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venable de consulter le texte original de cette pièce.

« En foi de quoi les plénipotentiaires respectifs ont signé :

« Pour l'Autriche, le prince de Metter-
nich et le baron de Wessemberg.
« Pour la France, le prince de Talley-
rand, le duc de Dalberg et le comte
Alexis de Noailles.

« Pour l'Angleterre, MM. Clancarty,
Cathcart, et Stewart.

.

« Pour le Portugal, le comte de Pal-
mella, don Antonio de Saldanha, et
don Joaquim Lobo de Silveira.

« Pour la Prusse, le prince de Harden-
berg, le baron de Humboldt.

« Pour la Russie, le prince de Razou-
moffski, le comte de Stakelberg, et le
comte de Nesselrode.

« Pour la Suède, le comte Charles Axel
de Locwenhielm. »

Pendant que sous les yeux des plus grands souverains de l'Europe, les plus savants publicistes régloient ainsi les intérêts de cette partie du monde, un homme, un seul homme se disposoit à les bouleverser de nouveau, et vint à bout de sa funeste entreprise.

1814.

Buona

Que Buonaparte ait signé de bonne foi Projets de ou non son acte d'abdication, c'est ce qu'il importe peu de savoir aujourd'hui.

parte.

1815.

Ce qu'il y a de certain, c'est qu'en le signant il céda à la nécessité, et qu'il ne se crut pas engagé par une loi qui n'engage personne.

On croira facilement qu'il ne déposa pas sans regrets une couronne qui lui avoit coûté tant de peines, et qu'en la déposant il conserva l'arrière-pensée de la recouvrer un jour, si l'occasion se présentoit. On sait que le traité de Paris lui assuroit la conservation de son titre, de ses honneurs, de ses trésors; et tous ces avantages concouroient à le confirmer dans ses desseins secrets.

que

Personne ne savoit mieux lui prévoir un événement. Personne ne sut mieux lier ensemble un grand nombre d'idées, embrasser dans ses vues un grand espace de temps, et tracer des plans qui auroient paru impraticables à tout autre que lui, et dont le succès, dans ses mains, n'a que trop souvent justifié son audace.

Les premiers jours de son exil furent employés à son établissement. Il aimoit à bâtir: il fit commencer un palais pour lui, des casernes pour ses gardes, des écuries pour ses chevaux, une salle de spectacle pour ses sujets. Il voulut ensuite connoître par ses yeux l'industrie et l'agriculture de ses états; il visita les carrières de marbre, les mines de fer, les ateliers de forgerons, les cabanes de pêcheurs, qu'ils

renferment. Il fit planter des arbustes d'Italie dans ses jardins, des mûriers sur les routes, des vignes à sa maison de campagne.

Čes travaux et ces voyages ne l'empêchoient ni de passer fréquemment la revue de son armée de quatre cents hommes, ni de donner des fetes brillantes aux dames de Porto-Ferrajo, ni d'écrire les Mémoires de son règne... Mais tout cela n'étoit qu'un jeu d'escamoteur, et le voile officieux qui couvroit ses intrigues en Italie, ses manœuvres en France, et sa correspondance à Vienne.

em

1815.

tion à l'île d'Elbe.

De l'île d'Elbe, comme du haut d'un Conspiraobservatoire, son vaste coup d'œil brassoit l'Europe entière, mais se fixoit principalement sur Vienne, sur Milan, sur Paris, sur Lyon et sur Grenoble. Il avoit dans toutes ces villes des émissaires adroits qui souffloient par-tout le feu de la guerre, en répandant par-tout les plus vives alarmes sur le retour du régime féodal, sur les prétentions des émigrés, sur les ressentiments des prêtres, sur la vente des biens nationaux, etc.

• Des soldats ambitieux, des sénateurs dégradés, d'anciens conseillers d'état, des femmes corrompues, des espions de police alloient et venoient, sans trop de mystère, de Paris à Lyon, et de l'île d'Elbe à Paris. C'étoit une conspiration

1815.

d'un genre nouveau, dont les agents ne prenoient pas la peine de se cacher. On savoit qu'ils se rassembloient à Neuilly, à Saint-Leu et dans quelques cafés de Paris, et personne ne les inquiétoit.

Des hommes réprouvés par leurs crimes et marqués du sceau de l'infamie osoient reparoître dans le monde, d'où l'opinion publique les avoit chassés dans les premiers jours de la restauration ; ils osoient davantage, ils insultoient périodiquement les prêtres et la religion dans leurs journaux (1); ils traduisoient devant les tribunaux, comme calomniateurs, les royalistes qui dénonçoient leurs complots (2); ils faisoient ouvertement l'éloge de Buonaparte; ils plaignoient les peuples qui ne vivoient plus sous sa domination; ils insultoient les souverains qui avoient contribué à le détrôner; et tout cela, sous

le
gouvernement d'un prince à la conser-
vation duquel les royalistes auroient sa-
crifié leurs vies! Et tout cela impuné-
ment! Aussi chacun se demandoit avec
inquiétude et saisissement, où sommes-
nous? qu'est-ce qui gouverne? que font
les ministres du roi?

(1) Le Nain jaune.

(2) L'auteur de l'Histoire du 18 brumaire fut traduit, sous le règne de Louis XVIII, devant le tribunal de police correctionnelle, pour avoir déploré l'horrible assassinat du duc d'Enghien, et en avoir signalé les auteurs.

Si les ministres ignoroient ces manoeuvres criminelles que tout le monde connoissoit, il falloit les renvoyer comme convaincus d'incapacité; s'ils en étoient instruits, il falloit les punir comme coupables de félonie.

Les mois de janvier et février 1815 s'écoulèrent dans les alarmes qui annoncent et précédent les grands orages politiques. Les nouvelles les plus fâcheuses, et souvent les plus absurdes, circuloient dans les salons, ainsi que dans les ateliers. Les partis se prononçoient pour ou contre la monarchie légitime, avec autant de hardiesse et d'impunité que si nous eussions été dans l'anarchie la plus complète. Chaque jour les disputes d'opinion dégénéroient en combats singuliers.

Les hommes sages trembloient à la vue de ces symptômes d'une prochaine et funeste catastrophe. Quelques uns d'eux sonnèrent l'alarme; ils ne furent point écoutés (1).

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1815.

que

prend Buona

Exactement informé de cet état de cho- Mesures ses, Buonaparte prenoit ses mesures pour en profiter. H avoit fait acheter secrètement deux felouques à Gênes, des armes à Alger, et des munitions de guerre à Naples. On supposa dans le temps qu'il

(1) Le ministre de la maison du roi reçut à cet égard des avis positifs et détaillés, auxquels il ne fit

aucune attention.

parte.

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