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chaient pour former un obstacle à sa retraite: Per calcatum perge patrem, per calcatam perge matrem ; il sait enfin qu'à l'imitation de Lévi aux eaux de contradiction, il doit déclarer à ses parents qu'il ne les connaît point: Nescio vos (Deut. XXXIII, 9); mais, hélas ! qu'une famille éplorée a de pouvoir sur un enfant! Celui dont nous parlons cédera donc, il s'offrira, il s'immolera; mais à qui? à l'ambition de ses parents, à leur avarice, à leur cupidité, à leurs desseins sacriléges c'est ainsi que des enfants se sacrifient, ou plutôt c'est ainsi que des pères et mères sacrifient leurs enfants; pouvonsnous y penser sans horreur?

Quand nous lisons dans l'histoire ancienne que certains peuples immolaient leurs enfants aux idoles qu'ils s'étaient forgées, qu'un père suivant les rites de sa religion sacrifiait une autre partie de lui-même, et que par principe de piété il portait le coup de la mort à ce tendre enfant, à qui par tous les droits de la nature il devait conserver la vie, nos sens se révoltent, notre âme est saisie d'effroi. Quand nous lisons dans le psaume cv et ailleurs, que les Israélites faisaient couler le sang de leurs enfants sur l'autel du dieu Méloch, notre foi en est alarmée; nous avons peine à croire que des hommes si chéris, si puissamment protégés, si visiblement soutenus du Tout-Puissant, soient tombés dans une idolatrie si monstrueuse; une ingratitude si marquée envers leur bienfaiteur nous cause autant d'indignation que d'étonnement. Ah! comment nous défendrionsnous de ces sentiments, quand nous voyons des pères et mères qui forcent la vocation de leurs enfants? quand, suivant les principes de la foi, nous réfléchissons qu'ils les sacrifient, non plus comme les païens et les Israélites, en les faisant mourir au milieu d'un feu qui s'éteint, mais en leur préparant un feu qui ne s'éteindra jamais, en leur faisant embrasser un état qui les rendra malheureux pendant leur vie, beaucoup plus malheureux à leur mort, infiniment plus malheureux pendant toute l'éternité? Voilà, mes frères, le sort moralement certain de quiconque entre dans l'état ecclésiastique sans vocation.

Oh que ces réflexions sont sérieuses et touchantes que je souhaiterais en avoir pénétré tous les parents, tous les enfants, tous ceux qui m'ont entendu! Alors les parents se bornant à ce qui est de leur devoir, à étudier les inclinations de leurs enfants, à cultiver leurs talents, à les diriger vers l'état pour lequel ils leur remarqueraient plus de goût et de dispositions, ils ne forceraient jamais leur vocation. Alors les enfants s'élevant au-dessus des menaces et des mauvais traitements, s'écrieraient avec l'Apôtre Si le Seigneur est pour nous, qui sera contre nous ? « Si Deus pro nobis, quis contra nos? » (Rom. VIII, 31) et avec le bienheureux François d'Assise, quand je n'aurai plus de père sur la terre, c'est alors que je dirai plus véritablement: Notre père qui êtes dans les cieux. Alors enfin, vous tous qui

m'avez entendu ! vous seconderiez de tout votre pouvoir les vœux que forme l'Eglise dans le temps des ordinations; alors vous observeriez avec soin les jeunes et l'abstinence qu'elle vous prescrit chaque quatretemps. Alors à l'austérité du jeune et de l'abstinence, vous joindriez les œuvres de miséricorde et de charité. Alors unissant votre voix à celle des âmes saintes, vous réclameriez la protection des saints qui sont dans le ciel, et de ceux surtout qui se sont sanctifiés dans le ministère sacré; vous prieriez, vous conjureriez, vous presseriez le père de famille d'envoyer des ouvriers dans sa moisson: Seigneur! diriez-vous avec les apôtres, faites connaître ceux que Vous avez choisis. Donnez-nous des pasteurs selon votre cœur, des pasteurs qui par leur application, leur parole et leur exemple, nous conduisent à la vie éternelle. Ainsi soit-il.

INSTRUCTION CXVIII.

