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nauld trouvoit cette dissertation admirable, et surtout le dernier chapitre, qui traite de l'usage que l'on peut faire des psaumes dans tous les états de la vie.

Bossuet distingue différentes sortes de psaumes; les psaumes moraux, qui contiennent des exhortations, des reproches, des préceptes, des conseils. Les déprécatifs, qui ont pour objet d'implorer la miséricorde et les grâces de la bonté divine; les historiques et les prophétiques.

Les prophétiques sont de deux genres; les uns, purement prophétiques, doivent s'entendre immédiatement de JÉSUS-CHRIST; les autres ne se rapportent que médiatement au Messie, et ce sont ceux où le prophète dit lui-même des choses qui ne peuvent avoir leur juste application et un sens parfait qu'en remontant à JÉSUS-CHRIST, figuré dans le psaume.

Quoique les différentes versions reçues dans l'Eglise varient beaucoup entre elles, elles s'accordent parfaitement avec le texte original sur le fond du dogme et de la morale. Le concile de Trente, en déclarant la Vulgate authentique, n'a point interdit aux commentateurs la liberté de consulter le texte original. Lorsqu'ils ont recours à l'hébreu r ce n'est pas pour y chercher des articles de foi inconnus, mais pour éclaircir et confirmer la vé-' rité déjà professée, ou pour découvrir des sens plus relevés, plus propres, plus analogues à la lettre.

Bossuet établit en principe que les titres des psaumes, destinés à nous en apprendre l'occasion et le sujet, ont été inspirés par le même esprit qui a inspiré les psaumes, qu'ils en sont comme la

clef, et il a appuyé son opinion sur les témoignages de toute la tradition.

Quant aux auteurs des psaumes, il juge plus raisonnable de dire qu'ils n'ont pas tous été composés par David, quoiqu'il en soit le principal auteur. Mais il croit qu'il est assez indifférent qu'on les attribue tous à David, ou qu'on soutienne qu'ils sont de différens auteurs, puisque leur autorité ne vient ni de David, ni de tout autre, mais de l'Esprit saint qui les a inspirés.

Les notes que Bossuet a ajoutées aux psaumes pour en faciliter l'intelligence sont courtes, mais judicieuses et exactes. Il y a surtout évité un vain. étalage d'érudition, l'ambition d'y trouver des sens éloignés et cachés, et la manie de hasarder des interprétations vaines ou imaginaires.

Il a placé à côté de la vulgate la version des psaumes que saint Jérôme a travaillée avec tant de soin, et que l'Eglise latine auroit adoptée, comme elle a adopté la version que ce Père a faite des autres parties de l'Ecriture, si les peuples des Eglises d'Occident n'eussent pas déjà été accoutumés à l'ancienne version italique..

L'abbé de Longuerue, qui, avec tout l'orgueil. d'une vaste érudition, avoit un caractère tranchant, s'exprime avec assez de légèreté sur travail de Bossuet.. Mais Arnauld, juge plus compétent dans une pareille matière, en avoit une opinion bien différente. Après avoir fait l'éloge de la dissertation préliminaire, il ajoute : « (a) Ce

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qui m'en a plu davantage, est le moyen qu'a » trouvé M. de Meaux d'expliquer les psaumes » selon l'hébreu, sans dire qu'il le faisoit..... Ç'a. (a) Lestre du 5 juin 1691.

» été en mettant vis-à-vis de la vulgate, non une » nouvelle version selon l'hébreu, mais celle de »saint Jérôme, à qui l'Eglise a rendu ce témoignage, >> qu'il avoit reçu de Dieu une vocation particulière » pour traduire les Ecritures divines. Il n'y a plus. » guère d'endroits dans les psaumes, qu'on n'en» tende très-bien, et on a dans un même livre la » traduction de l'hébreu de saint Jérôme et la. » vulgate. »

Bossuet avoit publié en 1691 sa préface et ses notes sur les psaumes. Deux aus après, en 1693, il publia ses préfaces et ses notes sur les livres de Salomon. Il mit à la fin de cet ouvrage un supplément à son commentaire sur les psaumes. L'objet de ce supplément étoit de réfuter quelques commentateurs, et entre autres Grotius, qui s'efforçoient d'affoiblir l'autorité des prophéties en général, et surtout celles qui sont annoncées dans les psaumes.

