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stabilité. Sigebert de Gemblours fait mention de la vie de saint Marius, écrite par Dyname.

La Vie de saint Maxime, abbé de Lérins et ensuite évêque de Riez, était plus courte dans le principe, parce que l'auteur avait manqué de Mémoires pour l'écrire ; mais Urbique, l'un des successeurs du saint sur le siége de Riez, lui en ayant fourni. Dyname travailla de nouveau cette vie qu'il mit en forme de panégyrique pour être lue tous les ans au jour de l'anniversaire de sa fête. Surius l'a rapportée au 27 de novembre, et Barali l'a reproduite également dans sa Chronologie des hommes illustres de l'abbaye de Lérins. Cette Vie de saint Maxime est adresssée à l'évêque Urbique à qui Dyname proteste qu'il n'avancera rien que sur des relations authentiques. C'est de cette vie qu'on a tiré la matière des hymnes composées en l'honneur de saint Maxime.

E

EBBON de Reims, que sa révolte contre son prince légitime a rendu si fameux dans notre histoire, naquit à la fin du viie siècle dans une condition servile, sur une des terres que l'empereur Charlemagne possédait au delà du R! in. I dut son élévation, moins à ses talents qu'à sa fortune. Himiltrude, sa mère, fut choisie pour nourrice de Louis le Débonnaire, et ce jeune prince, par reconnaissance de ses soins, fit d'Ebbon le compagnon de ses études. Ebbon, doué d'heureuses dispositions pour les sciences, sut mettre à profit les leçons qui lui étaient données. Il embrassa l'état ecclésiastique, fut pourvu de riches bénéfices et parut avec éclat, en 814, au concile de Noyon. Louis, parvenu au trône, lui donna une preuve de sa bienveillance, en le faisant nommer à l'archevêché de Reims devenu vacant par la inort de Vulfaire arrivée le 18 août 816. Il assista, en 822, au concile de Thionville, et peu de temps après, dans un voyage qu'il fit à Rome, il obtint du pape Paschal la mission d'aller prêcher la foi dans le Nord. Après s'être associé Halitgaire, évêque de Cambrai, pour compagnon de ses travaux, ils se rendirent en Danemark où leurs prédi cations furent couronnées d'un plein succès. Ils convertirent et baptisèrent un grand nombre d'infidèles. Il fit encore deux voyages en Danemark; le premier, pour aider de ses conseils le roi Héroldt, menacé par un parti puissant; le second avec le titre de légat du saint-siége dans tous les pays du Nord. Jusque-là, la conduite d'Ebbon ne lui avait mérité que des éloges; mais ce qu'il fit contre le roi Louis, son souverain et son bienfaiteur, lui attira l'indignation de son siècle et de la postérité. En 833, Louis le Débonnaire fut arrêté par ordre de son fils Lothaire, et traduit devant une assemblée convoquée à Compiègne pour prononcer sur son sort. Cet ambitieux prélet, méconnais

Freherus et André Duchesne nous ont donné deux lettres de Dyname: la première est adressée à un de ses amis à qui il témoigne tout le plaisir qu'il avait éprouvé à recevoir de ses nouvelles ; la seconde, à Villicus, évêque de Metz, pour s'excuser d'avoir apporté quelques retards à s'acquitter d'une commission dont il l'avait chargé.

Nous avons dit que dans sa jeunesse il avait cultivé la poésie avec quelques succès, mais il ne nous reste aucun de ses vers. Fortunat, évêque de Poitiers, en parle avec éloge dans une épître qu'il lui adresse, et qui se trouve la onzième du vi livre de ses œuvres. Son style est obscur à force d'être travaillé. On ne doit chercher dans les écrits qui nous restent de lui, ni critique dans les faits, ni méthode dans leur disposition, deux qualités inconnues dans le siècle auquel ces productions appartiennent.

