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Bievre le Châtel, environ à trois lieues de Paris. La Reine Anne de Bretagne lui avoit donné le nom de N. D. du Val-de Grace. Marguerite d'Arbouze pourvue de cette Abbaie par Louis XIII en 1618, entreprit avec fuccès d'y rétablir la régularité. Elle fut aidée dans fou entreprise par deux Religieufes qu'elle avoit amenées de Montmartre. Elle s'appliqua à faire obferver la Regle de S. Benoît, & avança la réforme autant par fes exemples que par fes exhortations. On lui confeilla de transférer fon Monaftere dans quelque faubourg de Paris, comme dans un lieu plus à couvert d'infultes pendant les guerres, ce qui eft conforme à l'ordonnance du Concile de Trente. Après plufieurs délibérations fur cette tranflation, on fe détermina à prendre une grande place au faubourg S. Jacques, avec quelques bâtimens ou le Cardinal de Berulle avoit d'abord logé les Peres de l'Oratoire, avant de les établir dans la rue S. Honoré. La Reine les fit acheter au nom de l'Abbaie du Val-de-Grace, & prit le titre de Fondatrice du Monaftere. Quand tout fut en état de recevoir une Communauté, la tranflation fe fit en Septembre 1621 avec toutes les formalités requifes. L'Abbeffe dreffa enfuite des Conftitucions, qu'elle fit approuver par Jean-François de Gondi, premier Archevêque de Paris, en 1623 ; & en 1625 par le Cardinal Barberin, Légat en France. Pour affermir davantage la réforme du Val-de-Grace, elle jugea néceffaire de rendre l'Abbeffe triennale, & obtint les Lettres patentes néceffaires par lefquelles le Roi renonçoit à fon droit de nomination. En 1626, la Mere d'Arbouze fe démit volontai

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rement de fa charge d'Abbeffe; & une Ab beffe triennale fut élue en fa place. Elle mourut la même année à Sery près de Dune-leRoi, où elle étoit allée pour réformer quelques Monafteres. Son corps fut apporté à Paris, & enterré dans le Choeur des Religieufes du Val-de-Grace, d'où il a été transféré depuis dans une Chapelle, par refpect pour fa mémoire qui eft en vénération dans tout l'Ordre. La Reine Anne d'Autriche voulant depuis donner des marques éclatantes de fon affection pour le Monaftere, & en mêmetemps s'acquitter du vœu dont nous avons parlé, entreprit de rebâtir l'églife & le Monaftere avec une fomptuofité qui a pea d'exemples dans l'Europe. Elle voulut que le Roi encore enfant y mît la premiere pierre de l'églife, ce qui fe fit avec beaucoup de folemnité le 1 d'Avril 1645, l'Archevêque de Paris officiant en présence de la Reine & de toute la Cour. Quand les troubles du Roïaume, qui obligerent d'interrompre les bâtimens, eurent été appaifés, la Reine fit travailler au Cloître, & voulut que le Duc d'Anjou fon fecond fils, depuis Duc d'Or léans, en posât la premiere pierre en 1655. Le refte des édifices a été achevé du vivant de la Reine, & mis dans l'état où ils font aujourd'hui.

V.

VII.
Marie de Sigifmond Ladiflas Roi de Pologne faifoit
Gonzague demander en mariage depuis quelque temps
devient Louife-Marie de Gonzague fille de Charles
Reine de I. Duc de Mantoue & de Catherine de Lor-
Pologne.
Ses liaifons raine. La Cour de France lui accorda enfin
avec Port- cette alliance. Cette Princeffe étoit depuis
Roial.

plufieurs années en liaison intime avec la célébre Marie-Angelique-Arnauld, Abbelfe & Réformatrice de Port-Roïal. Elle avoit eu la pensée de se mettre fous la conduite de M. de S. Cyran; mais ce grand ferviteur de Dien mourut quatre jours après qu'elle en eut fait l'ouverture à la Mere Angelique. Elle voulut avoir un petit appartement audedans de Port-Roïal de Paris, où elle alloit faire une retraite chaque semaine. Elle paroiffoit touchée, pratiquoit divers exercices de pénitence & demandoit souvent confeil à M. Singlin Difciple de M. de S. Cyran; mais elle n'eut pas la force de résister aux attraits d'une Couronne. Quand fon mariage avec le Roi de Pologne fut conclu, trois Seigneurs du premier rang accompagnés d'une nombreufe fuite de Noblesse Polonnoise, firent à Paris une entrée des plus folemnelles. On vouloit célébrer le mariage à Notre-Dame, avec beaucoup d'éclat & de magnificence, pour donner à ces Etrangers une idée de la grandeur de la France; mais les difficultés qu'il y eut au fujet des rangs & de la prefféance, déterminerent à faire la Cérémonie avec peu d'appareil dans la Chapelle du Palais-Roïal. Le Roi & la Reine rendirent de grands honneurs à la nouvelle Reine, qui fut complimentée par toutes les Cours Souveraines. Elle n'arriva en Pologne que l'année fuivante. Elle continua fur le Trône à demander des avis à la Mere Angelique, qui lui écrivit fort fouvent, pour l'exhorter, la confoler, & lui faire connoître fes devoirs. Nous avons plus de deux cens Lettres imprimées de cette Sainte Abbeffe à la Reine de Pologne. Dieu fit fentir à

