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père, il a transmis à ses enfants, comme à des ruisseaux, cette même corruption qui était en lui, comme en son principe; cette corruption est passée au corps d'abord, et du corps elle s'est communiquée à l'âme; mais pensons à respecter la profondeur des mystères, plutôt qu'à les expliquer.

Il existe donc, le péché d'origine; nous naissons donc tous coupables en Adam; toutes les misères que nous éprouvons, tant dans notre corps que dans notre âme, en sont donc les tristes effets, et nous devons les souffrir dans un esprit de patience et de pénitence. Hommes oisifs! vous devez donc regarder votre oisiveté comme criminelle, vous assujettir à un travail pénible, à un travail qui coûte à la nature par son assiduité, lors même qu'il n'épuise pas par la violence; c'est une nécessité imposée à tous les enfants d'Adam de manger leur pain à la sueur de leur front. Vous mères ! vous seriez donc coupables de la damnation de cet enfant qui, par votre faute, périrait avant d'avoir été baptisé. Nous eussions donc tous été malheureux en cette vie et dans l'autre, si nous n'eussions eu un Sauveur. Combien d'autres conséquences suivent du principe. que j'ai établi ? mais il est temps de passer à la seconde partie de mon discours; ce Sauveur est-il venu? Jésus fils de Marie est-il ce Sauver et le uMessie? C'est le sujet de mon second point.

SECOND POINT.

Etes-vous celui qui doit venir, ou en altendons-nous un autre? (Matth. x1, 4, 5.) C'est la question que saint Jean-Baptiste proposait à Jésus-Christ par quelques-uns de ses disciples dont il désirait fixer la foi, jusque-là incertaine Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont guéris, les sourds entendent; les morts ressuscitent; c'est la réponse que Jésus-Christ fit à ses disciples; les prophètes, leur répondit-il, ont prédit que le Messie, lorsqu'il viendrait, opérerait tous ces prodiges de bonté et de miséricorde; vos oreilles et vos yeux vous sont témoins qu'à ma parole ces merveilles se hâtent de paraître; elles ne laissent done aucun doute sur ma qualité de Messie: tel est le raisonnement renfermé dans la réponse du Sauveur, raisonnement qui nous montre qu'au jugement de la sagesse incarnée, une méthode excellente de convaincre les esprits sur cefte question la plus importante qui fût jamais. savoir: Si le Fils de Marie est le Messie véritable? c'est de comparer les prophéties qui concernent cet envoyé par excellenee, avec leur accomplissement parfait en la personne de JésusChrist. C'est, mes frères, celle que les apotres indiquaient aux Juifs de leur temps; c'est celle que les Pères ont suivie dans leurs prédications et leurs écrits; c'est celle que je vais suivre en vous mettant sous les yeux les prédictions qui regardent la naissance, la vie et la mort du Messie, et l'exactitude admirable avec laquelle elles se trouvent accomplies dans le Fils de Marie. Ce sont là

les liens que je prépare à votre imagination pour la captiver; si, pour y réussir, il ne fallait que vous dire des choses utiles, consolantes et même agréables, quelle attention ne pourrais-je pas me promettre de votre part? je vais vous montrer que le Fils de Marie, en qui vous croyez comme étant le Messie, l'est véritablement; quoi de plus utile, dans un siècle qui blasphème tout ce qu'il ignore, et ce dogme principalement? Je vais vous montrer que ce Fils de Marie est par conséquent votre Sauveur, votre libérateur? quoi de plus consolant pour des âmes qui gémissent sous le poids du péché? Je vais vous montrer ces vérités, en vous faisant passer rapidement sous les yeux divers personnages intéressants; quoi de plus agréable pour ceux qui aiment la

variété?

