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dix ou douze personnes ont de cet empêchemeat n'empêche pas que le grand vicaire ne puisse dispenser, parce que, puisqu'ils passent dans le public pour mari et femme, qu'on ne peut les séparer sans scandale et sans danger pour Mævia, et qu'ils sont pauvres, il n'y a pas d'apparence que le saintsiége ait voulu se réserver leur dispense dans des conjonctures si pressantes.

-Ces raisons prouvent bien qu'on ne peut refuser la dispense à Procule et Bibiène; mais elles ne prouvent pas que le grand vicaire la puisse accorder dans un cas assaz notoire, à moins que dans l'intervalle nécessaire pour l'obtenir de Rome, les parties qui ne pourraient peut-être avoir de prétexte pour se séparer d'habitation, ne soient in gravi periculo incontinentiæ, et que personne ne veuille leur faire la trèspetite aumône dont ils auraient besoin pour écrire et pour avoir une réponse.

CAS XL. Artémidore, official, ayant fulminé une dispense donnée par le pape, s'est laxé un écu pour son salaire. Le promoteur s'est fait aussi payer deux livres. Néanmoins le rescrit défendait à l'official, sous peine d'ex communication, ipso facto, de recevoir des impétrants, quodcumque munus aut præmium, etiam sponte oblatum; et le pape y déclarait en outre qu'en cas du contraire, la dispense serait nulle ipso facto. Voici les propres termes de ce rescrit: Mandamus quatenus deposita per te omni spe cujuscumque muneris aut præmii, etiam sponte oblati a quo te omnino abstinere debere monemus... Volumus autem quod si, spreta monitione nostra, ejusmodi aliquid muneris aut præmii occasione dicte dispensationis exigere aut oblatum recipere temere præsumpser is, excommunicationis latæ sententiæ pœnam incurras. Que doit-on juger de cette dispense? est-elle devenue nulle à cause que l'official et les autres officiers se sont fait payer la somme mentionnée dans l'exposé; et l'official a-t-il encouru l'excommunication ?

R. Si l'official a des gages, comme il en doit avoir, suivant les canons, il ne peut rien exiger pour son salaire, et c'est le cas de la défense que le pape lui fait de rien recevoir; mais s'il n'a point de gages établis sur les revenus de l'évêché, comme il serait juste qu'il en eût suivant la glose, il peut recevoir la récompense due à son travail, conformément aux lois et à la coutume, sans qu'il encoure pour cela aucune excommunication, ni que la dispense devienne nulle par cette raison, parce que ces sortes de clauses se doivent toujours entendre salvo jure naturali et divino positivo. Or, le droit naturel et le droit divin positif veulent que ceux qui travaillent reçoivent le juste salaire qui leur est dû. Dignus est operarius mercede sua, dit l'Evangile. C'est pourquoi ces clauses ne se doivent pas entendre de ce qu'on appelle stipendium laboris ou merces, c'est-à-dire d'un salaire légitimement dủ, qu'on ne peut appeler, en parlant exactement, munus ou præmium, quoi qu'en dise Navarre contre l'opinion commune; munus

ne signifiant autre chose qu'un présent pu rement gratuit, et præmium ayant souvent le même sens et quelquefois une signification odieuse chez quelques anciens auteurs, tels que sont Tibulle et Properce, qui le prennent pour ce qu'on appelle proie et butin. On doit donc entendre seulement par l'un et l'autre de ces mots ce qui excède un juste salaire, comme si un official, à qui il n'est légitimement dû qu'un écu, exigeait une pistole; auquel cas on avoue qu'il encourrait l'excommunication, et que la dispense deviendrait nulle par cette exaction.

A l'égard du promoteur et du greffier, ces sortes de clauses ne les regardent point; de sorte que, quand même ils exigeraient plus qu'il ne leur est dû, ils n'encourraient aucune peine, et la dispense ne laisserait pas d'être valide, puisqu'ils ne sont pas dénommés dans le rescrit qui ne parle que du seul official. Voyez Sainte-Be..ve, tom. I, cas. LXVI, Ducasse, part. 11, ch. 4, sect. 5, n. 4.

