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tion; 2o les établissements de ce genre, les bâtardeaux, pilotis, gords, pertuis, murs, amas de pierres, terres, fascines, pêcheries, filets dormants et à mailles ferrées, réservoirs, engins permanents et tous autres empêchements nuisibles au cours de l'eau; copie de ce procès-verbal devait être envoyée immédiatement au ministère de l'intérieur. Les autorités départementales devaient en même temps, enjoindre à tous propriétaires d'usines, de faire connaître leurs titres de propriété et, à cet effet, d'en déposer des copies authentiques au secrétariat de leur administration municipale, qui se chargerait de les faire parvenir au secrétariat de l'administration départementale. Les articles 5 à 9 voulaient que les usines reconnues dangereuses et nuisibles à la navigation, au libre cours des eaux, au desséchement et à l'irrigation des terres fussent rangées en deux classes 1° usines dont la propriété ne se trouverait pas fondée en titres; 2° usines non fondées en titres ou n'ayant d'autres titres que des concessions féodales abolies. Pour ces dernières des mesures immédiates étaient prescrites; leur destruction devait avoir lieu dans le mois ; ce délai pouvait à raison des circonstances être prorogé de deux mois, passés lesquels, hors le cas d'obstacles reconnus invincibles, la démolition devait être faite d'office aux frais du propriétaire et à la diligence du commissaire du pouvoir exécutif près chaque administration centrale. Toutefois, afin de prévenir les accidents, l'administration ne devait ordonner la destruction des moulins et usines qu'un mois après avoir prévenu les administrations centrales des départements supérieur et inférieur, de manière à leur permettre de prendre toutes les dispositions nécessaires ; ces administrations étaient de plus autorisées, si elles craignaient les résultats de ces destructions, à prévenir le ministre de l'intérieur qui suspendrait, s'il y avait lieu, l'exécution de l'arrêté incriminé.

248. Des deux buts que se proposait l'arrêté de ventôse, le premier seul put être atteint sans difficultés. Il fut matériellement impossible de faire procéder à la destruction générale des établissements non autorisés; tout ce que l'on put obtenir des autorités départementales fut le récolement et la classification des usines existantes; il fallut renoncer à exécuter cette mesure d'ensemble et on en arriva à considérer comme lettre morte les injonctions si précises de l'arrêté. Il n'en avait pas moins rendu un immense service en précisant pour la première fois les pouvoirs des diverses autorités administratives relativement aux usines; aucune concession ne put désormais être accordée que par un décret ou une ordonnance. En même temps, l'instruction du 19 Thermidor an VI spécifiait les clauses résolutoires qui devaient être introduites dans tout acte de concession de manière à réserver les droits de l'administration, tout concessionnaire se soumettant par avance à faire disparaître sa prise d'eau sans indemnité aucune, lorsque les besoins de la navigation viennent à l'exiger. Partant de ces principes, l'administration a pu organiser dans tous ses détails la procédure à suivre par les demandeurs en concession, et établir des règles uniformes pour l'instruction de chaque affaire. En 1824, les rapports des flotteurs et des usiniers furent définitivement réglés par une loi spéciale les indemnités de chômage fixées par l'Ordonnance de 1669 furent augmentées dans une large proportion. En 1840, une loi intervint également pour régulariser la perception des redevances imposées aux usiniers à raison de leurs prises d'eau; un pouvoir discrétionnaire fut accordé à l'administration pour en déterminer les éléments. En 1848, l'inspection et la surveillance des usines furent rattachées au service hydraulique et confiées à des ingénieurs spéciaux de là une garantie nouvelle pour les intérêts opposés à ceux des usiniers. Un progrès plus considé

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rable encore fut introduit par la circulaire ministérielle du 23 octobre 1851 contenant instruction pour le règlement des usines sur les cours d'eau : elle indique quelle marche doit être suivie dans les bureaux des préfectures et dans ceux des ingénieurs; elle prescrit des enquêtes et des descentes de lieux; elle insiste sur les clauses que les ingénieurs devront avoir soin de ne pas perdre de vue; enfin, elle se termine par une série de formules et par un programme pour la rédaction des pièces nécessaires : tous les agents de l'administration quelque haut placés qu'ils soient doivent s'y conformer strictement. Bientôt après, le décret du 25 avril 1852 vint conférer au préfet le droit d'autoriser sur les rivières navigables certaines prises d'eau peu importantes : une circulaire du 27 juillet 1852 en compléta les dispositions. Le dernier texte que nous rencontrons est le décret du 13 avril 1861 qui maintient les pouvoirs précédemment attribués au préfet : nous y joindrons la circulaire du 25 février 1863 qui s'y lie d'une manière intime. - Tels sont les documents principaux que nous avons à coordonner: sans doute nous rencontrerons plus d'une lacune dans cet ensemble et nous aurons plus d'une fois à regretter que le gouvernement ne se soit pas décidé à présenter aux assemblées législatives le projet élaboré en 1818 par une commission spéciale; mais, en définitive, les principes généraux de la matière ne sont pas susceptibles de controverse comme au cas où il s'agit d'usines établies sur les cours d'eau non navigables; l'administration est maîtresse absolue des rivières navigables; elle est seule juge de l'opportunité des concessions et des termes dans lesquelles elles doivent être accordées; les pages qui vont suivre ne seront en définitive que le développement de cette formule.