sant ce qu'il devait à son roi et à son bienfaiteur, prononça lui-même la sentence qui le déclarait déchu du trône et le condamnait à finir ses jours dans un cloître. Il refusa d'entendre la justification de ce malheureux prince, et poussa la dureté à son égard jusqu'à lui arracher les marques de la royauté pour le revêtir d'un cilice. La riche abbaye de Saint-Wast devait être le prix de cette infamie, mais la Providence ne lui permit pas d'en jouir, et il ne tarda pas à porter la peine de sa félonie. Cette noire action se consommait en 833, et, dès l'année suivante, le rétablissement de Louis sur son trône fit reléguer Ebbon à l'abbaye de Fulde. On l'en fit sortir en 835 pour coinparaître au concile de Thionville, où sur sa propre confession il fut déposé de l'épiscopat par quarantetrois évêques et renvoyé à Fulde. De là, on le fit passer à Lisieux, sous la garde de l'évêque Fréculfe, puis à Fleuri ou SaintBenoît sur Loire. Il en sortit à la mort de Louis le Débonnaire en 840; et le 24 juin de la même année, l'empereur Lothaire essaya de le faire rétablir sur son siége par vingt évêques et archevêques assemblés à Ingelheim. Mais dès l'année suivante, forcé d'abandonner un troupeau qui refusait de lui obéir, il s'éloigna de l'Eglise de Reims, où, malgré les mouvements qu'il se donna, il ne lui fut plus possible de rentrer. Ayant cherché un refuge à la cour de Lothaire, il s'attira une nouvelle disgrâce par le refus qu'il fit d'accepter l'ambassade de Constantinople. Ce prince lui enleva les abbayes de Saint-Remacle et de Saint-Colomban qu'il lui avait données, et l'infortuné prélat ne trouva plus d'asile qu'auprès de Louis, roi de Germanie. Celui-ci, touché de son infortune, lui donna l'évêché d'Hildesheim, en Saxe, où il finit ses jours trois ans après, le 20 mars 851.

SES ÉCRITS. Quoiqu'Ebbon eût de l'esprit et du savoir, il a peu écrit, ou du moins il

ne nous reste de lui que quelques opuscules qui n'ont presque d'intérêt que pour son histoire.

On a de lui des statuts ou règlements imprimés à la suite de l'histoire ecclésiastique de Reims par Flodord. On trouve en tête de cet écrit une espèce d'inscription qui marque qu'il s'adressait spécialement aux officiers de l'église de Reims, et qu'Ebbon les ayant trouvés sans discipline, dressa ses règlements àleur prière.C'est donc un des premiers opuscules de l'auteur. Il y détaille avec ordre et précision quelles sont les fonctions des principaux officiers ou ministres d'une Eglise, en commençant par ce qu'on nommait le prévôt, puis l'archidiacre, et en finissant par le corévêque et l'évêque lui-même. Avant le traité de Raban sur le même sujet, on ne trouvait nulle part, parmi les œuvres des anciens, une plus grande connaissance des fonctions attachées à la dignité de corévêque en particulier, que dans ce petit écrit d'Ebbon. Le P. Sirmond l'a publié sur un manuscrit de l'abbaye de Saint-Remy de Reims. A Halitgaire. — Nous avons également du même prélat une lettre adressée à Halitgaire, évêque de Cambrai et un de ses suffragants, pour l'engager à composer un pénitentiel tiré des canons et des ouvrages des Pères, et capable de remédier aux désordres que causaient tous les jours dans l'administration de la pénitence, le grand nombre et la diversité des faux penitentiels répandus dans la province de Reims. Il dit qu'il y aurait travaillé luimême si la multitude d'affaires dont il était accablé avait pu le lui premettre. Nous verrons en son lieu qu'Halitgaire satisfait au juste désir d'Ebbon qui eut ainsi la première part à cet ouvrage. Du reste, cette lettre est également honorable à la mémoire des deux prélats on y voit le zèle d'Ebbon pour le bon ordre et le maintien de la discipline, et d'une autre part, l'évêque de Cambrai nous y est représenté comme un homme continuellement livrés aux travaux d'une étude sérieuse et utile. Flodoard a fait entrer cette lettre dans son Histoire de l'Eglise de Reims, et Halitgaire a eu soin de la mettre en tête de son ouvrage.

