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(rej., 15 mại 1840, 23 janvier et 15 mai 1847; J. cr., art. 4080 et 4117). Et l'incompétence devrait être déclarée, s'il s'agissait d'un pair de France justiciable de la Cour des pairs seule, ou d'un magistrat justiciable de la Cour de cassation (opinion de M. le procureur général Dupin; Gaz. des Trib., 24 déc. 1847).

De là il résulte qu'un pourvoi en cassation est nécessaire pour faire valoir les causes d'incompétence sur lesquelles l'arrêt de renvoi contient virtuellement chose jugée, alors même qu'il s'agit de la compétence de la cour d'assises simplement saisie et non encore en fonctions, et qu'il doit être formé dans les délais de l'art. 296 ou dans ceux de l'art. 273; tandis que le pourvoi peut être différé jusqu'après la condamnation et n'a pas même besoin de porter sur l'arrêt de renvoi, à l'égard de celles des causes d'incompétence qui sont malgré tout proposables en cour d'assises par l'accusé, ou en cassation par le condamné, à raison de ce qu'elles sont permanentes et indélébiles.

Indépendamment de tout vice de procédure ou d'incompétence dans l'instruction préalable ou dans l'arrêt de renvoi, il peut y avoir des exceptions opposables contre la poursuite ou contre l'accusation: soit une exception dilatoire, tirée du défaut de plainte, d'autorisation préalable, ou de jugement sur une question préjudicielle, dans les cas où la loi les exige; soit une exception péremptoire de prescription, de chose jugée, d'amnistie, ou une exception résultant de ce que l'accusé a déjà été condamné à une peine plus forte, ou bien de ce qu'il n'a pas la qualité qui est un des éléments essentiels du crime, telle que celle de commerçant dans une accusation de banqueroute, celle de fonctionnaire, dans une accusation de corruption, etc.

Ces exceptions, ou fins de non recevoir, quand elles n'ont point été soumises à la chambre d'accusation, peuvent encore être proposées devant la cour d'assises et même devant la cour régulatrice après condamnation, avec les éléments de fait qu'ont laissé subsister l'arrêt de renvoi et la déclaration du jury car elles ne sauraient se couvrir par le seul silence, puisqu'elles sont d'ordre public; et il n'y a pas chose jugée sur ces exceptions, à défaut de disposition expresse dans l'arrêt de renvoi. La Cour de cassation reconnaît aux cours d'assises le droit de surseoir pour défaut d'autorisation préalable du conseil d'État, dans le cas de poursuite contre un fonctionnaire (cass., 9 février 1809), pour défaut de jugement préalable sur l'existence du premier mariage, dans une accusation de bigamie (rej. du 25 juillet 1811), ou pour défaut de jugement préalable sur une question d'état préjudicielle, dans une accusation du crime de suppression d'état (arr. des 21 mai 1813 et 22 juin 1820). Et elle a jugé qu'à la cour d'assises appartient l'examen des moyens de défense tirés par l'accusé de faux serment et l'accusé de bigamie de l'inadmissibilité de la preuve testimoniale et de la nullité du premier mariage, que ces moyens ne peuvent être présentés en cassation que d'après les faits jugés en cour d'assises

(arrêts des 5 septembre 1812 et 16 janvier 1826; Mangin, de l'Instr. écr., t. 2, p. 286-289).

Mais que décider à l'égard des exceptions qui ont été formellement repoussées par la chambre d'accusation? D'après la jurisprudence, il y a chose jugée par l'arrêt de renvoi, jugement irrévocable à défaut de pourvoi contre cet arrêt, parce que la chose jugée établit la plus puissante de toutes les présomptions et n'admet aucune preuve contraire. Un Anglais d'origine, accusé de bigamie, avait soutenu devant la chambre d'accusation qu'il fallait jugement préalable des tribunaux anglais, parce que le premier mariage avait eu lieu en Angleterre et que le deuxième avait communiqué à la femme la qualité d'Anglaise. La chambre d'accusation ayant rejeté l'exception et la cour d'assises ayant prononcé une condamnation pour bigamie, la Cour de cassation, sur le pourvoi du condamné, a décidé qu'il y avait chose jugée sur l'exception, qu'il ne restait plus qu'à examiner si le fait déclaré par le jury était qualifié crime par la loi (arr. du 20 novembre 1825).

