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Sur l'Eau régale, ou Acide nitro-muriatique.

PAR SIR HUMPHRY DAVY.

Traduit du nouveau Journal de l'Institution royale, vol. I.

St l'acide nitrique concentré, saturé de gaz nitreux, est mêlé avec une solution saturée de gaz acide muriatique, on remarque des effets qui auraient pu facilement se prévoir en considérant l'action d'un acide nitreux de même force sur une quantité d'eau égale à celle de la solution : le mélange acide, ainsi formé, n'exerce aucune action ni sur l'or ni sur le platine.

De plus, si des volumes égaux de gaz acide muriatique et de gaz nitreux sont mêlés sur le mercure, et si on y ajoute un demi-volume d'oxigène, on observera une condensation subite; mais elle ne sera pas plus considérable qu'on aurait dû l'attendre de la formation du gaz acide nitreux. Quand celui-ci est décomposé ou absorbé par le mercure, on trouve que l'acide muriatique n'a éprouvé aucune altération, et qu'il est seulement mélangé avec une certaine portion de gaz nitreux.

Il semble, d'après cela, que le gaz acide nitreux et le gaz acide muriatique n'exercent l'un sur l'autre aucune action chimique.

Si l'acide nitrique incolore et l'acide muriatique du commerce sont mêlés ensemble, on remarque que ce mélange devient jaune immédiatement, et qu'il acquiert la faculté de dissoudre l'or et le platine. Si le mélange est chauffé, le chlore pur se dégage et la couleur devient plus foncée. Une chaleur plus prolongée force de nou

velles portions de chlore à se dégager, mais elles sont mêlées avec du gaz acide nitreux, qui, étant beaucoup plus absorbable par l'eau, peut en être séparé à l'aide d'une petite quantité de ce liquide : si l'opération a été continuée assez long-temps, la couleur du mélange devient très-foncée, et on ne peut pas en retirer de nouvelles quantités de chlore; il perd la propriété d'agir sur l'or et le platine, et ce qui s'en dégage est un mélange d'acide nitreux et d'acide muriatique.

Il semble suivre de ces observations, qui ont été trèssouvent répétées, que l'acide nitro-muriatique doit ses propriétés particulières à une décomposition mutuelle des acides nitrique et muriatique; et que ce qui en provient est de l'eau, du chlore et du gaz acide nitreux. Les attractions qui amènent ces résultats paraissent être celle de l'oxigène pour l'hydrogène et celle du gaz acide nitreux pour l'eau.

L'exactitude de ces conclusions résulte de la circonstance que, quoique le gaz nitreux et le chlore n'exercent aucune action l'un sur l'autre quand ils sont parfaitement secs, il se produit, quand il y a de l'eau, une prompte décomposition qui donne naissance à de l'acide nitreux et à de l'acide muriatique. Il est aisé de calculer, d'après la doctrine des proportions définies, quelle quantité de chlore est produite dans l'acide nitro-muriatique; car chaque 67,5 parties en poids d'acide nitrique réel, équivalant à 79 parties en poids d'acide hydro-nitrique décomposé, il doit se produire 44 parties de chlore.

La connaissance de la nature de l'eau régale servira à expliquer plusieurs particularités de son action sur les

métaux et les alcalis. Cet acide n'oxide pas l'or et le platine, mais détermine uniquement leur combinaison avec le chlore; les sels neutres qu'il produit ne sont que des mélanges et non des combinaisons chimiques de nitrates et de composés de chlore.

M. Berthollet, avec sa sagacité ordinaire, avait établi depuis long-temps que l'acide nitro-muriatique doit ses propriétés à la production du chlore. Ses conclusions, du reste, sont parfaitement conformes aux miennes, si, à l'hypothèse qui considère cet acide comme un corps composé, on substitue la théorie qui le regarde comme un être simple.