Confession d'Ebbon. On peut compter encore au nombre des écrits d'Ebbon la confession qu'il fit de ses fautes au concile de Thionville, où il déclara à haute voix, en présence de tous les évêques, que les crimes dont il s'était rendu coupable envers sop souverain légitime le rendaient indigne de continuer les fonctions de l'épiscopat. Il répète cette déclaration par écrit, et Hincmar lui a donné place dans son grand ouvrage sur la Prédestination. Les éditeurs des conciles l'ont reproduite dans leur collection, avec les souscriptions des évêques qui le déposèrent, et Ebbon lui-même en a fait entrer une partie dans l'opuscule suivant.

Son Apologie. Le plus long écrit de ce prélat est son Apologie qui, après avoir été tirée de la poussière par Dom Luc d'Acheri, est passée dans la grande collection des Conciles. Ebbon la publia après qu il eut été so

lennellement replacé sur son siége, le 6 décembre 840, en conséquence du décret de Lothaire souscrit à Ingelheim au mois de Juin précédent. Il s'efforce d'y justifier sa conduite, et il ne néglige aucun des moyens qui peuvent l'aider à y réussir. Il y rappelle sa mission dans le Nord, son expulsion de l'Eglise de Reims, ses sept années de prison à l'abbaye de Fulde, son rétablissement par le roi Lothaire, après l'absolution qu'il avait reçue des évêques réunies à Ingelheim. Venant ensuite à l'acte de renonciation qu'il avait donné aux prélats assemblés à Thionville, il soutient qu'il n'avait pu être canoniquement déposé, en vertu de cette renonciation, parce qu'il ne l'avait faite que par force se trouvant alors dépouillé de tous ses biens, prisonnier et malade. On ne pouvait donc se prévaloir de ce qu'il s'y était reconnu indigne de l'épiscopal, puisqu'il marquait les mêmes sentiments d'humilité dans tous ses autres écrits. D'ailleurs, il n'avait été convaincu d'aucun crime, et lui-même n'en avait déclaré aucun qui lui méritât d'être déposé; or, de même qu'on ne peut déposer un évêque s'il n'a été convaincu par une procédure canonique, de même aussi un évêque ne peut abandonner son Eglise qu'avec le consentement de son peuple. Il ajoutait que sept années de prison étaient un temps suffisant pour expier les péchés qu'il avait accusés en secret à ses confesseurs. et que l'Eglise, après ce terme, avait coutume d'admettre les pénitents à recevoir leur pardon. En effet, le publicain, en confessant ses fautes, en avait obtenu la rémission; David avait effacé son crime par un instant de repentir, et saintPierre en un clin d'oeil avait recouvré tous ses droits à l'amour du Seigneur. Il concluait. qu'ayant trouvé libre l'Eglise qu'il n'avait quittée que par violence, l'autorité du prince régnant aurait dû lui suffire pour y rentrer, d'autant plus qu'il y était rappelé par les saints ordres, c'est-à-dire par les évêques de la province et le clergé de la ville.

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Narration des clercs. On ne peut guère séparer de cette apologie d'Ebbon l'écrit publié par les clercs qu'il avait ordonnés à son retour, au nombre de quatorze. Quoique cet écrit ne porte pas le nom du prélat, il put bien y avoir la meilleure part. D'ailleurs, il concerne sa cause et il contient encore plus sa justification que celle de ses auteurs. Ces clercs dont l'ordination fut contestée par Hincmar, font dans leur mémoire apologétique la description de la pompe avec laquelle Ebbon fut reçu à Reims, tant de la part du clergé de la ville et des évêques de la province, que de la part des laïques des deux sexes qui allèrent au-devant de lui avec des palmes et des cierges allumés, et en chantant les louanges de Dieu. Ils ajoutent que cet évêque, voulant faire confirmer son retablissement par le saint-siége, entreprit leVoyage de Rome, où en effet le pape Grégoire l'accueillit avec beaucoup de bonté, et en vertu de son autorité apostolique le confirma dans la pleine jouissance de son sige. Cette circonstance, il est vrai, ne se lit g