Ces commentateurs prétendoient que lorsque les apòtres ont fait usage des oracles des prophètes pour prouver que JÉSUS-CHRIST étoit le Messie, ils n'ont point présenté ces oracles comme des preuves d'une vérité déjà suffisamment attestée par les miracles et la résurrection de Jésus-CHRIST, mais qu'ils se proposoient uniquement d'éclaircir et de confirmer ce qui étoit déjà reconnu et dé

montré.

Bossuet s'élève avec chaleur contre cette opi-: nion. Il convient à la vérité que les témoignages employés par les apôtres ne sont pas tous de la même évidence ni de la même force. Mais il n'en est pas moins convaincu que la vérité des témoi gnages des prophètes consiste particulièrement dans

ces prophéties si multipliées, qui se rapportent clairement et uniquement à JÉSUS-CHRIST (1).

Bossuet dans ses préfaces sur les livres de Salomon, traite tout ce qui peut concerner le sujet, l'auteur, l'âge et les versions de ces différens livres; et quand l'occasion s'en présente, il combat les erreurs de quelques critiques, et en particulier celles de Grotius et de Richard Simon.

Les notes, dans le même genre que celles dont il a enrichi les psaumes, sont cependant plus étendues en quelques endroits. Ses notes sur le Cantique des cantiques sont une espèce de commentaire qui en développe les véritables sens. Il explique d'abord le sens historique, qui regarde Salomon et la reine son épouse, fille du roi d'Egypte; et après avoir éclairci le sens littéral, il passe au sens allégorique, et ramène tout à Jésus-CHRIST et à son Eglise.

Tous les interprètes conviennent aussi que ce dernier sens est celui que le Saint-Esprit a eu principalement en vue dans la composition de ce cantique. Bossuet emprunte des saints Pères toutes les explications qu'il donne; il a seulement fait choix de leurs plus belles pensées.

Le livre des Proverbes, celui de la Sagesse, l'Ecclésiaste et l'Ecclésiastique ont quelquefois exigé une certaine étendue dans les notes, pour bien éclaircir le sens historique et défendre des points de dogme contre les interprètes qui s'écar

(1) Nous aurons occasion d'exposer l'opinion de Bossuet sur-Grotius, lorsque nous aurons à parler de sa dissertation sur ce célèbre personnage, qu'il publia en 1703, à la suite de ses deux Instructions contre Richard Simon. (Voyez livre xie de cette Histoire.)

toient des règles de la foi en rejetant les sentimens des Pères. Bossuet a suivi à peu près le même plan qu'il avoit adopté pour l'explication des psaumes. Il a également fait usage des différentes versions propres à développer le texte, et il s'est principalement servi des traductions de saint Jérôme (1).

(1) Les Commentaires de Bossuet sur les psaumes et sur les livres sapientiaux sont les seuls qu'on ait pu réunir. Cependant il paroît par sa lettre à son chapitre, qu'il avoit dessein de commenter les Prophètes et tous les autres livres de l'ancien Testament. Les notes manuscrites de l'abbé Ledieu le confirment également; il existe même quelques fragmens informes, qui ne permettent pas de douter qu'il ne se soit occupé de ce travail. Indépendamment de ces fragmens, on voit, par le privilége obtenu en 1727 par l'évêque de Troyes pour la publication des ouvrages posthumes de son oncle, qu'il y est question d'un manuscrit de Bossuet portant pour titre : Notæ in libros Genesis et Prophetarum. On voit aussi dans le catalogue des livres de M. Lepeletier Desforts, ministre d'Etat, imprimé en 1741, un manuscrit portant pour titre Jacobi-Benigni Bossuet Nota et Commentaria in libros Genesis, in Exodum.... in Isaiani et prophetas, in-4°. Il est vraisemblable que ce manuscrit étoit passé à M. Lepeletier, contrôleur-général, son oncle, qui l'avoit reçu de l'abbé Fleury, avec lequel il étoit fort lié, et qui avoit eu part au travail de Bossuet sur l'Ecriture

sainte.

Ce manuscrit, à la vente de M. Lepeletier Desforts, fut acquis par M. Barrois, libraire, qui le revendit à M. de Mazaugues, président au parlement d'Aix. Après la mort de M. de Mazaugues, l'évêque de Carpentras fit l'acquisition de la plus grande partie de ses livres et de ses manuscrits, pour former dans sa ville épiscopale une bibliotheque publique. On y fit inutilement des recherches, ily a plus de soixante ans, pour retrouver ce manuscrit. On apprit seulement que l'évêque de Carpentras avoit donné au pape Benoît XIV plusieurs manuscrits de sa Libliothèque, et que

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