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850 francs, alors que les 1.800 alevins ne valaient que

80 francs. Il est à souhaiter que la pisciculture prenne en France le développement qu'elle comporte, surtout dans les régions favorables à l'élevage des salmonides. Il reste beaucoup à faire sous ce rapport.

Dans les Vosges, où les cours d'eau sont si nombreux, mais si souvent pollués par l'industrie, il est particulièrement utile d'améliorer la situation, de protéger et de multiplier le poisson partout où cela est possible. Le champ d'action est encore suffisamment vaste. Aussi conviendrait-il d'agrandir et de perfectionner l'établissement de Retournemer, de façon qu'il puisse répondre aux besoins de tout le département.

A cet effet, deux choses sont nécessaires. C'est d'abord l'amenée à Retournemer d'une plus grande quantité d'eau courante; le travail serait relativement peu dispendieux.

D'autre part, le concours de tous les agents forestiers de la région est indispensable. La période très délicate de l'incubation et de l'éclosion des œufs doit s'écouler de préférence en un lieu unique, à Retournemer, car elle nécessite une installation bien appropriée et un personnel exercé, tels qu'ils ne peuvent exister que dans un établissement permanent et spécial. Il convient au contraire que la récolte des œufs et l'élevage des alevins auprès des rivières soient effectués sur divers points, par des gardes nombreux, dont les connaissances en matière de pisciculture peuvent être très réduites. C'est de l'effort de tout le personnel forestier des Vosges que résultera le maximum d'effet de Retournemer avec le succès complet et définitif du repeuplement des rivières. Il est à croire que cette communauté d'action sera facilement obtenue, car la pisciculture constitue une agréable distraction aux occupations purement forestières. En général, les préposés s'y adonnent volontiers et s'y intéressent.

Qu'il me soit permis à cette occasion de signaler le zèle du personnel du cantonnement de Gérardmer qui, en dehors du service ordinaire, se livre avec tant d'ardeur et de patience à la pisciculture. Grâce au travail et au dévouement des préposés il a été possible de réaliser à très peu de frais, maintes améliorations que les crédits alloués auraient été trop faibles pour exécuter autrement.

Je crois bien même que le garde de Retournemer, le dévoué et fidèle Parmentier, aime encore mieux ses alevins que ses arbres. Qui lui en ferait un reproche? Les truites connaissent la main qui les nourrit. Il faudrait être cruel pour ne pas chérir leur familiarité.

JAUFFRET.

BIBLIOGRAPHIE FRANÇAISE

Commentaire de la loi forestière algérienne promulguée le 21 février 1903, par Ch. Guyot. In-8° de XV-356 pages. L. Laveur, éditeur. Prix 7 fr. 50.

La nouvelle loi forestière algérienne est peu connue en France : cela tient surtout à ce qu'elle n'a pas donné lieu à de longues discussions parlementaires; tant au Sénat qu'à la Chambre, elle a été votée sans débats. En revanche sa préparation a été très laborieuse dans les commissions, et c'est seulement après de nombreuses consultations et des études approfondies que l'entente a été enfin réalisée dans le but d'adapter le mieux possible la vieille loi métropolitaine aux conditions climatériques, sociales et politiques de notre grande colonie africaine.

En quoi consiste cette adaptation, quels peuvent en être les avantages et les dangers, c'est ce que M. Ch. Guyot, le savant directeur de l'Ecole forestière de Nancy, a entrepris d'exposer dans un commentaire où il met en parallèle, article par article, les deux législations. Ce qui ressort de ce travail, c'est d'abord que, malgré leur préoccupation plusieurs fois exprimée de faire une œuvre nouvelle, les auteurs de la loi algérienne n'ont pu se détacher, aussi complètement qu'ils l'avaient projeté peutêtre, de l'ancien code de 1827. Faut-il le regretter, et ne doit-on pas plutôt se féliciter de voir maintenus ces textes mis à l'épreuve depuis si longtemps et sur lesquels la jurisprudence est entièrement fixée? Quant aux parties absolument neuves de la loi algérienne, les droits d'usage, les locations de parcours, les mesures à prendre contre les incendies, etc., il faudra voir à la pratique quels résultats donnent ces dispositions que l'on ne peut critiquer de prime abord, dont l'introduction était peut-être nécessaire, mais dont les effets dépendront de l'esprit et de la mesure qui présideront à leur application.

