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Pour terminer ce qui a rapport à la question qui précède, la Legation Royale croit devoir rappeler au Ministère Royal que, d'après l'art. 49 du traité de Berlin, les droits acquis restent en vigueur tant qu'ils n'ont pas été modifiés d'un commun accord entre les deux Gouvernements. Or, le droit invoqué par la Légation par sa note No. 223 et par la présente en faveur du Consulat Royal lui a toujours été reconnu jusqu'à présent.

La Légation Royale a aussi l'honneur d'informer le Ministère Royal que Mr. le président du tribunal de Jalomitza a cru pouvoir s'adresser directement à la Légation Royale pour lui communiquer que le tribunal. a reconnu Christos Zappa en qualité d'héritier du défunt C. Zappa et que l'inventaire aurait lieu le 9 Mars et a en même temps invité le Chargé d'Affaires de Grèce d'y assister en cette qualité. Cet acte du Président du dit tribunal surprendra, sans doute, le Ministère Royal autant qu'il a étonné la Légation de Grèce, les autorités locales ne pouvant correspondre avec les représentants des pays étrangers que par le canal du Ministère Royal des Affaires Etrangères. Quant au contenu du dit acte du tribunal, la Légation est convaincue que le Ministère Royal appréciera à sa juste valeur cet acte de reconnaître Christos Zappa comme héritier ab intestat de la succession de C. Zappa avant la levée des scellés et l'inventaire, opérations qui auraient fait connaître si le défunt a laissé un testament, comme cela est presque certain.

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La Légation Royale Hellénique a l'honneur de soumettre à l'examen bienveillant du Ministère Royal des Affaires ce qui suit:

I.

Vanghély Zappa, sujet hellène, est décédé à Brosteni le 20 Juin 1865, date importante à retenir parce qu'elle fixe la législation à appliquer, qui ne saurait être ni la Constitution actuelle ni le code Cuza, car, incontestablement, la succession s'est ouverte sous l'empire du code Caradja complété dans ses lacunes par le droit romain.

En mourant, il a laissé un testament olographe et mystique, en date du 30 Novembre 1860.

Par ce testament:

1o Il a légué à son cousin, Const. Zappa, ses biens meubles (sauf les legs particuliers) et l'usufruit de ses immuebles.

2o Il a laissé la nue propriété de sa fortune immobilière à l'Etat Hellénique, pour être gérée par la Commission Olympique, ainsi que la pleine propriété de 400 actions de la société de navigation hellénique; imposé à son dit cousin Const. Zappa de construire l'établissement des Olympies (Palais de l'Exposition), etc.

3o Il a fait le legs connu à l'Académie Roumaine;

4o Il a légué 30.000 piastres à ceux de ses parents qui auraient pu avoir droit à sa succession;

5o Il a nommé le dit Const. Zappa son exécuteur testamentaire et fait divers autres legs.

II.

Après la mort de Vanghély Zappa, le tribunal consulaire hellénique à Bucarest (il est notoire qu'à cette époque-là et même beaucoup plus tard la juridiction des Consulats existait légalement en Roumanie), par sa décision No. 216 du 24 Juin 1865, a reconnu le dit testament du 30 Novembre 1860 et l'a déclaré valide.

A la date du 3 Juillet 1865, le Consulat hellénique a levé les scellés de la succession de Vanghély Zappa et reconnu pour exécuteur testamentaire Const. Zappa.

De plus, M. le Ministre de l'Instruction Publique, à la date du 14 Juillet 1865, a ordonné qu'il fût publié dans le Moniteur Roumains que Const. Zappa devait être reconnu comme exécuteur du testament de feu son cousin Vanghély; et cette publication a été faite, en effet, deux jours après. A la date du 25 Mai 1866, Mr. le Ministre des Affaires Etrangères de Roumaine, par son office No. 2.381, adressé au Consulat hellénique de Bucarest (à cette date-là il n'y avait pas de Légation), lui communiqua qu'il s'était entendu avec le Ministère de la Justice afin que le règlement de la succession Zappa fût laissé aux autorités consulaires helléniques comme seules compétentes pour cette succession (voir les offices No. 2.381 du 25 Mai et 2.783 du 13 Juin 1866, adressés par le Ministère des Affaires Etrangères au Ministère de la Justice). De plus, le même Ministère, par son office No. 3.988, en date du 19/31 Août 1866, adressé au Consulat hellénique, lui fit connaître qu'il avait provoqué un ordre du Ministère de la Justice pour que la tribunal d'Ilfov se desistât de toute juridiction sur la dite succession; l'ordre fut, en effet, donné par le Ministère de la Justice (No. 8.412 du 25 Août 1866) au président du tribunal d'Ilfov, et cet ordre fut communiqué au Consulat hellénique par l'office No. 4.269 du Ministère des Affaires Etrangères en date du 14 Septembre 1866, etc., etc.

