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libéralité ne pourraient pas être aliénées avant la mort du sieur Sarrat, son mari;

Qu'en exécution de ce testament, les sommes attribuées à la légataire ont été employées à l'acquisition de deux titres nominatifs de rente 3 p. c. sur l'Etat français, d'ensemble 513 francs portant la mention que ces titres ne seraient aliénables qu'après le décès du sieur Sarrat;

Considérant que la dame Sarrat a intenté contre le sieur Legrand, exécuteur testamentaire de la demoiselle Pautard, une demande tendant à faire réputer non écrite la clause d'inaliénabilité comme contraire à l'ordre public;

Que les premiers juges ont estimé que, dans l'espèce, cette clause était valable, parce qu'elle ne comportait pas une indisponibilité absolue, mais seulement temporaire;

Considérant qu'à raison de l'âge de la légataire, qui n'a que dix-huit mois de moins que son mari, et des circonstances particulières de la cause, la prohibition d'aliéner, contenue au testament, ne peut pas être qualifiée de «temporaire >> ;

Qu'elle équivaut à une interdiction absolue;

Qu'elle est contraire à l'ordre public, intéressé à la libre circulation des biens, et qu'elle est entachéo de nullité;

Qu'il échet, en conséquence, de faire droit à la demande de la dame Sarrat et d'infirmer le jugement frappé d'appel;

Par ces motifs, reçoit les époux Sarrat appelants du jugement susvisé, infirme le dit. jugement, émendant, décharge les appelants des dispositions qui leur font grief, et statuant à nouveau, déclare non écrite la condition d'inaliénabilité contenue dans le testament de la demoiselle Pautard et imposée au legs fait au profit de la dame Sarrat; dit que, nonobstant les clauses de ce testament, la dame Sarrat peut disposer du capital provenant de ce legs et transférer les titres de rente sur l'Etat français susvisés; ordonne, en conséquence, que le notaire détenteur de la minute du testament sera tenu de délivrer un certificat de propriété constatant que la damne Sarrat peut librement disposer des dits titres de rente; dit que le ministre des finances devra rayer la mention d'inaliénabilité inscrite sur les deux titres de rente 3 % sur l'Etat français.

Du 28 juin 1900.- Cour d'appel de Paris. - 2 ch. Prés. M. Harel.

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De simples mensonges, même réitérés et produits par écrit, ne peuvent constituer les manoeuvres frauduleuses caractéristiques du délit d'escroquerie, s'il ne s'y joint aucun fait extérieur ou acte matériel, aucune mise en scène ou intervention d'un tiers destinés à leur donner force ou crédit (1).

On ne saurait faire résulter l'escroquerie de la transmission à son patron, par un représentant à la commission, d'ordres fictifs ayant pour but de surprendre la bonne for du patron et de se faire remettre des sommes à valoir sur le montant des commissions.

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen du pourvoi pris de la violation des articles 405 du code pénal et 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué ne relevait à la charge du demandeur aucune des mises en scène ou instruction étrangère offrant le caractère des manœuvres frauduleuses qui constituent tous les éléments essentiels du délit d'escroquerie:

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que le demandeur, qui s'était fait agréer comme représentant à la commission par Loiseau, lui a transmis à diverses reprises

des ordres et s'est fait remettre une somme de 300 francs à valoir sur le montant de ses commissions; qu'il a ultérieurement tenté d'obtenir au même titre une somme de 200 francs, mais que sa demande n'a point été accueillie par Loiseau qui avait appris que les ordres que lui avait adressés le demandeur étaient fictif's;

Attendu que l'arrêt attaqué fait résulter l'escroquerie de ce que les ordres fictifs

(1) On sait que la cour de cassation de Belgique décide que le juge de fonds apprécie souverainement les manoeuvres frauduleuses constitutives de l'escroquerie. Cass. belge, 10 juillet 1900 (PASIC., 1900, I, 314).