VIII.

cette Princeffe bien des amertumes fous les
douceurs apparentes de la Couronne, & lui
donna lieu de réfléchir férieufement fur le
temps où elle avoit vécu fans penser à fon
falut. Le peu d'agrément qu'elle trouva au-
près d'un mari chagrin & accablé des infir-
mités de la vieilleffe ; l'efpéce de néceffité où
elle crut être d'époufer après la mort de ce
premier mari, le Cardinal Cafimir fon beau-.
frere avec difpenfe du Pape; la mort de fes
enfans; les ravages que firent les Suedois,
les Cofaques & les autres Nations voisines;
le fleau de la pefte dont les Etats furent affli-
gés; tous ces maux étoient une ample ma-
tiere de réflexions pour une fille aussi spiri-
tuelle que la Mere Angelique, qui n'em-
ploioit que pour le falut de la Reine la con-
fiance dont cette Princeffe l'honoroit. La
Reine de fon côté recevoit très-bien tous
les avis de la Mere Angelique, & elle lui
donna en plufieurs occafions des preuves de
fa tendre affection. Elle lui envoïa des au-
mônes confidérables, pour les répandre en
France dans des années de difette. Elle fit
préfent à Port Roïal d'un magnifique Ciboi-
re, & de piéces d'étoffes d'or & d'argent pour
l'Eglife. Mais ce qui eft plus important, elle
écrivit en 1655 au Pape Alexandre VII, pour
le prier de ne point fe laiffer prévenir par
de faux rapports contre les Religieufes de
Port-Roïal, & contre les Théologiens unis
à cette Sainte Maison.

V I.

Le jeune Roi Louis XIV voïagea pour la Edit fé- premiere fois le Printemps de 1646, & alla vere contre jufqu'à Amiens, où s'affembloit l'armée. Il

lier, Fon

1646.

donna en même temps un Edit pour renou-les duels. veller tous ceux que Louis XIII avoit ren- Eglife & dus contre les duels, qui étoient alors fort séminaire communs Ce qui fit efpérer que ce nouvel de S. SulpiEdit feroit plus capable que les précédens ce. Caracte d'arrêter une fureur auffi contraire à la rai- re de M.Olfon qu'à la Religion, c'eft que le Duc d'Or- dateur de ce léans, le Prince de Condé, le Cardinal Ma- Seminaire. zarin & tous les autres Seigneurs du Confeil, promirent de ne jamais s'intéreffer à quelqu'un qui fe feroit battu en duel. Le Roi & la Reine déclarerent qu'ils ne vouloient pas qu'il y eût jamais aucune grace fignée ni fçellée pour les duelliftes, & que leurs procès devoient en être pourfuivis au Parlement à la requifition des Gens du Roi. Rien n'étoit plus digne d'un Roi Très Chrétien que de tenir la main à l'exécution d'un Edit fi falutaire. On peut dire que Louis XIV a montré. plus de zéle qu'aucun de fes prédéceffeurs contre un ufage fi déshonorant pour l'humanité & pour le Chriftianifme. Ce fut auffi cette année qu'on entreprit de bâtir une nouvelle Eglife de S. Sulpice. Le vaiffeau n'aïant point encore paru affez grand pour le nombre extraordinaire de Paroiffiens, on donna d'autres deffeins en 1655, & pendant. dix huit ans on bâtit le choeur & les bas côtés Ces travaux furent fufpendus en 1675 par les detres confidérables que la Fabrique ayoit contractées. Ils n'ont été repris qu'en 1719, & ont toujours continué depuis par le moïen [fi étonnant] d'une Loterie qui dure depuis plus de trente ans. C'étoit Jacques Ollier Abbé de Pébrac qui étoit Curé de S. Sulpice, lorfque Gamart célébre Archi ecte entreprit le bâtiment de cette Eglife. Le Curé

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