Page images
PDF
EPUB

Le gouverneur de Saint-Paul de Loanda a fait occuper Massabi et le territoire qui s'étend jusqu'au Chiloango et à la Luisa-Loango, deux rivières qui se réunissent à 50 kilom. de la côte, et se jettent dans la mer près de Landana, à 30 kilom. environ de Punta-Negra et de la baie de Loango, dont les Français ont pris possession. Un traité a été conclu avec le roi de la localité; il prohibe l'esclavage, garantit la liberté commerciale à tous les étrangers, proclame la liberté de conscience, et assure protection aux missions scientifiques.

L'expédition polonaise, dirigée par le capitaine Rogozinski, a acquis l'île de Mandoleh, dans la baie de Cameroon, pour y établir une station. De là une partie de son personnel s'est rendue, au mont Cameroon, puis à Bakoundou sur la rivière Moungo, pour y passer la saison des pluies. Le Courrier de Varsovie a publié une lettre du chef de l'expédition, datée de Bakoundou-ba-Namwidi, le 20 août. Rogozinski organisait sa caravane pour s'en aller à la recherche des lacs. Il comptait envoyer à la côte le rapport sur son voyage par ses nègres, qu'il considérait comme la poste la plus sûre. « Les nègres, dit-il, ne perdent jamais de papiers, parce qu'ils croient que là où tombe un papier écrit par un Européen, un fétiche surgit immédiatement. » Il a expédié pour le musée de Varsovie des collections ethnographiques, se réservant de rapporter lui-même les collections zoologiques. Malgré la pluie, la santé de ses gens était bonne, et il espérait voir les lacs dont les indigènes lui parlaient.

Le D' Bayol, nommé récemment aux fonctions de lieutenant-gouverneur du Sénégal, établira sa résidence à Benty et aura à sa disposition un vapeur, pour pouvoir se transporter sur les différents points de son gouvernement, depuis la Cazamance jusqu'aux Scarcies. Sa connaissance du pays et des populations africaines est un gage de succès pour le développement de la colonie. On a profité cette année de la saison des hautes eaux, pour faire remonter à Khayes des steamers comme jamais le haut fleuve n'en avait porté ; on a pu ainsi expédier dans cette région une grande quantité de matériel, et une partie du personnel qui doit prendre part aux travaux du chemin de fer'. En même temps on formait la colonne qui doit aller ravitailler le poste de Bamakou. Elle emmènera avec elle un bateau à vapeur, démonté en un grand nombre de pièces dont la plus lourde ne dépasse pas 50 kilogr.; il sera remonté à Bamakou et lancé sur le Niger pour en compléter l'exploration.

1 Le steamer Alésia, de Marseille, transporte à Dakar 750 ouvriers pour les travaux de la ligne de Dakar à Saint-Louis.

NOUVELLES COMPLÉMENTAIRES

Un service rapide vient d'être institué entre Marseille et Alger; il y aura deux voyages par semaine, le mardi et le samedi, effectués par quatre paquebots à grande vitesse, qui feront la traversée en 29 ou 30 heures.

Le Dr Junker a dû revenir en Europe, pour rétablir sa santé compromise par son séjour de quatre ans et demi dans les bassins du Bahr-el-Ghazal et de l'Ouellé. Les missionnaires romains, partis de Zeïla pour le Choa, y sont heureusement arrivés et ont été reçus avec bienveillance par Ménélik, qui les a installés à Alinamba, lieu de marché où aboutissent les caravanes de Zeïla et d'Harar.

Aux dernières nouvelles reçues de J. Thompson à Zanzibar, l'explorateur anglais se trouvait à Wandarobo, mais rencontrait des difficultés de la part de ses gens, terrorisés par les Masaïs.

Le Henry Wright, destiné au service des stations missionnaires anglaises de la côte orientale, est arrivé à Zanzibar le 21 septembre.

D'après le Church Missionary Intelligence and Report, la mort de Mtésa n'est point confirmée. Les missionnaires anglais envoyés pour renforcer la station de l'Ouganda ont dû arriver à Roubaga; Lukongué, roi de l'île Oukéréoué, a cordialement invité deux d'entre eux à se rendre chez lui.

Un correspondant du Friend of the Free State écrit à ce journal que la tsétsé a disparu de la route du Transvaal à la baie de Delagoa, où quantité de wagons se rendent maintenant pour y chercher les marchandises d'Europe, dont naguère encore on allait se pourvoir à Durban par une route beaucoup plus longue. La nouvelle route a tout en sa faveur : la baie est commode et sûre, les droits sont peu élevés, la distance jusqu'à Lydenbourg courte, et la nature du pays est telle que l'on peut se servir de bœufs tout l'hiver pour les transports.