Aux actes ci-dessus du Gouvernement Roumain, on doit ajouter que le Ministère des Affaires Etrangères de Roumanie, en adressant annuellement depuis 1866, au Consulat Général de Grèce et à cette Légation Royale (depuis la création de celle-ci), des offices portant réception et quittance du legs annuel laissé à l'Académie Roumaine par feu Vanghély Zappa et payé par le Consulat d'abord et cette Légation ensuite au dit Ministère, le Gouvernement Roumain a evidemment reconnu le testament de Vanghély Zappa et notamment sa disposition en faveur de l'Etat hellénique et de plus, la possession de celui-ci puisque c'est de cet Etat qu'il a reçu les annuités du dit legs; il a reconnu également les qualités de Constantin Zappa comme exécuteur testamentaire et comme usufruitier. De tous les offices annuels en question on se bornera ici à appeler spécialement l'attention sur les deux premiers sous No. 167 du 20 Janvier 1866

et No. 201 du 16 (28) Janvier 1867 qui reconnaissent que le don annuel de l'Académie a été payé sur le revenu de la fortune immobilière et qui mentionnent les instructions dignes d'éloges du testateur, l'exactitude de l'exécuteur testamentaire, C. Zappa à exécuter le testament, etc.

Il est à mentionner aussi l'office adressé au Consulat Général par le même Ministère, le 25 Septembre 1878, sous No. 14.311, qui parle de legs testamentaires, de l'exécuteur testamentaire, d'annuités qui doivent être payées exactement selon la volonté du testateur, et qui (à cause d'un retard dans le payement de l'annuité de l'an 1878) demande l'exécution exacte de la disposition testamentaire, autrement la volonté du testateur ne serait pas remplie.

La Légation Royale est donc en droit de maintenir que, non seulement le testament a toujours été exécuté jusqu'aujourd'hui, non seulement l'Etat hellénique, par la Commission Olympique, est réellement entré en possession de la succession testamentaire de Vanghély Zappa et notamment des 400 actions de la société de navigation, de la partie des revenus de ses immeubles qui a été nécessaire pour la construction de l'établissement Olympique (Palais de l'Exposition), ainsi que pour son entretien, de celles, nécessaires au payement du legs annuel à l'Académie et des autres legs mais son droit à la dite succession et sa possession ont été toujours reconnus depuis l'an 1865 jusqu'à ce jour, c'est-à-dire pendant 26 ans par l'Etat roumain, ainsi que cela résulte des susdits offices et d'autres actes de même nature qu'il serait inutile de relater ici.

III.

En ce qui concerne la Commission des Olympies et legs à qui est confiée, pour le compte de l'Etat, l'administration de la fortune Vanghély Zappa, il résulte, des lois et ordonnances qui la concernent:

1o Que la dite Commission a son origine dans l'ordonnance royale du 27 Janvier 1837 qui, ayant été rendue sous le roi Othon avant la constitution hellénique, a force de loi et l'a créée sous le nom de >> Commission pour encouragement de l'Industrie Nationale«.

2o Que Vanghély Zappa ayant conçu l'idée de concours généraux de l'Industrie et de l'Agriculture en Grèce, sous le nom d'Olympies, dès l'année 1858, il a été rendu par le roi Othon l'ordonnance du 17 Août 1858 sur la création des Olympies« qui a confié la direction et la surveillance des Olympies (qui sont incontestablement une institution de l'Etat) à la susdite Commission créée par la loi de 1837, en y ajoutant quatre membres nouveaux et en formant ainsi une Commission plus grande.

3o Que le Gouvernement Hellénique a accepté la succession testamentaire de Vanghély Zappa après sa mort par l'ordonnance du 11 Août 1865 et que cette acceptation a même été répétée par d'autres ordonnances et lois postérieures.

Par conséquent, la Commission mentionnée dans le testament de Vanghély Zappa a certainement son origine dès l'année 1837 et, en tous cas, elle a été organisée définitivement et pour le but qu'il se proposait

dés 1858, c'est-à-dire deux années avant la date de son testament et 7 années avant sa mort. De plus, il résulte des lois et ordonnances qui concernent la dite Commission qu'elle doit être considérée non seulement comme une personne morale publique créée, organisée et surveillée par l'Etat Hellénique, mais comme une branche de l'administration de cet Etat. En effet:

L'article 1er de l'ordonnance de l'année 1837 crée une Commission de douze membres nommée commission pour l'encouragement de l'Industrie Nationale; l'article 2 porte que ses membres seront nommés par le Roi et par ordonnance royale et seront pris parmi les employés du Gouvernement, etc.; l'article 7, que la Commission déterminera les prix qui seront accordés au nom du Roi, et que ces propositions seront préalablement soumises au Roi; l'article 13, que la Commission aura à s'entendre avec le Ministère des Finances pour diminuer les droits de douane au profit des Industriels qui se seront distingués; l'article 18, que la Commission recevra les décisions et les ordres du Roi par le canal du Ministère de l'Intérieur; l'article 21, que la Commission aura une correspondance officielle avec les autorités administratives de l'Etat; l'article 25, que la Commission peut provoquer des crédits du Ministère de l'Intérieur comme faisant partie du budget de l'Etat et sans qu'on puisse refuser ces crédits; l'article 35 ajoute que lorsque, plus tard, une société privée sera formée dans le même but (chose qui n'a jamais eu lieu), les fonctions décrites dans le présent décret seront transmises à cette société-là.

