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çonneux, avare, cruel, ambitieux, diffimulé, incontinent, VI SIECLE. il fe livra prefque fans réferve à toutes ces paffions. En un mot Chilperic étoit tel dans fa conduite, que faint Gregoire de Tours, qui l'avoit connu perfonnellement, n'a pas craint de nous en faire un portrait, qui tend à nous le reprefenter comme l'Herode & le Neron de fon fiecle 'Il eft vrai que quelques Hiftoriens rejettent la plupart. Aim. ib. c. 311 de fes injuftices & de fes cruautés fur la fameufe Fredegonde, qui avoit fupplanté la Reine Audouere femme légitime de ce Prince, & pris fa place. Dès 567 Chil- Gr. T. ib. I. 4.0j peric avoit épousé une troifiéme femme du vivant des autres. Celle-ci étoit fille d'Athanagilde Roi des Visigots en Espagne,& fœur de Brunehaut, & fe nommoit Galfvinthe, ou Galfuinde. Mais elle ne fut pas long-temps à la Cour de France, fans devenir la victime de l'inhumanité du Roi fon Epoux & de la jaloufie de Fredegonde.

28.

56.

Chilperic fut tué à Chelles au retour d'une partie de 1.6.c.46.1.7. c. chafle vers l'automne de 584. Il avoit regné vingt-trois 4. Aim. 1. 3. cà ans, & en avoit vêcu environ quarante-cinq. Il parut alors, remarquent nos Hiftoriens, que ce Prince n'étoit pas plus aimé de fes fujets, qu'il les avoit aimés lui-même. Tout le monde l'abandonna. Il n'y eut que Mallulfe ou Malculfe Evêque de Senlis, qui prit foin d'enfevelir fon corps. Puis l'aïant fait tranfporter à Paris, il l'enterra dans l'Eglife de faint Vincent, aujourd'hui faint Germain des Prés, Quoique ce Prince fe fût vû quatre fils, Théodebert, Merouée, Clovis & Thierri, peu s'en fallut qu'il ne laiffât aucun héritier de fa couronne; ceux-là étant morts avant lui. Mais quatre mois avant qu'il fut tué, il lui en étoit né un cinquième, qui lui fucceda fous le nom de Clotaire II. Il laiffa auffi deux filles: Rigonthe qui fut accordée en mariage à Reccarede frere de faint Hermenegilde, mais qui ne l'époufa pas, & Bafine Religieufe à Sainte Croix de Poitiers.

Gr. T. ib. 1. 4. c. 31.6.c.34. 41 |

1. 7-.c. 7.

n.

'Tous les défauts que nos Hiftoriens reprochent à Chil- Mab, an, 1. 7. 0. peric, n'empêcherent pas qu'il ne fît du bien à quelques 30. Eglifes. Celles de faint Germain des Prés & de faint Lu cien de Bauvais en particulier le reconnoiffent pour un de leurs Bienfaiteurs. Ils n'empêcherent pas non plus qu'on n'eût du refpect pour fa mémoire même après fa mort. C'est ce qui paroît par le teftament de faint Bertran

ana. t. 3. p. 119.

Fort.ib.

VI SIECLE. Evêque du Mans, qui n'y parle de lui qu'avec honneur, 'Dès le vivant de ce Prince, Fortunat avoit fait son éloge, où il releve avec les beautés ordinaires de fa Mufe les vertus qu'il admiroit en lui: fa magnificence, sa valeur, fa politique, fon équité, fon fçavoir. Nous en rapporterons quelques vers, pour lui fervir comme d'épitaphe.

Gr. T. hift. I. 5. c. 45. Aim. l. 3.

C. 40%

O

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N vient de voir dans l'éloge que Fortunat nous a laiflé de Chilperic, que ce Prince aimoit les letres,& que malgré les foins qu'il étoit obligé de donner au gou vernement de fon Roïaume, il trouvoit encore du temps pour les cultiver. Saint Gregoire de Tours & Ainoin après lui atteftent la même chofe. Outre la connoifance des langues & la fcience des Loix, il fe mêloit enco re de poëfie, de grammaire, de Théologie & de Con troverfe.

