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Liége, parmi lesquelles il faut mettre au premier rang Marie d'Oignies, appelée aussi de Wilbrouck et de Nivelles. Cet ouvrage a été traduit en français par Arnauld d'Andilly, dans son Recueil des saints illustres. Jacques de Vitry n'en a composé que les deux premiers livres, et le troisième a été ajouté par Thomas de Cantimpré.

Les écrits les plus remarquables de Jacques de Vitry sont: l'Histoire orientale et 'Histoire occidentale. I! composa la première à Ptolémaïs, et la seconde à son retour en France. Des détails curieux sur les productions naturelles de l'Asie, sur ses divers habitants, sur les opérations militaires des croisés, principalement sur le siége de Damiette, et une description assez complète de la terre sainte, font lire avec intérêt l'Histoire orientale. Elle se divise en trois livres. Bougars en a imprimé deux dans le Gesta Dei per Francos. L'Histoire orientale offre plutôt un tableau moral et statistique de la terre sainte sous les princes chrétiens, qu'une histoire proprement dite de la première croisade. Au milieu d'une foule d'erreurs en physique, on remarque un passage très-curieux, qui constate que l'aiguille aimantée, dont on ne fait remonter la découverte qu'au XIV siècle, passait déjà, au commencement du xu, pour être nécessaire aux navigateurs. Plusieurs détails géographiques méritent aussi d'être remarqués.

L'Histoire occidentale n'est à proprement parler que l'histoire de l'Eglise du temps de Jacques de Vitry, époque de l'institution d'un grand nombre d'ordres religieux. André Hoïus, auteur d'une Vie de Jacques de Vitry, s'étonne que ce prélat, qui développe l'origine et les progrès des ordres religieux, qui donne de grands éloges aux Frères Mineurs, tout en avouant que cet ordre ne convient pas aux faibles, et qui dit avoir vu saint François d'Assises, ne fasse nulle mention de saint Dominique et de son ordre si fameux dans les guerres des Albigeois. Hoïus laisse à de plus habiles l'explication de ce silence, et nous ne pouvons qu'imiter sa réserve. Le cardinal de Vitry, tout en devenant historien, reste encore prédicateur, comme par une ancienne habitude qu'il conserve des premières années de sa vie. Il s'emporte avec véhémence contre la corruption des mœurs, et les reproches qu'il adresse au clergé ne sont pas ceux auxquels il a donné l'expression la moins énergique. Il voyait avec une sorte de douleur apostolique l'accroissement des richesses de l'Eglise, auquel il oppose la lettre et l'esprit de l'Evangile. Il fait de fréquentes citations de l'Ecriture, ou la rappelle sans cesse par des allusions qui sont quelquefois trèsheureuses. Son esprit était vif, sa mémoire ornée; les langues grecque et arabe lui étaient familières. Il écrit avec feu, et cependant sans trop de prolixité, avec une sorte de méthode dont il faut lui savoir d'autant plus de gré que les écrivains de son siècle n en connaissaient pas l'avantage.

On trouve dans le 1er volume de la Biographie des croisades, par Michaud, une notice sur les Histoires de Jacques de Vitry.

