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SAINT RURICE I,

R

VEQUE DE LIMOGES.

SI.

HISTOIRE DE SA VIE.

URICE defcendoit d'une Famille illuftre dans les Fort. 1.4.4 Gaules, qui avoit contracté des alliances avec celle des Anices de Rome. On ne fçait point quel fut l'endroit de sa naissance; & l'on ne fçauroit en juger définitivement fes habitudes. Car s'il en avoit en Provence, il en avoit auffi à Lyon, en Auvergne & ailleurs. Si cependant

par

il n'étoit pas de Provence, 'il paroît au moins qu'il y fai- Rur. 1. 1. ep. 1; 2; foit de fréquents voïages, & qu'il y avoit fait quelque fejour. On n'est pas plus inftruit touchant fon éducation. Mais on ne doit pas douter qu'elle ne fût conforme à sa naiffance.

Ses alliances n'y répondirent pas moins parfaitement. Sid. car 11; Il épousa Iberie fille d'Ommace d'une famille Patricienne d'Auvergne. Ce mariage fe fit quelque tems avant l'an 471, qui eft la premiere année de l'Epifcopat de S. Sidoine; puifque celui-ci fit l'épithalame de leurs nôces, piece trop mauvaise en toutes manieres pour l'attribuer à un Evêque. Rurice eut des enfants de fon mariage. On n'en Fort. ib. peut douter, fçachant qu'il fut aïeul d'un autre Rurice Evêque de Limoges après lui. Mais on ne connoît point

autrement fa pofterité;'fi ce n'eft peut-être une fille, qui Rur. 1. 1. cp. 3-5 époufa Hefpere célebre Poëte & l'un des hommes les plus magnifiques de fon temps, dont nous avons donné l'éloge

fur la fin du V fiecle.

7.

'Après avoir paflé quelques années dans le mariage, Ru- Fauft. ad, Rur. ep. rice renonça au grand monde, & prit le parti de la pieté Chrétienne. Son époufe imita fon exemple, & dès avant l'an 477, ils vivoient l'un & l'autre dans la pratique de toutes les bonnes œuvres ; le jeûne, la priere, les aumônes. Leur vertu jettoit tant d'éclat, qu'elle penetra jufTome III.

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G

Rur. 1. 1.ep. 6. S.

ep. 7-10.

ep.8.9.16 Sid. 1.4. ep.161.5. ep.151. 8. ep. 10.

Rur. 1. 1. cp. 1. 2
Fauft. ad Rur. ep.

5.7 Canif. B. t.i. P.359.

Fauft. ad Rur. ep.

6.9.

Sid. 1. 7. ep. 6.

qu'à Faufte Evêque de Riès, qui nous en a tracé un portrait auffi avantageux qu'édifiant.

'Rurice alors fit confifter fes plus cheres délices, dans la lecture des livres facrés, & des ouvrages des Peres de l'Eglife. Il n'épargnoit ni foin ni dépenfe pour en fournir fa bibliotheque. On y en voïoit plufieurs qu'il avoit fait copier chez S. Sidoine, & que celui-ci s'étoit donné la peine de revoir & de corriger. Pour mieux fe foûtenir dans le genre de vie qu'il avoit embraffe,& faire plus de progrès dans la vertu, Rurice chercha à fe lier avec les plus faints Evêques de l'Eglife des Gaules. A cet effet, il contracta d'étroites liaisons avec S. Loup de Troïes, Léonce d'Arles, S. Sidoine de Clermont, Faufte de Riès.

On a déja vû qu'il étoit ancien ami de S. Sidoine, 'mais depuis qu'il fut entré dans la voïe étroite du falut, leur amitié prit de nouvelles perfections, & devint toute fainte. Il nous reste encore aujourd'hui de l'un & de l'autre plufieurs letres, qui nous en font des preuves non équivoques. On y voit que Rurice s'étoit rendu le difciple de S.Sidoine, à qui il demandoit de frequentes inftructions. 'Il donna la même confiance à Faufte, qu'il avoit eu occafion de connoître par la lecture de fes écrits, & le choifit encore entre les autres Prélats de fes amis, pour fe conduire par fes confeils. Il le regardoit comme fon Maître dans la voïe de la perfection, & lui parle dans quelques-unes de fes letres comme fon fils fpirituel. Il fit tant de progrès fous de fi habiles directeurs, que l'Evêque Grec, qui gouvernoit l'Eglise de Marseille, crut devoir l'en feliciter par une letre qui eft venuë jusqu'à nous. Faufte paroît lui-même en avoir été dans l'admiration.

