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qui comprend les personnes et les propriétés; la liberté, l'égalité, la justice, voilà les élémens du bonheur pour tous les hommes et pour tous les empires.

VIII. Résumé des vœux actuels de l'armée.

L'armée tient aux sentimens généreux qui l'ont animée dans le cours de la guerre, et qui ont eu part à ses victoires. Elle chérit son chef et le proclame, avec joie, son empereur; mais, elle chérit sa patrie, et demande avec force la conservation, la garantie de la liberté, de l'égalité, le droit commun de tous de parvenir aux emplois, suivant leurs services, leurs talens, leurs vertus, ou leur âge et leurs propriétés, seules distinctions admissibles dans notre organisation sociale, d'après l'état actuel des lumières, et pour l'intérêt même du gouvernement; enfin, le droit des officiers de ne point dépendre de l'arbitraire et de ne pouvoir être destitués que par jugement, ou d'après un rapport, rendu public et motivé, du ministre de la guerre au chef de l'état.

IX. Des noms de France et de République qu'on a parlé de supprimer.

La nation et l'armée tiennent à ces beaux

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noms de France et de République, consacrés par vos glorieuses victoires et par cinq années de votre administration. Les mots ont une grande influence sur les opinions des hommes: l'Empire françois ne doit point renoncer au nom que l'Europe s'est habituée à respecter; la Nation ne le perdroit qu'avec peine.

Le nom de République (1), synonyme des mots, chose publique ou intérêt public, a toujours été appliqué, dans les temps anciens, à différentes formes de gouvernement, et même à la royauté. Ce mot seul, principe d'esprit public et d'orgueil national, semble rappeler au peuple qu'il n'est pas étranger aux intérêts généraux de l'état. Le gouvernement y trouve un ressort puissant, un moyen d'exciter le patriotisme qui produit les grandes actions.

X. Mot du premier Consul sur l'empire de la persuasion et de la modération, préférable à celui de la violence et de la force.

Général premier Consul, vous pouvez tout faire, tout obtenir, je le répète; mais, ce que

(1) RÉPUBLIQUE, mot usé, comme la chose, chez_ les François. Y a-t-il en France de l'esprit public?....

vous ferez, ce que vous obtiendrez par l'opinion publique, sera durable; ce qui seroit fait et accordé sans son vœu, ou contre son vœu, ne seroit qu'éphémère.

Vous l'avez dit vous-même : « La force est toujours force; l'enthousiasme n'est qu'enthousiasme; mais la persuasion reste et se grave dans les cœurs. »

XI. Que l'acte qui doit proclamer Bonaparte EMPEREUR, doit en même temps consacrer les principaux droits de la nation et les bases de l'organisation nouvelle du gou

vernement.

Le jour où vous serez proclamé Empereur, doit être celui où vous vous démettrez volontairement et généreusement de la dictature, pour prendre les rênes d'un gouvernement libre, dont toutes les parties, bien coordonnées entre elles, se balancent et se prêtent un mutuel appui.

L'acte de votre nouvelle installation sera d'autant plus agréable à la France et honorable pour vous, qu'il comprendra en même temps les bases d'une CHARTE CONSTITUTION

NELLE (1), garantie des destinées publiques. Cette charte devra consacrer à la fois vos droits à la puissance et les droits et les libertés du peuple; l'hérédité dans votre famille; l'organisation indépendante des autorités nationales et les attributions de chacune d'elles ; l'inviolabilité personnelle du chef de l'état et la responsabilité réelle et sévère de ses ministres et des agens du gouvernement; l'éclat et la dignité qui appartiennent au rang suprême dans un grand empire; la participation du pouvoir exécutif à la formation de la loi, directe et nécessaire, mais non pas absolue et exclusive; la force, l'énergie et la rapidité de l'action exé- cutrice, et en même temps le droit conservé à la nation de voter les impôts et les levées de soldats (2) par ses représentans; Ja liberté civile protégée et garantie; les propriétés particulières mises à l'abri de toute atteinte; la liberté de la presse (3) modifiée par les lois,

(1) Le mot seul de charte constitutionnelle effraie un souverain, qui n'est pas assez fort de la pureté de ses intentions pour vouloir étre le père du peuple.

(2) Bride à la puissance qui voudroit se rendre indépendante de la nation et absolue.

(5) Point difficile à obtenir.

mais capable de laisser un certain ressort à l'opinion.

XII. Du caractère essentiel de toute convention.

Vous donnerez ces bienfaits à la France, Général premier Consul; en les donnant, vous travaillerez pour vous-même, pour votre sécurité, pour la stabilité de votre puissance, pour votre gloire.

Toute convention, pour être solide et durable, doit être basée sur des intérêts réciproques. Vous concilierez, vous associerez ceux de la Nation et les vôtres; vous acquerrez des titres indestructibles et sácrés à la vénération des François.

XIII. Des états-généraux institués par Charlemagne (1).

L'immortel Charlemagne, dont le nom est souvent rapproché du vôtre, institua les étatsgénéraux. Il fit adopter ce principe : « qu'on ne pourroit imposer ni lever tailles en France sur le peuple, si urgente nécessité ou évidente

(1) Motif de Charlemagne, non dans la générosité, mais pour arrêter les déprédations des seigneurs qui ruinoient le peuple.

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