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venus en Bulgarie. Les informations parvenues à la police russe, que Bourtzew en particulier publierait des écrits révolutionnaires à Sophia, sont absolument inexacts, puisque cet individu n'a jamais habité ni la capitale ni une autre localité de la principauté et que, d'ailleurs, aucun écrit de cette nature n'a paru en Bulgarie.

Le nommé Sérébriakow (Blank) a demeuré en Bulgarie jusqu'en 1886, à une époque où il y avait des Agents et des Consuls de Russie. Il en est parti en même temps que les Représentants Russes ont quitté la Principauté, et il n'y est plus retourné.

Quant au sujet russe dont le nom n'est pas encore connu du Gouvernement Impérial de Russie, qui serait arrivé récemment avec sa femme à Sophia et aurait été engagé comme chef de gare à Novi-Han (Chemin de fer Tzaribrod - Sophia - Ballova), le Gouvernement princier est en mesure de donner des renseignements détaillés sur cet individu signalé comme revolutionnaire russe.

En effet, un nommé Boleslaw Pétrowitch Korsak est venu dernièrement de Paris à Sophia et possède les documents suivants:

a. Un passeport russe délivré pour l'étranger à Nijni - Novgorod le 17 février 1890, sous le n° 6.

Un livret de légitimation en date du 12 août 1887, certifiant que le détenteur est né à Plotsk, de religion catholique, et télégraphiste de profession;

c. Un livret-matricule de service militaire daté du 6 juin 1887 n° 110 (Régiment de Kalouga) et un prikaz de licenciement de même date et sous le n° 157.

d. Un certificat du 23 août 1886 n° 651, constatant que cet individu, placé sous la surveillance de la police dans le Gouvernement d'Irkoutsk depuis le 2 mai 1882, a été relevé de cette surveillance le 16 décembre 1885, avec droit de libre séjour partout en Russie, excepté dans les deux capitales et avec billet de libre parcours jusqu'à Belostok, et

Un permis de séjour à Paris, délivré par la Préfecture de Police de Paris le 26 septembre 1890, no 99,676.

En présence de pareils documents, il est évident que le nommé Korsak n'est pas précisément le révolutionnaire dangereux visé par la Notice et recherché par la police russe. Toutefois, pour n'avoir pas de difficultés à son sujet, le Gouvernement princier l'a licencié du service des Chemins de fer et les autorités administratives lui ont proposé de quitter le territoire bulgare.

Il résulte de ce qui précède que, parmi les personnes mentionnées dans la Notice, les unes ne sont jamais venues en Bulgarie et les autres y sont arrivées avec des passeports réguliers à une époque où le Gouvernement impérial de Russie avait ses Agents Diplomatiques et ses Consuls et où les Ministères de la Guerre et de l'Intérieur ainsi que l'Administration des Travaux Publics étaient dirigés par des Russes, envoyés spécialement par le Gouvernement Impérial. A cette époque, ni les Agents et Consuls de Russie, ni les hauts fonctionnaires russes qui occupaient les postes de ministre ou de directeur, n'ont élevé la moindre

réclamation contre l'admission au service de l'Etat, de personnes telles que les docteurs Brzesinsky, Dylewa et l'ingénieur Loutzky: au contraire, ils entouraient alors de leur sollicitude constante quelques unes de ces personnes qui sont aujourd'hui rangées au nombre des conspirateurs les plus dangereux.

La liste des personnes de cette catégorie seraient longue si le gouvernement bulgare en faisait le relevé avec preuves à l'appui. Il sufpra de citer le cas de Novitzky en Roumélie Orientale et celui de Nébolsine dans la Principauté.

Novitzky a été, sur les instances de M. Sorokine, Consul Général de Russie à Plovdiv, nommé à de hautes fonctions judiciaires en Roumélie Orientale. Après la révolution de Pérouschtitza qu'il a fomentée, il partit pour Constantinople, où il a été désigné par le Consulat Général de Russie au poste de juge-assesseur au Tidjaret. Il remplissait ces fonctions quand il fut arrêté dans les mêmes conditions que Loutsky, sous le chef d'accusation d'avoir participé au meurtre de l'empereur

Alexandre II le Libérateur.

Nébolsine, fortement protégé par de hauts fonctionnaires russes, civils ou militaires, était attaché en 1881 en qualité de chef de section au Ministère princier de la Justice. Le jour où parvint à Sophia la nouvelle de l'attentat contre l'Empereur Alexandre II, il donna un grand banquet à la glorification des auteurs de l'attentat. Expulsé de la principauté, il se rendit en Roumélie Orientale où il demeura quelques années: il revint en 1885 en Bulgarie. Durant sa mission, le général Kaulbars honora de sa confiance et de sa protection Nebolsine qui était alors avocat de la Municipalité de Sophia. Le Consulat général d'Allemagne n'ignore pas que ce sujet russe, convaincu en 1881 de nihilisme, fut expulsé de la Principauté en février 1887, à cause de ces menées révolutionnaires dans le pays. Il sait également que le Gouvernement Russe a protesté contre cette mesure et a réclamé des indemnités en faveur de son ressortissant. Il résulte enfin de cet exposé que le nombre est sensiblement réduit des sujets russes qui résident aujourd'hui en Bulgarie et qui sont qualifiés de nihilistes. Le Gouvernement princier ne sait où trouver cette affluence d'anarchistes russes qui, au dire du Gouvernement Impérial, prendrait des proportions inquiétantes dans la Principauté, au point de constituer un grave danger pour l'ordre public et une menace contre la sécurité de la Russie.