JACQUES DE VORAGINE, ainsi appelé du nom de la ville de Varaggio qui lui donna naissance, entra dans l'ordre de Saint-Dominique dont il fut successivement provincial, définiteur, puis supérieur général, et enfin promu à l'archevêché de Gênes en 1292. Le plus célèbre de ses écrits est sa Légende dorée, ou Histoire de la vie des saints. Le malheureux succès de cet ouvrage n'a pas peu contribué à décréditer dans l'opinion de certaines personnes la foi due aux plus respectables monuments. Le scepticisme moderne a mieux aimé condamner tous les miracies que de chercher à en approfondir up seui. Les protestants ont fait de cette légende une espèce de triomphe contre les Catholiques, comme si nous étions inté ressés à la défendre. Ce n'est pas à eux que l'on en doit la première critique. Claude Despence, docteur de Paris, la dénonça dans une harangue publique comme une œuvre remplie de fables et d'inepties. Melchior Cano, savant évêque des Canaries, l'appelle une légende de fer écrite par un homme qui avait un cœur de plomb, et dans la quelle on admire plutôt des monstres de miracles que de vrais miracles. Louis Vivès, le digne commentateur de saint Augustin, en a porté le même jugement. Cependant elle a eu un grand cours, et on en compte un grand nombre d'éditions imprimées dès les commencements du xv siècle. Le simple abrégé qui en a été publié à Venise, en 1418, comprend un volume in-folio. La critique a mis au creuset ces productions enfantées par un zèle peu éclairé et adoptées par une crédulité naïve. Métaphraste, Jean Moschus et Jacques de Voragine ne sont plus comptés que parmi les romanciers.

Le style de cet écrivain est plat et trivial dans tous ses ouvrages, mais ces défauts se font peut-être encore plus remarquer dans ses Sermons que dans sa Légende. Il en a composé un grand nombre pour le carême, pour tous les dimanches de l'année et sur les douleurs de Marie; sous le titre de Mariale aureum, on possède un recueil de pins de cent soixante discours en l'honneur de la Vierge, distribués par ordre alphabétique. Ces Sermons ont été imprimés plusieurs fois séparément, et tous ensemble à Mayence, en 1616. Il est impossible d'en soutenir la lecture. Mais si cet archevêque n'est pas estimable par ses écrits, on ne peut nier qu'il ne l'ait été par sa piété et son ardente charité pour les pauvres, à qui il faisait distribuer presque tous les revenus de son archevêché. Il avait beaucoup étudié les œuvres de saint Augustin et en avait composé un abrégé. Il fit faire aussi une version de la Bible en langue italienne.

JANUARIN, disciple de saint Florentin. premier abbé du monastère de SaintAurélien d'Aries, ne nous est connu que par l'épitaphe qu'il écrivit pour être place sur son tombeau, lors de là translation de

ses reliques en 588, c'est-à-dire trente-cinq ans après sa mort. Elle est composée de trente-sept vers acrostiches dont les initiales forment ces mots : Florentinus abbas hic in pace quiescit. Amen. Januarin ne s'est point oublié dans cette pièce. Il s'y recommande aux prières du saint, ainsi que le sculpteur qui l'a gravée et orné le tombeau, avec deux moines du même monastère nommés Bénigne et Hilarin. Baronius a inséré cette épitaphe dans ses Annales, Saxi dans l'Histoire des évêques d'Arles et le P. Lecointe dans les Annales de France sur l'an 553.

JARENTON, l'un des plus illustres abbés de Saint-Bénigne de Dijon, sur la fin du xr et au Commencement du XIe siècle, naquit sur le territoire de Vienne en Dauphiné, vers l'an 1045. Dès l'enfance il fut placé à Cluny pour y faire ses études sous le célèbre abbé saint Hugues, et les plus habiles maîtres de la maison. Il rentra ensuite dans le monde et y mena une vie assez dissipée ; mais enfin, touché de la grâce, il se retira à la retira à la Chaise-Dieu, où il prit l'habit monastique. Les progrès qu'il fit dans la vertu lui procurèrent la place de prieur de ce monastère, et l'abbaye de Saint-Bénigne étant venue à vaquer, on jeta les yeux sur lui, comme sur le personnage le plus digne de gouverner cette maison et d'y rétablir la régularité qui commençait à s'affaiblir. Jarenton opposa à ce choix les plus grandes résistances; mais il fut forcé de se soumettre, et reçut la bénédiction abbatiale le 17 septembre 1077. Ses grandes qualités lui acquirent la confiance du Pape Grégoire VII et celle de Hugues de Dic son légat, ce qui lui donna occasion de figurer beaucoup dans les affaires de l'Eglise par les diverses négociations dont il fut honoré. Le Pape Urbain II, successeur de Grégoire VII n'eut ni moins d'estime, ni moins de confiance en Jarenton. A l'issue du concile qui se tint à Clermont en Auvergne, au mois de novembre 1095, il le choisit pour aller en Angleterre, réconcilier Guillaume le Roux avec Robert, duc de Normandie son frère, et engager ce prince à remplir les évèchés et les abbayes qui se trouvaient vacants dans son royaume. Après s'être acquitté habilement de ces négociations, il revint à son monastère de Saint-Bénigne, où il mourut en 1112.