part ail.eurs, mais il était dans l'intérêt de ces élèves de faire croire que le pape avait lui-même rétabli Ebbon, quoique pourtant cette particularité ne prouvât pas beaucoup en faveur de leur cause. Ils parlent aussi de sa translation définitive au siége épiscopal d'Hildesheim. On ne trouve guère plus de solidité et de bonne foi dans ce récit que dans l'Apologie d'Ebbon. Toutes ces démarches d'Ebbon et de ses cleres pour leur justification n'en imposèrent point aux évêques des conciles de Paris en 847, et de Soissons en 853, la déposition d'Ebbon y fut confirmée et on frappa de nullité ces ordinations. André Duchesne a tiré cet opuscule d'un manuscrit d'Arras et l'a publié sous le titre de Narration des clercs de Reims, etc.

Nous croyons que l'inscription qu'on voyait autrefois au faîte de l'église de Reims, avec les figures du pape Etienne et de l'empereur Louis, pour laisser à la postérité le souvenir du couronnement de ce prince, et l'épitaphe d'Himiltrude, mère d'Ebbon, appartiennent l'une et l'autre à la plume de notre archevêque. Ces deux petites pièces en prose cadencée nous ont été conservées par Flodoard. Dom Marlot les a insérées également dans son Histoire de l'Eglise de Reims.

EBERARD, ou EVRARD, l'un des plus puissants seigneurs de la cour de l'empereur Lothaire, paraît être né à Cisoin, au diocèse de Tournai, dont quelques auteurs lui ont fait porter le surnom. I tenait par sa naissance à la première noblesse de l'empire et possédait plusieurs terres en Lombardie et en Allemagne. Investi, dès-avant l'année 848, du duché de Frioul l'un des plus importants parmi les grands tiefs d'Italie, Eberard fut chargé par Lothaire de réprimer les incursions des Slaves avec lesquels son gou-vernement confinail. Tous ces titres d'honneurs, réunis en sa personne, furent encore rehaussés par l'alliance qu'il contracta avec Giselle, fille de Louis le Débonnaire, et qui le rendit ainsi beau-frère de l'empereur, de Louis, roi de Germanie et de Charles, roi de France. De ce mariage il eut plusieurs enfants, parmi lesquels Bérenger, son second fils, devint roi d'Italie et empereur. Eberard laissa tant de marques de sa piété qu'il fut honoré comme un saint au monastère de Cisoin qu'il avait fondé avec la comtesse Giselle, sa femme, et où ils furent inhumés l'un et l'autre. Il mourut en 874. Hincmar de Reims, dans un écrit qu'il lui adressa rend à sa piété les hommages les plus flatteurs. Raban Maur, archevêque de Mayence, lui écrivit au sujet de Gothescalc en le priant de congédier au plus tôt ce moine dont la doctrine paraissait suspecte au plus juste titre.

Il nous reste d'Eberard un monument qui mérite de trouver place dans nos colonnes par les détails littéraires qu'il contient. C'est un testament daté de la vingt-quatrième année du règne de l'empereur Louis II. Dom Luc 'Acheri l'a reproduit après plusieurs autres éditeurs dans le tome XII de son Spicilege. Eberard après y avoir partagé ses biens meubles et immeubles entre ses fils et ses fil