SUR LE SACREMENT DE MARIAGE.
Sa célébration et ses cérémonies.
Sacramentum hoc magnum est. (Ephes. v. 32.)
Ce sacrement est grand.

Le mariage dont parle ici saint Paul et qu'il appelle un grand sacrement, peut être considéré, ou comme contrat naturel, ou comme contrat civil, ou comme contrat ecclésiastique. Comme contrat naturel, c'est une union de l'homme et de la femme, établie de Dieu même dans l'état d'innocence, pour le soutien de l'un et de l'autre, et pour la propagation du genre humain. Comme contrat civil, c'est une société formée par l'homme et la femme selon les lois et les ordonnances des princes, en vertu de laquelle l'homme et la femme se transfèrent réciproquement le domaine de leurs corps. Comme contrat ecclésiastique, c'est un lien sacré qui unit l'homme et la femme pour vivre ensemble chrétiennement et élever leurs enfants selon Dieu.

Sous ce dernier aspect, saint Paul l'appelle un sacrement et un grand sacrement; « Magnum sacramentum. » Il l'appelle un sacreinent, parce que Jésus-Christ par sa passion nous a mérité la grâce nécessaire pour perfectionner l'amour naturel des époux, pour affermir leur union dissoluble, et pour sanctifier les personnes mariées. Anathème à qui dirait le contraire; c'est là une première vérité que saint Paul insinue en disant : Epoux l'aimez vos femmes comme Jésus-Christ a aimé son Eglise (Ephes. v, 25), et qu'il exprime par ces premières paroles de mon texte : Sacramentum hoc.

Cet apôtre ne se contente pas d'appeler le mariage un sacrement, mais pour la gloire et la consolation des époux chrétiens, il l'appelle un grand sacrement en Jésus-Christ et en son Eglise, en ce que l'union de l'homme avec la femme représente l'union de Jésus Christ avec son Eglise, en ce que le mariage légitime, à commencer par celui d'Adam, a

toujours figuré l'alliance de Jésus-Christ avec son Eglise. En effet, comparez ici la figure avec la chose figurée, combien de traits de ressemblance? Adam dit que l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à son épouse, et Jésus-Christ a quitté le sein de son père pour s'unir à son Eglise. Eve est tirée du côté de l'homme, et l'Eglise est tirée du côté de Jésus-Christ. L'homme est le chef de la femme, et Jésus-Christ est le chef de l'Eglise. L'homme et la femme ne sont qu'une même chair, et Jésus-Christ et son Eglise ne font qu'un même corps. L'homme aime son épouse qui lui est soumise, et Jésus-Christ aime son Eglise qui l'adore. L'union de l'homme avec sa femme est indissoluble, l'union de Jésus-Christ avec son Eglise ne finira jamais. Combien de rapports entre ces deux unions? quel honneur aux époux de représenter ainsi le Verbe incarné quelle excellence du signe sensible qui les élève à cet honneur !

Non-seulement le Maître des nations en a fait voir la dignité et la grandeur, mais prévoyant les grands biens qui pouvaient revenir à toute l'Eglise si les Chrétiens connaissaient la sainteté du mariage, i les en instruit avec le plus grand soin dans plusieurs de ses Epîtres, surtout dans sa le aux Corinthiens. C'est aussi, mes frères, ce qu'ont fait les vrais pasteurs dans tous les temps postérieurs aux siècles de l'Apôtre, et c'est ce que je me propose de faire dans cette instruction et les deux suivantes.

Dans l'une, je considérerai le mariage par rapport à sa célébration même; dans les autres je le considérerai par rapport à ses fins expliquons aujourd'hui le premier de ces points.

POINT UNIQUE.

Que doivent faire l'homme et la femme avant de célébrer, lorsqu'ils célèbrent et après qu'ils ont célébré le mariage? ce sont les trois questions que je me propose de résoudre dans cet entretien heureux les époux qui, après m'avoir entendu, pourront se féliciter d'avoir rempli les différentes obligations que je vais leur mettre sous les yeux! heureux ceux mêmes qui ont eu le

alheur de les négliger, pourvu qu'enfin ils condamnent aujourd'hui leur négligence et qu'ils remédient à tous les maux que cette négligence a causés! c'est un des grands biens que j'ai en vue dans ce moment que je consacre autant à l'utilité de ceux qui sont déjà époux, qu'à la sanctification de ceux qui pensent à le devenir.