Jacob, c'est le premier de ces personnages qui figure, et qui, selon l'ordre des temps doit figurer dans un discours de cette nature, Jacob, près de sa fin, éclairé d'en haut, prédisant à ses enfants leurs destinées, comme s'il les eût lues dans un livre: Juda! dit-il à l'un d'eux, vos frères vous loueront, votre main sera sur le tête de vos ennemis, les enfants de votre père se prosterneront devant vous; mon fils! vous avez couru vers la proie, vous vous êtes reposé comme un lion et comme une lionne, qui osera le réveiller? Le sceptre ne sortira point de Juda, et l'on verra toujours des capitaines et des magistrats ou des juges de sa race, jusqu'à ce que vienne Celui qui doit être envoyé; et qui sera l'attente des peuples: « Non auferetur sceptrum de Juda, et dux de femore ejus doneo veniat qui mittendus est.» (Gen. XLIX, 8, 11.) C'est du Messie que le saint patriarche parle ici; c'est le sens évident du texte, puisqu'il s'y agit de l'envoyé simplement dit; c'est celui que toute la nation juive y a reconnu autrefois, et quand elle vit que les Romains avoient rendu la Judée tributaire, elle fut dès lors persuadée que le Messie n'était donc pas éloigné. Ce fut chez elle, ce fut chez les Samaritains, ce fut dans toutes les contrées de l'Orient que le bruit se répandit qu'il allait paraître un roi dont le vaste empire tiendrait tous les peuples sous sa doimination.

Aussi, et par un effet de cette persuasion, quand Jean-Baptiste parut, la synagogue lui fit une députation solennelle, pour savoir s'il n'était pas le Christ. Ainsi la Samaritaine, parlant au Sauveur qu'elle ne connaissait pas: Je sais, lui disait-elle, que le Messie vient (Joan. IV, 25), qu'il ne tardera pas de paraître. Ainsi pendant l'espace d'un siècle, l'imposture profitant de l'espoir général, on vit une foule de faux messies, et Joseph n'eut pas honte de reconnaître un paien, un empereur des Romains pour l'envoyé promis quel aveuglement de cet homme d'ailleurs si éclairé, qui, contre les oracles de l'Ecriture, transportait aux étrangers l'espérance de Juda! Ce qui résulte de cette persuasion commune, c'est que le Messie devait donc paraître, lorsque le sceptre et

l'autorité souveraine sortirait de Juda; et c'est le temps où naquit le Fils de Marie.

Il prit naissance sous Hérode, roi des Juifs, c'est-à-dire sous un prince qui tenait son autorité des Romains et non des Juifs; sous un prince qui, loin d'être de la tribu de Juda, n'était pas même Juif d'origine, mais Iduméen. Donc Jésus-Christ est né dans les temps marqués par les prophètes. Une autre raison que je pourrais vous en donner, c'est qu'il est né dans un temps où le second temple subsistait encore. Or ce temps est un temps où le Messie devait venir; la preuve en est évidente, puisque, selon le prophète Aggée, le Messie, le désiré des nations, devait remplir de gloire cette maison (Aggai, 11, 8); selon Malachie, ce dominateur, cet ange de l'alliance si désiré. devait venir dans son temple (Malac. ш, 1); selon Daniel, la destruction de ce temple, l'abolition des sacrifices, la désolation totale des Juifs, devait suivre la mort du Messie. Donc le Fils de Marie est venu dans le temps où le Messie devait naître. Premier trait de ressemblance.

2 Il est né de la tribu et de la famille de laquelle le Messie devait naître. Selon la prophétie de Jacob, le Messie devait naître de la tribu de Juda: selon Isaïe, il devait naître de la familie de David. (Isa. x1, 6.) Or il est manifeste, dit saint Paul, que Jésus est né de la tribu de Juda (Hebr. vii, 13); il est également certain qu'il est né de la famille de David; saint Matthieu ne se contente pas de le dire, mais il le prouve dès le commencement de son Evangile qu'il appelle le livre de la généalogie de Jésus-Christ Fils de David; et combien de fois n'entenditon pas les lépreux et les autres infirmes s'écrier Jésus-Christ fils de David! ayez pitié de nous? (Matth. 1x, 27.)