'Il fe mit en tête de terminer les difputes fur leyf tere de la Sainte Trinité, & de couper comme il pré zendoit, le nœud des difficultés qu'il faifoit naître. Dans ce deffein il compofa vers 589 un livre, où fuivant les e

reurs de Sabellius, il foûtenoit qu'on devoit nommer la VISIECLE. Sainte Trinité fimplement Dieu; fans diftinction de Perfonnes. Qu'il étoit indigne de Dieu de lui donner le nom de Perfonne, comme à un homme mortel. Que le même eft Pere, Fils & Saint Efprit. Il fit un jour faire lecture de ce livre en préfence de faint Grégoire de Tours, à qui il dit qu'il vouloit que tous les Evêques de fon Roïaume fuiviffent & enfeignaffent cette doctrine. Ce faint homme lui dit nettement qu'elle étoit contraire à celle des faints Docteurs de l'Eglife, qu'il lui expliqua en peu de mots, & que par conféquent il devoit y renoncer. Je le ferai voir, lui repliqua Chilperic en colere, à de plus doctes que vous, qui n'en jugeront pas de même. Vous ne trouverez, répartit faint Grégoire, que des infensés qui foient de votre opinion.

'Quelque temps après faint Salvius Evêque d'Albi vint Ibid à la Cour. Comme la réputation étoit grande pour le fçavoir & la fainteté, le Roi amoureux de fon livre, le pria d'en écouter la lecture. Apeine ce Prélat en eut-il entendu quelques pages, qu'il dit tout franchement qu'il déchireroit bien plus volontiers cet ouvrage que de l'entendre lire. La fermeté de ces deux Evêques déplut d'abord à Chilperic. Mais enfin il reconnut qu'ils avoient raifon. Il les loua, & condamna lui-même fon livre. C'est fans doute ce qui eft la principale cause pourquoi cet ouvrage n'eft pas venu jufqu'à nous.

'L'application que Chilperic donna à la poësie, pro- Gr. T. ib. I. a.c duifit deux livres en vers, qu'il compofa à l'imitation de 46. Sedulius. On ne nous apprend pas fur quel fujet. Il y a néanmoins quelque apparence que c'étoit plûtôt des hymnes, qu'autre chofe. Mais comme ce Prince fe mêloit de verfifier, fans fçavoir les regles de la poëtique, fes vers étoient fort défectueux. On y rencontroit continuellement des fyllabes longues pour des breves, & des breves pour des longues.

De toutes fes poëfies il ne nous refte, que l'on fçache, que l'épitaphe de faint Germain Evêque de Paris en douze vers élegiaques. Aimoin nous l'a confervée; & nous l'a- Aim. l. 3. c. 16. vons rapportée d'après lui, à la fin de l'hiftoire de ce Saint Prélat. On la trouve encore dans divers autres recueils;dans les notes fur Fortunat de Poitiers dans l'histoise

VI SIECLE. de l'Eglife de Paris, dans le premier volume des actes des Saints de l'ordre de Saint Benoît, & ailleurs,

Fort. 1. 9. c. I. not. p. 208.

Mab; an. 1. 6, n.

68.

Gr. T. ib. 1. 6. c.

46.

1. 5. c. 45. Aim, 1. 3. c. 49.

Gr. T. ib. not,

Aim, ib,

comme on

'Quelques fçavants doutent neanmoins, que ce foit là l'Epitaphe que Chilperic compofa pour orner le tombeau de faint Germain. Ils appuïent leur doute, fur ce que d'une part faint Grégoire de Tours affure vient de le voir, que ce Prince ignoroit les regles de la verfification; & que de l'autre Aimoin parlant de cette Epitaphe, témoigne que c'étoit une profe quarrée ryth micè, où il avoit plus d'égard au nombre & à la cadence qu'à la profodie, C'est ce qui a fait juger à Brower, que cette Epitaphe eft du même Auteur que la vie de faint Germain, & que l'on y peut appercevoir tout le genie de Fortunat. 'D'autres penfent feulement qu'Aimoin aura pû la retoucher, & la rendre telle qu'on la voit au, jourd'hui.