Oui, il s'est rencontré des sujets russes en Bulgarie qui, comme les sieurs Loutzky et Dragomanow, ont obtenu ou occupent des places plus ou moins bien rétribuées, il y en a encore qui, comme les docteurs Brzesinsky et Dylewa, vivent et exercent librement leur profession dans ce pays. Mais aucun d'eux n'a donné lieu, par ses paroles ou par ses actes, au moindre soupçon de propagande révolutionnaire. Les accusations portées contre eux ne sont donc point fondées; en particulier, les allégations touchant les agissements de Volansky et ses préparations chimiques dans le laboratoire de l'Ecole communale de Razgrad, qui auraient eu pour but des attentats criminels, sont purement fantaisistes. Le Gouvernement bul

gare prend assez à coeur l'avenir de la jeunesse de ses Ecoles pour empêcher les membres du Corps enseignant, recruté parmi les professeurs indigènes ou étrangers, de propager parmi elles des doctrines subversives: il ne peut toutefois qu'être sensible à l'intérêt que le Gouvernement impérial de Russie lui témoigne à cette occasion.

Le Gouvernement bulgare, en engageant à son service des spécialistes étrangers pour toutes les branches de son administration, a de tout temps donné la préférence aux Russes à cause des affinités de race et de langue; mais il a toujours exigé d'eux une conduite exemplaire dans l'accomplissement de leurs fonctions: il n'aurait jamais toléré de leur part le moindre acte dirigé contre la sécurité d'un Etat étranger. Il ne mérite donc pas le reproche d'avoir donné asile à des anarchistes ni ne peut s'expliquer les motifs qui ont incité le Gouvernement Impérial à dénoncer la Bulgarie comme un foyer de conspirations contre la Russie.

Au lieude s'adresser aux Grandes Puissances pour els engager à faire une démarche collective auprès du Gouvernement princier et à soulever de la sorte une question pour ainsi dire d'ordre international, il eût été désirable que le Gouvernement Impérial de Russie s'adressât au Gouvernement de la Principauté, comme il l'a fait toutes les fois qu'il s'est agi de ses intérêts, par l'entremise du Consulat Général d'Allemagne à Sophia pour formuler ses griefs au sujet des prétendues manoeuvres des nihilistes russes en Bulgarie, poser les faits avec documents à l'appui et réclamer, en cas de besoin, la punition des coupables. Le Gouvernement bulgare n'aurait pas manqué, comme il l'a fait par le passé, de donner aux demandes du Gouvernement Russe la suite qu'elles auraient été susceptibles de recevoir, conformément aux lois du pays et aux usages internationaux.

Tout bien considéré, la Notice communiquée par le Consulat Impérial d'Allemagne et qui a inspiré les démarches des Grandes Puissances, ne présente aucun fait démontrant que les prétendus anarchistes russes, nihilistes ou autres, auraient tramé des complots ou entrepris quelque mouvement révolutionnaire contre la Russie ou un autre Etat. Mais, si le Gouvernement bulgare est heureux de reconnaître qu'aucun acte de cette nature ne peut être imputé aux sujets russes établis dans la Principauté, il est, malheureusement, obligé de constater que la Bulgarie n'a pas eu le même traitement, grâce aux agents provocateurs et aux anarchistes venus du dehors.

Faut-il rappeler, en effet, les tristes évènements des dernières années et les monstrueux attentats contre l'ordre public et la liberté de ce pays? Le détrônement du Prince Alexandre, les émeutes sanglantes de Silistrie et de Roustchouk, les expéditions de Nabokow, le récent complot de Panitza-Kalobkow sont présents à la mémoire de tous. Les »nihilistes << bulgares ou russes, auteurs de ces attentats, jouissent en Russie d'un traitement particulièrement aimable: les uns ont été accueillis dans l'armée impériale; d'autres ont été décorés; tous sont l'objet de faveurs spéciales: il en est même qui, comme les Bolman et les Kalobkow, jouissent de l'impunité des crimes qu'ils ont commis en Bulgarie et pour lesquels ils ont été condamnés à la peine de mort ou à l'emprisonnement.

Le Gouvernement princier regrette vivement de devoir rappeler un passé pénible à tous égards: s'il le rappelle, c'est parce qu'il se voit en butte à de nouvelles accusations, injustifiées, de la part du Gouvernement impérial de Russie.

La Bulgarie voudrait oublier à jamais ce passé douloureux et néfaste; la paix et la tranquillité lui tiennent trop à coeur pour permettre que des anarchistes étrangers se réfugient en son sein dans le but avéré de mener une propagande révolutionnaire contre un autre Etat.