CAS XLI. Pépin, cousin issu de germain et tuleur de Gertrude, ayant abusé de cette fille, a demandé à Rome, par le conseil de son confesseur, la dispense nécessaire pour l'épouser; mais il s'est trouvé, par la lecture du rescrit, que le saint-père permet à Pépin d'épouser Gertrude, sans qu'il y soit fait mention de dispense de l'empêchement qui est entr'eux; d'ailleurs Pépin a omis d'exprimer sa qualité de tuteur. On demande: 1° si le confesseur de Pépin a pu sans péché lui conseiller de solliciter une dispense pour épouser sa parente; 2° si ce rescrit n'est point subreptice, à cause que la qualité de tuteur a été omise dans l'exposé; 3° supposé qu'il ne soit point subreplice, si l'ordinaire le peut mettre en exécution, quoiqu'il n'y soit fait aucune mention de dispense.

R. 1o Le confesseur de Pépin n'a pu, sano péché, lui conseiller d'obtenir la dispense dont il s'agit, à moins que les parties n'eussent de justes raisons de la demander; mais s'il a été persuadé par exemple que Gertrude demeurerait infamée si le mariage ne se faisait pas, il a pu donner ce conseil sans aucun péché; 2° l'omission de la qualité de tuteur ne peut produire aucune subreption dans le rescrit, parce qu'aucun canon n'y oblige sous peine de nullité; 3° l'omission de l'empêchement est une faute de clerc qui ne doit pas tirer à conséquence. Ainsi l'évêque peut et doit eutériner la dispense dont il s'agit ici.

DICTIONNAIRE DE CAS DE CONSCIENCE. 1.

CAS XLII. Aubin, ayant obtenu une dispense du pape pour épouser son alliée au quatrième degré, change de volonté et lui déclare qu'il renonce à la dispense. Un an après il change encore de volonté, et veut l'épouser en vertu de ce te dispense. Le peut-il ?

R. Il est vrai qu'on peut renoncer à une grâce: Cum quilibet ad renuntiandum juri suo liberum habeat facultatem, dit Innocent II, c. 9, de crimine falsi; mais cette renonciation, si elle n'est acceptée par le supérieur, ne rend pas la grâce nulle, parce

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que la valeur de la grâce dépend de la volonté du supérieur, et non de la volonté de celui à qui elle est accordée. Aubin peut donc toujours se servir de sa dispense. Il n'en serait pourtant pas ainsi s'il s'agissait d'un vœu ou d'un serment qu'il eût renouvelé.

CAS XLIII. Herculien recherche Antoinette en mariage; a-t-il besoin de la dispense du pape pour un empêchement qui n'est que prohibitif?

-M. P. dit dans ses Prænotata que tout évêque peut dispenser de tous les empêchements qui ne sont que prohibitifs, et il se trompe. Il dit ici qu'il en faut excepter le væeu absolu de chasteté perpétuelle et de religion, et il se trompe encore en faisant entendre qu'il n'y a que ces deux-là à excepter. Il faut y joindre encore les fiançailles, qui forment un empêchement dont le pape même ne put dispenser, puisqu'il ne peut rien au préjudice d'un tiers, quoiqu'il puisse, comme les évêques, spécifier les cas où la promesse ne peut avoir lieu.

CAS XLIV. Céran, voulant se marier promptement, a obtenu la dispense de la publication des trois bans: 1° l'ordinaire a-t-il pu sans péché la lui accorder, quoiqu'il sûl que Céran n'avait aucune raison léitime de la lui demander? 2o quelles sont les causes justes de ces sortes de dispenses?