M. Ch. Guyot a dédié son livre à nos camarades algériens, auxquels incombe la tâche difficile de mettre en pratique la législation nouvelle. Nous ajouterons que ce livre n'intéresse pas seulement les agents de l'administration coloniale et les propriétaires algériens: il présente le plus haut intérêt pour les forestiers de France et pour tous ceux que préoccupe cette question si grave et si délicate de faire vivre ensemble la forêt et le pâturage, question vitale dans un bon tiers de nos départements de la France continentale.

A. M.

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L'arbre, par J. Reynard, conservateur des Eaux et Forêts en retraite. In-8, 214 p., Clermont-Ferrand, imp. G. Mont-Louis. En vente chez l'auteur, rue des Hospices, 6, Clermont-Ferrand. Prix 2 fr.; franco par la poste, 2 fr. 50.

Après une longue carrière forestière, dont une bonne partie s'est écoulée en Algérie, M. Reynard consacre les loisirs de sa retraite à la défense des forêts. Connaissant par expérience personnelle leur indispensable nécessité dans notre colonie africaine, il a publié l'année dernière une série de causeries forestières dans le journal les Nouvelles d'Alger.

Ces articles viennent d'être réunis en un volume que son auteur dédie aux instituteurs et aux forestiers, espérant, dit-il, « qu'il aidera ces derniers à comprendre toute la grandeur et la noblesse de leurs fonctions et qu'il engagera les instituteurs qui le liront à faire de chacun de leurs élèves un ardent ami des arbres, remplissant dignement dans nos sociétés modernes un des premiers devoirs du citoyen. >>

L'ouvrage comprend trois parties : 1o Le culte de l'arbre; 20 l'arbre dans la nature et les sociétés; 3° le reboisement général de la France. M. Reynard fait surtout appel aux sentiments de solidarité qui doivent unir les membres de la société et les générations humaines se succédant les unes aux autres.

« Lorsque nos ancêtres, dit-il, nous lèguent un climat parfait, notre premier devoir est de le transmettre sans altération à nos enfants. Mais, s'il a été détérioré par des déboisements exagérés, nous ne sommes pas libérés de la dette sociale avant de l'avoir rétabli par une reforestation appropriée. Chacun de nous doit à la société la réparation de nos propres fautes ou de celles de nos pères, de même que nos enfants en restent responsables, d'après la loi de solidarité qui lie toutes les générations humaines.

« Dans la grande 'division du travail social, la fonction du forestier est donc une des plus nobles et des plus importantes. >>

Pour assurer la conservation des forêts, il voudrait qu'elles furent nationalisées. Par nationalisation, il entend « la possession du sol des forêts d'utilité publique par un propriétaire perpétuel : l'Etat, la commune ou toute association à durée illimitée, dont chaque membre conserve sa liberté d'homme et de citoyen » Les forêts nationalisées seraient soumises à un régime analogue à celui qui est appliqué aux forêts domaniales.

En ajoutant aux 9 millions et demi d'hectares boisés qui existent en France 6 millions de terres incultes que l'Etat devait acquérir et repeu

pler, on porterait la surface de nos forêts à 15 à 16 millions d'hectares.

Il serait certainement à désirer que ce projet grandiose pût être mis à exécution, car il assurerait nos approvisionnements en bois d'œuvre, nous délivrerait du lourd tribut que nous payons chaque année à l'étranger et nous permettrait même d'être exportateurs de bois.

Mais nous ne pensons pas qu'il ait, avant longtemps, quelque chance d'être adopté.

Il exigerait des dépenses considérables pour un profit certain, il est vrai, mais dont la réalisation ne serait obtenue que dans un avenir lointain. En outre, il est en opposition formelle avec les idées et les préjugés actuels qui admettraient difficilement l'établissement d'un régime qui, sous le nom nationalisation, serait peu différent de celui de la mainmorte avec jouissance sous le contrôle de l'Etat.

Cependant, le jour où l'on voudra fermement que la France produise les bois d'œuvre nécessaires à sa consommation, il faudra s'efforcer de multiplier les surfaces forestières appartenant à des propriétaires perpétuels Etat, Communes, Hospices, Compagnies de chemins de fer, sociétés houillères, associations de toute nature.

