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elle se mit en route pour l'Allemagne le 1814.

21 du même mois.

tion.

Cependant Napoléon, abandonné de la Négocia plupart de ses généraux et d'une grande tion pour partie de son armée, commencoit à croire l'abdicaà l'impossibilité de recouvrer son pouvoir: et dès le 4 avril il n'étoit pas éloigné d'écouter les propositions qui avoient son abdication pour objet.

Ce même jour, on lui avoit entendu dire: « Je n'ignore pas qu'avec les braves qui me sont restés fidéles, et les partisans nombreux que j'ai en France, je pourrois guerroyer pendant trois ou quatre ans. Mais cela ne se feroit pas sans causer beaucoup de déchirements, et c'est ce que je veux éviter. »

Ces dispositions étoient favorables à la pacification qu'on négocioit. Le 5, elles. n'étoient plus les mêmes; des dépêches qu'il reçut de Paris opérèrent ce changement et lui rendirent l'espoir qu'il avoit perdu.

On n'a jamais su ce que contenoient ces dépêches; mais on conjectura, dans le temps, qu'il avoit fait faire des ouvertures secrétes à l'empereur d'Autriche, et tenté dé le détacher de la coalition, par des offres aussi séduisantes pour la vanité d'un souverain que décisives pour le cœur d'un père.

En se présentant devant son beau-père

18.14.

Abdica

tion de Napo

léon.

dans l'attitude d'un homme malheureux,
mais non dépouillé de ses titres, d'un sou-
verain qui, cédant à des circonstances
impérieuses, renonce à tout, même au
trône, en faveur de son épouse et de son
fils, il pouvoit d'autant plus aisément se
flatter d'être écouté, qu'il donnoit à l'em-
pereur d'Autriche, avec le moyen d'effa-
cer la honte du mariage de sa fille, la
perspective d'une puissante influence sur
la France et sur le continent.

Il put croire que de pareilles offres ac-
querroient un grand poids en passant par
la bouche de sa femme, et que sa femme
feroit tout ce qui dépendroit d'elle pour
sauver dn naufrage un époux malheureux
et le père de son enfant.

Nous ignorons également si ceux qu'il avoit chargés de cette importante négociation le flattèrent d'une heureuse issue, et si cette flatteuse espérance fut la cause du changement qui s'opéra, le 5 avril, dans les dispositions pacifiques qu'il avoit montrées le 4. Mais dans ce cas sa joie fut de courte durée; l'empereur d'Autriche resta fidéle aux intérêts de l'Europe; et Napoléon, désabusé de ses dernières es pérances, donna son abdication en ces

termes :

« Les puissances alliées ayant proclamé que l'empereur Napoléon étoit le seul obstacle au rétablissement de la paix en Eu

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rope, l'empereur Napoléon, fidéle à son serment, déclare qu'il renonce pour lui et ses héritiers aux trônes de France et d'Italie, et qu'il n'est aucun sacrifice personnel, même celui de la vie, qu'il ne soit prêt à faire à l'intérêt de la France.

Fait au palais de Fontainebleau, le 11 avril 1814.

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Le même jour les puissances alliées conclurent à Paris, et signèrent, conjointement avec le maréchal Ney et le marquis de Caulaincourt, le traité suivant.

Article 1. S. M. l'empereur Napoléon. renonce pour lui, ses successeurs et descendants, ainsi que pour tous les membres de sa famille à tout droit de souveraineté et de domination, tant sur l'empire françois que sur le royaume d'Italie et tout autre pays.

Art. 2. LL. MM. l'empereur Napoléon et Marie-Louise conserveront leurs titres et rang pour en jouir pendant leur vie. La mère, les frères, sœurs, neveux et nièces de l'empereur conserveront aussi, en quelque lieu qu'ils résident, le titre de princes de sa famille.

Art. 3. L'île d'Elbe, que l'empereur Napoléon a choisie pour le lieu de sa résidence, formera, pendant sa vie, une principauté séparée, qu'il possédera en toute

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1814.

souveraineté et propriété. Il sera en outre accordé en toute propriété à l'empereur Napoléon un revenu annuel de 2 millions de francs, qui sera porté comme rente sur le grand-livre de France; de laquelle somme un million sera reversible à l'impératrice.

Art. 4. Les duchés de Parme, Plaisance et Guastalla seront donnés en toute propriété et souveraineté à S. M. l'impératrice Marie-Louise; ils passeront à son fils et à ses descendants en ligne directe.

Art. 5. Madame mère recevra un revenu de 300,000 fr.; le roi Joseph et sa femme 500,000 fr.; le roi Louis 200,000 fr.; la reine Hortense et ses enfants 400,000 fr.; le roi Jérôme et sa femme 500,000 fr.; la princesse Élisa Bachiochi 300,000 fr.; la princesse Pauline Borghese 300,000 fr.

Art. 6. La pension de l'impératrice Joséphine sera réduite à un million en domaines ou en inscriptions sur le grandlivre.

Art. 7. Il sera formé un établissement convenable hors de France, au prince Eugène, vice-roi d'Italie.

Art. 8. Tous les diamants de la couronne resteront en France.

Art. 9. Les dettes de la maison de l'empereur, telles qu'elles existoient le jour de la signature dudit traité, seront payées

sur l'arriéré dû par le trésor public à la liste civile.

Art. 10. L'empereur Napoléon pourra prendre avec lui et retenir, comme sa garde, quatre cents hommes, officiers, sous-officiers et soldats, etc., etc.

Fait à Paris, le 11 avril 1814.

Signé METTERNICH, STADION, RASUMOFFSKY,
NESSELRODE, CASTLEREAGH, HARDENBERG,
NEY, CAULAINcourt.

Napoléon envoya devant lui cent chariots et fourgons chargés de meubles, de bronzes, de tableaux, d'argent et d'argenterie.

Le 20 avril, jour de son départ, il trouva les grenadiers de sa garde rangés dans la cour du château. Il fit approcher les officiers, et leur fit seś adieux en ces

termes :

« Mes amis, je vous quitte. Les puissances coalisées ont armé contre moi l'univers entier, mon armée même vous seuls m'êtes restés fidèles. Avec vous je pourrois encore faire la guerre pendant trois ans; je pourrois déchirer la France par des guerres civiles, mais j'ai préféré les intérêts de notre patrie à mon propre sort. Je pouvois cesser de vivre, mais j'ai dû vivre pour écrire ce que nous avons fait : : vos exploits, braves guerriers, ne doivent pas être ensevelis dans l'oubli : je

1814.

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