les, fait aussi le partage de ses livres et des ornements de sa chapelle. Les plus remarquables parmi ces derniers sont un autel garni de cristal et d'argent; une chasse garnie de cristal et d'or; un calice de verre garni d'or; un autre d'argent avec la patène; un livre d'évangiles garni d'argent; un reliquaire où il y avait des reliques de saint Remy; des dalmatiques et des planètes avec des tapis d'autel; un calice d'ivoire garni d'or; un livre d'évangiles, un Lectionnaire, un Missel, un Antiphonier, avec les apostilles ou scholies de Smaragde sur les épîtres et évangiles de l'année. Tous ces livres étaient couverts d'ivoire. Il y avait dans sa bibliothèque plusieurs Psautiers, et plusieurs exemplaires des Sermons de saint Augustin. sur les paroles du Seigneur; les Gestes on l'Histoire des papes; les écrits de saint Isidore, de saint Fulgence et de saint Martin, de saint Ephrem et de saint Basile; les Vies des Pères; les Homélies de saint Grégoire sur Ezéchiel; des Martyrologes; un livre d'Alcuin à Widon; le Manuel de saint Augustin; un livre de prières avec les psaumes; les épîtres et évangiles de l'année en lettres d'or; le livre d'Anien; les sept livres de l'histoire d'Orose; les livres de saint Augustin et de saint Jérome sur ce passage de l'Epître de saint Jacques : Quiconque ayant gardé la loi la viole en un seul point, est coupable comme s'il l'avait violée tout entière; la loi des Francs, des Ripuaires, des Lombards, des Allemands et des Bavarois; un livre de lois sur la guerre; un autre sur diverses matières qui commençait par ces paroles: De Elia et Achab; un de l'Utilité de la pénitence; un recueil des Constitutions des princes et des édits des empereurs; un traité intitulé: Livre des bétes (librum bestiarum); la Cosmographie du philosophe Ethicus; la Physionomie du médecin Loxus; un livre qui avait pour titre : l'Ordre du palais; les livres de la Cité de Dieu par saint Augustin; un Psautier en lettres d'or; un Commentaire sur les Epitres de saint Paul; la Vie de saint Martin; le Traité des quatre vertus; et les Gestes des Francs.

Le testament de Giselle, épouse du comte Eberard, porte qu'elle fit bâtir un oratoire en l'honneur de la sainte Trinité dans le cimetière des moines de Cisoin, et qu'elle le dota. Elle fit en même temps un fonds pour l'entretien du luminaire dans l'église de ce monastère et dans l'oratoire qu'elle avait construit.

EBERARD, de Béthune en Artois, écrivait un Traité contre les Albigeois et les Vaudois à la fin du XIIe siècle. Il combat d'abord, dans son livre, l'erreur des manichéens sur la loi de Moïse et montre que l'on ne doit point rejeter la loi; que les patriarches et les prophètes ont été sauvés; que c'est le vrai Dieu qui a donné la loi et créé le monde. Il passe ensuite aux autres erreurs communes à tous les hérétiques de ce temps-là touchant les sacrements et les pratiques de l'Eglise, établit contre eux les dogmés suivants : que l'on doit baptiser les enfants; qu'il est permis de se marier; que le sacrifice de l'eucharistie

contient le corps de Jésus-Christ; que les seuls prêtres ont pouvoir de l'offrir, et qu'ils le doivent faire dans les églises; que l'onction des malades est utile: que les pèlerinages de dévotion sont louables; qu'il est permis de jurer avec vérité; que l'on peut punir, et même faire mourir les malfaiteurs; que nous ressusciterons avec la même chair que nous avons; que la foi doit être préférée aux bonnes ceuvres; que l'on doit honorer la croix; que les femmes seront sauvées, et ressusciteront avec la marque de leur sexe; que l'on peut se sauver par différentes voies, et dans différents états; qu'il est permis de manger de la chair; enfin il fait voir que ces hérétiques sont coupables, puisqu'ils se cachent; et que quoiqu'ils se vantent de renoncer aux biens de ce monde, ils cherchent à s'enrichir par une autre voie; qu'ils entendent mal l'Ecriture sainte; que tous les caractères des hérétiques leur conviennent. Il ajoute que les uns s'appellent valois, les autres xabatates; qu'ils déchirent leurs souliers, et demeurent tout le jour exposés au soleil jusqu'à l'heure du souper, qu'ils se présentent dans les places publiques. Il finit ce traité par un Catalogue de tous les hérétiques, tiré de celui d'Isidore de Séville, et par la solution de plusieurs questions qu'il se propose lui-même. Gretser a donné une édition de cet écrit en 1614.

