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III.

I I.

La vigilance des Parlemens faifoit tomber Entreprifes peu-à-peu les faux principes qui avoient endu Clergé fanté la Ligue. Mais le Clergé fouffroit imfur l'autori- patiemment que ces auguftes Tribunaux mifté Roïale. fent des bornes à ce qu'il appelloit fes privi

leges. Lorfque les Parlemens vouloient réprimer fes injuftes entreprifes, il fe plaignoit qu'ils mettoient la faulx dans la moiffon des Eccléfiaftiques. Dans le temps même dont nous venons de parler, c'eft-à-dire en 1606, il y avoit encore des Eglifes & des Monasteres où l'on refufoit de prier pour le Roi. Le Parlement de Toulouse fut obligé de rendre un Arrêt le 7 Juin pour contraindre les Prêtres de fon reffort à prier pour le Roi au Canon de la Meffe, & leur défendre de fe fervir de certains Miffels imprimés depuis quelques années, à Paris, à Bordeaux, & à Lyon, dans lefquels la priere pour le Roi avoit été fupprimée. On avoit ôté dans le Miffel de Rouen ce verfet des Litanies: Ut Regem nof trum cuftodire digneris, & la Collecte: Quafumus ut famulus tuus Rex nofter, &c. Dans une Oraifon du Vendredi Saint, on avoit fubftitué ces mots, Refpice ad Romanum, ber nignus, imperium, à ceux-ci : Refpice ad Chriftianum, benignus, imperium. On avoic ôté à S. Louis le titre de Roi, pour ne lui laiffer que celui de Confeffeur. En un mot on avoit changé tout ce qui pouvoit faire entendre que le Roi étoit le Souverain des Clercs comme des Laïcs. Le Ministere public réprima ces excès. En 1631 un Archidiacre fut décrété d'ajournement perfonnel, & dé

clara publiquement n'avoir eû aucune part à ces Miffels, dont la réformation fut ordonnée. Par ces actes d'autorité, les Parlemens fe font attiré la haine des Eccléfiaftiques, qui ne pouvoient fouffrir qu'on s'opposât au fyftême d'indépendance qu'ils vouloient établir, & auquel ils n'ont jamais renoncé.

IV.

rejette la

L'appel comme d'abus eft, comme on le fçait, le moïen que les Parlemens ont le plus Henri IV fouvent oppofé aux entreprifes du Clergé demande C'eft auffi contre ce moien qu'il a dirigé les du Clergé, plus grands efforts. En 1606 il demanda à de faire un Henri IV un Reglement fur cette matiere. Ce Reglement Prince qui connoifloit la néceffité des Appels contre les comme d'abus, pour maintenir l'exécution appels comdes faints Decrers des Conciles & des Confti- me d'abus. tutions Canoniques, l'autorité Roiale, fa Le ParleJurifdi&ion, les Loix du Roïaume, les ment répriDroits, les Libertés & les Privileges de l'Eglife Gallicane, les Ordonnances & Arrêts des Parlemens, dit aux Députés du Clergé, qu'il n'étoit pas poffible de rien ftatuer de nouveau fur une matiere de cette impor

tance.

Miron Evêque d'Angers ofa prêcher publiquement, que ceux qui favorisent les appels comme d'abus, nuifent plus à l'Eglife que les héretiques. En 1623 il excommunia Archidiacre de la Cathédrale, parce qu'il avoit appellé comme d'abus des procédures faites contre lui par cet Evêque. Le Parle ment par Arrêt du 30 Juin 1623 « déclara qu'il y avoit abus, d'avoir procédé par excommunication contre ledit Archidiacre, pour s'être pourvû en la Cour par appel comme d'abus, des jugemens & ordonnances dudit Evêque, lequel a condamné & con

me l'Evê

que d'An

gers.

V.

damne à revoquer & retracter ladite excom munication... & faire raïer de fes registres fefdits jugemens & ordonnances, en forte que rien n'en puiffe être lû; & jufqu'à ce qu'il ait fatisfait au préfent Arrêt, ordonne que le temporel dudit Evêque & autres béné fices dont il eft pourvu, fera faifi & mis en la'main du Roi: lui a fait inhibitions & défenfes de procéder à l'avenir par telles voies au préjudice des loix fondamentales de cè Royaume, de la fouveraineté du Roi & obéiffance qui lui eft dûe par tous les fujers tant Eccléfiaftiques que Laïcs, de quelque qualité & condition qu'ils foient, fous peine en cas de contravention d'être procédé contre lui par la rigueur des Ordonnances. » L'Evêque fort mécontent de cet Arrêt, s'adreffa à la Cour de Rome. Il en obtint un bref, qui fait un cas réservé au faint Siége, du recours aux Juges Seculiers par les Eccléfiaftiques, comme du crime le plus énorme. Le Préfidial d'Angers agit avec vigueur contre ce bref, & empêcha l'Evêque d'en tirer aucun avantage. On vit en cette occafion comme en bien d'autres, que les Juges royaux inférieurs, lorfqu'on leur laiffe la liberté d'agir, ne font pas moins attentifs que les Juges fupérieurs, au maintien de nos libertés & à l'exacte obfervation des faints Canons & des bonnes regles.

