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Eccléfiaftique qui vous faifoit la Cour, pour obtenir des bénéfices par votre faveur, que c'étoient des loups beanis. En quelle confcience donc avez-vous pû faire donner à ces loups ce qui étoit deftiné pour un troupeau de brebis innocentes ? »

par

XVII.

re comme un Saint.

Ce faint Evêque avoit raifon d'appeller brebis innocentes les Chanoines de fa Cathé- Piété des drale dont on avoit auffi faifi les revenus. Chanoines Son Chapitre étoit une Communauté très- de Pamiers. Ils font perréguliere, qui répandoit dans l'Eglife de fécutés France une odeur de vie. On étoit dans l'ad- comme leur miration en voïant avec quelle abondance faint Evêla piété avoit été communiquée à ces Cha- que. Mort noines. Ils vivoient dans un recueillement & de ce Préune entiere féparation du inonde. Leur union lat. Le peuétoit fi étroite & leur défintéressement fi ple 1 honofait, qu'il étoit visible réforme étoit que cette l'ouvrage de Dieu. Pour affliger plus fenfi- Les Jefuites blement le faint Evêque dont Dieu s'étoit le traitent fervi pour l'établir, on entreprit de féculari- comme un fer ce Chapitre : & pour exécuter ce deffein, fcélérat. on ne garda aucune forme de justice même apparente, & l'on y envoïa pour le remplir, des féculiers fans fcience & fans piété, dont la vie faifoit un contrafte parfait avec celle des anciens Chanoines. On peut voir dans l'Inventaire des piéces qui concernent l'affaire de Pamiers, le détail des perfécutions qu'eut à fouffrir M. de Pamiers, & avec quel courage il a défendu jufqu'à la mort la liberté de fon Eglife. Enfin Dieu l'appella à lui le 7 d'Août 1680. Le Juge qui vint mettre le fcellé dans la maifon Epifcopale, le fit avec tant d'exactitude, qu'il fallut emprunter de quoi enfevelir le corps de ce faint Prélat. On ferma l'endroit où il fut enterré, pour empê Tome X.

T

XVIII.

cher le concours du peuple, qui alloit prier fur fon tombeau. Les Jefuites publierent qu'il étoit damné, parce qu'il avoit été l'ennemi de leur Société. La fureur avec laquelle ils déchirerent fa mémoire, les calomnies par lefquelles ils tâcherent de noircir la foi, fa piété, fa pénitence, fon zéle, furpaffent les vexations qu'ils lui avoient fait souffrir pendant fa vic. Leur fameux P. Rapin fe fignala fur-tout par une Lettre au Cardinal Cibo, qui fait horreur, & qui fut condamnée à Rome.

Après la mort du faint Prélat, on reçut à Pamiers un Bref du Pape, qui lui étoit adreffé, & qui pourroit tenir lieu d'Oraifon funebre. Innocent XI en avoit adreffé au Roi un autre daté du 29 Décembre 1679. Il y appelloit l'Archevêque de Paris & le Pere de la Chaife des hommes fans foi, filios diffidentia, & continuoit avec raifon, comme dans fes deux premiers Brefs au même Prince, d'attribuer aux mauvais confeils qu'ils lui avoient donnés, tout ce qui s'étoit fait d'injufte dans cette affaire. Ce fut principalement pour fe venger de ce Bref, que M. de Harlai & le P. de la Chaife firen: figner aux Evêques affemblés à S. Germain-en-Laie une Lettre au Roi, pour l'indifpofer contre le Pape, fous prétexte que ce Bref étoit injurieux à Sa Mạjesté.

I V.

Après la mort du Pafteur, on n'épargna Souffrances pas le troupeau. Comme les Chanoines ne des Peres craignoient que Dieu, & étoient remplis de Carlat & l'efprit de leur faint Evêque, ils témoigneRouffe. rent autant de zéle pour défendre la liberté

de l'Eglife de Pamiers pendant la vacance du fége, que M. de Pamiers en avoit montré pendant la vie. Ils furent donc attaqués les uns après les autres, & difperfés en divers endroits du Roïaume, où ils font tous morts fans avoir voulu fe rendre à ce que la Cour exigeoit d'eux. Il eft jufte de faire connoître ici ces illuftres perfécutés, en les plaçant felon le tems de leur mort. Le P. Carlat fut la premiere victime, même avant la mort du S. Evêque. Il étoit Prieur clauftral, & en même-tems Syndic du Chapitre. La Cour aïant nommé un œconome pour régir les revenus du Chapitre, & en faire part aux Régaliftes intrus, il y forma oppofition. Il reçut auffi-tôt une lettre de cachet qui l'exiloit à Gergeau près d'Orléans, à 130 lieues de Pamiers. Comme il étoit fort âgé & trèsinfirme, M. de Pamiers confulta les Médecins, qui certifierent par écrit qu'il mourroit en chemin, s'il s'y mettoit dans la rigoureufe faifon où l'on étoit alors. Le certificat fut envoïé en Cour; & il en vint un ordre au Gouverneur du païs de Foix de le faire conduire au fort de Pequai dans le Bas-Languedoc fur le bord de la mer, où l'air est si mauvais, que l'on eft obligé d'y changer fort fouvent la garnison. On l'enleva de la chambre de M. de Pamiers, & on l'arracha, pour ainsi dire, d'entre les bras, pour le porter dans cette prifon, où il étoit impoffible qu'il vécût long-tems. Il y mourut au bout de quatre ou cinq mois.