Ce que la célébration du mariage exige de ceux-ci avant qu'ils ne s'y engagent, c'est qu'ils examinent si rien ne les arrête, surtout du côté des lois. La raison qui oblige, ef qui même oblige très-étroitement à cet examen, c'est, mes frères, qu'il y a des obstacles, les uns de droit naturel, les autres de droit divin, et les autres de droit

humain, qui empêchent tellement le mariage, qu'ils le rendraient nul, invalide entre les personnes qui le contracteraient sans égard à ces obstacles, quand même ils ne les auraient pas connus. Les voici ces obstacles que nous appelons empêchements dirimants.

Le premier de ceux que la loi naturelle même a établis, c'est le défaut de puberté, lequel cesse, pour l'ordinaire dans les hommes, à l'âge de quatorze ans accomplis, et dans les filles, à l'âge de douze ans aussi accomplis.

Le second est l'erreur de la personne qui empêche la vérité du consentement intérieur, sans lequel il n'y a point de mariage. Je dis l'erreur de la personne et non de ses qualités, parce que celle-ci n'empêche pas la vérité du consentement, ni du mariage par conséquent.

Le troisième est une violence injuste, et telle qu'elle ôte toute la liberté du consentement. Quand bien même elle n'ôterait pas toute la liberté, elle rendrait encore nul le mariage, non plus alors de droit naturel, mais de droit ecclésiastique. Ainsi l'a voulu l'Eglise pour ôter aux personnes puissantes la pensée d'user de violence et d'injustice en ce point.

Le quatrième est la folie, lorsqu'elle est telle que la personne ne sait ce qu'elle fait, puisqu'alors il n'y a point de consentement, lequel est un acte de la volonté, précédé de connaissance et accompagné de liberté.

Le cinquième (120) est l'impuissance de consommer le mariage avec la personne qu'on épouse lorsqu'elle est perpétuelle et antérieure au mariage.

Le sixième est l'union d'une femme avec un second mari, le premier étant vivant; rien n'est plus opposé à la fin principale du mariage.

Le septième enfin est la parenté de tous ceux qui sont en ligne directe, soit en montant, soit en descendant.

Le premier, ou plutôt l'unique empêchenient qu'établit la loi évangélique, est le lien du mariage que Jésus-Christ a rappelé à son premier état, où l'homme ne devait avoir qu'une seule femme. N'avez-vous pas tu, disait le Sauveur aux pharisiens, que celui qui a créé l'homme au commencement, n'a créé qu'un homme et qu'une femme ? n'est-il pas dit encore que l'homme laissera son père et sa mère; qu'il s'attachera non à ses femmes, mais à sa femme, et qu'ils seront non trois, mais deux dans une chair? C'est pourquoi ils ne sont plus deux, mais une seule chair : « Itaque jam non sunt duo, sed una caro. » Ce sont les paroles de Jésus-Christ même (Matth. XIX, 4-6), qui seules prouveraient invinciblement que Luther, Mélanchthon et Bucer ont été des séducteurs, puisque, contre cette loi formelle de Jésus-Christ, ont permis au Landgrave de Hesse d'épouser une seconde femme du vivant de la première, sans répudier celle-ci et sans

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(120) Un pasteur omet celui-ci en public, il peut aussi en omettre plusieurs autres, dont il croira inutile de parler à son peuple.

cesser d'habiter avec elle. Anathème à ces faux prophètes; anathème à ceux qui disent qu'il est permis aux Chrétiens d'avoir plu sieurs épouses à la fois, et qu'aucune loi de l'Evangile ne le défend. Cette défense est si stricte que ni un mari, ni une femme ne peuvent passer à de nouvelles noces, sous prétexte d'une longue absence de l'un des deux; il faut de plus des preuves certaines de la mort d'un des époux. Ainsi l'exige le respect dû à cette loi évangélique, qui met le lien du mariage existant au rang des empêchements dirimants.

Le premier qu'établit le droit humain est l'erreur de la condition, lorsqu'on épouse une personne esclave qu'on croit de condition libre; cet empêchement n'a point lieu en ce royaume, où il suffit de mettre le pied pour recouvrer sa liberté.