:

3° Le fils de Marie est né dans le lieu où devait naître le Messie. Et toi, avait dit un prophète, adressant la parole à Bethleem, et toi terre de Judu! non tune seras pas la moindre entre les principales villes de Juda; de toi sortira un chef qui conduira mon peuple d'Israël: (Matth. 11, 6.) C'est visiblement du Messie qu'il s'agit ici; c'est de celui dont les jours sont éternels; c'est d'un conducteur qui dominera avec la magnificence du nom du Tout-Puissant. Or le Fils de Marie est né dans cette Bethléem de Juda dont avait parlé le prophète; et depuis sa naissance jusqu'à nos jours quelle n'a pas été la gloire de cette ville? En ce moment où je prononce son nom, où je vous rappelle le Souvenir de cette grotte où il a prís naissance, est-il parmi vous un fidèle qui ne désire de voir un lieu si saint, d'arroser de ses larmes cette terre qui a été trempée de celles du Fils adorable de Marie, d'imiter le grand saint Jérôme, et comme cet illustre pénitent, de se frapper la poitrine d'un caillou, à la vue de cette étable où tout semble crier encore aujourd'hui: « Faites pénitence, personne n'entre dans le royaume des cieux qu'il ne se fasse violence?»

"

4° Le Fils de Marie est né dans cette abon

dance de paix, dans laquelle devait naître. le Messie. Aux jours de sa naissance, cette paix devait être telle que les peuples, devenus amis, devaient changer leurs lances en faux, et leurs épées en socs de charrue. Or tel était l'état heureux où se trouvait le monde quand Jésus-Christ naquit sous l'empire d'Auguste; le temple de Janus qui, depuis la fondation de Rome, n'avait encore été fermé que deux fois, le fut plus solennellement que jamais, sous ce prince, en signe de cette paix universelle qui régnait sur la terre, en signe de cette autre paix bien plus désirable, que les anges dans les cieux devaient publier aux hommes de bonne volonté sur la terre.

Jésus le Fils auguste de Marie a eu pour mère celle-là même que devait avoir le Messie. Enfants d'Israël! avait dit Isaïe (vii, 14) en la désignant, voici le signe de votre déli vrance: par un miracle plus grand que ceux que vous pourriez demander dans le ciel et dans les enfers, une vierge concevra, et enfantera un fils, et il sera appelé Emmanuel, c'est-à-dire Dieu avec nous. Suivant cette prédiction célèbre, c'est d'une vierge que le Messie devait naître. Or Jésus, notre divin Jésus, est né de Marie vierge, avant, pendant et après l'enfantement; dès lors il a marqué l'estime singulière qu'il faisait de la virginité, et de la gloire qu'il destinait aux vierges.

Jésus Fils de Marie est né dans l'état où le Messie devait naître. Un homme pauvre, inconnu, dédaigné, méprisé d'un peuple qui l'aurait sous les yeux, et qui ne le connaîtrait point, c'est sous ces dehors que le Messie devait paraître selon les prophètes. C'est en effet sous ces dehors qu'a paru le Fils de Marie; c'est dans une étable, c'est dans la compagnie de deux vils animaux : quel appareil plus obscur, plus humiliant, plus indigne de notre divin Sauveur, s'il n'eût été digne de nous, s'il ne nous l'eût fallu pour confondre notre orgueil, pour condamner en nous l'insatiable convoitise des plaisirs et des richesses?

En notre aimable Jésus se sont donc accomplies les prophéties qui annonçaient la naissance du Messie. Premier préjugé légitime en faveur de ce dogme par lequel vous croyez que le Fils de Marie est le Sauveur promis. Eh! que ne puis-je en faire connaitre la solidité à ce juif, à cet infidèle, à ce déiste dont la bouche pleine de blasphèmes, ose prononcer que Jésus-Christ fut un imposteur qui sut s'approprier les prophéties! je lui demanderais: comment donc avant de naître, avant d'exister, ce Jésus a-t-il pu tellement préparer les événements qu'il soit né dans toutes les circonstances dont j'ai parlé ? quelle absurdité! Ce que je vais dire des prophéties concernant la vie du Messie et leur accomplissement dans Jésus Fils de Marie, va répandre un nouveau jour sur ce que j'ai déjà dit.