R. L'ordinaire n'a pu sans péché accorder cette dispense; parce que toute dispense donnée sans cause est un abus cruel de l'auto

rité. Il est fâcheux que cet abus, en matière
de bans, croisse tous les jours. A l'égard des
causes qui peuvent porter l'évêque à dispen-
ser de la proclamation des bans, il y en a six:
J. Lorsqu'il y a sujet de craindre que quel-
ques personnes ne s'opposent au mariage sans
raison et par malice. II. Quand il y a un
soupçon bien fondé que quelqu'un n'exerce
un maléfice à l'égard des contractants. III.
Lorsqu'on demande la dispense dans la vue
d'éviter la dérision, le mépris ou la haine que
les parties seraient obligées de subir, comine
lorsqu'un vieillard épouse une jeune fille; ce
qui est arrivé depuis peu de temps en la per-
sonne de Timothée Blanche, marchand de la
petite ville de Monneur, près celle de Ton-
neins, sur la Garonne, qui, à l'âge de cent
dix-sept ans et trois mois, a épousé, au mois
de janvier 1708, la demoiselle Vigneaux de
Dre ne, âgée seulement de dix-huit ans;
comme quand encore une vieille femme se
marie à un jeune homme, ou lorsqu'un
homme noble ou riche épouse une fille ro-
turière ou pauvre. IV. Quand il s'agit d'é-
viter un scandale, comme lorsqu'il faut réha-
biliter un mariage nul, qui passait publique-
ment pour légitime. V. Lorsqu'on est si pro-
che de l'avent ou du carême qu'on ne peut
ni publier les bans, ni différer le mariage à
un autre temps, sans quelque inconvénient
considérable. VI. Quand on est dans quelque
danger de mort, et qu'on se trouve dans l'o-
bligation d'épouser une personne.
Voyez EMPÊCHEMENTS DE MARIAGE.

DISPENSE DE VOEUX EN GÉNÉRAL.

Le vœu est une promesse faite à Dieu d'une chose qui lui est plus agréable que son contraire. Il y a plusieurs sortes de vœux, savoir: le vœu absolu, qui se fait purement et simplement, sans rien ajouter qui en puisse suspendre l'effet. Le vou conditionnel, qu'on ne fait qu'en y ajoutant quelque terme ou quelque condition capable d'en suspendre l'exécution. Le vœu perpétuel, qu'on fait pour toute sa vie, et le vœu fait pour un temps, qui n'engage que pendant que dure ce temps, et qui cesse aussitôt que ce temps est passé. Il y a encore des vrux, ou personnels, c'est-à-dire qui n'obligent que les personnes seules qui les font, comme de jeûner ou d'entrer en religion; ou réels, qui obligent à faire soi-même, ou à faire faire par un autre une bonne œuvre, comme à donner ou à faire donner une pistole à un pauvre; ou mixtes, parce qu'ils renferment tout à la fois l'un et l'autre. Enfin il y a un vœu solennel qui consiste à faire profession solennelle de religion dans un ordre approuvé, ou à recevoir les ordres sacrés; et un veu simple, qui est celui qu'on fait hors de ces deux cas, quand même on le ferait publiquement et à la vue de tout le monde.

La dispense du vœu est une remise faite par le supérieur légitime de la det!e que celui qui avait fait le vœu avait contractée envers Dieu; la commutation ne remet pas la dette du vou, elle la change en une autre; la condonation est la décharge que fait un tiers de l'obligation qu'on s'était imposée par vœu à son égard; l'irritation est l'acte par lequel un supérieur annule ou suspend le vœu de ceux qui dépendent de lui.