I II.

Henri IV n'ignoroit pas que fon autorité Les Jefui- feroit toujours mal affermie, tant qu'il autes follici- roit pour ennemis les Jefuites, dont il connoiffoit le crédit & les intrigues. Depuis que ce Prince avoit été abfous à Rome, ces Peres n'avoient ceffé d'emploier l'interceffion du

tent leur

retour en France.

Pape, leurs foins & leur adreffe, pour ob- Mezerai, tenir leur rétablissement. Ils prétendoient que Tom. VII. c'étoit une des conditions fecrétes, fans lef- p. 445· quelles on ne l'auroit point abfous. Mais leur conduite en Angleterre, à Venife, & dans quelques-uns des Cantons Suiffes, aïant fait porter à Rome de vives plaintes contr'eux, le Pape Clément VIII ne fit pas de fortes inf tances pour leur retour en France. Ils profiterent d'un voïage que le Roi fit en Lorraine en 1603, pour le folliciter eux-mêmes auprès de ce Prince, dont ils connoiffoient la clémence. Lorfqu'il paffa par Verdun, le Recteur à la tête de tous les Jefuites du Collége, encouragés par un Courti fan qu'ils avoient fçu mettre dans leurs intérêts, fe préfenta devant le Roi, pour le fupplier que l'Arrêt du Parlement de Paris, qui défendoit à tous François d'envoïer leurs enfans étudier dans leurs Colléges, n'eût point lieu à l'égard du Collège de Verdun. Henri IV, qui craignoit les fuites de leur inimitié, les reçut & leur parla avec une bonté, qui leur fit juger qu'ils devoient aller en avant. Leur Provincial & trois ou quatre des principaux fe rendirent à Metz. Ils crurent que le temps de la Paffion étoit propre à exciter des fentimens de miféricorde dans un cœur Chrétien. Ils fçurent donc trouver le moïen de fe faire conduire dans le cabinet du Roi l'aprèsmidi du Jeudi faint. Ils fe profternerent humblement à fes pieds, & le Roi les releva & leur donna une audience favorable. Le Provincial qui portoit la parole, s'infinua dans fon efprit en comblant d'éloges fes victoi- Ibid. p. 446. res & fa clémence; il tâcha enfuite de juftifier la Société des reproches les plus ordinai

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ble.

VI.

res qu'on lui faifoit. Il finit en conjurant fa clémence roïale par le prérieux fang de JefusChrist, d'ufer envers eux de mifericorde, & de faire enforte que la Société ne tînt cette grace que de fa bonté, & qu'elle n'en eût obligation qu'à lui feul. Comme il avoit écrit fon difcours, le Roi le prit comme pour le lire avec encore plus d'attention qu'il ne l'avoit écouté. M. de Thou & d'autres Hiftoriens dignes de foi affurent que le Roi leur dit, que ce que le Parlement avoit fait contr'eux, n'étoit pas fans y avoir bien penfé. Le Lundi de Pâques ce Prince les fit venir dans fon cabinet, leur promit de les rappeller, & dit au Provincial de le venir trouver à Paris avec le P. Cotton. En même-temps il l'embraffa lui & les compagnons, pour montrer qu'il leur pardonnoit absolument tout le paffé.

Depuis ce voïage du Roi à Metz, les JeLes Jefui- fuites ne cefferent de folliciter leur rappel. tes obtien Ils entretenoient de grandes intrigues à la nent un E- Cour où ils avoient de très-puiffans amis, dit qui leur elt favora- qui étoient trompés jufqu'au point de les croire feuls capables de bien inftruire la jeuneffe & de convertir les Huguenots. Le P. Cotton, qui n'avoit point négligé de fe rendre à Paris, alla à la Cour, & il ne la quittoit point. Il y prêchoit, & fommoit chaque jour le Roi de tenir fa promeffe. Le Nonce l'en preffoit de la part du Pape; MM. de Villeroi & de Silleri faifoient ufage de leur crédit. en faveur de la Société. Mais le plus puiffant folliciteur des Jefuites étoir Guillaume Fouquer de la Varenne, Contrôleur Général des Poftes, qui, dit Mezerai, des plus bas Offices de la maison du Roi, s'étoit éle

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