On ne possède de Jarenton qu'une lettre assez longue qu'il écrivit à Thierry II abbé de Saint-Hubert et à sa communauté, dans le temps où ces religieux avaient à subir les plus mauvais traitements à cause de leur attachement au Saint-Siége et de leur aversion pour le schisme, c'est-à-dire vers l'an 1100. Jarenton avec autant de force que d'éloquence, les exhorte à demeurer ferines dans le parti de la vérité; et pour les y soutenir, il leur propose les exemples de Moise, de Jean-Baptiste, et la conduite de saint Jean l'évangéliste à l'égard de l'héréSarque Cérinthe. Il leur expose ensuite par des passages de l'Ecriture qui montrent qu'il 1 possédait à fond, l'honneur, la gloire et

la récompense attachés à leurs combats. Et comme la crainte de manquer des choses nécessaires à la vie affaiblit souvent le courage, et abbat même la constance des plus fermes, le généreux abbé leur offre sa maison pour lieu de retraite, dans le cas où leur intrépidité les ferait chasser de leur monastère. Cette lettre, bien écrite à tous égards, ne respire que la charité fraternelle et un zèle tout de feu pour la justice et la vérité; mais il est fâcheux qu'elle ne soit pas aussi mesurée qu'elle devrait l'être dans ce qu'elle dit d'Othbert, évêque de Liége et le chef du parti qui vexait les moines de SaintHubert. Outre que le caractère épiscopal méritait plus de réserve et de ménagements, Othbert, après tout, n'était pas assez mauvais évêque pour mériter d'être mis en parallèle avec Cérinthe et Simon le Magicien. On ne peut s'empêcher de convenir que le trop grand zèle de Jarenton lui a fait oublier ici le respect qu'il avait témoigné à l'épiscopat en d'autres occasions. Cependant l'historiographe de Saint Hubert a regardé cette lettre comme assez intéressante pour la faire entrer dans l'histoire de cette abbaye, et la conserver ainsi à la postérité. Dom Mabillon l'ayant trouvée isolée dans un manuscrit de Saint-Vanne, en a publié la première partie dans le corps de ses Annales, et la pièce entière dans l'appendice du V volume.

Parmi les monuments qui ont servi à dom Martène pour la composition de son savant et prolixe Traité sur les riles monastiques, il a fait beaucoup usage des anciennes Coutumes de l'abbaye de Saint-Bénigne de Dijon. Le premier fonds de ces Coutumes appartient au bienheureux abbé Guillaume, premier réformateur de ce monastère, mais il est vraisemblable que Jarenton, qui les réforma à son tour, les aura retouchées et augmentées lorsqu'il en renouvela le manuscrit. Celles dont il est ici question sont d'une juste étendue, puisque dom Martène, qui en copie un grand nombre de morceaux, en cite jusqu'au soixante-treizième chapitre. On y découvre quantité de traits remarquables, sur les cérémonies de la messe, les autres rits du service divin et les différentes pratiques du cloître. Du reste il y a une grande conformité entre ces Coutumes et celles de l'abbaye de Cluny, auxquelles Jarenton les aura probablement empruntées. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il demanda des moines à Cluni pour l'aider dans la réforme de son monastère. Dom Martène parle aussi d'un Rituel pour la profession des novices et la sépulture des morts. Si l'abbé Jarenton n'a pas dirigé lui-même ce Rituel, on peut au moins présumer qu'il y a fait des additions et des corrections, et que peutêtre il lui a donné sa première forme.