Un chef de bureau de préfecture ayant été mis en accusation, pour le crime de l'art. 177 du C. pén., par un arrêt qui le qualifiait de fonctionnaire, et cette qualité ayant été de même exprimée dans la question au jury, son pourvoi contre l'arrêt de condamnation a aussi été dirigé contre l'arrêt de renvoi, dans le but de faire porter la discussion sur le titre dans lequel on avait vu la qualité de fonctionnaire. La Cour de cassation a décidé que l'arrêt de renvoi avait été tardivement attaqué, que l'accusé condamné ne pouvait proposer l'exception péremptoire ou la fausse application de la loi pénale que d'après les faits déclarés par le jury, ce qui restreignait la discussion à raison de ce que la qualification de fonctionnaire, donnée à l'accusé dans la question au jury, se trouvait en fait dans le verdict (rej. du 7 janvier 1843; J. cr., art. 3263).

Toutefois, l'arrêt de renvoi ne peut entraîner chose jugée sur aucune exception, à l'égard des points de fait qui sont susceptibles de se modifier aux débats. Ainsi, quoique l'arrêt ait repoussé la prescription opposée, elle peut être admise par la cour d'assises, si la date du crime est jugée plus ancienne, ou si le fait est reconnu ne constituer qu'un délit prescriptible par un moindre temps (rej. du 9 août 1812 et 15 juillet 1813). Quoique l'arrêt ait donné à l'accusé la qualité sans laquelle le crime manquerait d'un élément essentiel, les faits d'où dériverait cette qualité peuvent être autrement appréciés par la cour d'assises jugeant par contumace ou par le jury (cass. 21 novembre 1812). De même que le fait de l'accusation, quoique imparfaitement énoncé dans l'arrêt de renvoi, peut revêtir d'après les débats tous les caractères d'un crime, parce que l'imperfection de rédaction, qui est une des causes de nullité admises par l'art. 299, diffère essentiellement du défaut de loi pénale applicable au fait declaré par le jury (roy. cass., 20 janvier 1842; J. cr., art. 3085). Bien plus, une modification du fait,

quoique écartée par l'arrêt de renvoi qui a refusé d'admettre une accusation subsidiaire à cet égard, peut être admise par la Cour d'assises et le jury, parce que la loi leur fait un devoir de juger le crime ou délit tel qu'il résulte des débats (Rej. 24 déc. 1847; J. cr., art. 4217).

A l'égard des excuses, l'arrêt de renvoi ne saurait jamais avoir autorité de chose jugée. S'agit-il d'une excuse péremptoire, faisant disparaître la criminalité de l'action, par exemple de la légitime défense, de la démence ou de la contrainte réelle, de l'obéissance à l'autorité, de la parenté dans une accusation de vol? La chambre d'accusation peut examiner si elle existe et est admissible, mais sans enchaîner la cour d'assises et le jury dans le cas où elle l'écarte, puisque c'est un moyen péremptoire et permanent (cass., 9 décembre 1814, 27 mars 1818, 8 janvier 1819). S'agit-il d'une excuse simplement atténuante, comme celles qu'admettent les art. 107 et 108, 114, 116, 119, 137 et 138, 141, 143, 190, 248, C. pén.? Le jury seul peut en connaître d'après l'art. 339, C. instr. cr., d'où la conséquence que l'arrêt de renvoi ne saurait à cet égard contenir aucune disposition légale et obligatoire (cass., 15 novembre 1811, 16 juin 1815, 28 août 1828, 16 janvier 1829, 10 août 1838 et 7 août 1845; J. cr., art. 2235 et 3958).