Le second empêchement de droit ecclésiastique est le vœu solennel de continence que font les personnes qui embrassent la profession religieuse. Ce vœu est comme un mariage spirituel de l'âme avec Jésus-Christ à qui elle dit qu'elle le prend pour époux, qu 'elle veut lui être attachée par un en indissoluble. C'est sur cette considération qu'est fondée la loi de ce second empêchement. Il porte ses effets plus loin encore, non-seulement il rendrait nul un mariage qui le suivrait, mais il dirime un mariage qui le précède, lorsqu'il n'est encore que ratifié. Les novateurs, qui ont osé enseigner Je contraire, ont été frappés des anathèmes de l'Eglise.

Le troisième empêchement qu'elle a établi est celui de la parenté, lequel a la force de rendre nul tout mariage que des parents au second, au troisième ou au quatrième degré, contracteraient sans dispense, quand même ils ignoreraient cet empêchement.Deux raisons surtout ont porté T'Eglise à cette sanction : l'une est d'étendre les liens de la charité en étendant les alliances à un plus grand nombre de familles; l'autre est de prévenir certains désordres que la familiarité plus grande entre des parents pourrait occasionner, s'ils espéraient en couvrir la honte par un mariage futur. C'est pour les mêmes raisons que l'Eglise a voulu que l'alliance charnelle et l'alliance spirituelle fussent aussi un quatrième et un cinquième empêchement, dont voici la nature et l'étendue :

L'alliance charnelle consiste en ce que celui qui s'est uni à une autre personne est allié à tous les parents de cette personne. Ou cette union est légitime et autorisée par le mariage, et l'empêchement qui en résulte s'étend jusqu'au quatrième degré; ou cette union est criminelle et ne présuppose point de mariage, et l'empêchement qui en naît s'étend jusqu'au second degré inclusivement. Dans ce second cas le mariage contracté entre une de ces deux personnes, et une parente au premier ou au second degré est nul;

dans le premier cas le mariage contracté par un époux, après la mort de son épouse avec une parente de cette épouse au second, an troisième ou au quatrième degré est invalide; l'usage en serait très-criminel devant Dieu, il serait sans effet civil et ecclésiastique devant les hommes.

L'alliance spirituelle est une alliance qui se forme à l'occasion du baptême, et qui produit un empêchement dirimant: 1° entre la personne qui baptise et celle qui est baptisée; 2° entre la personne qui lève et celle qui est levée des fonts de baptême; 3° en-. tre les pères et mères, et les parrains et marraines. Je ne parle ici que des parrains et marraines de baptême, parce que l'usage d'en prendre pour la confirmation ayant cessé parmi nous, l'empêchement qui en résulte n'y a pas lieu.

Un sixième, que nous appelons l'empêchement du crime, résulte : 1° de l'homicide d'un époux, à la mort duquel la partie survivante a conspiré ou consenti; 2° de l'homicide précédé de l'adultère quand bien même l'époux survivant n'aurait pas consenti à la mort de l'épouse à laquelle il survit; 3° de l'adultère auquel a été jointe la promesse acceptée du mariage futur après la mort de l'époux qui y fait obstacle; 4 du faux mariage contracté de mauvaise foi entre deux personnes, dont l'une est mariée. L'Eglise veut ôter aux époux la pensée de commettre ces crimes en vue d'un futur mariage, et rendre plus confiante la fidélité conjugale; c'est le motif pour lequel elle a établi ce sixième empêchement.

Un septième que l'Eglise a établi pour éloigner ses enfants du danger de perdre la foi, est la différence de religion par laquelle on entend, non l'hérésie, mais l'infidélité d'une personne qui n'a jamais reçu le baptême. L'infidélité peut encore produire un autre effet; non-seulement elle annulerait le mariage de deux personnes, dont l'une serait fidèle et l'autre infidèle, mais elle dirimerait le mariage qu'elles auraient contracté avant le baptême, en cas que l'une se convertisse et que l'autre l'abandonne en haine de la religion chrétienne (121)

