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le répétons, ne peut être recherché qu'à raison des évictions dont le germe existait déjà à l'époque de la vente mais encore, faut-il qu'à cette dernière époque l'acquéreur ait absolument ignoré la possibilité de cette éviction. Ainsi, l'arrêt des requêtes du 2 mai 1864 (Dev., 65-1-381) a jugé : 1o qu'au cas où le propriétaire d'une usine située sur une rivière navigable, en transigeant avec l'administration relativement à l'indemnité par lui prétendue pour chômage résultant de travaux exécutés sur la rivière, a renoncé à toute indemnité pour l'avenir; l'acquéreur de l'usine n'a aucune action en garantie pour la charge résultant de cette transaction, quoique non mentionnée dans la vente, s'il en a eu connaissance au moment de l'acquisition; 2° qu'il y a preuve écrite de cette connaissance, conformément à la règle établie par l'article 1341, C. civ., lors que la transaction est mentionnée dans des delibérations émanées du conseil municipal de la commune où est située l'usine et dont l'acquéreur était maire à cette époque. - Ajoutons que la jurisprudence n'exige pas que la preuve de la connaissance par l'acquéreur des causes d'éviction résulte d'un acte écrit. Nous voyons, par exemple, dans l'arrêt des requêtes du 20 juin 1843 (Dev., 43-1-788) que l'acquéreur d'un moulin dont l'existence a été subordonnée à la construction et à l'entretien d'un pont nécessaire à d'autres riverains ne peut, en se fondant sur ce que cette charge d'entretien ne lui a pas été déclarée lors de la vente, exercer de recours en garantie contre son vendeur, alors qu'à l'époque de la vente, il connaissait parfaitement le domaine vendu et qu'en outre, à la seule inspection des lieux, il a dû penser et être convaincu que l'entretien du pont rentrait dans les obligations du propriétaire de ce moulin. La même Chambre a encore jugé le 21 avril 1874 (Dev., 74-1-243) que le vendeur qui, en cédant pour l'exploitation d'une usine des eaux à prendre à un barrage, n'a pas déclaré l'existence d'un barrage

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supérieur ayant pour effet de diminuer notablement le volume des eaux, est affranchi de toute garantie, si l'existence du barrage supérieur révélée par des terrassements et par l'aspect même des terrains arrosés, n'a pu être ignorée par l'acquéreur. Il ne faut pas oublier que tout ce que nous venons de dire serait inapplicable au cas où l'acheteur démontrerait qu'il y a eu dol personnel du vendeur. C'est ce qui arriverait si l'acte administratif postérieur à la vente avait été provoqué par ce dernier par exemple, s'il avait lui-même signalé aux ingénieurs les inconvénients que pouvait présenter l'usine. Le contraire avait été jugé par le tribunal de Corbeil et la Cour de Paris; mais l'arrêt de cassation du 8 janvier 1851 (Dev., 51-1-106) vint à juste titre réformer cette décision: «Attendu qu'il est reconnu par l'arrêt attaqué que, au lieu de laisser Baudry exercer librement le droit de se faire maintenir par l'administration en jouissance des eaux, conformément à l'arrêté de 1827, Chodron, dans son intérêt privé, s'est pourvu devant le préfet de Seine et-Oise pour faire exécuter l'arrêté de 1833; que cette réclamation constitue un trouble apporté à la faculté que l'arrêt attaqué reconnaît lui-même avoir été cédée par Chodron à Baudry dans l'acte de vente de 1838 pour le maintien de l'arrêté de 1827; d'où il suit que l'arrêt, en jugeant que, au sujet de la décision administrative à intervenir, Baudry n'avait aucune garantie à exiger contre le fait personnel de Chodron, a violé l'article 1628, C. civ..... »

§ VIII.

352. Nous ne pouvons, à propos des usines hydrauliques, examiner la théorie générale de l'impôt foncier, de l'impôt sur les patentes, de la contribution mobilière et de la con