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JEAN I". Jean, premier du nom sur le Siége pontifical, était fils d'un Toscan, nommé Constantius, et fut élu le 13 août 523 pour succéder au saint Pape Hormisdas. Justin I gouvernait alors l'empire d'Orient, et Théodoric, roi des Goths, régnait en Italie. Le

premier, par un zèle plus louable dans son objet que réfléchi dans ses conséquences, voulant extirper d'un seul coup l'hérésie, signifia aux ariens qu'ils eussent à céder leurs églises aux catholiques. Irrité de ce projet le roi des Goths, qui professait l'arianisme, après avoir adressé à Justin de vaines remontrances, ordonna au Pape Jean de se transporter à Constantinople, et d'aller en son nom faire cette demande à l'empereur. Il le menaça même de traiter rigoureusement les Catholiques, si Justin ne se relâchait de la sévérité de ses édits. Jean entreprit ce voyage, accompagné de quatre sénateurs qui avaient été consuls. Toute la population de Constantinople accourut au-devant de lui, avec des cierges et des croix jusqu'à douze milles de ses remparts. L'empereur Justin lui-même se prosterna à ses genoux, et demanda à être couronné de sa main.

A l'invitation du patriarche Epiphane, le Pape célébra solennellement en latin l'office dujour de Pâques, et communiqua avec tous les évêques d'Orient, excepté Timothée d'Alexandrie ennemi déclaré du concile de Chalcédoine. On n'oublia rien dans Constantinople pour lui faire honneur, et la joie y fut d'autant plus universelle, que depuis l'entrevue du Pape saint Sylvestre avec le grand Constantin, on ne se souvenait pas qu'aucun vicaire de saint Pierre eût jamais visité la Grèce. Cependant le Pape Jean avec les quatre sénateurs qui l'accompagnaient représentèrent à Justin les périls dont l'Italie était menacée, s'il tenait à l'exécution des ordres qu'il avait donnés contre les ariens. Mais on n'est pas d'accord sur le résultat de ces négociations. Quelques historiens lui attribuent la gloire d'avoir fléchi l'empereur par ses larmes. D'autres, parmi lesquels se trouve Baronius, affirment au contraire qu'il ne put rien obtenir. Ce qui nous ferait incliner vers cette dernière opinion, c'est qu'à son retour, Théodoric irrité le fit arrêter à Ravenne, avec les sénateurs qui l'avaient accompagné dans son ambassade. Le saint Pape, épuisé par les fatigues d'un long et pénible voyage, et manquant dans sa prison du plus étroit nécessaire, y succomba à ses souffrances, et termina sa carrière le 27 mai 526, après deux ans et neuf mois de pontificat. Sa mort fut glorifiée par un miracle, et un énergumène fut guéri en touchant le corps du saint Pontife. Ses restes furent transportés de Ravenne à Rome, et inhumés dans l'église de Saint-Pierre. Il est honoré comme un martyr. Son cruel persécuteur fit périr de la même manière les autres ambassadeurs, sans avoir aucun égard pour leur dignité. Le Pape Jean avait été l'ami de Boëce qui lui dédia plusieurs de ses ouvrages, et qui fut comme lui victime de l'ingratitude et de la tyrannie de Théodoric. Le Bollandiste Papebrock a réuni leurs Vies au mois de mai, tome VI de sa collection.