Relativement aux circonstances aggravantes, il faut distinguer. Les circonstances comprises dans l'arrêt de renvoi doivent nécessairement, pour que l'accusation soit purgée, être soumises par le président des assises au jury (C. inst. cr., 337). Celles qui, non mentionnées dans l'arrêt, paraissent résulter des débats, peuvent lui être soumises, selon l'appréciation de la cour d'assises (338). Quant à celles que l'arrêt a expressément écartées, il y a difficulté, à raison du silence de la loi. Dans le principe, la Cour de cassation a pensé que l'arrêt de mise en accusation qui écarte une circonstance aggravante n'a pas autorité de chose jugée à cet égard, qu'il n'empêche point le procureur général de reproduire cette circonstance, et qu'ainsi un pourvoi n'est pas nécessaire (cass., 10 décembre 1812 et 5 février 1819; rej., 2 janvier 1829). Mais aujourd'hui, elle décide que si l'omission d'une circonstance aggravante ou son appréciation erronée en fait, dans l'arrêt de renvoi, n'empêche pas de la comprendre dans les questions au jury quand elle se révèle aux débats, il en est autrement de la décision qui, après avoir reconnu le fait constitutif de la circonstance aggravante, l'écarte en droit et formellement; qu'une telle décision empêcherait le ministère public, qui ne peut changer l'accusation, de relever la circonstance aggravante écartée, si elle n'était pas réformée sur son pourvoi, parce qu'il y aurait chose jugée contradictoirement avec lui (cass., 11 juin 1841, 20 janvier et 18 février 1843, 5 décembre 1844; J. cr., art. 3034, 3437 et 3793).

Telles sont les règles qu'a posées jusqu'ici la jurisprudence, quant aux effets des arrêts de renvoi sur les nullités et autres exceptions proposées ou proposables. On voit combien elle a vivifié, développé même le texte imparfait de la loi écrite.

La pensée qui domine la jurisprudence, en cette matière, est celle-ci : L'inculpé, jusqu'à ce qu'il ait eu légalement connaissance de l'instruction et de l'arrêt qui la régularise, l'accusé, après sa condamnation et dans le délai imparti, doivent sans doute être admis à faire valoir toutes les irrégularités graves viciant essentiellement la procédure. Mais il ne faut pas que le même individu, dans tout le cours d'une poursuite qui a des phases diverses, d'une procédure qui a des degrés bien marqués, puisse tenir en réserve, pour les faire valoir à coup sûr en cas de condamnation et tout faire tomber, des nullités accidentelles qui eussent été réparées sans dommage pour l'accusé s'il les eût signalées avant la comparution aux assises et qui ne peuvent plus l'être après condamnation sans perte de frais pour le trésor public. La loi, certainement, a fait assez pour l'accusé, en admettant de nombreuses causes d'annu lation, dans la procédure intermédiaire et dans le débat oral, qui sont proposables par l'accusé ainsi que par le ministère public, en cas dè condamnation, et qui ne peuvent être relevées que dans l'intérêt de la loi, au cas d'acquittement (art. 408 et 409).

Il y a même une idée dominante, plus générale, dans la jurisprudence suivant laquelle les arrêts de renvoi non attaqués régularisent toute l'instruction qui a précédé, au point de faire disparaître des vices d'incompétence et d'exclure des exceptions péremptoires. La régularité est une des justes exigences de notre organisation politique, un besoin impérieux pour l'époque actuelle. Elle est indispensable dans l'administration gouvernementale: aussi voyons-nous tous les services publics se régulariser successivement, partout où des abus out été découverts ou paraissent encore possibles, de manière à les faire cesser et à rendre inexcusables ceux qui se reproduiraient. Elle est indispensable surtout dans l'administration de la justice, qui doit être exempte d'oscillations et d'arbitraire, qui ne saurait admettre d'autres chances aléatoires de succès que celles qu'engendre la difficulté des preuves. C'est pourquoi la Cour de cassation, considérant aussi qu'une irrégularité commise est d'autant plus condamnable qu'elle pouvait plus facilement être évitée applique de plus en plus sévèrement cette peine des frais de la procédure à recommencer qui était déjà dans l'ordonnance de 1670 (tit 45, art. 24), que n'a pas voulu prononcer le Code de brumaire, si fécond en nullités, et que reproduit le Code actuel (art. 415). Les avertissements réitérés qui ont été donnés aux greffiers et huissiers dans ces derniers temps (voy. J. cr., 1847, p. 22), doivent appeler l'attention des juges instructeurs sur la disposition de la loi qui permet de les condamner eux-mêmes aux frais pour nullité de leur fait ; et les chambres d'accusation remarqueront aussi qu'elles ont le droit et le devoir, en vérifiant la régularité des procédures qui leur sont soumises, de prononcer la peine contre les officiers qui auraient commis une faute très-grave.