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EBERHARD, poëte et historien du Ix siècle, était moine de Saint-Mathias de Trèves. Sa vertu le fit élever au sacerdoce, et sa science le fit choisir pour modérateur des écoles de son monastère. Il succéda en 885 à Florbert, autre savant moine, et exerça cet emploi pendant près de vingt-quatre ans. Il mourut en 909, après avoir formé aux lettres un grand nombre de disciples, et eut pour successeur un de ses confrères nommé Richard. Trithème, qui avait connu ses ouvrages, en établit ainsi le catalogue 1° Eberhard fit des additions. considérables à l'Ilistoire des archevêques de Trèves. Nous avons trois recueils des Actes de ces prélats dans les collections de Leibbitz, de dom Luc d'Achery et de dom Martène; mais on n'y retrouve aucun indice qui nous aide à distinguer ce qui appartient réellement à cet auteur. Comme ces Actes ont été retouchés par des écrivains beaucoup plus récents, il est probable qu'ils y auront fondu les additions d'Eberhard. 2° Il composa aussi, en particulier, les Vies des saints Euchaire, Valère et Materne, premiers évêques de Trèves. La manière dont en parle Trithème donne à penser que ces trois Vies ne formaient qu'un seul et même ouvrage, écrit en prose et en vers. Quoique l'auteur fat bien éloigné de l'époque dont il avait fût entrepris d'écrire l'histoire, il serait à souhaiter qu'on nous en eût conservé quelque fragment qui nous mit à même de juger si le style en était réellement aussi bon que ce eritique cherche à nous le persuader. 3° La piété d'Eberhard ne se bornait pas aux seuls saints dont il nous a laissé la Vie; il composa aussi, enl'honneur de plusieurs autres, des hymns, des séquences et des répons,

auxquels il faut ajouter encore un recueil d'épigrammes. Il ne nous reste plus rien de toutes ces pièces; et c'est une perte, après tout, dont nous nous consolons facilement, en pensant à ce qu'était devenue la poésie à cette époque.

EBERVIN ou EVERVIN, abbé de SaintMaurice de Tolen, dans le diocèse de Trèves, a écrit la Vie de saint Siméon de Syracuse, moine de Trèves, mort en 1035. Elle est dédiée à Poppon, archevêque de Trèves, et rapportée par Surius au 1er juin.

EBRARD, auteur de la Chronique de Waste, la commence à la fondation de ce monastère, vers le milieu du xr siècle. Il avait été disciple du fondateur et témoin de tout ce qu'il raconte. Ce fondateur se nommait Odfrid: c'était un prêtre très-instruit dans les lettres divines et humaines. Dans le désir de mener une vie retirée, il parcourut divers monastères et se fixa enfin à Waste où il rassembla sous sa direction plusieurs disciples, auxquels il donna la règle des chanoines réguliers établis depuis peu en France, mais dont la Flandre ne possédait pas encore de communautés. Leur vie était frugale, et ils ne mangeaient point de viandes. Quelques personnes firent à ce nouveau monastère des donations qui furent confirmées dans des assemblées tenues à Sithieu et à Térouane, en présence de l'évêque Drogon, l'an 1072. Odfrid gouverna sept ans, huit mois et six jours le monastère qu'il avait fondé, et mourut à Gand. Ebrard finit là sa Chronique et ne dit rien de Bernold qui fut le second abbé de ce monastère. Dom Mabillon attribue encore à Ebrard la relation d'un miracle opéré à Bruges, en 1072, pa l'intercession de saint Donatien, en faveur de Tamard, chanoine régulier de Waste. Le style de cet écrit, semblable à celui de la Chronique, favorise l'opinion qui l'attribue

à cet auteur.