Il nous reste sous son nom deux lettres que l'on regarde comme supposées. La première, adressée à l'archevêque Zacharie, est, composée de plusieurs passages empruntés

aux lettres des Papes Innocent I", Zosime et Symmaque et aux actes du cinquième concile tenu à Rome sous le pontificat de ce dernier. La date, marquée au 15 des calendes de novembre, c'est-à-dire au 18 octobre 523, sous le consulat de Maxime et d'Oly brius, en est fausse, puisque cet Olybrius ne fut consul qu'en 526. - La seconde adressée aux évêques d'Italie pour les exhorter à défendre la foi catholique contre les ariens, et à consacrer leurs églises comme on le faisait en Orient, est datée du 3 des ides de juin, sous le consulat de Maxime et et d'Olybrius, puisque Maxime et Olybrius ne furent pas consuls ensemble, et que le premier l'était dès l'an 523. Or Jean n'ayant été fait Pape qu'au mois d'août de cette année, il est impossible qu'il ait pris cette qualité dans une lettre écrite du 11 du mois de juin. Il faut ajouter que cette lettre, compilée comme la précédente, partie sur celles de saint Léon et partie sur la seconde Epitre de saint Paul aux Corinthiens, est contraire à la vérité historique, en ce qu'elle suppose, qu'au lieu de demander à l'empereur Justin la révocation de son édit contre les ariens, Jean trompa les espérances de Théodoric, en confirmant l'empereur grec dans son projet d'extermination. Cette lettre tend évidemment à déshonorer la mémoire de ce saint Pontife, en le faisant passer pour un homme de mauvaise foi. Elle lui fail tenir d'ailleurs ce raisonnement ridicule : J'ai consacré à Constantinople des églises des ariens, pour obéir aux désirs de Justin, prince catholique; consacrez-en de même en Italie, malgré l'opposition de Théodoric, prince arien. Grégoire de Tours dit qu'aussitôt qu'il eut été placé sur le Saint-Siége, Jean consacra plusieurs églises des ariens pour les Catholiques; ce qui irrita tellement le roi des Goths qu'il envoya des gladiateurs à travers l'Italie avec ordre d'égorger les Catholiques, partout où ils les rencontreraient. L'anonymne publié par Valois, à la suite d'Ammien Marcellin, raconte la chose autrement, et dit que le roi Théodoric, informé de l'édit publié par l'empereur Justin, pour chasser les ariens de l'empire, envoya Je Pape Jean à Constantinople afin de détourner l'empereur de l'exécution de cet édit, mais que Justin ayant persévéré dans sa résolution, Théodoric fit mettre le Pape en prison à son retour à Ravenne. Dans la variété des opinions sur ce fait, nous pensons qu'il vaut mieux s'en tenir à cette dernière qui paraît la plus plausible.

JEAN II, fils d'un Romain nommé Projectus et prêtre du titre de Saint-Clément, succéda au Pape Boniface II, le 22 janvier 533. Il dut son surnom de Mercure à son éloquence, et non à l'acquisition simoniaque du Saint-Siége, comme quelques auteurs l'out avancé, quoique les mœurs de son époque semblent autoriser malheureusement cette supposition. Le premier acte de son pontificat, suivant Platine, fut la condamnation d'Anthémius, patriarche de Constantinople convaincu d'arianisme. Dans ce même tenips,