Pour rendre ce parallèle plus sensible, ouvrons d'un côté le livre des prophéties, et de l'autre le livre des Evangiles; que lisons

nous là, que nous ne trouvions ici? Là (Num. XXIV), nous lisons qu'une étoile sortie de Jacob devait annoncer à la terre la venue de son libérateur; ici (Matth. 11), nous trouvons que des mages ont vu cette étoile en Orient, et qu'à travers les dangers ils sont venus adorer le divin Enfant à Bethléem. Là (Jer. xxxII), nous lisons qu'un grand bruit à été entendu dans Rama, qu'on y ouï des plaintes et des cris lamentables; que Rachel pleurant ses enfants ne veut pas recevoir de consolations, parce qu'ils ne sont plus; ici (Matth. 1), nous trouvons qu'Hérode a fait mourir tous les enfants âgés de moins de deux ans et nés à Bethléem ou aux environs de cette ville figurée par Rachel; qu'il les a fait mourir tous, afin d'envelopper dans ce massacre général le Fils de Marie; nous trouvous que cet Enfant dans sa crèche a déjà fait trembler les rois sur leurs trônes: eh! que fera-t-il donc, quand il paraîtra porté sur les nues, environné de gloire et de majesté? Pécheur ! quel sera alors l'effroi qui te saisira? Là (Osee, x1), nous lisons que le Seigneur devait rappeler le Messic de l'Egypte; ici (Matth. 1), j'adore les desseins de la Providence; je vous invite, justes, à considérer les épreuves où est mise la vertu de Joseph à peine Jésus est-il né, qu'il reçoit ordre de fuir en Egypte, chargé de ce dépôt précieux, d'y demeurer jusqu'à ce qu'il soit averti d'en revenir, et il y reste en effet jusqu'à ce qu'un messager céleste lui apprenne qu'il peut retourner dans la terre d'Israël. Quelle foi de ce Joseph, mes frères ! de quelle tentation n'a-t-elle pas triomphe en exécutant de tels ordres ? C'est un Dieu qui lui est confié, et ce Dieu ne lui parle pas encore, et ce Dieu le laisse dans la pauvreté, et ce Dieu lui fait dire par le ministère des anges de le sauver, pour le soustraire à la fureur d'un homme; quelle force de la foi qui surmonte ces difficultés! Mais ne nous écartons pas des prophéties.

Là, nous lisons qu'un précurseur préparera la voie du Messie, en criant: Préparez la voie du Seigneur; rendez droits ses sentiers, etc. (Isa. XL, 3.) Ici nous trouvons un Jean-Baptiste qui fait retentir les déserts, et ensuite les rives du Jourdain, de cette voix : Faites des fruits dignes de pénitence, la cognée est appliquée à la racine; tout arbre qui ne porte pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu: après moi il en viendra un plus fort que moi... le van à la main, il nettoiera son grain; le bon, il le placera dans son grenier, et la paille, les pécheurs figurés par la paille, il les brûlera d'un feu qui ne s'éteindra jamais. (Matth. I, 8, 10-12)... Le voilà, cet Agneau de Dieu, celui qui efface les péchés du monde : « Ecce Agnus Dei,» etc. (Joan. 1, 29.) Là, c'est-à-dire dans les prophéties, nous lisons que le Messie devait prendre sur lui nos infirmités (Isa. LIII, 3), celles de nos âmes principalement; ici, ô la nouvelle heureuse et consolante! ici nous trouvons que Jésus guérissait les corps, afin de guérir les âmes; qu'il est venu chercher, non les justes, mais les pécheurs (Matth. ix, 13); qu'il a pris le nom de Jésus,