ÉBREMAR ou ÉVERMER, né à Cickes, village du diocèse de Térouane, entra dans le clergé d'Arras où il fut élevé à la prêtrise. Il eut pour maître le célèbre Lambert, une des lumières de son siècle, qui brilla ensuite sur le siége épiscopal d'Arras. Guillaume de Tyr nous apprend qu'Ebremar fit partie de la première expédition que les Français envoyèrent en Palestine pour la conquête de Ja terre sainte. Il s'y consacra à Dieu dans l'église du Saint-Sépulcre, et fut probablement du nombre des chanoines réguliers que Godefroi de Bouillon y établit peu de temps après la prise de Jérusalem. Albert d'Acqs, auteur contemporain, nous donne une idée très-avantageuse d'Ebremar, et nous le représente comme un homme plein de zèle pour la religion, de charité pour ses frères, et qui rendit même au roi Baudouin des services importants dans les guerres qu'il eul à soutenir contre les Sarrasins et les infidèles. C'est ainsi qu'en parle cet historien, dans l'endroit même où il rapporte comment Ebremar fut élevé sur le siége patriarcal de Jérusalem à la place de Daimbert, qui venait d'être déposé pour ses crimes dans une as

siè

semblée de prélats, d'abbés et de seigneurs du royaume. Ce témoignage en faveur d'Ebremar mérite d'autant plus d'attention, que tous les historiens modernes, sur l'autorité de Guillaume de Tyr, nous le dépeignent comme un intrus qui s'était emparé du siége de Jérusalem, dont le patriarche Daïmbert avait été injustement dépouillé. Suivant Albert d'Acqs, au contraire, Daïmbert avait été accusé et convaincu de simonie, d'homicide et de plusieurs autres crimes encore par des témoins irréprochables et dans un concile présidé par un cardinal. Ses partisans même, forcés par l'évidence de la vérité, avaient abandonné ce patriarche frappé d'anathème, et le siége de Jérusalem était devenu vacant par sa déposition. C'est dans ces circonstances que, de l'avis du cardinal Robert, et par le choix du clergé et de tout le peuple, Ebremar, recommandable par ses bonnes qualités, la pureté de ses mœurs, sa compassion pour les pauvres, son zèle pour la religion, sa charité pour ses frères et les services importants qu'il avait rendus au prince et à l'Etat, fut placé sur le siége patriarcal de Jérusalem, où la plupart des écrivains modernes l'ont signalé comme un intrus. Dom Rivet lui-même, dans sa préface sur le x cle, semble s'être laissé entraîner par la foule, et parle de lui comme d'un usurpateur. Sans prétendre nous ériger en censeurs de tant de savants qui ont adopté cette opinion, nous avons cru pouvoir au moins al léguer en sa faveur le témoignage d'un historien contemporain. Nous pourrions y joindre celui de Radulphe qui, dans son Tancrède, aflirme positivement que tout le monde applaudit au choix d'Ebremar, et qu'il fut élevé malgré lui sur le siége de Jérusalem. Enfin Guillaume de Tyr lui-même reconnaît qu'à la première croisade, Ebremar s'était fait aimer de tous par la sagesse de sa conduite. Il le blâme seulement d'avoir accepté par une ignorance inqualifiable le siége épiscopal de cette ville du vivant même du patriarche. Mais si Daïmbert a été canoniquement déposé, comme Albert d'Acqs l'assure, Ebremar peut-il être regardé comme un intrus, parce qu'il a accepté, après s'en être défendu longtemps, le siége de ce patriarche. Albert ne fixe point l'époque de la déposition de Daïmbert et de l'élection d'Ebremar; mais on doit rapporter cet événement à l'an 1103 ou au plus tard 1104. L'année suivante, 1105, le sultan d'Egypte, connaissant la faiblesse du nouveau royaume de Jérusalem, médita d'en faire la conquête et de tirer vengeance des fréquentes invasions que les croisés faisaient dans ses Etats. Il expédia en Palestine une armée nombreuse et commandée par des chefs expérimentés. A la première nouvelle de leur mar- ́ che, Baudouin réunit tout ce qui était capable de porter les armes, et avec une armée forte à peine de quinze cents chevaux et de deux mille hommes d'infanterie, il s'avança contre les infidèles. Lorsque cette troupe fut rangée en bataille, le patriarche Fbremar parcourut les rangs, tenant à la main une por