le roi Athalaric reçut des plaintes sur les brigues qui s'exercaient pendant la vacance du Saint-Siége, pour extorquer des promesses sur les biens de l'Eglise. Voulant remédier à cet abus, il écrivit au Pape Jean II de remettre en vigueur un décret porté sous le pontificat de Boniface, son prédécesseur, et prescrivant la nullité de tout contrat et de toute promesse faite pour obtenir un évêché, avec restitution de tout ce qui pouvait avoir été donné dans cette intention. I dressa même à ce sujet un règlement qu'il rendit obligatoire; et par une autre lettre adressée au préfet de Rome, il ordonna que son édit et un décret du sénat contre la simonie seraient gravés sur des tables de marbre, et placés à l'entrée du parvis de Saint-Pierre. Lettre à l'empereur Justinien. — Au mois de juin de l'an 533, l'empereur Justinien, dans la vue de ramener les schismatiques à l'unité de l'Eglise, publia un édit accompagné d'une profession de foi orthodoxe, qu'il fit signer de la plupart des métropolitains d'Orient, et qu'il envoya au Pape Jean II avec de richies présents. Il lui demandait l'approbation de ces actes, et lui donnait le titre de chef des évêques. Le Pape, dans sa réponse datée du 8'des calendes d'avril, c'est-à-dire du 25 mars 534, loue Justinien de son zèle pour la foi et du respect qu'il témoignait pour l'autorité du Saint-Siége. Il ap prouve sa profession de foi, en disant que la doctrine qu'elle renfermait était la même que tous les Pères et tous les évêques de Rome ont enseignée, et que quiconque en professe une contraire se déclare lui-même séparé de la communion de l'Eglise catholique. Le Pape, par ces derniers mots, faisait allusion principalement aux deux religieux Cyrus et Euloge, qui avaient été envoyés à Rome du monastère des acémètes, pour Soutenir que Jésus-Christ n'est pas un de la sainte Trinité, et que Marie n'est pas à proprement parler mère de Dieu. Jean II fit tout ce qu'il put pour les ramen à la saine doctrine; mais les voyant ohiatres dans Terreur, il refusa de les admettre à sa communion et les sépara de l'Eglise catholique jusqu'à ce qu'ils en eussent embrassé la foi, en condamnant leurs erreurs. Il prie toute fois l'empereur de leur accorder sa communion et sa bienveillance, si à l'avenir ils voulaient revenir à l'unité de l'Eglise. Il fait l'éloge de ses ambassadeurs Hypace et Démétrius, mais il ne dit rien des présents qu'ils avaient apportés à saint Pierre, lesquels consistaient en vases d'or et d'argent et en tissus d'un grand prix. Il y en a qui ont voulu contester l'authenticité de ces deux lettres, de l'empereur au Pape Jean et du Pape à l'empereur; mais outre qu'elles ne renferment aucun caractère de supposition, elles sont encore citées l'une et l'autre dans des monuments que personne ne conteste; savoir, dans la lettre du même Pape aux Sénateurs romains, et dans la constitution de Justinien à Epiphane, patriarche de Constantinople.

Aux sénateurs romains. Après le départ

des ambassadeurs, le Pape Jean écrivit aux sénateurs de Rome, Aviénus et plusieurs autres dont les noms se trouvent inscrits en tête de sa lettre, pour les instruire, suivant le désir qu'ils lui en avaient témoigné, de la réponse qu'il avait adressée à l'empereur. « Justinien, notre fils, leur dit-il, nous a marqué qu'il s'était élevé une dispute sur ces trois questions, savoir si Jésus-Christ peut être appelé un des trois de la Trinité; s'il a souffert en sa chair, quoique la divinité soit demeurée impassible; et si la sainte Vierge Marie peut être appelée proprement et véritablement la Mère de Dieu. Nous avons approuvé la foi de l'empereur comme catholique et montré que ce qu'il a dit sur chacune de ces propositions est conforme à l'Ecriture et aux Pères. » Et en effet, il en rapporte ensuite les passages qui autorisent ces propositions. Saint Augustin est le premier des Pères qu'il cite en disant que TEglise romaine suit et observe sa doctrine suivant les décrets de ses prédécesseurs. Il rapporte ensuite plusieurs témoignages des anciens docteurs, entre autres, des deux saints Grégoire de Nazianze et de Nysse, de saint Procle de Constantinople, de saint Cyprien, de saint Cyrille, de saint Léon, de Léporius et de Gélase. Il déclare ensuite que l'Eglise romaine a condamné les moines acémètes, qui lui ont paru donner évidemment dans l'erreur de Nestorius. C'est pourquoi, conformément au canon qui défend à un Chrétien de parler ni de communiquer avec un excommunié, il avertit les sénateurs d'éviter leur conversation et de n'avoir rien de commun avec eux. Le Pape Jean, en approuvant la proposition de l'empereur Justinien ne fit rien de contraire à ce qu'avait fait le Pape Hormisdas, son prédécesseur, à l'égard des moines de Scythie, quand, sans les condamner d'une manière formelle, il se contenta de témoigner du mécontentement de leur conduite et des troubles qu'ils avaient excités dans Rome.

