL FATIO.

« PreviousContinue »