M. Berzelius, dans une lettre écrite d'un ton peu convenable à un chimiste d'une si grande réputation, a mis en avant que l'azotane ou le composé détonnant de chlore et d'azote est de l'acide nitro-muriatique sec. Il est difficile de découvrir quelle signification il attache à ce terme, et il est entièrement inutile de réfuter une assertion aussi vague et aussi mal fondée.

Sur les Lampes de sûreté de sir HUMPHRY DAVY.

Nous avons publié dans le précédent cahier des Annales la traduction du Mémoire dans lequel sir Humphry Davy a donné l'histoire de ses recherches sur les lampes de sûreté; nous allons extraire d'un nouvel écrit que ce savant a inséré dans le Journal de l'Institution royale, les indications pratiques qu'il recommande aux propriétaires et inspecteurs des mines, aussibien qu'aux simples mineurs qui auront l'occasion d'employer son appareil.

Les ouvertures de la toile métallique ne doivent pas avoir plus de de pouce carré. La grosseur du fil peut être quelconque ; ceux qui ont deà de pouce anglais de diamètre semblent les plus convenables. Des toiles de la finesse requise se trouvent chez tous les fabricans de cribles. Les modèles que l'auteur a envoyés dans les mines renfermaient 48 ouvertures dans un pouce carré. Les toiles en fer doivent être préférées : quand on leur donne une épaisseur suffisante, elles ne peuvent ni se fondre ni brûler; la couche de rouille dont leur surface se couvre bientôt défend leur intérieur de l'action de l'air.

Lorsque la cage de la lampe est cylindrique, son diamètre ne doit pas surpasser deux pouces; dans des cylindres plus larges, la combustion de l'air inflammable échauffe trop le sommet: aussi sera-t-il convenable de placer toujours au-delà de cette partie du cylindre métallique une seconde enveloppe de même espèce, et séparée de la première de ou de de pouce. En ployant la toile pour la façonner en cylindre, l'ouvrier doit avoir l'attention de ne laisser aucune ouverture dans les joints; car l'instrument ne saurait réussir s'il présentait dans une seule de ses parties des ouvertures plus considérables que celles de la toile métallique. L'auteur recommande expressément de fixer l'enveloppe au corps de la lampe par plusieurs vis; sa forme peut d'ailleurs être quelconque; on peut aussi faire brûler la mèche de mille manières.

Si la lampe de sûreté est introduite dans une atmosphère mêlée d'air inflammable, le premier effet qu'on remarque est une augmentation dans le diamètre et la

longueur de la flamme. Lorsque ce gaz forme le du volume de l'air, le cylindre est rempli d'une flamme bleue et faible, dans l'intérieur de laquelle la mèche paraît brûler avec assez de vivacité; mais quand la proportion d'air inflammable s'élève jusqu'à ou du volume total, la vive lumière qu'il donne et qui remplit également toute la capacité du cylindre métallique empêche de distinguer la faible lueur de la mèche. Aussi long-temps qu'un mélange détonnant de gaz est en contact avec la lampe, elle donne de la lumière; quand elle s'éteint, et ceci arrive lorsque l'air méphitique (foul) compose le tiers du volume de l'atmosphère l'air n'est plus propre à la respiration, ou occasione du moins quelque souffrance.

La lampe de sûreté consume rapidement les gaz inflammables que l'air peut renfermer, et abaisse bientôt leur proportion au-dessous du terme où l'explosion peut avoir lieu, Aussi à peine peut-il arriver, dans la pratique, que la lampe soit employée dans des mélanges fortement détonnans; mais, dans ce cas même, elle serait parfaitement sûre; car la toile ne transmet pas l'explosion lors même que les fils qui la composent ont été chauffés jusqu'au rouge.

La lampe de sûreté, plongée dans des atmosphères beaucoup plus inflammables que celles qu'on trouve dans les mines, n'a jamais produit d'explosion; il est vrai que, lorsque les mélanges étaient détonnans, l'auteur se servait d'une toile métallique qui renfermait goo ouvertures dans un pouce carré.

Si, dans quelques circonstances, le mineur était forcé de travailler au milieu d'une atmosphère détonnante, il

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