A saint Césaire, aux évêques des Gaules et au clergé de Riez.-Vers le même temps, le Pape reçut de saint Césaire d'Arles et de quelques autres évêques des Gaules, des plaintes très-graves contre Contuméliosus, évêque de Riez, convaincu de plusieurs crimes d'après sa propre confession. Le Pape écrivit à ce sujet trois lettres adressées, l'une à saint Césaire, l'autre aux évêques de la Gaule, et la troisième au clergé de Riez, pour leur dire qu'il avait interdit Contuméliosus de toutes ses fonctions et ordonné qu'il fût renfermé dans un monastère pour y faire pénitence, après toutefois qu'il en aurait demandé lui-même la permission aux évêques, dans une requête datée du jour de sa demande et dans laquelle il confesserait son crime. Le Pape charge particulièrement saint Césaire de l'exécution de cet ordre, comme aussi du soin de nommer à la place de Contuméliosus un visiteur chargé de gouverner son Eglise, à la condition qu'il ne se mêlerait que de la célébration des saints mystères, sans toucher aux

ordinations ni au temporel de l'Eglise. A sa lettre à saint Césaire, le Pape Jean II joignit une liste des canons contre les évêques condamnés par les conciles de la province. A la suite de cette lettre de Jean II, on en a mis une dout l'auteur est inconnu, et que quelques-uns croient de saint Césaire lui-même; elle roule sur la même matière que la fin de la précédente. Pour ce qui est de la lettre à Valère, attribuée à notre pontife, c'est un composé de fragments tirés des écrits d'Itace à Varimode et de ceux de saint Léon; le style diffère des autres lettres du même Pape, et la date des consuls est absolument fausse. La condamnation de Coutuméliosus est le dernier acte de Jean II, qui mourut peu de temps après, le 18 mai 535, après avoir tenu le Saint-Siége pendant deux ans quatre mois et quelques jours.

JEAN III, surnommé Cattein et fils d'Anastase du rang des illustres, succéda au Pape Pélage I, le premier août 560. L'histoire de son pontificat est dénuée d'événements, on y trouve seulement qu'il acheva l'église de Saint-Philippe et Saint-Jacques, et qu'il y fit peindre plusieurs histoires, dont une partie était en mosaïque. Il rétablit et augmenta les cimetières des martyrs et donna ordre pour que, tous les dimanches, l'église de Saint-Jean de Latran y fournit le pain et le vin, et le luminaire. Ce fut sous son pontificat que les Hérules, après avoir ravagé la Toscane, et d'autres parties de l'Italie, furent subjugués par Narsès qui leur tua leur roi. On a faussement prétendu que le Pape Jean III n'avait point approuvé le cinquième concile général. Cette erreur a été victorieusement combattue par le cardinal Noris et le P. Pagi. Jean III mourut le 3 juillet 573, après un pontificat de treize ans moins un mois.

