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principautés de Parme et de Plaisance, et ce même royaume d'Étrurie, fondé récemment par le gouvernement françois, maintenant anéanti par un simple acte de la volonté de l'empereur Napoléon. Et l'Autriche apprit, par un rapport solennel fait en plein sénat, « que d'après l'intention de l'empereur Napoléon, toute la côte de la Méditerranée et de l'Adriatique, devoit faire partie, ou du territoire françois, ou bien de celui du grand empire. »

A la vue de tant d'envahissemens, il auroit fallu s'aveugler d'une manière bien étrange, pour compter encore sur la stabilité de la paix. Quelque soin que la cour de Vienne mit à la conserver, elle pouvoit d'un moment à l'autre se trouver dans la nécessité de défendre son indépendance, soit contre des prétentions entièrement inadmissibles, soit même contre une agression directe. L'approche d'une telle crise devenoit chaque jour plus sensible; et s'il existoit encore un moyen pour l'éloigner, il ne pouvoit être que dans un établissement militaire assez imposant, pour du moins affoiblir l'espérance qu'on auroit pu concevoir de subjuguer l'Autriche sans résistance. C'est dans cette vue seule et sans aucun autre motif, que l'Empereur adopta les mesures qui lui présentoient des

moyens plus étendus pour compléter et recruter son armée. Le patriotisme éclairé de ses sujets facilita ces mesures, et en assura le succès. La conviction, que Sa Majesté ne cherchoit qu'une garantie suffisante de son repos, que rien n'étoit plus étranger à ses sentimens qu'une inquiétude turbulente et guerrière, et qu'il ne falloit rien moins qu'une urgente nécessité pour l'engager à demander de nouveaux efforts à ses sujets, cette conviction s'étoit emparée de tous les esprits ; et les intentions paternelles de l'Empereur se réalisèrent partout avec une confiance également honorable pour les peuples et pour le gouvernement.

A moins d'avoir pris d'avance le parti de refuser à l'Autriche le droit de pourvoir à sa propre conservation, aucune puissance étrangère ne pouvoit se tromper sur le véritable caractère de ces mesures. Elles se renfermoient dans les strictes bornes d'un système purement défensif; elles ne se rapportoient qu'à l'organisation des moyens absolument indispensables pour maintenir et perfectionner ce système; et des opérations tout-à-fait semblables, et même bien plus étendues ayant eu lieu, nonseulement en France, mais dans d'autres pays plus rapprochés, on ne pouvait raisonnable

ment s'attendre, que les précautions prises par l'Empereur réveillassent la jalousie d'aucun autre gouvernement. La monarchie étoit entourée de troupes étrangères, établies sur un pied de guerre permanent, et prêtes à marcher au premier avis; les siennes étoient restées sur le pied de paix, dispersées dans leurs garnisons habituelles, et sans aucun point de rassemblement. Il étoit impossible d'exiger d'une grande puissance une attitude moins propre à alarmer ses voisins, moins faite pour leur donner ombrage.

De la part même du cabinet des Tuileries aucune plainte ne sembloit devoir s'élever, Sa Majesté n'ayant pas manqué une seule occasion de manifester à son égard son attachement invariable aux principes pacifiques, dont elle avoit fait la base de sa conduite. Tandis que pour éviter toute discussion désagréable, elle avoit gardé le silence sur une quantité de griefs essentiels; tandis qu'en vertu d'un ordre arbitraire, plus de quatre-vingts bâtimens autrichiens avoient été saisis par des armateurs françois et conduits à Ancône, où la plus grande partie en avoit été vendue, procédé qui ne paroissoit pas d'un bien favorable pour augure la liberté des mers, la cour de Vienne étoit

continuellement occupée à se défendre, et à défendre ses employés contre les accusations chimériques ou controuvées, que la fougue ou la malveillance des agens françois ne cessoit de mettre en avant, principalement du côté de Trieste. Aucune de ces accusations n'a jamais été prouvée; toutes, au contraire, l'une après l'autre, ont été victorieusement réfutées. Cependant l'Empereur ne s'en tint pas là. Il voulut tarir la source de ces chicanes perpétuelles; il voulut donner en même temps une preuve de prévenance et de bonne volonté telle, qu'elle ne pût laisser aucun doute sur la sincérité de ses intentions; et sans se dissimuler l'effet désastreux que cette mesure devoit produire sur les derniers débris du commerce de ses provinces maritimes, il résolut, de son propre mouvement, d'exclure encore de ses ports le pavillon des États-Unis de l'Amérique, qui jusque-là avoit continué d'y être admis.

Mais rien désormais ne pouvoit engager le gouvernement françois à envisager la conduite de Sa Majesté sous un point de vue plus équitable. Les mesures qu'elle n'avoit prises que pour garantir la sûreté de ses états, dans le cas où cette sûreté viendroit à être directement compromise par le danger dont elle étoit

sans cesse menacée, furent regardées par l'empereur Napoléon comme autant de tentatives punissables, pour se soustraire à l'arrêt prononcé depuis long-temps sur le sort de la monarchie autrichienne. On qualifia ces mesures de mouvemens hostiles contre la France. Les efforts des ministres de Sa Majesté, pour mettre la chose dans son vrai jour, furent constamment inutiles. On n'admit aucune de leurs explications. Enfin, par une note du 30 juillet 1808, le cabinet des Tuileries fit connoître : « que la guerre étoit inévitable, si le mouve«ment imprimé à la monarchie autrichienne, « n'étoit pas arrêté par un mouvement tout « contraire. » Paroles d'autant plus remarquables, que dans la même note où elles étoient consignées, on annonçoit avec éclat : « que les « armées françoises en Allemagne et en Italie « étoient doubles de ce qu'elles avoient été en « 1805, sans compter les troupes de la confé« dération.» Dès ce moment, la déclaration de guerre étoit prononcée. Le langage tenu dans cette note n'a jamais été rétracté. A Paris, à Baïonne, à Erfurt, partout il est resté le même. Si des évènemens, étrangers à l'Autriche, ont depuis occupé les armées françoises sur d'autres points et ont fait différer les hosti

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