Un huitième empêchement de droit ecclésiastique, est l'ordre sacré qui rendrait nul le mariage qu'un sous-diacre contracterait après son ordination. En vain l'hérétique accuserait-il cette loi d'injustice, il ne faut qu'en considérer la fin pour en voir la sagesse et l'équité. L'Eglise l'a portée, afin que ses ministres soient plus détachés du monde, des affaires temporelles, des embarras qu'entraîne après lui le mariage; afin qu'ils soient par conséquent plus libres pour vaquer au service de Dieu et du prochain, et plus purs de corps et d'esprit pour approcher du Saint des saints et pour servir au ministère du sanctuaire. Combien d'autorités de l'Ecriture, soit de l'Ancien et du Nouveau Testament, je pourrais ici vous

(121) Quid, si infidelis consentiat pacifice cohabitare? Non est operis præsentis tales quæstiones solvere, Bcd sequentis in Nov. Test.

rapporter pour justifier à vos yeux ce dessein, s'il ne se justifiait assez par luimême?

Un neuvième empêchement de droit ecclé siastique fondé sur les mêmes raisons que ceux d'alliance et de parenté, est l'honnêteté publique qui résulte des fiançailles et du mariage ratifié. Dans ce dernier cas elle s'étend au quatrième degré, et dans le premier, c'est-à-dire lorsque les fiançailles viennent à se dissoudre, soit par la mort d'une des parties, soit par quelque autre événe ment, elle ne s'étend qu'au premier degré, et empêche seulement que le fiancé et la fiancée n'épousent les parents l'un de l'autre au premier degré.

Un dixième empêchement est la clandestinité qui rend nul an mariage auquel n'as sisterait pas le curé avec deux témoins.

Enfin un onzième et dernier, est le rapt par lequel on entend l'enlèvement d'une personne contre son gré ou contre le gré de ses parents (122). L'auteur de cet enlèvement ne peut épouser la personne enlevée jusqu'à ce qu'elle soit remise en un lieu sûr et libre à peine de nullité; c'est l'effet propre de cet empêchement et de tous ceux que je viens de nommer; c'est pourquoi on les appelle dirimants. Ceux que nous appelons non dirimants ou prohibitifs seulement, sont ceux qui, sans annuler le mariage le rendent illicite ou non permis; les voici au nombre de trois seulement :

Le premier est la défense que fait l'Eglise de se marier en certains temps, en certains lieux, avec certaines personnes, sans certaines formalités. En certains temps; c'est-àdire, en Avent jusqu'au lendemain de l'Epiphanie, en carême jusqu'au lendemain de l'oclave de Pâques : en ce diocèse les jours de dimanches, les jours de fêtes, et même les autres jours après dîner. En certains lieux; il n'est permis de se marier qu'à l'église, et cette église est nécessairement l'église paroissiale, s'il n'y a dispense. Avec certaines personnes, comme font les hérétiques et les excommuniés non absous. Sans certaines formalités, dont la première est la publication des banes, ordonnée pour rendre les mariages publics, pour exhorter les fidèles à prier Dieu pour les futurs époux, et pour découvrir s'il y a des empêchements au mariage. En vertu de cette publication, à moins que de très-fortes raisons n'en dispensent, Vous êtes tous tenus, sous peine d'excommunication, de révéler les empêchements que vous connaftriez, quand bien même vous seriez d'une autre paroisse, d'un autre diocèse et d'un autre royaume: la raison en est qu'un Curé ne publie les bancs ni en son nom, ni au nom de son évêque, mais au nom de l'Eglise dont l'autorité n'est bornée, ni à une paroisse, ni à un diocèse, ni a un Etat.

La seconde formalité sont les fiançailles qui ailleurs se célèbrent, non comme ici

immédiatement avant le mariage, mais ou le dimanche précédent, ou même avant la publication des bancs, depuis laquelle jusqu'à la célébration du mariage, les futurs époux ne doivent, sous aucun prétexte, demeurer dans la même maison.