'Ce dernier Prelat aïant été exilé par Euric Roi des Vifigots, pour le fujet qu'on a dit ailleurs, Rurice fut un de ceux qui lui donnerent plus génereufement du fecours dans fa difgrace. Elle dura environ trois ans, depuis 482 jufques vers la fin de 484. Au même temps qu'elle finit, Rurice fe vit Evêque de Limoges. C'eft ce que montre la letre que Faufte de retour à fon Eglife lui écrivit, tant pour le remercier de fa génereufe attention, que pour le congratuler de ce qu'il avoit été élevé au miniftere apoftolique, dont la vertu le rendoit fi digne depuis longtemps. ' Il n'y a presque pas lieu de douter que Rurice ne

¡fuccedât 1 immédiatement à cet Evêque de Limoges, qu' Euric, ennemi juré du nom catholique, avoit fait égor ger, comme tant d'autres dans les lieux de fa domination. Encore peut-on moins douter que ce ne foit le renversement, que ce Prince Arien caufa dans cette partie des Gaules qu'il fubjugua, qui nous a privé de la connoissance de ce qui fe paffa dans ces Provinces par rapport à l'Eglise. A.cet obfcurciffement de l'histoire on a joint la négligence & l'inexactitude, en traitant la fucceffion des Evêques de Limoges de la fin du V fiecle & du commencement du VI. 'Le fiege où la Providence plaçoit Rurice, n'étoit pas Rur. 1. 2. ep. 32. alors fort relevé, fuivant fes propres expreffions. Mais il s'en confoloit fans peine, fur ce qu'il eft plus honorable que ce foit l'Evêque qui donne du relief à fon Eglife, que fi c'étoit l'Eglife qui en donnât à l'Evêque. On peut juger de l'honneur que Rurice fit à l'Epifcopat, par la piété dont il faifoit profeffion avant que d'y entrer, & le foin qu'il prenoit de s'inftruire de la doctrine de l'Eglife.' De- Canis. ib. p. 360. venu Evêque, il s'appliqua tout de nouveau à fe rendre fçavant dans la loi de Dieu & les écrits des Peres. Ceux qui lui étoient les plus familiers, font S. Cyprien, S. Hilaire de Poitiers, S. Ambroife & S. Auguftin. Alors il fit en faveur des autres ce que S. Sidoine & Faufte avoient fait à fon égard. Il emploïa fon fçavoir & fés talents à les inftruire, & à les faire avancer dans la vertu. Quelquefois même malgré les autres occupations de fon miniftere, il compofoit des traités de pieté à leur ufage. Turence ou Taurence, qui avoit fouvent reffenti dans fes befoins fpirituels, les effets de cette charité bienfaifante du faint Prélat, nous en a laiffé une preuve édifiante dans une de ses letres qu'il lui adreffe. On voit de même dans celles que lui écrivirent plufieurs grands Evêques des Gaules, avec lefquels il étoit en liaison, l'eftime qu'ils faifoient & de fa pieté & de fon mérite. S. Céfaire d'Arles entr'autres lui donne les titres d'honneur les plus magnifiques.

P. 358-367:

On ne connoît point en détail toutes les grandes actions par lesquelles S. Rurice illuftra fon épifcopat. 'Il Rur. 1. 1. ep. 327

1. Il y avoit déja felon toute apparence plufieurs années que cette Eglife étoit fans Evêque, lorfque S. Rurice fut élu pour la gouverner en cette qualité. L'on peut croire que la liberté qu'elle cut

alors de faire cette élection, lui fut ac-
cordée par le moïen de Léon, ce fage
& principal, mais fi pieux Miniftre d'Eu-
ric, dont nous avons parlé en fon lieu.

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nous apprend lui-même qu'il étoit fort valetudinaire, furtout pendant l'été, quoiqu'il fe portât un peu mieux en hyver. Sa mauvaise fanté ne lui permit pas de fe trouver au Concile d'Agde, tenu, comme on l'a vû, au mois de 1 Canif.ib.p.366. Septembre 506. 'S. Céfaire d'Arles, qui y avoit préfidé, lui écrivit pour lui marquer la peine qu'il avoit de ce qu'il s'en étoit abfenté,& de ce qu'il n'y avoit envoïé perfonne à fa place. Il l'invitoit en même temps à celui qui fe devoit tenir à Toulouse l'année fuivante, & auquel affifteroient les Evêques d'Efpagne. 'Mais Rurice ne fe trouva point à ce Concile, non plus qu'à celui d'Agde, & fans doute pour la même raison.