Cela supposé, nous disons qu'il y a des vœux dont le pape seul peut dispenser, parce qu'ils lui sont réservés par le droit ou par la coutume. Tels sont, outre les vœux solennels dont nous avons parlé, ceux d'aller en pèlerinage à Rome, ad limina Apostolorum, à Saint-Jacques en Galice, et à la terre sainte; le vœu de chasteté perpétuelle et celui de religion. Les évêques peuvent par eux-mêmes ou par une commission spéciale dispenser de tous les autres et même de ceux de chasteté perpétuelle, conditionnels ou seulement implicites, pourvu que la condition ne soit pas encore accomplie; et ils peuvent pareillement dispenser de ceux qui ne sont pas certains, mais seulement douteux, soit que le doute regarde le droit ou le fait. Mais il faut bien remarquer que toute dispense de vieux, pour être légitime, doit étre fondée sur une juste cause: Si necessitas urget, dit saint Bernard, excusabilis dispensatio est. Ubi utilitas provocat, dispensatio laudabilis est. Utilitas, dico, communis, non propria: nam, cum nihil horum est, non plane filelis dispensatio, sed crudelis dissipatio et. Afin de ne se pas tromper soi-même en trompant le pape ou l'évêque à qui l'on demande une dispense de vœu, il faut absolument lui exposer dans une exacte vérité le fait et toutes les eir

constances nécessaires qui l'accompagnent: autrement la dispense est obreplice ou subreptice, et l'on ne peut s'en servir sans violer son væu, parce qu'elle est nulle devant Dieu.

CAS I. Sosipatre, touché dans une méditation sur la mort de Notre-Seigneur, a fait vœu d'aller en pèlerinage à Rome aux tombeaux des saints apôtres, et de là à Jérusalem pour visiter les lieux saints; mais, quelque temps après, il s'est trouvé dans une situation qui ne lui permettait pas d'entreprendre ce voyage si pénible; ce qui l'a déterminé à demander dispense de son vou. Est-il nécessaire qu'il s'adresse au pape, ou suffit-il qu'il en demande la dispense à son évêque ?

R. Il y a cinq vœux, dont la dispense est réservée au pape, savoir: le vœu simple de religion, celui de chasteté perpétuelle et ceux de pèlerinage à Jérusalem, à Rome et à SaintJacques en Galice; et selon la coutume trèsprescrite, le vœu de Jérusalem est réservé, quoiqu'il n'ait été fait que par dévotion, et non pas in subsidium terræ sanctæ; mais l'évêque peut dispenser de tous ces vo ux, quand ils n'ont été faits que sous une condition qui n'est pas encore remplie, ou que pour se punir d'une faute, en cas qu'on viut à la commettre.

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Je crois le vœu pénal très-réservé au pape, à moins que l'évêque de celui qui l'a fait ne soit en possession d'en dispenser. Voy. le Traité des Disp., t. II, l. 1, p. 4, c. 2, n. 6.

CAS II. Servais, âgé de 25 ans, après avoir fait vœu de passer trois ans en différents pèlerinages de France et d'Allemagne, se sent appelé à l'ordre des Chartreux. Peut-il y faire profession sans être dispensé de son vœu? Ou peut-il donner mille écus aux pauvres, ou faire quelque autre œuvre de piété plus agréable à Dieu que l'accomplissement de son vou?

R. 1 On ne peut changer en quelque chose de meilleur les vœux réservés au saint-siége; l'usage le veut ainsi, et il ne souffre d'exception que par rapport à l'entrée de la religion, cap. 4, extra de volo, etc. 2° On peut changer proprio motu tout vœu en chose évidemment meilleure par exemple, la récitation. du chapelet en celle du petit office de la Vierge. 3o Dans les autres cas, où l'on pourrait regarder comme meilleur ce qui ne l'est pas, il ne faut rien faire sans l'aveu du supérieur; et il semble même que saint Thomas, 2-2, quæst. 88, art. 12, en fasse une loi gé

nérale.

CAS III. Zénobe ayant su au bout de trois ans que la profession qu'il avait faite dans un ordre réformé était nulle, en a obtenu du pape dispense, sous la clause modo vota non Talificaveris. L'on demande si Zénobe, ayant renouvelé ses veux les deux premières aunées, peut se servir de cette dispense?