Ex

expédiés à trois reprises différentes par Hademard à Loiseau constituaient des manœuvres frauduleuses de nature à persuader l'existence d'un crédit imaginaire et auraient été en fait la cause déterminante de la remise de la somme de 300 francs;

Mais attendu que de simples mensonges, même réitirés et produits par écrit ne peuvent constituer les manoeuvres frauduleuses caractéristiques de l'escroquerie s'il ne s'y joint aucun fait extérieur ou acte matériel, aucune mise en scène ou intervention d'un tiers destinés à leur donner force ou crédit;

Attendu que l'arrêt attaqué ne relève aucune circonstance, aucun fait extérieur ou acte matériel, aucune mise en scène ou intervention d'un tiers de nature à donner force et crédit, aucune allégation mensongère qu'auraient renfermées les lettres du demandeur; que dès lors, dans l'état des faits constatés, on ne saurait reconnaître au moyen employé par le demandeur pour surprendre la bonne foi de son patron le caractère des manoeuvres constitutives du délit d'escroquerie prévu et puni par l'article 405 du code pénal;

D'où il suit que c'est à tort que la cour de Bordeaux a fait application au demandeur de la peine édictée par le dit article;

Par ces motifs, casse...

Du 8 février 1900.

Cour de cassation de France. - Chambre criminelle. Prés. M. Ballot Beaupré, président. Rapp. M. Boulloche, conseiller. Min. publ. M. M. Duboin, avocat général. Pl. M. Mornard.

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fondait sur ce qu'un syndic de faillite ne pourrait acquiescer à un jugement susceptible d'appel sans l'autorisation du jugecommissaire; que le pourvoi prétend qu'en déclarant cette autorisation nécessaire, l'arrêt a violé les articles 443 du code de procédure civile et 443 du code de commerce (444 de la loi belge du 18 avril 1851) et les principes généraux en matière d'acquiescement et d'appel; que cette prétention du pourvoi est erronée; qu'en effet, l'acquiescement, entraînant abandon d'un droit, équivaut à une transaction et est, par conséquent, assujetti aux formes prescrites par les articles 487 et 535 du code de commerce (492 de loi belge du 18 avril 1851); qu'ainsi, le syndic n'aurait pas eu capacité suffisante pour acquiescer au jugement du tribunal de Lourdes du 30 juillet 1896 sans autorisation;

Attendu que l'arrêt déclare, en conséquence, qu'en faisant signifier à Moutier le jugement du 30 juillet 1896, le syndic Delaval, n'ayant pas capacité d'acquiescer, n'a pu avoir d'autre intention que de faire courir les délais d'appel; que, par suite, l'acte d'appel signifié par le dit Delaval à Moutier, le 16 octobre 1896, était recevable en la forme; que cette décision, régulièrement motivée, ne viole ni les textes de loi, ni les principes de droit invoqués par le pourvoi; Rejette...

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Attendu que dans la nuit du 7 et 8 octobre 1898, c'est-à-dire douze jours avant de commettre le double assassinat qui a motivé contre lui l'application de la peine de mort, le facteur Bétille s'était rendu coupable près du bourg de St-Georges-de-Vièvres d'un important vol qualifié dans le domicile et au prejudice du sieur Le Fauqueur, rentier au dit lieu; qu'il y avait soustrait notamment une pièce de 20 dollars et deux pièces de monnaie française de 40 et 50 francs en or;

Qu'au cours de l'information nécessitée par ces crimes, il fut reconnu que la pièce d'or de 50 francs dont il s'agit, qui portait une petite éraflure caractéristique, était du millésime de 1857 et à l'effigie de Napoléon III non couronné, avait été le 9 octobre de la dite année remise au sieur F..., boucher à B.... par Bétille, en payement d'une somme de 6 francs pour une fourniture de viande que celui-ci venait de prendre dans sa boutique;

Attendu qu'il résulte de la procédure criminelle suivie contre Bétille et communiquée aux parties en cause que F.. et les personnes de sa maison ne connaissaient nullement cet individu d'ailleurs étranger à leur arrondissement; qu'il avait, au dire du boucher T..., lequel a assisté à toute la scène, des allures suspectes, «un air pressé», une certaine quantité d'argent dans son porte-monnaie qui avait «l'air gonflé »; qu'après avoir dit, sur la proposition d'un morceau de viande que l'on faisait à sa demande : «Moyennant que ce soit bon, le prix ne me fait rien», il déclarait, au moment de payer, en montrant une pièce de 5 francs « Ça ne fait pas assez; ça me

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coûte beaucoup de changer un louis de 50 francs, car il y a longtemps que je l'ai, mais si je repasse, ici, je le reprendrai»;