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ᎪᏒᎢ. 4215.

1° ACCUSATION. COMPÉTENCE. FAUX. 20 ARRÊT DE REJET.

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1o Le jury du lieu où le prévenu peut être trouvé est tout aussi compétent que celui du lieu du délit, sans exception pour le crime de faux.

2o L'arrêt qui rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de renvoi n'a pas besoin d'être notifié comme celui-ci.

3o La question intentionnelle ne doit pas nécessairement étré soumise au jury dans les termes mêmes de l'arrêt de renvoi : elle se trouve suffisamment, à l'égard du crime de fabrication d'un faux certificat, dans la question de culpabilité avec l'énonciation de toutes les circonstances constitutives.

4o Dans le cas de condamnation pour fabrication d'un faux certificat ayant déterminé un remplacement, l'annulation de l'acte de remplacement doit avoir lieu, sans que le remplaçant condamné puisse se faire un moyen de ce que le remplacé n'est pas présent.

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attendu que

LA COUR; sur le premier moyen, tiré de l'incompétence : d'après les art. 23 et 63 du Code d'instruction criminelle le juge du lieu où le prévenu peut être trouvé est tout aussi compétent que celui du lieu du délit; que les dispositions de ces articles sont générales, et qu'aucune loi n'y déroge en matière de faux; qu'en fait, le demandeur a été trouvé et arrêté à Toulon; qu'ainsi, il a été compétenment jugé par la cour d'assises du Var; sur le deuxième moyen, pris de la violation de l'art. 242 du Code d'instructrion criminelle : attendu que l'arrêt de renvoi et l'acte d'accusation ont été notifiés au demandeur; que si l'arrêt de rejet intervenu sur le pourvoi qu'il avait formé contre l'arrêt de renvoi ne lui a pas été notifié, aucune loi n'exigeait qu'il le fût; que la disposition de l'art. 242 ne le concerne pas, puisqu'on ne peut l'assimiler à un arrêt de renvoi; sur le troisième moyen, pris de la violation de l'art. 337 du Code d'instruction criminelle et de la fausse application de la loi pénale: - attendu que si le président de la cour d'assises n'a point reproduit, dans la question posée au jury touchant le certificat émané du maire de Sainte-Foy, cette énonciation de l'arrêt de renvoi que le faux avait été commis dans l'intention de nuire à autrui, cette omission est sans importance, puisque la question intentionnelle était clairement soumise au jury à qui l'on demandait, non pas si l'accusé avait commis le faux, mais s'il était coupable de l'avoir commis; attendu, d'un autre côté, que la nature même du certificat argué de faux, tel qu'il est spécifié dans la question, indique suffisamment que ce certificat était propre à favoriser un remplacement illégal, et par conséquent à causer un préjudice; que la question contenait donc toutes les circonstances constitutives du crime pour lequel le demandeur avait été mis en accusation, et qu'ainsi, il n'y a eu ni violation de l'art. 337 invoqué, ni fausse application de la loi pénale; sur le quatrième moyen, tiré de ce que l'annulation de l'acte de remplacement a été prononcée sans nécessité et sans que le ministère public l'ait

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