La troisième formalité est le consentement des pères et mères, ou de ceux qui en tiennent la place. Le jeune Tobie épousa Sara sans que son père et sa mère le sussent, et il est des cas où une jeune personne peut se marier sans le consentemont, et même contre la volonté de ses pères et mères; mais ces cas sont extraordinaires, le droit tant naturel et divin, que civil et canonique, a toujours exigé le consentement des pères et mères au mariage de leurs enfants; il serait déclaré nul quant aux effets civils en ce royaume, s'il n'était revêtu de cette formalité, ou si l'enfant qui se marie n'avait vingtcinq ans : en ce cas même et tandis qu'il n'a pas trente ans, il serait libre à ses parents de le déshériter comme ayant manqué au respect, et à la déférence due à ceux de qui il tient la vie, et de qui il devait prendre les conseils, au moins comme de personnes qui ont plus d'expérience et de discernement. Quel scandale en effet que des jeunes personnes esclaves d'une passion qui les aveugle, méprisent les avis de leurs pères et mères sur une matière si importante? à qui leur conduite pourrait-elle ne point paraître très-criminelle et très-condamnable? rappelez-vous ici, jeunesse chrétienne! celle qu'ont tenue Isaac et Rachel par rapport à leur mariage; voyez comme ils ont reçu de leurs parents, celui-là une épouse et celleci un époux. Faites sur cet exemple les réflexions suivantes de saint Ambroise, que la pudeur ĉte à une vierge la pensée de se choisir un mari, qu'elle doit laisser ce soin à ses parents, qu'elle doit l'accepter de leurs mains comme lui étant donné de Dieu, rien ne vous apprendra mieux la conduite que vous devez tenir à l'égard de vos parents lorsqu'il s'agit du mariage.

Le second empêchement prohibitif est celui qui naît des fiançailles, lesquelles tandis qu'elles subsistent, empêchent qu'on ne puisse se marier avec une autre personne que son fiancé et sa fiancée; ailleurs il serait nécessaire de m'étendre sur les causes suffisantes pour la dissolution des fiançailles, ici où elles se célèbrent au moment qui précède celui du mariage, et où par conséquent leur dissolution n'a pas lieu, je dirai seulement qu'ailleurs on compte ordinairement dix de ces causes.

Le troisième empêchement prohibitif est le vœu simple, ou de chasteté, ou de célibat, ou de religion. Le vœu en général est une promesse de quelque bonne œuvre, faite à Dieu avec délibération. On en distingue de deux espèces, un simple et un solennel. Le vou simple est celui qu'une personne fait en particulier, sans cérémonie, sans éclat,

(122) Les lois de l'Etat portent la peine de mort contre ce crime, et les lois de l'Eglise la peine de l'excommunication.

sans approbation de l'Eglise; le vœu solennel est celui qui se fait publiquement, à haute voix, à la face de l'Eglise, et dans une religion approuvée du Saint-Siége. Le premier rend le mariage illicite, s'il a pour objet la chasteté, le célibat ou l'entrée en religion et le second le rend nul, à moins que le supérieur légitime n'ait dispensé de l'obligation de les accomplir.

L'Eglise, c'est-à-dire, les évêques et le Pape, peuvent en effet dispenser de ces derniers empêchements, de ceux aussi de parenté, d'affinité, et de plusieurs autres que leur autorité a établis; mais afin de ne point vous éloigner de l'esprit de l'Eglise, lorsque détenus par quelqu'un de ces empêchements, il vous faudra recourir à ces supérieurs ecclésiastiques, voici les observations qu'il est de mon devoir de vous faire et du vôtre de pratiquer le cas échéant.