La Bulgarie n'a qu'un désir: travailler à l'oeuvre de son relèvement et vivre en bonnes relations avec tous les pays.

Sophia, le 3/15 février 1891.

6.

CONGO, PORTUGAL.

Convention pour la délimitation de leurs sphères de souveraineté respectives dans la région du Lunda; signée à Lisbonne le 25 mai 1891 *).

Archives diplomatiques 1891. No. 9.

Sa Majesté le Roi - Souverain de l'Etat Indépendant du Congo et Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves, animés du désir de resserrer par des relations de bon voisinage et de parfaite harmonie les liens. d'amitié qui existent entre les deux pays, ont résolu de conclure à cet effet un traité spécial pour la délimitation de leurs sphères de souveraineté et d'influence respectives dans la région du Lunda, et ont nommé pour leurs Plénipotentiaires, savoir:

Sa Majesté le Roi-Souverain de l'Etat Indépendant du Congo: M. Edouard de Grelle Rogier, Envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire, muni de ses pouvoirs, Officier de l'Ordre de Léopold, etc.;

Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves: M. Carlos Roma du Bocage, Député, Major de l'état-major du génie, son aide de camp honoraire, Chevalier de l'Ordre de Saint-Jacques, etc.,

Lesquels après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

Article premier. Dans la région du Lunda les possessions de Sa Majesté le Roi de Portugal et de Sa Majesté le Roi-Souverain de l'Etat. Indépendant du Congo sont délimitées de la manière suivante :

1° Par le thalweg du cours du Cuango depuis le 6° degré de latitude sud jusqu'au 8° degré; par le 8° parallèle jusqu'à son point d'intersection avec la rivière Kuilu; par le cours du Kuilu dans la direction du nord

*) Les ratifications ont été échangées à Lisbonne le 1er août 1891.

jusqu'au 7° degré de latitude sud; par le 7° parallèle jusqu'à la rivière Cassay;

2o Il est entendu que le tracé définitif de la ligne de démarcation des territoires compris entre le 7° et le 8° parallèle de latitude sud depuis le Cuango jusqu'au Cassaï sera exécuté ultérieurement en tenant compte de la configuration du terrain et des limites des Etats indigènes.

Les Etats de Maxinge (Capenda) et de Cassassa dont la frontière septentrionale longe le 8° parallèle depuis la rive droite du Cuango jusqu'au cours du Kuilu, celui d'Amucundo (Caungula) ayant pour limite occidentale la rive droite de ce dernier cours d'eau et touchant au 7o parallèle, ainsi que l'Etat de Mataba (Ambinge) qui s'étend vers la même latitude et aboutit à la rive gauche du Cassal, resteront sous la souveraineté de Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves.

Les Etats de Mussuco (Cambongo) et d'Anzovo dont la frontière méridionale longe le 8° parallèle depuis le Cuango jusqu'au Kuilu et ceux de Cassongo (Muene Puto), Tupeinde (Muata Cumbana) et Turuba (Maï Munene) resteront soumis à la souveraineté de Sa Majesté le Roi-Souverain de l'Etat Indépendant du Congo;

3° Par le thalweg du Cassaï depuis le point de rencontre de cette rivière avec la ligne de démarcation mentionnée au paragraphe précédent jusqu'à l'embouchure de celui de ses affluents, qui prend naissance dans le lac Dilolo et par le cours de cet affluent jusqu'à sa source. La région à l'ouest du Cassaï appartiendra au Portugal; la région orientale à l'Etat Indépendant du Congo.

4o Par la crête de partage des eaux du Zaïre (Congo) et de celles de Zambèse jusqu'à son intersection avec le méridien de 24° longitude est de Greenwich.

Art. 2. Une Commission composée de représentants des Hautes Parties contractantes, en nombre égal des deux côtés, sera chargée d'exécuter sur le terrain le tracé de la frontière, conformément aux stipulations précédentes. Ces commissaires se réuniront à l'endroit qui leur sera ultérieurement fixé de commun accord et dans le plus bref délai possible après l'échange des ratifications du présent traité.

Art. 3. Les sujets portugais dans les territoires de la région du Lunda, placés sous la souveraineté de l'Etat Indépendant du Congo, et les sujets de l'Etat Indépendant du Congo dans les territoires de cette même région, placés sous la souveraineté du Portugal, seront respectivement, en ce qui concerne la protection des personnes et des propriétés, traités sur un pied d'égalité avec les sujets de l'autre Puissance contractante. Art. 4. Les deux Hautes Parties contractantes s'engagent, à défaut d'une entente directe, à recourir à l'arbitrage d'une ou de plusieurs Puissances amies pour le règlement de toutes les contestations auxquelles le présent traité pourrait donner lieu, qu'il s'agisse de l'interprétation de ce traité ou du tracé des frontières sur le terrain.

Art. 5.

Le présent traité sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Lisbonne aussitôt que faire se pourra.

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