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la plume d'un Tacite ou d'un Robertson.

XV. ANGLETERRE. C'est l'Angleterre, il faut l'avouer, qui a été le boulevard et la conservatrice de la civilisation européenne. Elle doit cet avantage à la sagesse de sa constitution, à la force de son esprit public, à l'énergie de son gouvernement et de la nation. Il importe à son honneur, à sa liberté, à son existence politique, de conserver ce noble caractère. L'Angleterre jugera digne d'elle dé donner l'exemple de la modération aux puissances du continent. Elle doit être assez généreuse pour restituer une partie de leurs colonies à la Hollande, à l'Espagne, et même à la France. Une répartition proportionnelle et bien combinée des possessions coloniales entre les principales puissances de l'Europe, suivant leur influence commerciale respective, formeroit le sujet d'un vaste et utile travail, pour lequel l'auteur du présent mémoire n'a point les lumières ni les renseignemens nécessaires.

Il seroit également digne de l'Angleterre et des souverains de l'Europe de mettre à exécution le projet réparateur de la population et des finances, d'opérer une réduction proportionnelle convenue dans l'état militaire des diffé6

TOME IX.

rentes puissances du continent, véritable et nécessaire garantie de la paix.

On terminera ces considérations sur la situation et les intérêts de l'Europe par une vérité générale, adressée surtout à l'Angleterre, qui est assez éclairée pour l'apprécier, assez magnanime pour en faire l'application.

Une puissance du premier ordre, qui, par la nature des choses, est appelée à exercer une grande influence, rendra cette influence d'autant plus honorable et solide, qu'elle la fera aimer par la modération, par le désintéressement, par la sagesse. En politique, comme en morale, le mal ou le bien qu'on fait rejaillit sur son auteur. Une nation qui fera servir sa puissance au bonheur de toutes, prendra le système de conduite le plus propre à la rendre elle-même heureuse et florissante.

QUELQUES FRAGMENS

EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE POLITIQUE

DE BUONAPARTE,

OU

MÉMOIRES

SUR LES INTÉRÊTS POLITIQUES DE L'ITALIE ET SUR CEUX DE LA FRANCE,

Remis, à deux époques importantes, au premier consul Buonaparte, et destinés à prévenir d'immenses malheurs, si les vérités qu'ils renferment, et qui leur donnent un caractère prophétique, n'eussent pas été méconnues et repoussées.

« Tuer un homme, c'est détruire une créature raisonnable; mais, étouffer un bon écrit, c'est tuer la raison elle-même. Beaucoup d'hommes n'ont qu'une vie purement végétative, et pèsent inutilement sur la terre ; mais un écrit (inspiré par l'amour de la patrie et de l'humanité), est l'essence pure et précieuse du sentiment et de la pensée.

......

« ...... La perte de la vie, quoiqu'irréparable, peut quelquefois n'être pas un grand mal; mais, il est possible qu'une vérité qu'on aura rejetée ne se reproduise plus dans la suite des temps (ou que son apparition soit trop tardive), et que sa perte (ou le retard de sa publication) entraîne le malheur des peuples.

<«< L'intelligence et la vérité ne sont pas des denrées propres au monopole, ni dont on doive soumettre le commerce à des règlemens particuliers......

<< Otez-moi toutes les autres libertés; mais laissezmoi celle de parler et d'écrire selon ma conscience..... La liberté de publier ses pensées est la sauve-garile et le phare des gouvernemens........ La servitude intellectuelle entraîne l'oppression du peuple, nécessairement suivie de l'esclavage et de la chute du prince. »

(MILTON. Discours prononcé devant le parlement d'Angleterre, en faveur de la liberté de la presse, illimitée et sans aucune censure.)

AVERTISSEMENT

DE

L'ÉDITEUR.

L'ÉDITEUR, entre les mains duquel se trouvent les mémoires manuscrits qu'on imprime aujourd'hui, sans se permettre d'y faire aucune espèce de retranchement, ni de changement de rédaction, croit utile, en les publiant, d'augmenter le nombre des mémoires des temps. actuels qui fourniront des matériaux à l'histoire. Cette publication fera d'ailleurs connoître que si Buonaparte a entretenu, consulté, accueilli, payé des conseillers fourbes et traîtres, qui poussent aujourd'hui l'impudence et l'infamie jusqu'à se faire publiquement un honteux honneur de s'être insinués dans sa confiance intime, et de lui avoir donné des avis perfides pour le perdre, il s'est aussi trouvé des François purs, nobles, généreux, qui lui ont dit la vérité avec courage, aux dépens même de leur avancement, de leur fortune, et quelquefois de leur tranquillité et de leur sûreté, dans la seule vue de servir leur patrie, et de prévenir

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