Page images
PDF
EPUB

Arrêt du 7 juillet 1853 « Considérant que l'administration ne pouvait faire commencer les travaux sur les terrains compris dans le tracé du chemin projeté qu'après une cession amiable ou après l'accomplissement des formalités prescrites par l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836; que, dès lors, il appartenait à l'autorité judiciaire de prononcer sur la demande formée par le sieur Robin, de la Grimaudière, pour faire ordonner que les travaux commencés sur la propriété seraient discontinués jusqu'au règlement et au paiement de l'indemnité à laquelle il avait droit: -Art. 1. L'arrêté de conflit, pris par le préfet d'Ille-et-Vilaine, est annulé» (1).]

833. Lorsque, par une décision passée en force de chose jugée, les tribunaux ont ordonné la réintégration d'un propriétaire illégalement dépossédé, celui-ci, pour arriver à l'exécution de cette décision, peut au besoin requérir l'intervention de la justice, et, par suite de la force armée. Pour l'exécution des fortifications de Paris, l'administration de la guerre avait fait prononcer l'expropriation des terrains appartenant au sieur de SaintAlbin, et s'était mise en possession de ces terrains. Par arrêt du 5 juillet 1842, ce propriétaire fit casser la décision qui avait servi de base à cette prise de possession. Il voulut ensuite faire cesser les travaux et rentrer lui-même en possession de son terrain. Il s'adressa au président du tribunal de la Seine, qui, le 2 août 1842, rendit en référé l'ordonnance suivante: «< Disons que, dans les cinq jours de la signification de la présente ordonnance, le préfet de la Seine et le ministre de la guerre, chacun en ce qui le concerne, seront tenus de quitter les lieux; sinon, et faute par eux de ce faire dans ledit délai, et icelui passé, autorisons ledit sieur de Saint-Albin à se mettre en possession de ladite pièce de terre par toutes les voies de droit, et mème, en cas de résistance, à se faire assister du commissaire de police et de la force armée si besoin est; ce qui sera exécutoire par provision, nonobstant appel et sans y préjudicier, et sur minute, attendu l'urgence. » Cette décision a été confirmée par arrêt de la Cour royale de Paris du 26 juin 1843 (Gaz. des Trib., 3 août 1842 et 27 juin 1843) (2).

(1) Lebon, Rec., 1853, p. 693.

(2) V. Dufour, Traité de droit administratif, v, no 501, p. 498.

834.

CHAPITRE XI.

DES PROPRIÉTÉS MORCELÉES PAR LES TRAVAUX.

Disposition de la loi du 7 septembre 1807 sur les propriétés

morcelées.

835. Disposition de la loi du 7 juillet 1833.

836.
837.
838-839.

Disposition de la loi du 3 mai 1841.

Modifications introduites par cette dernière loi.

Regles applicables aux propriétés bâties et non bâties.

840. Des dépendances des propriétés bâties.

[ocr errors]

841-842.

843.

844.

845. 846.

847.

848.

849.

850.

851.

852.

[merged small][ocr errors][ocr errors][ocr errors][merged small]
[ocr errors]

Des bâtiments dont on prend une partie.

Du cas où la propriété appartient à une femme mariée.
Du cas où la propriété appartient à un mineur, interdit, etc.
Du cas où il y a un usufruitier.

Forme et délai de la réquisition, à fin d'acquisition de la tota-
lité d'une propriété morcelée.

Des difficultés qui s'élèvent sur l'exercice de ce droit.

- Le propriétaire ne peut rétracter sa réquisition.

Droits des localaires et autres tiers sur les parties de la propriété dont la cession n'était pas réclamée par l'utilité publique.

Le jury doit régler distinctement les indemnités vis-à-vis des propriétaires et locataires.

L'expropriation partielle entraîne-t-elle nécessairement la résiliation du bail?

Le locataire qui a reçu une indemnité peut-il conserver la chose louée avec diminution de loyers? Jurisprudence de la Cour de cassation.

853. Arrêt contraire de la Cour de Paris.

[blocks in formation]

855. Les diverses conditions du bail subsistent, malgré l'expropriation partie, tant que la résiliation n'est pas prononcée.

-

856. Des dommages causés, après le morcellement d'une propriété, par l'exécution des travaux, à la partie non expropriée. Compétence.