1. Interdiction d'ouvrir des prises d'eau sans autorisation sur les rivières el canaux navigables ou flottables.

II. De l'obtention des concessions administratives.

2 III. Conditions imposées aux usiniers.

? IV. Surveillance des travaux, récolement, réception.

V. Propriété des biefs, canaux d'amenée et canaux de fuite.

8 VI. De l'exploitation des usines.

aux tiers. hydrauliques.

Réparation des dommages causés Modifications apportées dans la disposition des ouvrages

8 VII. Louage et vente des usines hydrauliques.

? VIII. Des usines hydrauliques au point de vue de la perception de l'impôt.

§ IX. Chômage et suppression des usines.

§ I.

249. L'interdiction de détourner dans l'intérêt de l'industrie les eaux des rivières navigables ou flottables se trouve consacrée ; 1o par l'ordonnance de 1669 art. 44, Tit. XXVII; 2o par l'article 4 de l'arrêt du Conseil du 24 juin 1777; 3o par l'article 9 de l'arrêté du 19 ventose an VI: « Il est enjoint aux administrations centrales et municipales et aux commissaires du Directoire exécutif établis près d'elles, de veiller avec la plus sévère exactitude à ce qu'il ne soit établi par la suite aucun pont, aucune chaussée permanente ou mobile, aucune écluse ou usine, aucun bâtardeau, moulin, digue ou autre obstacle quelconque au libre cours des eaux dans les rivières navigables et flottables, dans les canaux d'irrigation ou de dessèchement généraux, sans en avoir préalablement obtenu la permission de l'autorité centrale qui ne pourra l'accorder que de l'autorisation expresse du Directoire exécutif. De plus, suivant l'ord. de 1669 et l'arrêt de 1777, aucune tranchée ne peut être pratiquée à une distance moindre de six toises des bords d'une rivière navigable. Une question assez délicate s'est présentée à ce propos; un propriétaire creusant un puits ou une tranchée au delà de cette distance de six toises arrive en fait à détourner indirectement partie des eaux souterraines qui

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dépendent du régime de la rivière: doit-on le considérer comme ayant contrevenu aux dispositions que venons de citer? Dans l'intérêt de la négative, on peut s'appuyer sur la jurisprudence qui permet au voisin d'une source de détourner, par des fouilles opérées sur son propre terrain, les eaux souterraines qui alimentent cette source; c'est là, disent les arrêts, une faculté inhérente au droit de propriété et que l'on peut exercer à condition d'agir suivant un intérêt sérieux et non pas dans la seule intention de nuire au voisin. (V. Req. Rej. 4 Déc. 1860. Dev. 61-1-623 et le renvoi). Cette doctrine, tout à fait favorable aux besoins de l'industrie, a reçu récemment la consécration de l'autorité administrative : dans une dépêche adressée le 9 mai 1866 à M. le Préfet de la Meurthe, M. de Franqueville, directeur général des chemins de fer, se prononçait en ce sens de la manière la plus formelle. "J'ai examiné en Conseil des Ponts-et-Chaussées la demande présentée par la Compagnie des chemins de fer de l'Est tendant à obtenir l'annulation d'un arrêté préfectoral du 21 juillet 1865 qui l'a autorisée, moyennant redevance à faire une prise d'eau dans la Meurthe pour l'alimentation de la gare de Lunéville. Cette demande s'appuie sur ce qu'en creusant les puits destinés à recevoir les pompes, la Compagnie a trouvé une nappe d'eau souterraine dont l'abondance permettra de satisfaire aux besoins du service de la gare. Dans un rapport des 24 novembre et 4 décembre 1865, MM. les ingénieurs pensent que le puits creusé à 11 mètres seulement de distance de la Meurthe est incontestablement alimenté par cette rivière; que, dès lors, ce puits constituait une prise d'eau indirecte qui doit être assimilée jusqu'à un certain point aux ouvrages prévus par l'article 4 de l'arrêt du 24 juin 1777, qui défend d'affaiblir le cours des rivières et canaux par aucune tranchée ou autrement. Mais, avant de proposer certaines mesures restrictives ou d'autres conditions règlementaires,

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