L'ordonnance du 17 Août 1858 a créé tous les 4 ans, à Athènes, sous le nom d'Olympies, des concours généraux pour l'exposition de tous les produits de l'industrie, de l'agriculture et de l'élève des bestiaux, et l'article 2 a confié la direction et la surveillance des Olympies à la Commission existant près le Ministère de l'Intérieur pour l'encouragement de l'Industrie National«, en y ajoutant quatre nouveaux membres choisis par le Ministère de l'Intérieur et sous la présidence du Ministre.

Après la mort de Vanghély Zappa et l'ouverture de son testament, Sa Majesté le Roi Georges a rendu l'ordonnance du 11 Août 1865 portant que : 1) La Commission des Olympies, qui doit se réunir, d'après l'article 2 de l'ordonnance du 17 Août 1858, tous les quatre ans, doit se composer d'une manière définitive de la Commission existant près du Ministère de l'Intérieur pour l'encouragement de l'Industrie Nationales et des quatre membres suivants: Christidis, etc. 2) Cette Commission sera présidée par le Ministère de Intérieur. 3) Cette Commission, nommée aussi Commission des legs, devra prendre immédiatement soin d'exécuter les clauses du testament qui concernent les Olympies. 4) Le testament de feu Vanghély Zappa sera publié avec la présente ordonnance.

On peut aussi mentionner: 1) La loi du 30 novembre 1869 concernant la construction du palais des Olympies, conformément aux dispositions du testament de Vanghely Zappa. B) L'ordonnance du 27 septembre 1875, qui a réglé plus complètement les fonctions de la Commission des Olympies et legs et le contrôle de l'administration et de la gestion, et dont les dispositions les plus importantes sont celles de l'article 26 qui lui applique les articles

34 et 35 de la loi sur la comptabilité publique, et celles de l'article 30 qui exige la soumission des comptes au Ministère de l'Intérieur, leur contrôle par la cour des comptes, leur publication dans le journal officiel etc. 3) La loi du 28 Mai 1887 sur l'administration de la fortune laissée à l'Etat Hellénique par Vanghély Zappa, qui a réorganisé la dite Commission d'une manière plus nette et plus complète.

C'est donc bien comme une branche de l'administration de l'Etat Hellénique que doit être très certainement considérée la Commission des Olympies et legs.

Or, l'Etat hellénique est incontestablement une personne civile reconnue par l'Etat roumain, puisque les deux gouvernements entretiennent des rapports officiels entre eux. Il serait d'ailleurs non seulement contraire à la vérité, mais sans utilité, de prétendre que la dite Commission ne serait qu'une personne morale, puisque les droits à la succession de Vanghély Zappa ont été ouverts par sa mort en Juin 1865, c'est-à-dire à une époque où il n'y avait aucune prohibition d'acquérir par testament ou autrement même les immeubles situés en Roumanie comme les meubles, soit par les personnes morales, soit par les personnes physiques, et soit roumaines, soit étrangères; car, ainsi qu'il a été dit au commencement de la présente note, en Juin 1865, ni la Constitution actuelle ni le code Cuza n'étaient en vigueur. Aussi n'est-il pas nécessaire de prouver ici que même si, ce qui n'est pas, il y avait lieu d'appliquer cette législation nouvelle, même si, l'article 7, § 5 de la Constitution, n'exceptait pas formellement les droits acquis, même alors le droit d'aubaine n'existant pas en Roumanie et la confiscation étant prohibée par la Constitution nouvelle non moins que par les principes du droit moderne et de l'éternelle morale, les questions dont il s'agit devraient recevoir les mêmes solutions, avec ce correctif peut-être que l'étranger, à qui est dévolue une succession comprenant aussi des immeubles sis en Roumanie, devrait les vendre: ce que d'ailleurs le Gouvernement Grec pourrait accepter.

Dans cet état de choses, il est aisé de comprendre quel a été l'étonnement de la Légation Royale en apprenant que l'Etat roumain avait décidé de demander l'envoi en possession de la succession de Vanghély Zappa comme vacante! Elle a hésité à croire à la réalité d'une telle demande, d'autant plus que dans les entretiens qu'elle a eu l'honneur d'avoir avec ce Département rien ne pouvait le lui faire pressentir. Mais elle a dû se rendre à l'évidence lorsqu'elle a vu la dite demande soumise au greffe du tribunal d'Ilfov par les avocats du domaine, et su que ce tribunal avait fixé au 2 Mars pour se prononcer.

En présence de ce fait, la Légation Royale se voit dans la pénible nécessité d'appeler toute l'attention bienveillante de ce Département sur le contenu de la présente, bien convaincue qu'un nouvel examen de l'affaire ne pourra qu'amener la retraite ou le désistement de la dite demande.

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