La première est que vous ne devez jamais demander de dispense, pas même celle de publication du troisième et du second ban, sans cause légitime. La raison en est qu'un supérieur ne peut, lorsqu'il n'y a pas de cause légitime, vous en accorder aucune sans péché. Où il y a une nécessité pressante, la dispense est excusable, écrivait saint Bernard au Pape Eugène; où il y a une utilité évidente et commune, la dispense est louable; où il n'y a ni nécessité, ni utilité, ce n'est pas une dispensation fidèle, mais une cruelle dissipation à laquelle vous concourriez, en sollicitant une dispense sans une cause légitime et pressante. La seconde est que le supérieur vous dispensant de la loi, il convient que vous répariez cette brêche par quelques aumônes, lorsque vos facultés vous permettent d'en faire. La troisième est que jamais on ne vous vend et vous n'achetez de dispense; ce serait un trafic criminel semblable à celui de Giézi et de Simon le Magicien; la religion réprouve jusqu'aux termes d'achat ou de réachat dont vous vous servez, les uns par ignorance, et les autres par malice; ce que le supérieur ecclésiastique exige de vous, il l'exige non comme prix de sa grâce, mais en forme d'aumônes, lesquelles ici sont en effet destinées au soutien de nos pauvres, et à Rome à l'entretien des missionnaires apostoliques, et à d'autres œuvres saintes. La quatrième enfin, c'est qu'un mariage contracté avec un empêchement dirimant est tellement nul aux yeux de Dieu même, que sa célébration serait un horrible sacrilége, qu'il ne donne aucun droit aux prétendus époux, que l'usage en serait abominable, et que les deux coupables doivent être séparés sans espérer d'obtenir dispense. Celui, dit le concile de Trente, qui méprise témérairement les préceptes salutaires de l'Eglise, ne mérite pas d'en éprouver la bonté; il n'en est pas de même, ajoutent les Pères, si après avoir observé toutes les formalités requises, on vient à découvrir quelque empêchement secret dont il soit probable que les parties n'aient rien su, on pourra alors leur accorder la dispense plus facilement et gratuitement. (Sess. 24, 5.)

Ce sont-là les observations que je devais vous faire sur les dispenses en général, et sur celles qui concernent le mariage en par. ticulier, avant de finir cette première partie de mon instruction. Vous y avez vu les divers empêchements que le droit naturel, le droit divin et le droit ecclésiastique forment à la célébration du mariage, la nécessité de les connaître et l'obligation d'examiner s'il y en a avant de contracter une alliance de celte nature: voyons maintenant ce que le mariage exige lorsqu'on le célèbré, et qu'elles sont les vertus que les futurs époux doivent pratiquer alors principale

ment.

La première de ces vertus est une piété digne des patriarches et des justes qui se sont sanctifiés dans l'état du mariage. Nous sommes les enfants des saints, doivent se dire les personnes qui se proposent d'unir leur sort, comme Tobie le disait à la jeune Sara; nous ne devons pas nous unir ensemble comme les infidèles qui ne connaissent pas Dieu; ces hommes ne se marient que dans des vues humaines et souvent criminelles; ils ne cherchent dans l'alliance conjugale, les uns, que les grands biens; les autres que la naissance; les autres que l'esprit et l'enjouement; la plupart que les plaisirs et la satisfaction des sens, comine les animaux sans raison. Non, ce n'est point ce que nous devons nous proposer dans notre union réciproque, mais les vrais motifs pour lesquels nous devons le former, c'est de nous sanctifier, et d'avoir des enfants qui bénissent le saint nom du Seigneur dans les siècles des siècles. Si nous devons rapporter toutes nos actions à Dieu, combien n'est-il pas juste de lui rapporter celle-ci de laquelle dépend notre vie, notre mort, notre salut éternel? Ce sont là les grands desseins dont des futurs époux doivent s'entretenir et s'occuper dans ces jours où ils se disposent prochainement à s'unir par les liens indissolubles du mariage.

Imitateurs fidèles du jeune Tobie dans leurs paroles, ils doivent aussi l'imiter dans le choix de la personne à laquelle ils veulent unir leur destinée. O le beau modèle à proposer à tous ceux qui pensent au sacrement de mariage! Dans celui de Tobie tout est égal de part et d'autre; il y a égalité de vertus, égalité de religion, égalité d'âge, égalité d'inclinations, égalité de naissance, égalité de fortune, égalité dans tout ce qui peut contribuer à la félicité réelle des époux. C'est, Chrétiens, cette égalité que vous devez aussi chercher dans l'alliance conjugale.

La première chose dont vous devez vous assurer d'abord, c'est que la personne à laquelle vous vous proposez de vous unir ait elle-même beaucoup de religion et de foi. Voudriez-vous vous exposer à perdre la vôtre? voudriez-vous vivre avec une personne qui vous gênerait dans vos exercices de piété? voudriez-vous former des liens indissolubles avec une personne qui est ennemie de votre Dicu? qui est 'constamment l'esclave du démon? qui marche d'un pas ferme dans

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