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recevez-moi dans vos rangs, mes chers collègues, ' avec le même sentiment d'affectueuse confiance que j'y apporte.

<«< Ma conduite, toujours inspirée par le devoir, toujours animée par le respect de la loi, ma conduite prouvera, à l'encontre des passions qui ont essayé de me noircir pour me proscrire encore, que nul ici plus que moi n'est résolu ́ à se dévouer à la défense de l'ordre et à l'affermissement de la République. >>

Ces paroles, favorablement accueillies par l'Assemblée, ramènent à Louis-Napoléon la plupart de ceuxlà même qu'on avait un moment rendus ses adversaires.

L'Assemblée nationale, quelques jours après, vote, à I'UNANIMITÉ DES SUFFRAGES, le décret suivant, dernière condamnation du projet de décret présenté le 12 juin.

« L'ARTICLE 6 DE LA LOI DU 8 AVRIL 1832, RELATIVE AU BANNISSEMENT DE LA FAMILLE BONAPARTE, EST ABROGÉ1. »

Louis-Napoléon, néanmoins, fut encore attaqué dans le sein de l'Assemblée nationale le 25 octobre.

Le Prince répondit le lendemain à ces nouvelles attaques.

1. Voir le Moniteur du 13 octobre 1848.

Citoyens Représentants,

« L'incident regrettable, qui s'est élevé hier à mon sujet, ne me permet pas de me taire. Je déplore profondément d'être obligé de parler encore de moi, car il me répugne de voir porter sans cesse devant l'Assemblée des questions personnelles, alors que nous n'avons pas un moment à perdre pour nous occuper des graves intérêts de la patrie.

« Je ne parlerai point de mes sentiments ni de mes opinions; je les ai déjà manifestés devant vous, et jamais personne n'a pu encore douter de ma parole.

Quant à ma conduite parlementaire, de même que je ne me permettrai jamais de demander à aucun de mes collègues compte de celle qu'il croira devoir tenir, de même je ne reconnais à aucun d'eux le droit de m'interpeller sur la mienne; ce compte, je ne le dois qu'à mes commettants.

«< De quoi m'accuse-t-on? d'accepter, des sentiments populaires, une candidature que je n'ai pas réclamée?

« Eh bien! oui, je l'accepte, cette candidature qui m'honore. Je l'accepte, parce que trois élec

tions successives et le décret unanime de l'Assemblée nationale contre la proscription de ma famille, m'autorisent à croire que la France regarde le nom que je porte comme pouvant servir à la consolidation de la société ébranlée jusque dans ses fondements, à l'affermissement et à la prospérité de la République.

« Que ceux qui m'accusent d'ambition connaissent peu mon cœur! Si un devoir impérieux ne me retenait pas ici, si la sympathie de mes concitoyens ne me consolait pas de l'animosité de quelques attaques et de l'impétuosité même de quelques défenses, il y a longtemps que j'aurais regretté l'exil.

<< On me reproche mon silence! il n'est donné qu'à peu de personnes d'apporter ici une parole éloquente au service d'idées justes et saines.

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N'y a-t-il donc qu'un seul moyen de servir son pays; ce qu'il lui faut, surtout, ce sont des actes; ce qu'il lui faut, c'est un gouvernement ferme, intelligent et sage, qui pense plus à guérir les maux de la société qu'à les venger; un gouvernement qui se mette franchement à la tête des idées vraies, pour repousser ainsi, mille fois mieux que par les baïonnettes, les théories qui ne sont pas fondées sur l'expérience et la raison.

« Je sais qu'on veut semer mon chemin d'écueils et d'embûches, je n'y tomberai pas. Je suivrai toujours, comme je l'entends, la ligne que je me suis tracée, sans m'inquiéter, sans m'arrêter. Rien ne m'ôtera mon calme, rien ne me fera oublier mes devoirs.

« Je n'ai qu'un but, c'est de mériter l'estime de l'Assemblée, et, avec cette estime, celle de tous les hommes de bien et la confiance de ce peuple magnanime qu'on a si légèrement traité hier.

« Je déclare donc à ceux qui voudraient organiser contre moi un système de provocation, que, dorénavant, je ne répondrai à aucune interpellation, à aucune espèce d'attaque. Je ne répondrai pas à ceux qui voudraient me faire parler, alors que je veux me taire.

« Je resterai inébranlable contre toutes les attaques, impassible contre toutes les calom

nies. >>

L'Assemblée tout entière accueille ce discours par ses acclamations.

Quelques jours avant le vote du 10 décembre, le Prince Louis-Napoléon adresse à ses concitoyens le manifeste suivant :

LOUIS-NAPOLEON BONAPARTE

A SES CONCITOYENS.

Pour me rappeler de l'exil, vous m'avez nommé représentant du peuple. A la veille d'élire le premier magistrat de la République, mon nom se présente à vous comme symbole d'ordre et de sécurité.

Ces témoignages d'une confiance si honorable s'adressent, je le sais, bien plus à mon nom qu'à moi-même, qui n'ai rien fait encore pour mon pays; mais plus la mémoire de l'Empereur me protége et inspire vos suffrages, plus je me sens obligé de vous faire connaître mes sentiments et mes principes. Il ne faut pas qu'il y ait d'équivoque entre vous et moi.

Je ne suis pas un ambitieux qui rêve tantôt l'Empire et la guerre, tantôt l'application de théories subversives. Élevé dans les pays libres, à l'école du malheur, je resterai toujours fidèle aux

.

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