R. I le peut, si, lorsqu'il a renouvelé ses vœux, il en ignorait la nullité, parce qu'une ratification fondée sur l'erreur est aussi nulle que la première profession. Ce .serait autre chose s'il avait renouvelé ses vœux avec connaissance de leur première rullité, parce qu'il aurait alors réparé leur défaut primitif.

-Une rénovation faite en particulier n'inJuirait que des voeux simples.

CAS IV et V. Honorine, catholique, fille d'un calviniste d'Edimbourg, a fait vou à l'âge de seize ans de garder toute sa vie la virgi nité. Edouard, aussi catholique, la recherche en mariage. Elle voudrait bien l'épouser, parce qu'elle se sent trop faible pour garder fidèlement son vœu ; mais parce qu'il lui est très-difficile d'avoir recours au pape, Edimhourg étant éloigné de Rome de plus de 500 lieues, et qu'elle ne peut prier son père d'écrire pour elle, à cause de l'aversion que tous les hérétiques ont pour le pape, elle demande si elle peut en ce cas se faire dispenser par un évêque catholique, qui est caché en Ecosse depuis quelques mois.

R. Elle le peut, parce que dans ces impossibilités morales de recourir au pape, les évêques sont en possession de dispenser, selon cette maxime d'A bely et des autres théologiens Casus papalis superveniente impedimento fit episcopalis. Ajoutez que, eu égard au danger où cette fille est de tomber, la réserve au pape serait préjudiciable à son salut, et contre l'intention de l'Eglisè qui n'a établi ces sortes de réserves que pour le bien commun des fidèles. Cette décision est conforme au sentiment de l'auteur des Conférences de Condom, et c'est l'opinion commune des théologiens. Il suit de là qu'une fille pauvre, qui a souvent violé son væu, qui craint encore de retomber,et qui est fort éloignée de Rome, peut obtenir de son évêque la dispense de ce même vou, dont la réserve au pape ne serait alors ni juste, ni conforme au bien des fidèles, et se marier en conséquence.

Jamais on ne dispense à Rome uniquement pour empêcher qu'une personne qui a péché souvent contre son viu, ne joigue au péché d'incontinence le péché de sacrilége. Voyez mon Traité des Indulgences, tom. 11, p. 418.

CAS VI. David qui a fait vœu de chasteté perpétue le, dans la ferveur de sa dévotion, et immédiatement après avoir communié le jour de Pâques, s'est trouvé deux ans après si fort tenté, que, dans la crainte où il est de tomber dans l'incontinence, il voudrait bien pouvoir se marier. Peut-il, pour cette seule raison, demander une dispense ad hunc effectum?

vel

R. I le peut, la clause ob stimulos carnis, étant reçue dans toute l'Eglise, conformé ment à ce mot de saint Cyprien, epist. 62, édit. Pam. Si autem perseverare nolunt, non possunt, melius est nubant, quam in ignem delictis suis cadant. Il faut observer que si le pape ne fait que commuer le vœu en des œuvres de piété, à condition que, si la personne dispensée devient libre dans la suite par la mort de son conjoint, elle ne pourra passer à un second mariage, alors son obligation n'étant que suspendue, elle ne pet se remarier sans une nouvelle dispense. Voy. Sainte-Beuve, t. II, cas C.

CAS VII. Rosalie, fille âgée de vingt ans, ayant fait vœu de virginité, a été si pressée par ses parents de se marier à un homme de

robe fort riche, qu'elle a demandé à R me dispense de son vœu, dans l'espérance que cet homme, très-intelligent dans les affaires, mettrait bon ordre à celles de sa famille, qui étaient fort dérangées; mais le banquier a exposé qu cette fille était en danger d'incontinence. Le curé qui a vu dans la dispense la clause ob stimulos carnis, qu'il savait être fau se, a cru que la dispense était nulle. Ne se trompe-t-il pas ?