Le renversement de Cettiwayo a plongé le Zoulouland dans un vrai chaos. Enivré par ses succès, Usibepu a mis le pays à feu et à sang; il s'empare de tous les territoires limitrophes à sa portée et refuse de reconnaître l'autorité du gouvernement britannique. D'après une dépêche de Durban, une partie de son armée a été mise en déroute par une bande de Zoulous, sous le commandement du chef Umnyamana.

L'acquisition d'un territoire à Angra Pequena par la maison Lüderitz de Brême et l'installation de ses agents, rencontrent une certaine opposition de la part des colons anglais du Cap, dont les relations commerciales avec cette partie de la côte se sentent menacées par la concurrence allemande.

Le Dr Höpfner, jeune géologue, chargé par le gouvernement de l'empire allemand de faire des recherches minéralogiques dans l'Ovampo et le Damaraland, est revenu à Berlin. Dans une séance de la Société de géographie de cette ville, il a rendu compte de son voyage de Mossamédès à Humpata, puis au delà du Cunéné jusqu'aux villages du Damaraland, avec retour à Wallfishbay. Il repartira prochainement pour la même région.

Les explorateurs portugais Capello et Ivens ont été chargés, par leur gouvernement, de reprendre la suite de leur exploration et d'achever les cartes et relevés topographiques de la partie septentrionale de la province d'Angola et du territoire qui s'étend jusqu'au Congo. Ils doivent partir de Lisbonne le 6 décembre.

Le lieutenant Wissmann est parti pour le Congo, accompagné par le Dr Wolff et par deux frères, MM. Müller, lieutenants tous les deux.

M. Humblot, naturaliste français, est chargé d'explorer au point de vue botanique les bassins du Congo, de l'Ogôoué et du Gabon.

Le P. Augouard est parti de Landana pour aller fonder une station à Brazzaville.

Savorgnan de Brazza, dont la mort a été annoncée par erreur, était le 3 novembre à Franceville sur l'Ogôoué, tandis que son aide, le Dr Ballay, allait descendre par l'Alima au Congo avec une chaloupe à vapeur; de son côté, M. Mizon, naguère préposé à l'une des stations de l'Ogôoué, se rendait vers Mayombé par le Quillou, étudiant la route directe entre l'Atlantique et le Congo. Le ministère de l'instruction publique, d'accord avec celui de la marine, a fait partir, par le Niger, MM. Dufourcq, Labeyrie, Faucher, Coste, Didelot, Manas et Froment, pour renforcer les postes du littoral et de l'Ogôoué.

Le Congrès géographique et colonial espagnol, réuni en novembre à Madrid, s'est occupé de la question de la colonisation de Fernando-Po et de l'exploitation de cette île pour la production de café, cacao, sucre, coton, tabac, etc.

Un télégramme de Madère annonce que plusieurs canonnières anglaises de la station des côtes de Guinée ont fait une expédition sur le Niger, et qu'elles ont bombardé les deux villes d'Ado et d'Egan, à 180 et à 360 kilom. de l'embouchure du fleuve, pour punir le roi d'Ado de sa conduite envers des sujets anglais.

Le Dr Mähly se propose de faire, avec le missionnaire Muller d'Abouri, un voyage de reconnaissance le long du Volta jusqu'à Salaga, où se trouvent différentes tribus otschis pacifiques, afin de préparer une extension urgente de l'œuvre de la Société de Bâle à l'intérieur, et d'étudier la possibilité d'installer des stations dans des localités plus salubres.

La guerre civile de l'Achanti s'est terminée par le triomphe du prince Quacoe Duah, le protégé des Anglais, qui retient prisonnier Calcalli, l'ancien roi, détrôné par ces derniers en 1874 et dont les partisans ont été massacrés. Quant au roi Mensah, il est tombé dans un profond mépris.

Les ingénieurs anglais chargés des travaux préparatoires pour la pose du câble sous-marin de Cadix à Ténériffe, qui doit avoir un embranchement sur le Sénégal, ont procédé aux travaux d'atterrissement à Ténériffe. On pense que l'Europe sera reliée au Sénégal en janvier prochain.

M. Saturnino Zimenes, chef de l'expédition espagnole au N.-O. de l'Afrique, est revenu à Madrid, après avoir exploré la côte de Santa-Cruz de Mar Pequena et l'intérieur du Maroc jusqu'à Mequinez et à Fez.

LES GRANDES VOIES FLUVIALES DE L'AFRIQUE

En annonçant (p. 255) le mémoire de M. Stevenson, nous avions l'intention de revenir, plus tôt que l'abondance des matières ne nous l'a permis, sur l'importante question des voies fluviales africaines, au point de vue de l'exploration et de la civilisation de la zone équatoriale. Importante en effet, puisqu'un des grands obstacles au progrès de l'œuvre scientifique et humanitaire qui s'y poursuit s'est trouvé dans la difficulté et dans le coût des transports par terre. Tout le monde sait les embarras que causent aux explorateurs, aux négociants et aux missionnaires, l'obligation de se servir de caravanes de porteurs chargés d'innombrables colis de marchandises d'échange, de provisions, d'instruments, etc. On n'ignore pas non plus l'insuccès des tentatives faites pour créer des routes, bien vite recouvertes par une végétation exubérante, et pour substituer aux porteurs des bêtes de somme, éléphants, bœufs ou ânes, bientôt victimes du climat ou de la tsétsé. Quant aux frais de transport, le seul chiffre de 10,000 fr. la tonne, de Zanzibar au Tanganyika, suffit pour faire comprendre l'immense transformation que subira l'œuvre africaine lorsque, pour pénétrer au cœur du continent, on pourra adopter les grandes voies fluviales qui y conduisent.