tribution des portes et fenêtres; nous renverrons sur ce point aux ouvrages qui ont eu pour but de commenter spécialement la loi du 3 frimaire an VII et les textes qui l'ont complétée. Nous ne rechercherons donc point suivant quelle base l'impôt foncier s'applique aux bâtiments des usines hydrauliques, nous bornant à signaler les articles 87 et 88 de la loi de frimaire; nous n'essayerons point d'interpréter la disposition si obscure de la loi du 23 avril 1844 (art. 9), relativement à l'impôt des patentes. Le seul point sur lequel nous nous proposons d'insister est le suivant : comment l'impôt foncier sera-t-il perçu sur les biefs et arrière-biefs des usines hydrauliques? Deux questions sont à résoudre : 1° Quelle doit être l'assiette de l'impôt? La réponse se trouve dans l'article 104 de la loi de frimaire. « Les canaux destinés à conduire les eaux à des moulins, forges et autres usines, seront cotisés, mais à raison de l'espace seulement qu'ils occupent et sur le pied des terres qui les bordent. » En présence d'un texte aussi précis, on a peine à comprendre les difficultés qui ont, pendant si longtemps, surgi dans la pratique. Dès l'origine, l'administration mettant de côté les expressions formelles de l'article, prétendait assujettir les terres recouvertes par ces canaux, à la cotisation sur le pied des terres de première qualité et le recueil méthodique du cadastre publié en 1811, consacrait dans son article 387 cet étrange abus de pouvoir. Lorsque la question finit par être portée devant le Conseil d'Etat, M. le ministre des finances essaya de faire prévaloir ce qu'il appelait le système de l'administration des contributions directes. Lors de la rédaction du recueil méthodique du cadastre, disait-il, on a considéré que les canaux d'irrigation étant en général bordés par des propriétés de différentes natures et de différentes classes, leur imposition, réglée d'après la loi du 3 frimaire an VII, donnerait lieu à des difficultés presque insurmontables, en ce qu'elle nécessiterait l'ouverture d'une multi

tude d'articles de classement dont le revenu serait souvent si faible qu'à peine pourrait-il être exprimé, et on a pensé qu'il convenait d'adopter un mode uniforme d'imposition qui, sans s'écarter de l'esprit de la loi, simplifierait l'exécution des travaux; en conséquence, l'article 387 du recueil méthodique a assimilé les canaux d'irrigation et ceux destinés à conduire l'eau aux usines, aux canaux de navigation, et disposé qu'ils seraient imposés, comme ces derniers, sur le pied des meilleures terres labourables. Ce mode d'évaluation a paru ne devoir nuire en rien aux intérêts des propriétaires, l'augmentation d'impôt qu'ils éprouvent sur certains points, par l'application du tarif des terres de première classe, se trouvant compensée par la diminution qui résulte de cette application aux prés, vignes, jardins, et autres natures de propriétés qui se trouvent sur les bords des canaux et qui sont susceptibles de recevoir un revenu supérieur à celui des terres. Je viens d'indiquer les motifs qui ont déterminé à substituer le mode fixé par l'article 387 du recueil méthodique à celui de l'article 104 de la loi du 3 frimaire an VII; il reste à examiner si les dispositions de ce recueil doivent être considérées comme ayant force de loi et ayant abrogé les règlements antérieurs. La question me semble avoir été résolue d'une manière affirmative, quoique implicite par cette disposition des lois de finances de 1814 et 1816 portant: « Les lois et règlements sur le cadastre continueront d'être exécutés. » — Nous avons à peine besoin de dire que le Conseil d'Etat ne s'est nullement laissé arrêter par un argument aussi singulier : l'arrêt du 20 février 1835 (Lebon, 35-124), qui a définitivement fixé la jurisprudence, décide d'une manière formelle que l'article 104 de la loi de frimaire n'a pu être abrogé en 1811 et que ce sont les bases de calcul par elle fixées qui seules peuvent être appliquées par l'administration. -2° Contre qui l'impôt foncier peut-il être recouvré dans notre espèce? Aucune difficulté ne sera

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soulevée quand l'usinier est en même temps propriétaire des biefs et arrière-biefs; mais quid dans le cas contraire? On a soutenu qu'aux termes de la loi de frimaire, l'impôt ne grevait que les propriétés foncières et que, dès lors, une servitude qui n'est qu'un droit incorporel et qui ne détruit pas la propriété entre les mains de celui qui la conserve, ne saurait être passible dudit impôt; que la servitude d'aqueduc n'est pas plus susceptible d'être assujettie à la contribution foncière que celle de simple passage en cas d'enclave, l'une et l'autre de ces deux servitudes étant de la même nature; que la qualité d'usufruitier ne saurait convenir à celui qui jouit de la servitude du passage des eaux; que les deux droits ayant une nature différente, ne peuvent être confondus pour les charges qui leur sont inhérentes; que le propriétaire du plat fond du canal, continuant d'avoir cette propriété nonobstant le passage des eaux, il y aurait lieu dans le systême de l'administration à une double imposition, l'une pour le canal, l'autre pour ledit plat fond. Néanmoins, le Conseil d'Etat a jugé, en s'appuyant sur les termes de la loi de frimaire que c'était le canal lui-même, c'est-à-dire le droit d'aqueduc, qui était assujetti à l'impôt; que, dès lors, l'administration en agissant contre les usiniers, avait réellement agi contre les contribuables qui lui étaient désignés par la loi; depuis l'arrêt du 5 mai 1831 (Lebon, 31-172) aucune controverse n'a été soulevée à nouveau sur ce point.

§ IX.

A. Chômage et suppression des usines dans l'intérêt public.
B. Chômage des usines dans l'intérêt du flotlage.

A

353. Les concessions de prises d'eau autorisées par l'administration, ne peuvent subsister qu'autant qu'elles ne nui

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