R. Sainte-Beuve, t. I, cas LXXIV, regarde cette dispense comme valable, parce que, selon lui, ladite clause n'est que de style. Mais le sentiment de ce docteur est absolument faux. Il en est de même de la fameuse clause et oratoribus vitæ periculum immineret; et quand il y aurait eu autrefois du doute là-dessus, il ne pourrait plus y en voir depuis la Déclaration donnée par Benoit XIV, en 1741.

CAS VIII. Godolie, ayant obtenu du pape un rescrit adressé à son confesseur pour la dispenser d'un vou simple de virginité, s'est mar ée aussitôt sans autre formalité. L'a-telle pu en conscience?

R. Godolie a été dans l'erreur; et quoique son mariage soit valide, el'e n'est pas délice de son vœu jusqu'à ce que son confesseur ait exécuté le rescrit que le pape lui a adressé. La raison est qu'il y a une grande différence à faire entre une dispense absolue que donne le pape, et la commission ou le pouvoir qu'il donne à un confesseur de dispenser d'un vœu ou de le commuer en quelques œuvres de piété, qu'il juge être convenables à la personne à qui le rescrit a été accordé. Aliqui simplices in eo sunt errore, dit un savant canoniste, ut simul atque diploma sive bullam acceperunt, in qua papa concedit, ut confessarius possit certa illorum vota vel dispensare, vel commutare, credant se statim a suis votis liberari. Etenim aliud est committere potestatem dispensandi vel commutandi, aliud vero dispensare el commutare... quocirca ab ipso confessario petere debent, ut sua debita in alia opera pietatis commutet aut dispenset. Enimvero nisi confessarius fuerit requisitus, imo etiamsi fuerit, ni i dispensaverit aut commutaverit... vola adhuc sicut antea in suo vigore perseverant. Cet auteur appuie son sentiment sur plusieurs constitutions des papes, dont la plus formelle sur ce sujet est celle de Boniface VIII, cap. 9, de Offic. et pot. judicis deleg. lib. I, tit. 14.

CAS IX. Si le confesseur de Godolie l'avait dispensée hors de la confession, cette dispense serait-elle valide?

R. Non: car, comme dit Tiburce Navarre, un des pénitenciers de Rome: Exsecutio dispensationis extra confessionem, ob quemcumque prætextum et causam facta, non est valida. La raison est que la confession actuelle est une condition prescrite par le saint-père.

- CAS X. Si l'empêchement de Godolie état dirimant, et que la confession à la suite de laquelle elle a été dispensée cût été nulle et sacrilége, le mariage qu'elle aurait Contracté en conséquence serait-il valide?

R. J'avais peine à cro're ce mariage va lide, malgré l'autorité de Marc-Paul Léon, qui est grande dans ces matières ; mais j'ai actuellement entre les mains une décision de la pénitencerie, qui déclare un tel mariage valide, pourvu que d'ailleurs le confesseur ait observé toutes les clauses qui lui ont été prescrites. Sans doute qu'on a voulu que l'importante validité d'un mariage ne dépen dit pas d'une condition, qui aurait pu donner dans la suite beaucoup d'inquiétude à des personnes scrupuleuses, et fournir des sujets de réclamation à celles qui se seraient ennuyées de leur état. La même décision, qui est de 1757, ajoute : Quod si confessarius advertat pænitentem ex sua indisposi tione a peccatis absolvi rite non posse, cu rare debet eumdem pænitentem recte disponere; vel si disponere nequeat in præsenti una cum ab olutione a peccatis differre quoque prædiclam dispensationem, NISI FORTE URGENS ALI

QUA NECESSITAS SUADEAT DISPENSATIONES EAS DEM ACCELERAZE. Cette décision cs: très-importante.

CAS. XI. Gobert a fait vœu de se fa're religieux dans un ordre fort austère; mais parce qu'il craint de n'avoir pas assez de force pour en supporter la discipline régulière, il désire d'être dispensé de son vœu, à l'effet d'entrer dans un monastère où la règle soit moins rigide. L'évêque diocésain peut-il lui accorder cette dispense?