P 360. 361.]

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Ses fréquentes infirmités jointes à un âge déja avancé, ne permettent guéres de reculer fa mort au-delà de 507 qui eft l'époque de la tenue du Concile de Touloufe. Mais on n'a rien pour en fixer l'année précise, non plus que le jour. Quoiqu'il foit généralement reconnu pour Saint, fon nom toutefois ne paroît point dans les Martyrologes. On le nomme communément S. Rurice l'ancien, pour le dif tinguer de fon petit-fils de même nom que lui, qui fut fon fucceffeur dans le fiege Epifcopal de Limoges, apparemment après quelque autre. Dans la fuite du temps Fortunat alors Prêtre à Poitiers, où il fut depuis Evêque, compofa l'Epitaphe de ces deux Evêques réunis enfemble, telle que nous la donnons ici. L'on y voit que la grande véneration qu'avoit S. Rurice pour la mémoire de S. Auguftin, le porta à bâtir une Eglife en fon honneur. C'est aujourd'hui l'Abbaïe de Benedictins de ce nom à la porte de la ville.

EPITAPHE.

'Invida mors rapido quamvis miniteris hiatu,
Non tamen in Sanctos jura tenere vales.

1.' Par-là tombe fans reffource la conjecture de M. Valois, qui prétend que Evêque nommé Pierre du Palais entre les Peres du Concile d'Agde, étoit l'Evêque de Limoges. Et il ne ferviroit de rien pour donner quelque appui à cette opinion, de dire qu'il n'eft pas certain que la letre de faint Céfaire qui dément cette conjecture, foit de S. Céfaire

d'Arles. Car non-feulement il eft certain que cette letre eft de S. Céfaire d'Arles, qui avoit préfidé au Concile d'Ag de; Mais il eft encore incontestable & par une letre de l'Evêque Sedatus & une autre de S. Rurice même, que celui-ci occupoit alors le fiege Epifcopal de Limoges.

Nam poftquam remeans domuit fera tartara Chriftus,
Juftorum meritis fub pede victa jaces.

Hic Sacra Pontificum toto radiantia mundo

Membra, Sepulcra tegunt; Spiritus astra colit.
Ruricii gemini flores, quibus Anniciorum,
Juncta parentali culmine Roma fuit.
Accumulante gradus prænomine, fanguine nexi,
Exultant pariter hinc avus, inde nepos.
Tempore quifque fuo fundans pia templa patroni,

Ifte Auguftini, condidit ille Petri.

Hic probus, ille pius, hic ferius, ille ferenus,
Certantes pariter, quis fibi major erit.
Plurima pauperibus tribuentes divite cenfu,
Miferunt cælos, quas fequerentur opes.
Quos fpargente manu, redimentes crimina mundi,
Inter Apoftolicos credimus effe choros.

Felices qui fic de nobilitate fugaci

Mercati, in cœlis jura Senatûs habent.

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T

Canif. t. 5.p. 46123. t. p. 373

407.

L nous est resté de S. Rurice un recueil de letres divifé en deux livres. Le premier en contient dix-huit, & le fecond foixante-quatre. Toutes celles du premier livre & plufieurs du fecond tant des dernieres que des premieres, ont été écrites avant l'Episcopat de leur Auteur. 'Il y en Rur. I. 1. ep. 16. a même qui ont précedé l'an 471. De ce nombre eft une de celles qui s'adreffent à S. Sidoine. S. Rurice l'y qualifie fon frere: ce qu'il n'auroit pas fait après cette époque, lorfque S. Sidoine étoit Evêque de Clermont. On voit par-là que ces letres ne font point placées selon l'ordre de

leurs dates.

'Une des principales, comme des plus longues, eft la 1.2.ep. 4. 4c du fecond livre, adreffée à Namace & Ceraunie, avec qui S. Rurice étoit lié d'une maniere particuliere. Elle eft pour les confoler fur la mort d'une fille unique que Dieu venoit de leur enlever. 'La 14e du même livre eft encore ep. 14 fort confidérable. Elle eft écrite à Ceraunie alors veuve pour lui tracer un plan de conduite, & la porter aux exercices de la pieté Chrétienne.

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