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riale du côté de la haute mer. La manifestation la plus évidente de l'imperium consiste dans le tir d'une pièce de canon placée sur le rivage. Où tombera le projectile, là finira l'imperium: suivant l'adage: Terræ imperium finitur ubi finitur armorum vis. Autrefois l'on fixait cette limite à 3 milles. anglais au plus ou 1 mille géographique à partir de la laisse de basse mer'. Mais la portée pratique de cette souveraineté sur la mer voisine des côtes s'est notablement accrue depuis l'invention des canons à longue portée. La limite de la mer territoriale serait fixée d'après la portée des canons actuels à 15 ou même 18 kilomètres.

III. La mer étant libre et chaque Etat indépendant, la navigation et le commerce sont libres. Tout Etat peut construire des navires, les lancer, les équiper, en constituer des flottes, les envoyer à travers les Océans, sans que l'Etat voisin ait le droit de s'y opposer. Voilà pour la liberté de la navigation. La liberté du commerce repose sur des bases un peu plus compliquées.

Tout acte de commerce suppose la conclusion d'un contrat il y a l'offre, la demande, l'accord entre l'offre et la demande. Sans demande, l'offre est stérile, et réciproquement. Il est impossible de forcer un Etat à acheter ce qu'on lui offre; on ne peut le forcer à vendre ses produits. Il est libre de vendre ou de conserver ce qu'il possède; il peut nouer des relations commerciales avec tel ou tel Etat, et refuser d'en nouer avec un autre. Un Etat ne peut être empêché par un autre Etat de nouer des rela

1. Art. 1. Traité du 28 octobre 1818 (Angleterre, Etats-Unis). - Art. 9 et 10. Traité du 2 août 1839 (France, Angleterre).

tions commerciales avec un troisième. Tous les Etats maritimes empruntent cette grande voie maritime, la mer, pour le commerce. La mer étant libre, le commerce étant libre, le commerce maritime ne peut recevoir aucune entrave, ou du moins ne peut recevoir que celles qui dérivent de l'indépendance même des Etats.

Néanmoins

on considère aujourd'hui comme une atteinte au droit naturel de l'humanité le fait qu'un Etat s'isole absolument ou défende à ses ressortissants d'entretenir des rapports avec l'étranger. Jadis on eut envisagé cette façon de procéder comme la conséquence toute naturelle de la souveraineté et de l'indépendance des Etats. On reconnait aujourd'hui à toutes les nations le droit d'entretenir des relations entre elles; on veut que ces relations soient facilitées, protégées, afin que l'humanité produise mieux et plus, afin que les destinées du genre humain puissent être réalisées'.

1. Bluntschli. Op. cit. Introduction.

-- JOE

CHAPITRE III

DE LA NEUTRALITÉ

Effets de la guerre.

Nations pacifiques.

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tralité. Devoirs d'un Etat neutre. Devoirs des ressortissants de l'Etat neutre. Droits de l'Etat neutre. La neutralité doit être effective. Définition de la neutralité.

Malheureusement les manifestations pacifiques de l'activité humaine sont trop souvent entravées par les dissensions des peuples. Maintes fois la guerre est venue arrêter l'humanité dans sa marche vers l'idéal de droit et de justice que l'on voit briller pour elle dans l'avenir.

La guerre déchaîne promptement toutes les passions barbares et anéantit les progrès de maintes années de civilisation I.

Alors se font jour les prétentions inassouvies; alors les égoïsmes contenus pendant la paix se ma nifestent sans pudeur; alors les Puissances qui ont à leur disposition la force et l'argent, l'ambition et la haine, ne reculent devant aucune considération pour soumettre à leurs caprices les puissances moins fortes qu'elles; alors, enfin, les vrais principes du Droit, que l'on croyait reconnus, éternels, sombrent

1. M. Kasson. Exposé lu le 10 décembre à la Contérence de Berlin.

à leur tour: heureux encore s'ils peuvent surnager après la tourmente.

Si encore dans ces conflits les nations aux prises étaient seules en cause! Si les nations sages, désirant la paix et la cultivant, n'étaient pas entraînées à des soumissions étranges vis-à-vis des belligérants! Il n'en est rien. Ceux-ci, jaloux de la tranquillité dont jouiraient les nations pacifiques, s'évertuent à leur créer des ennuis, et s'arrogent, en s'appuyant sur les prétendus devoirs des Neutres, le droit de les molester.

Qu'est-ce donc alors que la Neutralité ? Est-ce un vain mot? une fable avec laquelle on endort les Puissances les plus faibles?

Il est entendu, disait, le 23 février 1885, M. le baron de Courcel à la Conférence de Berlin, que le mot de neutralité, employé à l'article X, est pris dans son sens propre et technique, c'est-à-dire qu'il qualifie la situation légale d'un tiers qui s'abstient de prendre part à la lutte de deux ou plusieurs parties belligérantes. Pour qu'on parle de neutres, il faut qu'il y ait des belligérants, et il n'y a pas de neutralité en temps de paix, ni entre deux parties envisagées seulement au point de vue de leurs rapports mutuels.

La Neutralité consiste donc pour un Etat à ne point participer à la lutte engagée entre d'autres puissances, à maintenir la paix sur son territoire ; à localiser la guerre et à sauvegarder autant que possible pendant la guerre les intérêts de la paix. « Les Etats neutres entourent le théâtre de la guerre d'un cercle de territoires où règne la paix. A leurs frontières vient s'éteindre l'incendie'. » Ces Etats ne renoncent pas pour cela à leur droit de faire la guerre, mais tant qu'ils restent neutres ils s'abstiennent de toute participation à celle-ci.

1 Bluntschli. Op. cit.

«La neutralité, suivant Hübner, consiste dans une inaction absolue relativement à la guerre, et dans une impartialité exacte et parfaite, manifestée par des faits à l'égard des belligérants, autant que cette impartialité a rapport à la guerre et aux moyens directs et immédiats de la faire. »

«La neutralité la plus rigoureuse, ajoute-t-il, ailleurs, ne nous empêche pas d'entretenir un commerce plus grand avec une partie belligérante qu'avec l'autre, suivant que nos propres affaires l'exigent, que nous mettons plus de confiance dans l'une que dans l'autre1. »

"Dans tout ce qui ne concerne pas la guerre, le neutre ne refusera pas à l'une des parties, à raison de sa querelle présente, ce qu'il accorde à l'autre, ce qui n'empêche pas la liberté de commerce plutôt avec l'une qu'avec l'autre. Il use de son droit; il n'y a pas de partialité, à moins que le refus ne soit fait à l'une à cause de la guerre et pour favoriser

l'autre2. »

Ainsi, d'après Hübner et Vattel, la guerre ne modifierait pas la position de l'Etat neutre; elle le laisserait en possession de sa liberté et de son indépendance, mais produirait sur lui des effets indirects, lui imposerait de nouveaux devoirs en limitant quelques-uns de ses droits. Ces nouveaux devoirs. se résumeraient ainsi : 1o abstention I abstention absolue de toute immixtion aux actes directs ou indirects d'hostilité; 2o impartialité complète envers les deux parties dans toutes les relations n'ayant pas de rapport avec les hostilités.

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