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sailles, auxquels les décrets de Berlin et de Milan la forçoient d'avoir recours, à réconcilier les états neutres avec ces mesures, que la conduite de l'ennemi avoit rendues inévitables, et que S. M. a déclaré dans tous les temps être prête à révoquer aussitôt que les décrets de l'ennemi, qui l'avoient forcée d'y avoir recours, auroient été révoqués formellement et sans conditions, et que le commerce des nations neutres auroit été rendu à son cours accoutumé. A une époque subséquente de la guerre, S. M. ayant égard à la situation où se trouvoit alors l'Europe, sans toutefois abandonner le principe et l'objet des ordres du conseil du mois de novembre 1807, voulut bien limiter leur effet de manière à adoucir très-sensiblement les restrictions qu'ils imposoient au commerce neutre. L'ordre du conseil, du mois d'avril 1809, fut substitué à ceux du mois de novembre 1807; et le système de représailles de la Grande-Bretagne ne frappa plus indistinctement sur tous les pays où étoient en vigueur les mesures d'agression adoptées par l'ennemi ; mais son effet fut limité à la France i; et aux pays sur lesquels pesoit le plus strictement le joug de la France, et qui ainsi étoient

devenus naturellement partie intégrante des possessions de la France. Les États-Unis d'Amérique continuèrent néanmoins à être mécontens, et leur mécontentement a été depuis grandement accru par un artifice, qui a été employé malheureusement avec trop de succès par l'ennemi, lequel a prétendu que les décrets de Berlin et de Milan étoient révoqués, quoique le décret portant une semblable révocation n'ait jamais été promulgué, quoique la notification de cette prétendue révocation eût énoncé distinctement qu'elle étoit dépendante de conditions auxquelles l'ennemi savoit bien que la Grande-Bretagne n'acquiesceroit jamais, et quoique de nombreux exemples aient depuis prouvé que ces décrets continuoient d'être en vigueur.

Mais l'ennemi, à la fin, a mis de côté toute dissimulation; il déclare aujourd'hui publiquement et solennellement, que non-seulement ces décrets continuent encore à être en vigueur, mais qu'ils seront rigoureusement exécutés, jusqu'à ce que la Grande-Bretagne ait acquiescé à de nouvelles conditions également extravagantes, et il annonce de plus, que les peines portées par ces décrets auront leur plein

effet contre toutes les nations qui souffriroient que leur pavillon fût, suivant l'expression de ce nouveau code, dénationalisé.

Outre la cessation du blocus de mai 1806, et le désaveu des principes sur lequel ce blocus a été établi, et outre la révocation des ordres du conseil, il demande qu'on reconnoisse comme principe, que les marchandises d'un ennemi, transportées sous pavillon neutre soient traitées comme marchandises neutres ; que les propriétés des neutres, sous pavillon ennemi, soient traitées comme appartenant à des ennemis; qu'il n'y ait que les armes et munitions de guerre (à l'exception toutefois des bois de construction pour la marine et d'autres objets d'équipement pour les vaisseaux), qui soient regardées comme contrebande de guerre; et qu'on ne puisse regarder comme légitimement bloqués, que les ports qui sont investis et assiégés, en prévention d'être pris, et dans lesquels un bâtiment marchand ne pourroit entrer sans danger.

l'en

Par ces demandes et d'autres encore, nemi, dans le fait, veut que la Grande-Bretagne et toutes les nations civilisées renoncent, selon son bon plaisir, aux droits naturels et incontestables que donne la guerre maritime,

que la Grande-Bretagne, en particulier, abandonnant tous les avantages que lui donne sa supériorité navale, laisse les marchandises ainsi que les produits et objets manufacturés, de la France et de ses alliés, traverser tranquillement l'Océan, tandis que les sujets de la Grande-Bretagne seroient positivement exclus de toute relation commerciale avec les autres nations, et tandis que tous les pays du monde où s'étendent les armes et l'influence de l'ennemi, seroient fermés aux produits du sol et des manufactures des royaumes-unis.

Telles sont les conditions auxquelles le gouvernement anglois est sommé de se soumettre, en abandonnant ses droits maritimes les plus anciens, les plus importans, les plus incontestables. Tel est le code par lequel la France espère, sous l'abri du pavillon neutre, de mettre son commerce hors de toute atteinte par mer, en ne négligeant rien d'ailleurs pour envahir et réunir à son territoire tous les états qui hésitent à sacrifier leur intérêt à ses ordres, et à adopter, par l'abandon de leurs droits les plus légitimes, un code, par suite duquel on leur demande, en présentant ses principes comme des règlemens municipaux, d'exclure de leur territoire tout ce qui est anglois.

Le prétexte sur lequel on établit ces prétentions insensées, c'est que plusieurs de ces principes ont été, d'un commun accord, consacrés par le traité d'Utrecht; comme si un traité qui a été conclu entre deux nations particulières, d'après des considérations spéciales et réciproques, qui ne lioit que les parties contractantes, et dont les principes, dans le dernier traité de paix entre les mémes puissances, n'ont point été renouvelés, devoit être regardé comme un acte de déclaration du droit des gens.

Il seroit inutile que S. A. R. s'appliquât à démontrer l'injustice de semblables prétentions; elle n'auroit besoin que d'en appeler à la conduite même de la France dans cette guerre, ainsi que dans les précédentes, et au code maritime qu'elle a elle-même établi; il suffit que ces nouvelles demandes de l'ennemi s'éloignent considérablement des conditions auxquelles la révocation prétendue des décrets françois a été acceptée par l'Amérique, et d'après lesquelles l'Amérique, regardant sans fondement cette révocation comme complète, a demandé la révocation des ordres du conseil.

S. A. R., en examinant toutes ces circonstances, est persuadée que, dès que cette déclaration formelle du gouvernement françois, par laquelle il persiste purement et simplement

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