parce qu'il voulait délivrer son peuple de ses péchés. (Luc. 11, 21.) Là, nous lisons que le Messie devait paraître à Jérusalem, monté sur une ânesse accompagnée de son anon (Zach. IX, 9); ici, nous trouvons que Jésus a accompli cette prophétie : Réjouissezvous, fille de Sion! voici que votre roi vient vers vous, plein de douceur (Matth. xx1, 5); il a fait son entrée solennelle à Jérusalem avec cet appareil dont avait parlé le prophète. Là, nous lisons que la louange du Messie devait sortir de la bouche des enfants à la mamelle (Psal. vni, 3); ici, que trouvons-nous? qu'au triomphe de Jésus-Christ à Jérusalem, les enfants, je dis avec saint Chrysostome (Adv. gentes), les enfants pendants au sein de leurs mères, entonnèrent cette hymne à la louange du Fils de Marie : Hosanna, gloire au plus haut des cieux; béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. (Matth. xxi, 15.)

Là, nous lisons que le Messie devait être trahi par un de ses disciples, et de quels anathèmes ce disciple perfide ne doit-il pas être foudroyé ? Que son oraison se change en péché, que ses jours soient abrégés, qu'un autre reçoive son épiscopat, que son épouse devienne veuve et ses enfants orphelins, que la malediction tombe sur sa tête, qu'il en soit revêtu comme d'un manteau, qu'elle pénètre le fond de son âme, qu'elle s'insinue comme Thuile dans ses os (Psal. cvin, 7, 8, 18): c'est ce que le Psalmiste avait prédit des châtiments du traître; ici nous trouvons que Judas a vendu son divin Maître, qu'il l'a'livré pour trente pièces d'argent; que, frappé de la noirceur de son horrible forfait, il en a reporté le prix aux Juifs; qu'il s'est pendu dans le désespoir d'obtenir jamais le pardon d'un crime si énorme. (Matth. xxvi.) Là, nous lisons que le Messie devait être rassasié d'opprobres, condamné comme un séduc teur, déchiré tellement qu'on pût compter ses os, mis à mort entre deux scélérats, étendu sur le bois infâme de la croix, les pieds et les mains percés de clous, abreuvé de fiel, sans ouvrir la bouche (Psal. xx1, 7, 8, 17; xxxvII, 14), ou pour se plaindre, ou pour se justifier; ici (Matth. xxvII) nous trouvons une telle conformité entre l'événement et la prédiction, que les prophètes semblent avoir écrit un cinquième Evangile en annonçant les douleurs du Fils de Marie.

Il a donc vérifié en sa personne toutes les prophéties concernant la vie du Messie jusqu'à sa mort. Second préjugé légitime en faveur de ce dogme, selon lequel le Fils de Marie est le Messie promis. Jusques-là quelle ressemblance de Jésus né de Marie, au libérateur préconisé par les prophètes ! Les traits suivants vont achever le tableau ; il n'en est aucun de ceux qui désignent le Messie après sa mort, qui ne convienne à ce Jésus que 'nous adorons; faites-en vous mêmes la comparaison, d'après ce que je

vais dire.

Je briserai les portes d'airain; j'abattrai les gonds de fer; j'ouvrirai ces trésors où n'a pas lui le soleil (Isa. XLV, 2); c'est ainsi qu'Isaïe

prophétisait la descente du Messie dans les lieux souterrains, où les âmes des justes l'attendaient; et saint Pierre nous apprend que l'âme de Jésus-Christ descendit dans la prison de ces justes, pour leur annoncer leur delivrance. (I Petr. ш, 19.) Vous ne laisserez pas mon âme dans les lieux bas de la terre: vous ne permettrez pas, ô Dieu ! que mon corps souffre la corruption du tombeau; vous m'avez fail connaître la voie qui conduit à la vie, vous m'avez communiqué le pouvoir de la suivre; c'est ainsi que David (Psal. xv, 10, 11), prédisait non sa résurrection, mais celle du Messie qui devait naître de lui; et celle du Fils de Marie est de tous les faits le plus constant, le mieux prouvé.

