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n'est pas compatible avec la liberté de la circulation sur la pleine mer1. »

Comme on le verra plus tard, une autre et grande différence existe entre les navires de guerre et les navires de commerce. Ceux-ci, en temps de guerre, sont soumis à la visite; ceux-là tirent un coup de canon et affirment leur pavillon; pratiquée sur eux la visite serait un outrage.

Comme les ambassadeurs, les navires de guerre jouissent de l'extraterritorialité. Elle est sans doute moins complète; cependant elle est incontestée. M. Pierantoni la définissait ainsi (Séance du 1er mai, Conférence Internationale du Canal de Suez):

C'est, disait-il, un droit incontestablement acquis aux Etats de faire séjourner leurs bâtiments de guerre dans les eaux territoriales étrangères. Ce droit est certain. Mais par ce fait que le principe d'extraterritorialité couvre les navires de guerre aussitôt leur arrivée dans les eaux juridictionnelles d'une Puissance étrangère (ports, rades, havres et mers territoriales) deux souverainetés se trouvent en présence. En prévision d'éventualités menaçantes, et par droit de conservation et d'indépendance, un Gouvernement peut être amené, s'il a des motifs sérieux pour le faire, à défendre l'accès de ses ports aux bâtiments de guerre étrangers; en ce cas, l'usage pacifique des eaux territoriales, qui est la règle ordinaire, se trouve être interrompu, mais l'Etat qui somme un navire de guerre étranger de quitter ses eaux assume, dès lors, la responsabilité qui résulte de tout acte dont le caractère n'est pas défensif.

Les navires de guerre et les navires de transport, soit appartenant à l'Etat, soit affrétés par lui pour le transport des troupes et du matériel, et, dans ces conditions, faisant partie des forces de l'Etat, commandés par des Officiers de l'armée de mer ou commissionnés, se reconnaissent à une flamme arborée. au grand mat, indépendamment du Pavillon national arboré à la poupe.

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Les navires de commerce, comme on l'a déjà dit, ne peuvent être assimilés à une portion du territoire de l'Etat auquel ils appartiennent. « Ils ne forment point partie du territoire neutre, dit Wheaton, et quand ils sont dans les mers territoriales d'un autre Etat, ils ne sont point exempts de la juridiction locale. La portion de l'Océan temporairement occupée par eux ne forme pas une portion du territoire neutre et le vaisseau lui-même, qui est un objet mobilier, propriété d'individus privés, ne forme pas partie du territoire de la puissance aux sujets de laquelle il appartient. La juridiction que cette puissance peut légalement exercer sur le vaisseau en pleine mer est une juridiction sur les personnes et les propriétés de ses citoyens. Ce n'est pas une juridiction territoriale'. »

Chaque Etat confère sa nationalité aux différents navires de commerce d'après ses lois particulières, et par cela même leur donne le droit d'arborer son pavillon et de compter sur sa protection, et leur impose le devoir de se soumettre à ses prescriptions.

La nationalité d'un navire de commerce, outre le pavillon, est établie par des papiers de bord, papiers authentiques, dont la forme et le contenu peuvent varier d'Etat à Etat, mais établissant sa nationalité, sa provenance, sa destination, la nature et la destination de la cargaison, le rôle de l'équipage.

Les papiers de bord sont généralement les sui

vants :

A. Le signalement du navire, servant à établir son identité ;

B.

Son passeport, ou patente de navigation (acte

1. Wheaton

Elements of international law.

de francisation), acte autorisant le navire à porter le pavillon national;

c.

L'acte de propriété du navire;

D. Le rôle de l'équipage, où sont portés les noms et les différentes nationalités des matelots. La loi française et la loi anglaise (29 juin 1849) exigent que le capitaine et les trois quarts de l'équipage soient citoyens de l'Etat dont le navire porte le pavillon; celle des Etats-Unis n'exige que les deux tiers; celle de Russie, un quart; la loi allemande ne met qu'une condition, c'est que le propriétaire du navire soit citoyen de l'Empire ;

E. Le connaissement ou contrat de transport entre l'armateur et le capitaine; c'est une déclaration contenant un état des marchandises chargées sur le navire, les noms de ceux auxquels elles appartiennent, l'indication des lieux où on les transporte, et le prix du fret. Tous les connaissements sont signés par le capitaine et les chargeurs 1.

Le capitaine est tenu de produire ces papiers chaque fois qu'il en est légitimement requis. En pleine mer, et en temps de paix, cette éventualité ne peut se produire, car aucun Etat n'a le droit d'y arrêter les navires de commerce d'un autre Etat et de les faire visiter par ses officiers.

En temps de paix les navires de commerce n'ont aucun ordre à recevoir des vaisseaux de guerre ou croiseurs étrangers. Le Pavillon couvre le navire.

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CHAPITRE V

QUESTIONS QUE SOULÈVE LA GUERRE MARITIME

Situation des navires de commerce des Etats neutres. Des navires

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Capture; Visite; Blocus;

Aussitôt qu'une guerre est déclarée entre des puissances maritimes, les principes précédemment établis de la liberté de la mer, de l'indépendance des Etats, de la liberté du commerce et de la navigation, subissent malheureusement des transformations si graves que l'on se demande si notre époque est, malgré les progrès accomplis, bien digne du titre de libérale qu'on lui accorde couramment. Certainement nous sommes loin de la barbarie qui marqua les dernières années du siècle dernier et les premières de celui-ci. Mais les principes sont méconnus quoique reconnus, et nous n'osons pas espérer que notre voix sera particulièrement écoutée.

La mer n'est plus libre, car, sans parler des rencontres entre bâtiments de guerre belligérants, les navires de commerce de toutes les nations peuvent être arrêtés et visités par les navires de guerre et les croiseurs des puissances belligérantes;

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