[blocks in formation]

Du cas où il y a chose jugée à cet égard par la décision du jury.

[ocr errors]

Du cas où les dommages ont été prévus lors de la décision du
jury. · Arrêt du Conseil d'Etat du 12 mai 1853.
Controverse sur la compétence.

Jurisprudence antérieure du Conseil d'Etat. Arrêts de la Cour de cassation.

834. Un propriétaire à qui on enlève une partie de sa propriété pourrait prétendre que cette partie est d'une telle importance, que, sans elle, la propriété lui devient inutile, et demander que l'Etat la prenne en entier. L'art. 1636, C. Nap., eût pu, jusqu'à un certain point, autoriser une pareille prétention; mais, pour éviter toute difficulté à cet égard, le législateur s'est prononcé sur ce point. Il n'est pas certain cependant qu'il soit parvenu à concilier tous les intérêts.

L'art. 51 de la loi du 16 septembre 1807 porte : « Les maisons et bâtiments dont il serait nécessaire de faire démolir et d'enlever une portion pour cause d'utilité publique légalement reconnue seront acquis en entier si le propriétaire l'exige, sauf à l'administration publique ou aux communes à revendre les portions de bâtiment ainsi acquises, et qui ne seront pas nécessaires pour l'exécution du plan. » On voit que cette disposition ne s'appliquait qu'aux propriétés bâties.

835. L'art. 50 de la loi du 7 juillet 1833 porte : « Les maisons et bâtiments dont il est nécessaire d'acquérir une portion pour cause d'utilité publique seront achetés en entier si les propriétaires le requièrent par une déclaration formelle adressée au magistrat directeur du jury, dans le délai énoncé en l'art. 24. Il en sera de même de toute parcelle de terrain qui, par suite du morcellement, se trouvera réduite au quart de la contenance totale, si toutefois le propriétaire ne possède aucun terrain immédiatement contigu, et si la parcelle ainsi réduite est inférieure à 10 ares. »

«Le § 1o de l'art. 40 (disait en 1832 M. le comte d'Argout, ministre du commerce) contient une disposition déjà consacrée par la loi du 16 septembre 1887, mais qui, dans le système de cette dernière loi, ne s'applique qu'aux maisons et bâtiments. Le § 2 l'étend aux terrains non bâtis, qui, par suite du morcellement, ne conserveraient plus qu'une surface étroite, et dont l'exploitation serait impossible, ou du moins onéreuse. L'Etat s'impose l'obligation d'acquérir ces faibles parcelles si le propriétaire le requiert, sauf à l'administration à les revendre plus tard, et à verser le produit de cette vente dans les caisses de l'Etat. Cette disposition est en vigueur en Angleterre; elle y est pratiquée avec succès, et rend plus facile un grand nombre de transactions » (Mon., 13 décembre 1832, p. 2137).

836. Dans le projet porté en 1840 à la Chambre des pairs, le Gouvernement proposait au § 1er de l'art. 50 des modifications qui ne furent point approuvées par la commission, et qu'il

abandonna ensuite. (Mon., 22 février 1840, p. 344; 11 avril, p. 679; 10 mai, p. 989.) Le Gouvernement demandait en outre que le § 2 de ce même article fût rédigé dans les termes suivants : « Il en sera de même de toute parcelle de terrain qui, par suite du morcellement, se trouvera réduite à moins de 10 ares, si toutefois le propriétaire ne possède aucun terrain contigu (Mon., 22 février 1840, p. 344). On lit dans le premier rapport de M. le comte Daru (Mon., 11 avril, p. 679): « Nous vous proposerons en conséquence la suppression du dernier paragraphe de l'art. 50 » ; mais il y a nécessairement erreur d'impression : car les motifs donnés par l'honorable rapporteur ne tendent nullement à la suppression de ce § 2, et l'on voit, p. 680, que la commission proposait l'adoption du § 2 avec la modification introduite par le Gouvernement, modification qui fut en effet votée par la Chambre sans discussion (Mon., 10 mai 1840, p. 990).

La Chambre des députés craignit, au contraire, de trop multiplier les cas où l'administration doit acheter des terrains qui ne lui sont pas nécessaires, et revint en conséquence au texte de la loi de 1833 pour ce § 2 (Mon., 5 mars 1841, p. 539).