Cieux ouvrez vos pories principales, afin que le roi de gloire pénètre dans votre sanctuaire (Psal. xxIII, 7); c'est ainsi que David annonçait l'ascension du Messie, et saint Luc nous dit que, de la montagne des Oliviers, le fils de Marie est monté au plus haut des cieux, où il est assis à la droite de son père. (Act. 1, 9.) Le Seigneur revêtira d'un grand pouvoir ceux qu'il chargera d'annoncer sa parole (Psal. LXXXvn, 12); leur voix se fera entendre par toute la terre (Psal. XVIII, 5): vous les établirez princes de tout l'univers (Psal. XLIV, 17); c'est ce que David prédisait de ces hommes que le Messie, après sa mort, devait envoyer pour prêcher son alliance; et nous, que dirons-nous de ceux qu'a envoyés le Fils de Marie ? quel pouvoir de ces hommes, à la parole desquels la la mort s'enfuit abandonnant la proie qu'elle avait déjà saisie ! quel zèle de ces apôtres qui volent à travers les périls jusqu'aux extrémités du monde ! quelle gloire de ces princes dont les édits subsistent tant de siècles après leur mort, tandis que souvent ceux des rois durent moins que les rois qui les ont portés ! Que leur table, leur loi, leur sacrifice soient pour eux un filet qui les enveloppe, une pierre d'achoppement qui les fasse tomber; que leurs yeux s'obscurcissent pour ne point voir, que leur dos soit toujours courbé vers la terre, le peuple qui le nicra cessera d'être son peuple, sa désolation sera extrême (Psal. LXVIII, 23-25; Dan. ix, 27); c'est ainsi que David, que Daniel, que les prophètes ont prédit la réprobation du peuple juif, après avoir renoncé au Messie promis. Le Fils de Marie était donc ce Messie, puisque la nation juive est réprouvée depuis qu'elle a crié contre notre aimable Jésus : «Que son sang rejaillisse sur nous tous, et sur les enfants qui viendront de nous. » (Matth. xxvII, 25.) Il est donc vrai, et vos propres yeux vous l'assurent, que les prophéties qui regardent la mort du Messie et ses suites, ont été accomplies dans le Fils de Marie. Il est donc le Messie promis; cette conséquence suit si nécessairement, elle est d'une telle évidence, qu'il n'est pas possible de s'en défendre.

Pour la rendre plus sensible encore, voici le raisonnement que je fais; ne permettez pas, Dieu de bonté! que ceux à qui je le propose, ressemblent à ces Juifs incrédules

qui voyaient sans voir et qui entendaient sans comprendre! Celui-là est véritablement le Messie promis, à qui conviennent tous les caractères du Messie. Il est impossible de nier cette proposition sans tomber dans une de ces trois absurdités; sans dire, qu'un habile imposteur a pu tromper la sagesse divine, et malgré elle, s'approprier ces caractères; ou que la sagesse divine aura secondé et même prévenu son imposture, en le faisant naître dans les circonstances convenables; ou qu'un autre que le Messie peut avoir ces caractères, de sorte qu'ils ne servent plus à le distinguer, et qu'ils cessent par conséquent d'être caractères: combien d'absurdités intolérables, impies!

Or le Fils de Marie, notre Jésus, a tous les caractères du Messie, tels que les Juifs, nos ennemis, les conservent, tels que sûrement ils ne les ont pas inventés, puisqu'ils font leur condamnation et notre justification; mais tels qu'ils les ont reçus des prophètes, tels que les prophètes les avaient reçus de Dieu; car, quel antre que Dieu même aurait pu prévoir tant de faits éloignés de tant de siècles, indépendants de tout autre que de lui seul? quel autre que Dieu aurait pu former un tableau si parfait, employant à cet ouvrage des hommes dont chacun ne forme, pour ainsi dire, qu'un trait? et souvent un, ou plusieurs siècles, après que le précédent a été formé ?

