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1809.

Bataille

leurs propres mains égorgé leurs en fants! (1)

« Le peuple de Vienne, selon l'expression de la députation des faubourgs, dé laissé, abandonné, veuf, sera l'objet de vos égards. J'en prends les bons habitants sous ma spéciale protection. Quant aux hommes turbulents et méchants, j'en ferai une justice exemplaire.

"

Soldats! soyons bons pour les pauvres paysans, pour ce bon peuple qui a tant de droits à notre estime. Ne conser vons aucun orgueil de nos succès, voyonsy une preuve de cette justice divine qui punit l'ingrat et le parjure.

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Cependant le prince Charles, à la tête d'Esling. d'une armée de cent trente mille hommes, étoit retranché sur la rive gauche du Danube, vis-à-vis d'Ebersdorfs, au-dessous et à deux lieues de Vienne. Il étoit maître du cours du fleuve. Il connoissoit parfaitement les localités, et il avoit tous les habitants pour lui. Dans cette position, il pouvoit, sans combattre, ruiner l'armée françoise, et lui faire chèrement payer la témérité de son chef.

Maître de Vienne, Napoléon craignit un moment d'y rester prisonnier; il vit le danger, prit son parti soudain, et, par (1) Quelles images! quel style!

une de ces résolutions hardies qui ne peuvent sortir que d'une tête forte, et qui ont souvent rétabli les affaires désespérées, il change son plan de campagne, passe le Danube sur des ponts volants, n'attend pas que toute son armée l'ait suivi, attaque le prince Charles dans ses retranchements et livre cette fameuse bataille d'Esling, qui dura trois jours, qui fut terrible, sanglante et sans résultat. Le troisième jour une crue subite du Danube ayant rompu tous les ponts et toutes les communications avec la rive droite, les cartouches à canon et d'infanterie manquèrent à l'armée françoise; l'armée couroit les plus grands risques, et pouvoit être anéantie, si d'une part elle avoit été conduite par des chefs moins savants et moins audacieux que les généraux Montebello, Oudinot, Saint-Hilaire, Boudet, Durosnel, etc., qui firent des prodiges; et si de l'autre, le prince Charles avoit moins ménagé ses hommes, et s'il n'avoit pas craint de pousser les François au désespoir, en les plaçant dans l'alternative de vaincre ou de périr. Le prince ralentit sa marche et son feu, et donna à son ennemi le temps de se rallier, de rétablir ses ponts et de repasser le Danube.

La perte fut immense des deux côtés, mais plus grande du côté des François ; là périrent les généraux d'Espagne et Saint

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Hilaire, et le maréchal Lannes, surnommé avec raison le brave des braves. Il eut la cuisse emportée par un boulet, et mourut le lendemain, une heure après l'amputation: son corps fut embaumé, envoyé à Paris, et déposé au Panthéon, avec des honneurs tels qu'aucun souverain peutêtre n'en reçut jamais d'aussi pompeux. Ainsi l'avoit ordonné Napoléon, par une politique assortie à son caractère et à ses desseins.

Cette bataille ne changea rien à l'état des choses. Le prince Charles resta maître de la rive gauche du Danube, et Napoléon resté maître de Vienne fit de nouvelles dispositions pour une seconde bataille. Réunion Dans l'intervalle il donna quelques des états soins à l'administration de ses états; ce du pape à fut alors qu'il réunit les états du pape françois. à l'empire françois, par un décret daté de Vienne, le 17 mai, dont voici le considé rant et les principales dispositions.

l'empire

« Napoléon, etc... Considérant que, lorsque Charlemagne, empereur des François et notre auguste prédécesseur, fit don aux évéques de Rome de diverses contrées, il les leur céda à titre de fief, pour assurer le repos de ses sujets, et sans que Rome ait cessé pour cela d'être une partie de son empire;

« Considérant que, depuis ce temps, l'union des deux pouvoirs spirituel et tem

porel ayant été, comme elle l'est encore aujourd'hui, la source de continuelles discordes, que les souverains pontifes ne se sont que trop souvent servis de l'influence de l'un pour soutenir les prétentions de l'autre, et que, par cette raison, les affaires spirituelles qui, de leur nature sont immuables, se trouvèrent confondues avec les affaires temporelles, qui changent suivant les circonstances et la politique des temps;

«Considérant enfin que tout ce que nous avons proposé pour concilier la sûreté de nos armées, la tranquillité et le bien-être de nos peuples, la dignité et l'intégrité de notre empire avec les prétentions temporelles des souverains pontifes, ayant été proposé en vain; nous avons décrété ce qui suit :

Art. I. « Les états du pape sont réunis à l'empire françois.

II. « La ville de Rome, premier siége du christianisme, et si célébre par les souvenirs qu'elle rappelle, et les monu ments qu'elle conserve, est déclarée ville impériale et libre. Son gouvernement et son administration seront réglés par un décret spécial.

III. «Les revenus du pape seront portés jusqu'à deux millions de francs, libres de toute charge et redevance.

IV. « Une consulte extraordinaire pren

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dra le 1er juin prochain possession en notre nom des états du pape, et fera en sorte que le gouvernement constitutionnel y soit en vigueur le 1er janvier 1810. »

Par un autre décret du même jour, la consulte instituée par le décret précédent fut composée de MM. Miollis, Salicetti, Jannet, Degerando, del Pozzo et de Balbe.

A peine établie, la consulte adressa aux habitants de la ville et des états de Rome la proclamation suivante :

«Romains! la volonté du plus grand des héros vous réunit au plus grand des empires. Il étoit juste que le premier peuple de la terre partageât l'avantage de ses lois et l'honneur de son nom avec celui qui jadis le précéda dans le chemin de la gloire.

« Le seul desir de votre prospérité a dicté le décret de votre réunion. Depuis long-temps vos annales ne contiennent que le récit de vos infortunes. Votre foiblesse naturelle vous rendoit la facile conquête de tous les guerriers qui vouloient franchir les Alpes.

« Unis à la France, sa force devient la vôtre; tous les maux qui résultoient de votre foiblesse ont cessé.

<< Rome continuera d'être le siége du chef visible de l'église; et le Vatican, richement doté et à l'abri de toute influence étrangère, présentera à l'univers la reli

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