Nous avons sous son nom une lettre adressée aux évêques de Germanie et des Gaules, et qui fournit elle-même des preuves de sa supposition. D'abord elle est datée du 14 des calendes d'août, c'est-à-dire du 10 juillet 572, Justin étant consul avec Narsès pour la sixième fois. Or il y avait déjà cinq jours que Jean III était mort, et depuis l'an 541, les Papes ne comptaient plus par les consulats. Ensuite, on y avance, contre le sentiment unanime de tous les anciens, que saint Lin et saint Clet n'ont été que des chorévêques, aidant saint Pierre dans tout ce qu'il leur ordonnait, sans avoir jamais eu ni le caractère ni l'autorité de Pontifes. Enfin, cette lettre ne parle que de chorévêques, qu'elle suppose avoir été fort communs dans l'Allemagne et dans les Gaules; ce qui ne se lit dans aucune des histoires du temps. Ajoutons que cette lettre n'est qu'une compilation de celles du Pape Innocent I", des Jettres supposées au Pape Damase, et des Jettres de Zozime et de saint Grégoire le Grand, tous deux postérieurs à Jean III. On possède encore sous le nom de ce Pontife, une autre lettre beaucoup plus courte, adressée à Edalde, archevêque de Vienne. Cette pièce, qui est sans date, avance contre la

vérité de l'histoire, que l'Eglise de Vienne a été fondée par un disciple de saint Paul, et que c'était alors un usage établi à Rome de distribuer des reliques des apôtres, tandis que l'on se contentait d'envoyer des linges qui les avaient touchées. Il paraîtrait encore qu'Edalde avait conçu de l'inquiétude sur la liturgie qu'il devait suivre, comme si l'Eglise de France n'avait pas eu la sienne, ou qu'elle se fût peu préoccupée de la régler. Le contraire est positivement établi par le concile de Vaison tenu en 529.

JEAN IV, Dalmate d'origine et fils de Venance le Scholastique, fut élu pour succéder au Pape Séverin le 26 décembre 640. Il eut à combattre les erreurs des monothélites que l'empereur Héraclius protégeait et qu'il voulait appuyer dans son édit appelé Ecthèse ou exposition, édit composé par Sergius, patriarche de Constantinople. Cette doctrine fut condamnée dans un concile assemblé à Rome, par les soins du même pontife qui envoya cette décision à l'Eglise grecque. Le Pape Jean IV eut aussi à défendre la mémoire de l'un de ses prédécesseurs, Honorius, que l'on accusait d'erreur au sujet des deux volontés contraires que l'on supposait en Jésus-Christ, comme homme et comme Dieu. Le Pape Jean IV, dans une apologie adressée à l'empereur Constantin, démontra qu'Honorius avait soutenu que Jésus-Christ étant tout à la fois homme parfait et Dieu parfait, la volonté de sa chair n'a jamais combattu la volonté de son esprit, et que les volontés contraires n'appartiennent qu'à nous autres pécheurs, depuis la chute d'Adam. Cette apologie, adressée à Constantin, successeur d'Héraclius, ne parvint à Constantinople qu'après la mort précipitée de cet empereur. Le Pape lui-même ne lui survécut pas longtemps et mourut le 12 octobre 642, après avoir occupé le Saint-Siége un an et neuf mois. On a encore sous son nom deux autres lettres. La première adressée aux abbés d'Irlande, pendant la vacance du Saint-Siége, pour leur reprocher de ne pas célébrer la pâque avec toutes les autres Eglises, et de conserver chez eux des restes de pélagianisme. Dans la seconde, à Isaac de Syracuse, il déclare que les moines ont le droit de choisir et de placer dans les églises qui leur ont été données, tels prêtres qu'il leur plaira, à la condition toutefois que s'ils entreprennent quelque chose contre l'autorité de l'évêque, ils seront punis par le synode diocésain.

JEAN V, Syrien de naissance et de la province d'Antioche, succéda au Pape Benoit II le 23 juillet 685. Il était savant, courageux et plein de modération. On conserve de lui un décret par lequel il remit sous la disposition du Saint-Siége les Eglises de Sardaigne, dont les ordinations lui appartenaient de toute antiquité, mais qui avaient été accordées pour un temps aux archevêques de Cagliari. Ce Pape mourut le 2 août 686. après un an et dix jours de pontificat.

JEAN VII, élu Pape le 1er mars 705, occupa le Saint-Siége jusqu'au mois d'octobre 707

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