R. I le peut, selon l'opinion commune: parce que, comme dit Sayr: Hoc non est dispensare in voto religionis, cum semper sil religioni obnoxius, sed in modo et qualitate illius; hoc est, in arctiori vinculo. Petrus de Aragonia, Josephus Anglès, Reginaldus, Sanchez, Lessius, Bonacina et plusieurs autres enseignent unanimement la même chose.

CAS XII. Aruntius, qui a fait un vœu simple de chasteté perpétuelle ou de religion, ayant conçu de l'amitié pour Sylvéria, a ob tenu une dispense de Rome qui lui permet de l'épouser, quoiqu'il n'ait eu aucune autre raison de la demander que la simple affeclion qu'il a pour cette fille, et qu'il ne se soit même jamais trouvé pressé par aucun mouvement déréglé de concupiscence. Peutil se servir de cette dispense?

R. Il ne le peut, parce que son affection n'est pas une cause qui autorise le supérieur à dispenser d'une obligation contrac tée vis-à-vis de Dieu même; c'est la décision de saint Thomas, qui dit 2-2, quæst. 88, art. 12, ad 2: Et ideo in manifestis dispen satio prælati non excusaret a culpa, puta, si prælatus dispensaret cum aliquo super toto de ingressu religionis, nulla apparenti causa obstante. Si autem esset causa apparens, per quam saltem in dubium verteretur, posset stare judicio prælati dispensantis vel com tantis: non tamen judicio proprio, quia ipse non gerit vicem Dei. Il faut même ajouter que, quand Aruntius se trouverait agite de tentations contre son vau, il serait oblige, avant d'avoir recours à la voie de la dispense, de mettre en pratique les principaux reme

des que Dieu nous a donnés contre ces sortes de tentations, qui sont la prière et le jeûne; puisque, selon la doctrine de l'Eglise, Dieu ne refuse pas le don de chasteté à ceux qui le lui demandent comme il faut, et qu'il ne souffre jamais que personne soit tenté audessus de ses forces. Cum Deus id (donum castitatis) recte petentibus non deneget, nec patiatur nos supra id quod possumus tentari, dit le concile de Trente, sess. 12, de Reform. matr. c. 9.

CAS XIII. Marcien, ayant fait pour trois ans vœu de virginité, expose six mois après à son évêque qu'il se trouve souvent en grand danger de tomber dans l'incontinence, et le supplie de le dispenser de son you. L'évêque a-t-il ce pouvoir?

R. Il n'y a que le vœu perpétuel et total de chasteté qui soit réservé au pape. L'évêque peut donc dispenser du vœu dont il s'agit, comme du vœu de ne se point marier, et semb'ables. Saint Antonin, Cabassut., lib. I, cap. 8, n. 14, etc.

Cas XIV. Irène, fille âgée de vingt ans, a fait vœu de garder toute sa vie la virginité, en cas que sa mère venant à mourir lui laissât seulement 300 liv. de rente; mais comme elle a beaucoup de peine à garder son vœu, à cause des violentes tentations dont elle est agitée, elle a dessein de se marier, en cas qu'elle puisse obtenir la dispense nécessaire. Celle de l'évêque lui suffitelle?

R. Les évêques peuvent dispenser d'un vœu conditionnel, jusqu'à ce qu'il soit devenu absolu par l'accomplissement de la condition. Irène peut donc se marier, avec la dispense de son évêque, à moins que sa mère ne soit morte et ne lui ait laissé 300 liv. de rente. C'est le sentiment des meilleurs théologiens.

CAS XV. Euprépie croit avoir fait vœu de chasteté perpétuelle, étant à peine âgée de douze ans, et comme il y en a plus de dix que cela s'est passé, elle n'est pas assurée si elle avait assez de discernement pour s'engager par un véritable vou, ou si ce n'était seulement qu'une simple résolution. Doit-elle pour la sûreté de sa conscience recourir au pape?