Donc le Fils de Marie est véritablement le Messie, et vous pouvez dire que les Juifs en ont le tableau, et que vous avez l'original ; que la vue de ce tableau vous assure pleinement de la vérité de l'original, que les preuves tirées des prophètes démontrent invinciblement ce dogme: Je crois que le Fils de Marie est le Sauveur promis. Maintenant donc que vous prononcez ces mots : Je crois en Jésus-Christ, de quels sentiments de joie, de reconnaissance, de confiance, ne vous sentez-vous pas pénétrés ? Vous croyez que le Messie promis est arrivé dans la personne du Fils de Marie; qu'en lui vous possédez celui que le monde a désiré pendant quatre mille ans; celui après lequel les justes et les patriarches n'ont cessé de soupirer, celui dont le jour a été annoncé comme un jour de joie pour le ciel et pour la terre; eh! si Abraham s'est réjoui pour l'avoir vu de loin, quelle doit être votre joie en le voyant de si près ? Vous croyez que le Fils de Marie est votre Jésus, votre Sauveur, cet ami généreux qui vous a délivrés du péché originel, de tous vos péchés actuels, de la damnation éterrelle que vous aviez méritée par ces péchés; quelle reconnaissance n si grand bienfait n'exige-t-il pas de votre part? Vous croyez que Jésus est votre Sauveur, le vôtre en particulier, que c'est à vous qu'il adresse encore aujourd'hui ces paroles: Venez à moi, vous qui êtes fatigués et qui êtes chargés, et je vous soulagerai (Matth. xi, 28); prenez mon joug sur vous... et vous trouverez le repos de vos âmes (Ibid., 29): avec quelle confiance ne devez-vous pas vous rendre à cette invitation? quelqu'un parmi vous y serait-il in

sensible? ah! malheur à celui-là je lui prédis, de la part de ce même Sauveur, qu'au jugement dernier il sera traité plus rigoureusement que Tyr et que Sidon, plus rigoureusement que Sodome et que Gomorrhe; ces villes eussent peut-être fait pénitence, si elles eussent entendu du Messie tout ce que vous venez d'entendre et que j'abandonne à vos réflexions.

INSTRUCTION IX.

SUR LA FOI.

Explication de ces paroles du symbole : SON FILS UNIQUE NOTRE-SEIGNEUR. Grandeur de Jésus, Messie, dans le sein de son Père. In principio erat Verbum, et Verbum erat apud Deum, et Deus erat Verbum. (Joan. 1, 1.)

Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.

Un des disciples du philosophe Platon qui avait lu ces paroles, en trouvait les pensées si sublimes, si savantes, si intéresssantes, qu'il eût désiré qu'elles fussent écrites en caractères d'or et placées dans toutes les églises, sur les lieux les plus éminents, pour être plus facilement aperçues de ceux qui y entreraient. Mes désirs, mes frères, sont encore plus vifs et plus étendus que ceux de ce paien dont nous parle saint Augustin (59); je désire que ces paroles soient gravées jusque dans le foud de vos âmes, avec ces sentiments d'admiration, d'adoration, de piété qu'elles inspirent.

Quelle élévation subite du disciple bienaimé ainsi que le pilote fuyant le rivage ct cinglant en pleine mer, le saint évangéiste, dit saint Chrysostome, s'élève tout à coup au-dessus de la terre, au-dessus du firmament, au-dessus des cieux, jusqu'au trône de l'Eternel, et là, comme l'aigle qui, d'un œil fixe et intrépide, regarde le soleil brûlant d'été, il contemple le Soleil de justice; il découvre les secrets célestes dans leurs principes, et, sans incertitude, sans doute, de ce ton majestueux qui sied au fils du tonnerre, il prononce ces paroles adorables: Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. « In principio erat Verbum, » etc.