M. Galis rappela à la Chambre des députés que le § 1o de l'art. 50 avait donné lieu à des difficultés qu'il importait de faire cesser, «Des propriétaires, a-t-il dit, ont prétendu que l'expression maisons comprenait les bâtiments d'habitation, cours et toutes leurs dépendances; d'autres ont pensé que par bâtiments, il fallait entendre tous bâtiments d'exploitation, de manière que l'expropriation d'un seul dût s'étendre nécessairement à la totalité des constructions. La jurisprudence n'a pas définitivement fixé le sens de cet article; mais les tribunaux paraissent s'arrèter à l'idée de n'appliquer la première de ces expressions qu'aux bâtiments d'habitation, et la seconde qu'aux bâtiments d'exploitation atteints par l'expropriation. Il me paraît évident que l'emploi simultané de ces deux mots dans l'art. 50 peut donner lieu à des interprétations erronées, car il est naturel de ne pas supposer l'expression maisons synonymes de celle bâtiments, et de lui attribuer le sens d'une collection d'objets composant l'ensemble de la propriété. Il conviendrait de rédiger ainsi l'article en discussion: « Chacun des bâtiments dont il sera nécessaire d'acquérir une portion pour cause d'utilité publiqne sera acheté en entier, etc. » (Mon., 5 mars 1851, p. 539).

M. Dufaure répondit que l'on pourrait mettre tout simplement les bâtiments. M. le duc de Marmier fit observer qu'il y a certain bâtiment dont l'existence est tellement liée à celle d'un

bâtiment qui n'est pas atteint, qu'il ne semble pas qu'on puisse les séparer dans l'expropriation. M. Galis répliqua : « La valeur de la portion expropriée sera fixée à raison du tort que l'expropriation d'une partie des dépendances aura pu causer à l'immeuble. Mais on ne peut exiger, dans les grandes villes surtout, où les bâtiments ont une grande importance, qu'on exproprie un immeuble entier pour une portion de cour ou pour un corps de bâtiment. » Après ces observations, la suppression du mot maisons, adoptée par la commission, le fut aussi par la Chambre (Ibid.).

En conséquence, l'art. 50 de la loi du 3 mai 1841 porte : « Les bâtiments dont il est nécessaire d'acquérir une portion « pour cause d'utilité publique seront achetés en entier, si les « propriétaires le requièrent par une déclaration formelle adres«sée au magistrat directeur du jury dans les délais énoncés « aux art. 24 et 27. Il en sera de même de toute parcelle de «< terrain qui, par suite du morcellement, se trouvera réduite « au quart de la contenance totale, si toutefois le propriétaire «< ne possède aucun terrain immédiatement contigu, et si la << parcelle ainsi réduite est inférieure à dix ares. » - (A)

837. On a vu que la loi du 7 juillet 1833 avait, relativement au morcellement, distingué les maisons et propriétés renfer<«<mant des constructions, et les terrains qui n'en contenaient pas. Mais, d'après la loi du 3 mai 1841, la disposition du § 2 de l'art. 50 forme la règle générale pour toutes les propriétés morcelées, qu'elles contiennent ou non des constructions, qu'on les nomme maison, ferme, parc, etc., ou champ, vigne, prairie. Le § 1er de ce même article établit seulement une extension à cette règle en obligeant l'administration, lorsque les travaux doivent entamer des bâtiments, à acquérir ces bâtiments en entier si le propriétaire l'exige, mais rien au delà de ces bâtiments, à moins que l'on ne rentre dans les cas prévus par le § 2 du même article. Ce nouveau système est beaucoup moins favorable aux propriétaires.

838. Les droits des propriétaires en cas de morcellement se

Additions.

(A) Le droit de requérir l'expropriation totale d'un terrain réduit au quart de sa contenance primitive n'est pas acquis au propriétaire, si l'emprise ne provient pas exclusivement du fait même de l'expropria

tion, mais est en partie le résultat d'une aliénation volontaire, par exemple, d'offres faites par l'expropriant et acceptées par l'exproprié. Trib. civ. Seine, 16 nov. 1865 (Gaz, trib, 7 déc. 65).

« PreviousContinue »