tion de la vraie croix qu'on avait conservée à Jérusalem; il exhorta les soldats à combattre vaillamment à la vue de ce signe salutaire, se souvenant de celui qui était mort attaché à ce bois pour les racheter. Les soldats, animés par cette exhortation, marcherent au combat avec un courage extraordinaire, enfoncèrent les ennemis, en taillèrent une partie en pièces, et mirent l'autre partie en fuite. Ebremar demeura sur le siége de Jérusalem jusqu'à l'an 1107 sans être troublé par Daimbert, qui, après sa déposition, s'était retiré à Antioche, dans la principauté de Bohémond, son protecteur. Mais l'année suivante, celui-ci le mena avec lui en Europe, où il se rendait pour solliciter des secours. Daïmbert, arrivé en Italie, alla trouver le pape Pascal II, qui le garda plus de deux ans à sa cour, pour voir si ceux qui l'avaient chassé de son siége viendraient se justifier de leur conduite. Personne n'ayant comparu, Daïmbert fut renvoyé avec des lettres du Pape, qui témoignaient qu'il était en ses bonnes grâces; mais il fut arrêté en chemin par la mort. Etant tombé malade à Messine, où il attendait une occasion favorable pour s'embarquer, il y finit sa vie le 14 mai 1107. Ebremar, instruit du retour de Daïmbert, mais non de sa mort, résolut de se rendre à Rome pour y justifier son innocence; mais à son arrivée, il ne put rien obtenir autre chose, sinon qu'on enverrait un légat à Jérusalem pour prendre sur les lieux une pleine connaissance de cette affaire. Gibelin, archevêque d'Arles, fut chargé de cette commission par le pape. A son arrivée à Jérusalem, il assembla un concile des évêques du royaume, et la cause d'Ebremar fut instruite avec activité. Ayant donc reconnu par la déposition de témoins au-dessus de tout soupçon, que Daïmbert avait été dépossédé de son siége injustement par la violence d'Arnoul et la volonté du roi, il déposa, en vertu de son autorité déléguée, Ebrémar qui s'était laissé porter sur le siége d'un patriarche Vivant et en communion avec l'Eglise romaine; toutefois, en considération de sa bonne foi et de sa grande piété, il le transféra à l'Eglise de Césarée dont le siége était alors vaquant. C'est ainsi que Guillaume de Tyr rapporte la chose, et il a été suivi par tous les historiens modernes. Mais Albert d'Acqs la raconte d'une manière tout à fait différente. Selon lui, Ebremar se justitia pleinement à Rome dans un concile, et il revint apportant un jugement favorable de l'Eglise romaine, avec des lettres que le pape Pascal II écrivait au roi pour lui recommander de maintenir Ebremar sur le siége de Jérusalem. Si l'on demande pourquoi Ebremar, renvoyé de Rome à Jérusalem si solennellement justifié, ne remonta pas sur le siége patriarcal, la réponse est toute simple: Baudouin, roi de Jérusalem, à l'instigation d'Arnoul qui le dirigeait, sans égard pour les lettres du Pape et le jugement de l'Eglise romaine, s'opposa formellement à la réinté gration d'Ebremar, qui fut obligé de se retirer à Accaron. Cependant, pour ne pas lais

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