Attendu qu'une pareille attitude de la part d'un étranger, absolument inconnu, ne pouvait éveiller chez F... lui-même que les soupçons les plus graves; qu'il les conçut en effet, tout en remettant à cet étranger les 45 franes formant la différence; qu'il en fit immédiatement part à sa femme et à sa belle mère, disant à celle-ci : « Vous voyez ce louis-là, c'est un louis volé, vous verrez que nous en aurons des nouvelles avant peu»; qu'il le mit du reste de côté parce qu'il avait, a-t-il dit plus tard au magistrat instructeur, le soupçon qu'il provenait d'un vol; qu'il a du reste franchement complété sa pensée devant le même magistrat en ajoutant : « Si j'ai eu le soupçon d'un vol, c'est parce que le jeune homme qui m'a remis une pièce de 50 francs n'avait pas l'air d'être dans une situation lui permettant d'en posséder. Depuis quinze ans que je suis dans le commerce je n'en ai jamais reçu de mes clients » ;...

Attendu que postérieurement F... fit à la justice spontanément remise de cette pièce qui figura aux débats de la juridiction criminelle; qu'après l'expiration des délais légaux, elle fut, sur l'ordre de M. le procu reur général près la cour d'appel de Rouen, restituée à Le Fauqueur; qu'alors F... introduisit l'instance civile sur laquelle a statué le premier juge, en prononçant la condamnation qu'il sollicitait;

Attendu que cette sentence à peu près exclusivement étayée sur des motifs de droit plus ou moins déterminants, renferme une erreur de fait qu'il y a lieu de rectifier ici; que F... ne demandait pas, en effet, comme semble le dire le jugement attaqué, l'attribution de la pièce de 50 francs, mais seulement sa valeur; que l'argument tiré de sa bonne foi est sans portée juridique; qu'il n'est du reste pas inutile de remarquer que, sans reconnaître de principe d'obligation, Le Fauqueur lui a proposé amiablement de lui remettre la moitié de la pièce volée à son préjudice;

En droit :

Attendu qu'il est inexact de dire, comme le fait le premier juge, que F... était devenu propriétaire de la somme de 50 francs; qu'en effet Bétille, qui l'avait volée, ne pouvait la faire servir à un payement valable (art. 1238 du code civ.); qu'en tout cas c'est là une pétition de principes qu'il devient inutile de relever plus amplement, puisque l'intimé ne songe même pas à revendiquer la propriété proprement dite de la pièce en question,

dont il reconnaît Le Fauqueur valablement saisi;

Attendu que s'il n'y a pas lieu, comme l'allégue le jugement attaqué, d'appliquer à la monnaie courante les dispositions de l'article 2279, § 2, cette exclusion ne saurait atteindre les pièces rares, recherchées parce qu'elles ne sont pas courantes, parce que ceux qui les possèdent donnent tous leurs soins à leur conservation et gardent scrupuleusement le souvenir des signes caractérisant leur identité particulière;

Attendu que l'on ne saurait prendre davantage en considération l'argument tiré de ce que F... était dans la nécessité de recevoir la pièce présentée par Bétille, parce qu'elle aurait eu cours forcé; que cet argument est contraire à l'article 1243 du code civil et à la jurisprudence qui en a fait l'application; que, du moment où la dépense qu'il s'agissait de solder n'atteignait qu'un chiffre minime, et, en tout cas, largement inférieur à la valeur de la pièce d'or proposée par Bétille, F... n'était nullement tenu d'affecter le change de monnaie demandé pour la facilité du payement;

Attendu qu'après avoir ainsi écarté chacun des motifs sur lesquels s'appuyait le jugement dont est appel, il importe de condenser ceux qui doivent faire admettre le bien fondé des prétentions de Le Fau

queur;

Attendu que celui-ci se prévaut, à bon droit, de l'exception inscrite dans le § 8 de l'article 2279 du code civil; qu'il est certain que la pièce remise par Bétille à F... est bien celle qui lui a été volée; qu'aucun doute n'est possible sur son identité; qu'il y a concordance absolue de valeur, de millésime et d'effigie;

Attendu, il est vrai, que, d'après F..., l'article 2280 du code civil serait seul applicable à la cause, et qu'en vertu de ce texte, possesseur ayant, dit-il, reçu l'objet d'un machand de choses pareilles, il doit être indemnisé par le revendiquant;

Mais attendu que l'article ainsi invoqué ne fait que conserver une exception au principe posé par l'article 2279; que le caractère de toute exception est de ne pouvoir être étendu d'un cas à un autre; que le principe dont il s'agit dispense d'une façon très générale le revendiquant de rembourser le prix qu'a pu débourser le possesseur de la chose perdue ou volée; que ce remboursement n'est imposé que dans un cas particulier seulement, celui où le possesseur «l'a achetée dans un fonds ou dans un marché ou dans une vente publique, ou d'un marchand vendant des choses pareilles>> ;