Il va sans dire que de longtemps il ne pourra, en fait de navigation sur les fleuves de l'Afrique, être question de rien de semblable à ce qui existe sur le Rhône, le Rhin ou le Danube pour l'Europe, sur le Mississipi ou l'Amazone pour l'Amérique, sur les fleuves de l'Inde ou de la Chine pour l'Asie. Le relief du continent africain, avec son vaste plateau central bordé, sur presque toute sa périphérie, de plusieurs terrasses qui ne laissent entre elles et la mer qu'une zone de terrain bas plus ou moins étroite, crée, pour tous les fleuves venant de l'intérieur, des séries de rapides ou de cataractes qui ne permettent de songer, pour aucun d'eux, à une navigation non interrompue jusque dans la région de leur cours supérieur, comme c'est le cas pour les grandes artères fluviales des autres parties du monde. Le Niger seul pourra faire exception. Ce n'est pas que ce grand cours d'eau soit exempt de rapides, infranchissables pour les bâtiments réclamés aujourd'hui par la navigation accélérée ; les cataractes de Boussa sont encore un obstacle insurmontable aux vapeurs, mais peut-être réussira-t-on un jour à les faire disparaître, et à établir une communication continue des bouches du Niger jusque près de Bamakou. En attendant il ne serait point impossible, à des vapeurs d'un faible tirant d'eau, de pénétrer à l'époque des hautes eaux, par le grand

affluent du Niger, le Bénoué, et, par le Mayo-Kebbi et les marais de Toubouri, jusqu'au lac Tchad, et de là, par le Chari et l'Ouellé jusque dans le voisinage du Nil Blanc', soit à plus de 3000 kilom. de l'océan Atlantique. Mais, au point où nous ont conduits les explorations de Flegel d'un côté, et celles de Junker et de Casati de l'autre, nous ne pouvons encore rien dire de positif à cet égard.

Il n'en est pas de même des trois autres grands fleuves de l'Afrique, le Nil, le Zambèze et le Congo. Toutefois avant d'entrer, avec M. Stevenson, dans l'étude de la navigabilité de ces grandes voies civilisatrices, qu'il nous soit permis de faire remarquer que si, au point de vue des rapides et des cataractes, l'Afrique offre une infériorité relativement aux autres continents, d'autre part, la disposition de ses grands cours d'eau lui crée un avantage que les autres parties du monde ne présentent pas, celui de pouvoir, sauf quelques interruptions, pénétrer du nord, de l'est et de l'ouest, par eau, jusqu'au cœur du continent. En Europe, en Asie et en Amérique des chaînes de montagnes ont opposé aux communications rapides des obstacles que la science a surmontés, mais à quel prix! et encore, les frais de transport par les chemins de fer du MontCenis et du Saint-Gothard, comme par ceux des montagnes Rocheuses et des Andes, dépasseront toujours le coût des transports par eau, même avec transbordements, que l'on pourra établir sur les fleuves de l'Afrique.

Il est naturel que nous commencions par le Nil, le mieux connu, et celui sur lequel existent déjà des communications régulières par bateaux à vapeur. En effet, cette grande artère qui s'étend du nord au sud, de la Méditerranée jusqu'au delà de l'équateur, est navigable jusqu'à la première cataracte, près d'Assouan, à plus de 1100 kilom. de la mer. Il est vrai qu'à partir de ce point, sur un parcours de 1000 kilom. environ, jusque près de Khartoum, il n'y a pas moins de six cataractes ou rapides. Aussi a-t-on eu l'idée de faire un chemin de fer d'Assouan à Chendi; le tracé en a été levé, mais on n'en a construit que quelques kilomètres. Un projet d'écluses pour franchir les cataractes a aussi été conçu, et les plans en ont été dressés, mais on n'y a pas donné suite. L'idée de Gordon-pacha, de gagner le Haut-Nil par la voie de Souakim sur la mer Rouge, a beaucoup plus d'avenir; c'est la route que prennent les

1 D'après une carte d'Emin-bey, gouverneur des provinces équatoriales, publiée dans la dernière livraison des Mittheilungen de Gotha, un affluent du Nil-Blanc prend sa source dans la même région que le Kibali, cours supérieur de l'Ouellé. (Voir la carte, page 116).

« PreviousContinue »