M. de Pamiers avoit fait inutilement les plus vives inftances, pour obtenir du moins qu'on le transférât dans un autre lieu. On fe mit peu en peine de faire donner les derniers

XIX.

Sacremens à ce vénérable vieillard, quoiqu'il les eût demandés avec empreffement. Le Gouverneur du païs de Foix éxécutoit toujours avec rigueur tous les ordres qu'on lui envoïoit, & il y ajoutoit toutes les duretés qu'il jugeoit être agréables aux Jefuites, & fur-tout au P. de la Chaise, Confeffeur du Roi C'eft ce qu'il fit principalement à l'égard du P. Rouffe ancien Chanoine, qui étoit Curé pendant l'horrible tempête qui étoit venu fondre fur l'Eglife de Pamiers. Il ne paroifloit pas devoir y être enveloppé mais pendant qu'il travailloit au falut des ames avec un zéle infatigable, on vint fe faifir de lui, fous prétexte qu'il avoit fait quelque correction à une Ordonnance du P. Cerle Grand - Vicaire, & on le jetta dans la prifon publique de Pamiers. Il y fut réduit à une telle néceffité, qu'il étoit contraint de pendre un fac à la fenêtre de fa prifon, pour recevoir l'aumône des paffans. Quelque tems après, il fut relégué au Prieuré de Caffan dans le Bas-Languedoc, & il y mourut en 1689.

Le P. Cerle, un des Grands-Vicaires de Courage Pamiers, a été un des plus illuftres des difcidu P. Cer ples du faint Evêque de cette Eglife défolée. le. Excès Rien n'eft plus admirable que le courage aufquels on qu'il fit paroître, pour foutenir les droits de fe porte a fon Eglife, & pour s'oppofer aux entreprises fon égard. deM.de Montpezat, Archevêque de Toulouse,

qui, pour feconder les intentions de la Cour, & pour fuivre les impreffions des Jefuites, viola dans cette affaire toutes les Loix divines & canoniques. La premiere entreprise de cet Archevêque, fut de caffer, par un attentat vifible fur la jurisdiction du Chapitre de

Pamiers, l'élection des Grands-Vicaires, & de nommer en leur place pour Grand-Vicaire, fon Aumônier nommé Fortafin, qui fut inftallé par l'Intendant. Le P. Cerle difpa rut, pour être mieux en état de défendre les droits de l'Eglife de Pamiers. Il oppofa à l'Ordonnance de l'Archevêque une autre Ordonnance, qui attira des ordres de le chercher par tout, pour le faifir de fa perfonne.

Mais Dieu le tenoit caché dans le fecret de fa face. Il écrivoit lui-même alors : « On me

cherche par tout. Je fuis obligé de me cacher tantôt dans des trous, tantôt fur les montagnes. Je comprens par expérience ce que S. Paul dit des premiers Chrétiens. « Une lettre pleine de vigueur Apoftolique, qu'il fe crut obligé d'écrire à l'Archevêque de Toulouse porta les Jefuites confeillers de ce Prélat à l'engager de recourir au Parlement de Tou loufe, & de demander que le Grand-Vicaire de Pamiers fût condamné au dernier fupplice. Ce Parlement refufa d'entrer dans la paffion de ce Prélat & des Jefuites. Celui de Paris avoit rendu à la fin de 1680 un Arrêt par lequel il paroiffoit clairement qu'il n'y avoit rien que d'illégitime dans tout ce qu'avoit fait M. de Montpezat, en nommant Fortaffin pour Vicaire-Général de Pamiers. Cet Arrêt ordonnoit au Chapitre de faire une nouvelle élection, finon que l'Archevêque y pourvoiroit. Comme le Chapitre étoit en fuite ou en prifon, il ne pouvoit s'affembler. D'ailleurs il y avoit des Grands-Vicaires élus canoniquement par le Chapitre & approuvés folemnellement par le Pape. L'Archevêque de Touloufe fit donner à Fortaflin fa démission, & choifit un autre fujet encore plus indigne

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