Attendu qu'il est aisé de comprendre qu'en règle générale, le possesseur d'un objet volé n'ait droit à aucune indemnité; que le propriétaire qui le revendique ne lui doit rien; que sa situation est plus favorable que celle du possesseur; que, dépouillé par un crime qu'il ne pouvait ni empêcher ni même prévoir, il n'a rien à se reprocher; que le possesseur se trouve en faute de ne point s'être enquis de la situation et de la moralité du son vendeur, de ne s'être pas informé de l'origine plus ou moins douteuse de la possession du vendeur (LAURENT, t. XXXII, no 887; BAUDRY - LACANTINERIE, Vo Prix, n° 902), qu'en achetant partout ailleurs qu'en foire, d'un non-marchand ou du premier venu, il n'est point absolument exempt d'imprudence; qu'il aurait dû s'abstenir s'il avait eu quelque doute; qu'il a eu au contraire le tort de suivre imprudemment la foi de son vendeur; qu'il a en quelque sorte acheté de lui au hasard, à ses risques et périls (MOURLON, t. III, p. 830);

Attendu que l'exception à la dite règle générale s'explique aussi facilement que cette règle elle-même; que quand l'acquéreur a acheté la chose dans une foire ou un marché, une vente publique, ou d'un marchand vendant des choses pareilles, il lui eût été bien difficile de supposer à cette chose une origine frauduleuse; que les garanties en quelque sorte officielles de publicité spécifiées dans la loi et sous la sauvegarde desquelles il a traité, étaient de nature à vaincre toutes hésitations de sa part; que son erreur a été si légitime et si invincible, qu'il y aurait injustice à permettre de le dépouiller sans indemnité;

Attendu que tel n'est pas le cas de F... qui, pour soutenir son système, en est réduit à prétendre qu'il a reçu l'objet d'un marchand de choses pareilles;

Mais attendu que, pour être exact et pour rentrer dans les termes du texte par lui invoqué, il devrait aller jusqu'à dire qu'il a acheté de Bétille, marchand de pièces d'or pareilles, la pièce de 50 francs, objet du débat;

Attendu que signaler une pareille conséquence, c'est en montrer l'inadmissibilité;

Que F... n'a rien acheté de Bétille; que ce dernier n'a jamais été marchand ni eu la prétention de l'être; qu'il a fini sa triste existence comme doivent la terminer les voleurs et les assassins, et que F... avait bien eu au moment de la réception de la pièce de 50 francs, non pas certes le pressentiment de la gravité de ce qu'avait pu faire Bétille, mais la quasi-certitude qu'il avait au moins commis un vol; que dans de pareilles cir

constances, et tout en reconnaissant que F... a agi loyalement pour aider la justice criminelle dans ses recherches, on doit déclarer mal fondée sa demande actuelle en remboursement;

Que, succombant dans ses prétentions, il doit supporter les dépens;

Par ces motifs, dit qu'il a été mal jugé, bien appelé; réformant, décharge Le Fauqueur des condamnations prononcées contre lui; rejette comme mal fondée l'action de F...; le condamne à tous les dépens.

Du 1er avril 1900. Tribunal civil de Pont-Audemer. Prés. M. Leconte.

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NOTAIRE. REGLEMENT. VIOLATION.

CHAMBRE DE DISCIPLINE. DECISION CONTRAIRE.

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ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi:

Vu les articles 23 de l'ordonnance du 7 janvier 1843 et 34 du règlement intérieur des notaires de l'arrondissement de Beauvais, approuvé par arrêté du garde des sceaux, du 30 novembre 1894;

Attendu qu'aux termes du dernier de ces articles, la rédaction et la garde de la minute d'un acte de vente amiable appartiennent au notaire de l'acquéreur;

Attendu qu'en vertu de cette disposition, Me Langlois, notaire à Noailles, en concours avec Me Lefevre, notaire à Beauvais, a prétendu rester détenteur de la minute d'un acte de vente consentie par la dame de Grasse au sieur Deversin, parce qu'il était le notaire de ce dernier;

Attendu que la délibération attaquée a considéré « qu'en retenant la minute de ce contrat de vente, que, dans des espèces précédentes, la chambre avait attribué au no

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