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Pendant sa vie, qui doit durer 120 à 150 ans, un chêne situé dans un bois particulier change au minimum quatre fois de propriétaire. Il court donc, quatre fois au moins, le risque d'être réalisé avant d'avoir acquis le maximum d'utilité réclamé par l'intérêt général. Presque toujours il arrivera que l'un des propriétaires successifs sera prodigue, besogneux ou désirera monnayer son capital ligneux pour acquérir d'autres pro priétés ou des valeurs industrielles. La forêt passera alors dans les mains de spéculateurs qui s'empresseront de la raser. C'est ce qu'on voit à chaque instant; aussi peut-on constater que les gros chênes sont très rares dans les bois particuliers.

On doit donc souhaiter que la répulsion qu'inspire en France le mot main morte vienne à s'atténuer. On comprend à la rigueur qu'aux époques où toute richesse consistait dans la possession de la terre, on ait craint de voir accaparer celle-ci par un nombre restreint de propriétaires. Mais la fortune mobilière et industrielle s'est tellement développée depuis un siècle que la terre ne constitue maintenant que la moindre partie de la richesse nationale et les forêts elles-mêmes ne forment qu'une faible fraction de la valeur du territoire.

L'extension de la main-morte aux propriétés forestières n'aurait donc aucun danger social et par contre présenterait un immense avantage économique, puisqu'elle donnerait le moyen de produire en abondance les bois d'œuvre dont l'industrie moderne ne peut se passer.

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Ce serait, selon nous, faire preuve d'une singulière étroitesse d'esprit que d'écarter a priori les idées développées avec tant de conviction par M. Reynard. De ce qu'elles ne sont pas immédiatement réalisables, de ce qu'elles ne concordent pas avec la situation financière ou l'opinion inal éclairée de l'heure présente, et il ne s'en suit pas qu'on doive les qualifier de chimériques. L'extension du domaine boisé de l'Etat, la constitution de nombreuses forêts d'associations s'imposeront tôt ou tard en France comme chez les autres nations.

Quand les grandes réserves forestières dans lesquelles on s'est approvisionné pendant tout le xIx° siècle seront épuisées, tout pays ne produisant pas sur son territoire les bois dont il a besoin sera dans un état d'infériorité manifeste vis-à-vis de ses concurrents. N'attendons pas trop longtemps pour mettre la France à même de garder un rang honorable dans les luttes industrielles de l'avenir.

Notice sur le sapin de Numidie. Fructification, jeune plant, bois; par M. P. Fliche, ancien professeur à l'Ecole nationale forestière de Nancy. In-8, 12 pages. Besançon, imp. Jacquin.

L'Algérie possède un représentant du genre Abies dans lequel on crut, pendant longtemps, voir une variété de l'Abies pinsapo répandu en Espagne dans les parties élevées de l'Andalousie.

M. Fliche estime que cette assimilation reposait sur des données inexactes. Des semis effectués, en 1897, avec des graines de provenance certaine, lui ont permis d'étudier, tant à la pépinière de Bellefontaine qu'au jardin et à l'arboretum de l'Ecole forestière, le développement des jeunes plants de l'essence algérienne. Il conclut de ses observations qu'il s'agit d'une espèce nettement caractérisée (Abies numidica, Laun), bien différente de l'Abies pinsapo et qui se rapprocherait plutôt de l'Abies cilicica qui croît dans la chaîne du Taurus, en Asie Mineure.

Le bois de l'Abies numidica ressemble beaucoup à celui du Sapin pectiné. Il n'est pas très homogène; ses couches varient notablement d'épaisseur. Cela tient sans doute à l'irrégularité du climat algérien, où des périodes de sécheresse succèdent à des années humides. Les mêmes différences dans l'épaisseur des couches se constatent dans le bois du Cèdre de l'Atlas.

L'Abies numidica n'a pas paru, jusqu'à présent, souffrir du climat assez froid des environs de Nancy.

Les observations si minutieuses de M. Fliche tranchent définitivement la question en faveur de l'admission du sapin d'Algérie au rang des espèces. Quand l'exploration forestière du Maroc aura été faite scienti

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