R. La réserve doit être restreinte, parce qu'elle est odieuse, comme étant contraire à la juridiction primitive des évêques. Ainsi, comme elle n'a lieu que dans les vœux absolus, elle n'a lieu que dans les vœux certains et suffisamment réfléchis. Or, un vœu douteux, comme celui d'Euprépie, ne peut être certain; il suffit donc d'avoir recours à l'évêque. Item, dit Cabassut, liv. 1. c. 8, n. 15, potest episcopus dispensare, ubi dubitalur utrum votum reservationis papalis fuerit obligatorium; ut si res in ambiguo sit, ulrum sufficiens intervenerit deliberatio circa volum quod quis se emisse certus est. In dubiis quippe benigniori parti favendum, et ipsa quæ sancto pontifici reservantur vota, debent esse indubitata. A quoi il ajoute que c'est le sentiment commun des docteurs. In præfalis, dit-il, omnes fere doctores conveniunt:

et leur principale raison est fondée sur l'importance de pourvoir au salut des fidèles, en les délivrant des piéges que leur tend le démon. Agnoscentes quantum expediat animarum saluti easdem laqueis extricare, quibus se facile et plerumque, ipso diabolo sub specie boni sollicitante, implicant; eaque occasione superadditis reservationum difficultatibus novis, se contraventionum sacrilegarum laqueis involrunt.

CAS XVI. Auxence, ayant fait vœu de recevoir les ordres sacrés, à formé, un an après, la résolution de se marier: mais comme son vœu renferme celui de la chasteté perpé tuelle, qui est attachée aux ordres majeurs, il demande s'il est nécessaire qu'il ait recours à Rome, pour en obtenir la dispense.

R. La dispense de l'évêque lui suffit, parce que son vœu ne regarde la chasteté que d'une manière indirecte. C'est la décision de Sylvius, et elle est coma unément reçue. Ob. servandum est, dit ce théologien, vota de non nubendo... de suscipiendo sacros ordines... non comprehendi sub voto castitatis perpetuæ, vel religionis, quia non sunt absoluta vota castitatis: et ideo episcopus potest in illis dispensare.

ČAS XVII. Maurin ayant fait vou, ou de recevoir les ordres, ou de faire profession de religion, ou de garder la chasteté perpétuelle, désire aujourd'hui de se marier, à cause des fréquentes tentations dont il est allaqué. A qui doit-il s'adresser pour oblenir dispense?

R. La dispense de l'évêque lui suffit, parce que son vou, qui est disjonctif, n'est pas réservé dans toutes ses parties; mais s'il avait renoncé au vœu de prendre les ordres, et qu'il n'eût plus à choisir qu'entre la chas teté ou la religion, il ne pourrait plus être dispensé que par le pape, parce que son vœu ne roulerait plus que sur deux objets, qui sont également réservés au saint-siége. C'est le sentiment d'Azor, de Sayr, bénédic→ tin anglais, etc.

CAS XVIII. Riccius ayant fait vœu de ne se point marier, sans avoir eu intention de vouer la chasteté, s'est fait dispenser de son væu par son évêque. Cette dispense lui suffitelle?

R. Elle suffit parce qu'il n'y a que le vœu absolu de chasteté perpétuelle qui soit réservé au pape. Or le vœu de ne se point marier est très-différent du vœu de chasteté perpétuelle; car celui qui, après un tel væu, tomberait en fornication, ne pécherait pas précisément contre son vou, quoiqu'il péchât mortellement contre la chasteté; parce qu'il ne peut pécher contre son vœu qu'en contractant mariage, son vœu ne l'obligeant à autre chose qu'à ne le point contracter. Nota qu'assez souvent ceux qui font vœu de ne se point marier ont en même temps l'intention de s'engager à garder la chasteté perpétuelle, et que pour lors la dispense de leur vœu est réservée au pape, parce qu'une telle intention le rend un véritable vœu de chasteté.

CAS XIX. Tristan, se trouvant partagé

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