Qu'il est done ancien ce Verbe, qui était déjà lorsque le monde commençait! qu'il est donc heureux ce Verbe qui avant les siècles est en Dieu, jouissant du bonheur de Dieu! qu'il est donc grand ce Verbe qui est Dieu même! Ah! qu'il est donc grand ce Messie dont je vous parlais dans mon entretien précédent! c'est, mes frères, ce que je me propose de vous montrer aujourd'hui, en vous expliquant ces paroles du second article du symbole Son Fils unique, Notre-Seigneur; et parce qu'il est important que vous connaissiez le Messie dans ses abaissements, de même que dans ses grandeurs, je vous le ferai voir ensuite dans les mystères de ses humiliations, je veux dire de son incarnation, de sa naissance, de sa vie et de sa

:

(59) De civ. Dei, b. x, cap. 29.

mort; enfin, après vous l'avoir présenté sous ces aspects, je vous le découvrirai ressuscitant plein de vie, et environné de gloire : tel est l'ordre des matières renfermées dans le symbole, celui que je dois suivre par conséquent.

De tels sujets, mes frères, pourrraient-ils vous paraître peu dignes de vous ? Si quel-, qu'un le pensait, ce que je ne puis pas même soupçonner, ah ! qu'il serait lui-même indigne de ces sujets! c'est ce que je lui dirais d'abord, et ensuite je le prierais de considérer ces maximes incontestables et divines, qu'un chrétien fait profession de ne connaître que Jésus, et Jésus crucifié ; que son salut consiste dans cette connaissance; que quiconque ne connaît pas le Fils ne peut connaître le Père; que nous n'aimons le Père et le Fils qu'à proportion que nous les connaissons qu'enfin les vérités que je vais vous annoncer, ont coûté aux apôtres les travaux les plus pénibles, aux martyrs les combats les plus terribles, aux confesseurs les exils les plus durs, à l'Eglise les larmes les plus amères; sera-ce trop, vous demanderai-je ensuite, sera-ce trop qu'elles Vous coûtent ici quelques heures de votre attention?

Les grandeurs de Jésus-Christ dans le sein de son Père éternel, c'est le premier objet pour lequel je vous la demande aujourd'hui ; ce sera celui de cette instruction.

POINT UNIQUE.

Je vous le disais, mes frères, en vous expliquant ces mots: Je crois en Dieu, ils s gnifient ces trois choses je crois qu'il y a un Dieu; que ce Dieu est infaillible dans 33 parole; qu'il est infiniment aimable, et qu'il mérite toutes les affections de notre cœur. Il en est ici de même ; ces mots : Je crois en Jésus-Christ, signifient 1° je crois que Jésus Fils de Marie est le Messie promis, parce qu'il en a tous les caractères; je crois 2° que ce Messie doit être cru en tout ce qu'il dit, parce qu'il est visiblement l'envoyé de Dieu pour me délivrer de l'erreur, et qu'un tel envoyé ne peut me tromper ; je crois 3' que ce Messie est digne de l'amour le plus parfait dont je suis capable, parce qu'il est le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu du vrai Dieu, qui n'a pas été fait, mais engendré, qui est consubstantiel au Père, et par qui tout a été fait. (Joan. 1.) C'est ainsi, mes frères, que le symbole de Constantinople explique celui des apôtres; c'est dans la méditation de ces paroles que nous allons apprendre à connaître les grandeurs de Jésus-Christ dans le sein de son Père, à les admirer, à les adorer de toute no

tre âme.

L'un et l'autre symbole nous disent d'abord que Jésus-Christ est le Fils de Dieu; c'est l'expression que nous trouvons cent fois répétée dans les Ecritures. Quand ce di. vin Jésus est annoncé à Marie: Il sera grand,

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