'Chilperic entreprit encore de compofer des hymnes, des collectes & autres piéces pour l'office divin. Mais on n'en put faire aucun ufage, fuivant la remarque de faint Gregoire de Tours.

'Il ne fut gueres plus heureux dans fon entreprise en faveur de l'orthographe, Il voulut ajoûter à l'alphabet ordinaire dont on fe fervoit de fon temps, quatre carac teres pour marquer d'un feul trait certaines prononciations, dont chacune avoit befoin de plufieurs letres. Il fut fi amoureux de ce deffein, qu'il envoïa des ordres dans toutes les villes de fon Roïaume, pour faire inftruire ainfi les enfants, faire corriger les anciens livres.conformément à cette nouvelle orthographe. Mais on ne s'en fervit que pendant qu'il vêcut. De forte que les quatre letres inventées à ce deffein, eurent le même fort que celles que l'Empereur Claude voulut autrefois faire pafler dans l'ufage public, Les unes & les autres finirent avec leurs Auteurs,

On ne sçauroit au refte rien ftatuer fur ces quatre carac teres du Roi Chilperic, parce qu'on en ignore la veritable figure. 'Ils font en effet auffi differemment peints, qu'il fe trouve de differents manuferits de l'Hiftoire de faint Gregoire de Tours. Un des plus anciens qui peut remonter au-delà de huit cents ans, les reprefente de cette façon, ∞ ¥ z◊.'Mais on croit qu'il y a plus d'apparen

ce que ce font ceux qu'Aimoin nous repréfente fous ces VI SIECLE quatre figures, ex.

Goldaft rapporte fous le nom de Chilperic quelques Gold. conf. imp. fragments de fes Edits & Ordonnances. Mais c'est très-peu t. 1. p. 11. 12. de chofe, & prefque tout tiré de faint Gregoire de Tours.

'CE

II CONCILE

DE MACON.

P. 381-390.

E fut encore le Roi Gontran qui affembla ce Con- Conc. t. 3. p cile. Il fe tint le vingt-troifiéme d'Octobre, la 979.989. IG. t. 1. vingt-quatrième année de fon regne, 585 de J. C. On y compta jufqu'à quarante-trois Evêques en perfonne, fans y en comprendre trois autres qui étoient fans fiége: Fronime d'Agde, Promote de Châteaudun & Fauftien de Dax. A la tête de tous ces Evêques étoient fix Métropolitains: Prifque de Lyon; qui eft qualifié Patriarche & qui préfida à l'affemblée, Evance de Vienne, Prétextat de Rouen, Bertran de Bourdeaux, Arteme de Sens & Sulpice de Bourges. Les plus célebres entre les fimples Evêques, font faint Syagre d'Autun, faint Aunacaire d'Auxerre, faint Veran de Cavaillon & Marius d'Avenche. Nous pourrons dans la fuite parler de ces trois derniers en particulier. Outre ces Evêques préfents, il s'y trouva dix-huit, ou même vingt Députés d'autant d'autres Prélats qui ne purent fe trouver à l'aflemblée.

pour

20.

Il paroît par faint Grégoire de Tours, que le pre- Gr. T.hift. 1. 8. a mier motif de la convocation de ce Concile fut juger les Evêques accufés d'avoir embraffé le parti de Gondebaud. On fçait au refte que ce Gondebaud étoit 1. 6. c. 24un avanturier, qui fous le beau nom de fils de Clotaire I, avoit fait un puiffant parti & de grandes conquêtes, fur-tout en Aquitaine On y examina effectivement la 1.8. c. zo. caufe de ces Evêques. Fauftien qui avoit été ordonné Evêque de Dax par l'autorité de ce Prince prétendu, y fut dépofé, & un autre mis à fa place. Les Peres du Concile eurent néanmoins la précaution de ftatuer, que les trois Evêques qui avoient eu part à l'ordination de

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