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Le jugement du tribunal de police correctionnelle accuellit cette défense.

Ce jugement fut confirmé sur l'appel, par la Cour de justice criminelle du département du Morbihan.

Sur le pourvoi de l'Administration forestière et de M. le procureur-général impérial contre cet arrêt, la Cour de Cassation a pensé que, dans aucun cas et sous aucun prétexte, un adjudicataire n'a le droit d'abattre des arbres dont l'empreinte seule du marteau constitue la réserve la plus expresse; que les clauses quelconques d'une adjudication ne peuvent autoriser un sembable abus de jouissance; qu'un pareil délit doit être réprimé, ou comme le fruit d'une malveillance inexcusable, ou comme celui d'une erreur dont il est facile de se garantir, en recourant soit à l'Administration forestière, soit aux Agens de de la marine, pour connoître les motifs qui ont pu faire marquer des arbres dont la réserve n'est point indiquée dans le procès-verbal d'adjudication.

C'est d'après ces motifs et ce principe que l'annulation de l'arrêt attaqué a été prononcée dans l'arrêt

suivant :

« Ouï M. Guieu et M. Giraud, pour M. le procureur-général impérial;

« Vu l'article 456 du Code des délits et des peines, » du 3 brumaire an IV, §. 1. et 6, conçus en ces termes: « Le tribunal, etc.

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« Vu les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 du titre 21 << de l'ordonnance de 1669, relatifs au martelage des « arbres de réserve.

«< L'arrêt du Conseil, du 23 juillet 1748, conçu

en ces termes :

Sa Majesté ayant reconnu, par le compte.

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qu'elle s'est fait rendre des dispositions des différens articles contenus dans l'ordon«nance de 1669, et de celle portée par l'arrét « du 21 septembre 1700, qu'il n'y est infligé «< aucune peine, contre ceux qui se trouvoient « convaincus d'avoir abattu ou fait couper des « arbres que le bien du service de la marine a << fait marquer, Sa Majesté fait très-expresses "inhibitions et défenses aux communautés ecclé

siastiques, séculières, régulières et laïques, et « mémé aux particuliers propriétaires de bois, « de quelque qualité et condition qu'ils soient «de faire abattre à l'avenir, sur quelque pré«< texte que ce soit, aucun des arbres futaies « ou épars et baliveaux sur taillis, qui avoient été marqués du marteau de la marine, à peine de « confiscation desdits arbres et baliveaux, et de plus grandes peines en cas de récidive.

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« Vu la loi du 4 octobre 1793;

« La loi du g floréal an XI, et l'article 15 de l'ar9 rêté du gouvernement, du 28 floréal an XI, conçu

en ces termes :

« Tous les arbres qui sont marqués pour le « service de la marine, ne pourront être dis« traits, etc.

« Attendu qu'il résulte des pièces de la cause et « de l'arrêt attaqué: 1°. que les arbres de réserve « pour la marine avoient été marqués du marteau impérial dans la forêt des Camors et dans le «< canton, no. 16.

Que ces arbres existoient dans le canton no. 16 « lors de l'adjudication qui en fut faite à Honoré« Armand Guay, et de sa mise en possession.

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«cet adjudicataire sans le concours et l'assentiment « des Agens de la marine et de l'Administration «< forestière;

« Attendu qu'il est établi, par toutes les lois, que << la seule empreinte du marteau impérial constitue « la réserve la plus expresse des arbres sur lesquels « elle est apposée.

« Que le défaut de mention de cette réserve dans « les clauses de l'adjudication ne peut détruire le «< fait matériel et visible du martelage, lequel doit << suffire pour interdire à tout individu, même aux « adjudicataires des ventes, l'abattement et l'enlève<< ment des arbres ainsi marqués et réservés.

« Qu'en supposant que le silence du procès-verbal «< d'adjudication, sur la réserve des bois marqués « pour la marine pût, dans l'espèce, donner lieu « de la part de l'adjudicataire, à des doutes sur l'in«tention des agens de la marine, il étoit du devoir « de cet adjudicataire de ne point en disposer sans << recourir préalablement à l'autorité, à l'effet de << savoir si ces arbres avoient été abandonnés, et si « leur martelage étoit le fruit d'une erreur.

«Que la recherche de ces éclaircissemens et la « demande d'une autorisation formelle étoit d'autant «<plus nécessaire, que l'arrêt du Conseil de 1748 << n'admet aucun prétexte pour excuser l'abattement « des arbres marqués, et que l'arrêté de 28 floréal «an XI, fait de la seule apposition du marteau im<< périal, la base d'une prohibition absolue générale, « et qui n'est susceptible d'aucune exception.

«Que d'après ces principes, la conduite d'Honoré« Armand Guay n'a pu être excusable; qu'elle avoit << tous les caractères d'un délit volontaire, ou d'un abus & de jouissance dans une exploitation qui n'étoit pas

<< seulement limitée par les clauses particulières de « l'enchère, mais qui l'étoit encore par les lois géné«rales de la marine, dont il n'est permis ni de pré<< texter l'ignorance, ni de supposer la dérogation, « si cette dérogation ne résulte point d'un acte exprès de l'autorité compétente.

<«< D'où il suit qu'en mettant ledit Guay hors de «< cause, et en ne prononçant point, à raison du dé«lit dont il étoit prévenu, les peines portées par « l'arrêt du Conseil du 23 juillet 1748, et par l'ar« rêté du 28 floréal an XI, la Cour de justice crimi<< nelle du département du Morbihan a commis un « excès de pouvoir et violé toutes les lois précitées. : La cour casse et annule l'arrêt de ladite Cour « de justice criminelle du département du Mor«bihan, sous la date du 4 décembre 1807, etc.

(Enlèvement de Feuilles mortes dans les forêts). Peines à infliger.

L'ordonnance de 1669, ne défend pas textuellement l'enlèvement des feuilles mortes, mais par cela même qu'elle ne l'autorise pas, elle le prohibe véritablement, comme action préjudiciable aux forêts, dont ce règlement a voulu la conservation; or, on ne sauroit disconvenir que les feuilles ne soient l'engrais naturel des forêts réléguées presque partout sur des montagnes escarpées, sur des terrains secs et arides qui se refusent à tout autre genre de production, et où elles ne reçoivent d'amendement, que de leurs propres dépouilles (les feuilles mortes); s'il étoit permis de leur enlever ce moyen de restauration bientôt la couche de terre végétale dépériroit entièrement, et le sol des forêts seroit frappé de stérilité.

D'un autre côté, les semences destinées à renouveler et à perpétuer les forêts, ne peuvent germer que sous les feuilles mortes ces feuilles sont le voile dont la nature se sert pour dérober une partie des semences à la voracité des oiseaux, ou des animaux qui s'en nourissent; les feuilles sont le manteau dont la nature se sert en hiver, pour préserver les semences contre les fortes gelées qui les détruiroient; les feuilles sont la couverture sous laquelle la nature développe les germes au printemps, sous laquelle elle les garantit en été des chaleurs qui dessécheroient leurs foibles racines, durciroient la surface de la terre, et les empêcheroient de la pénétrer enfin il est sensible, que sans le secours des feuilles mortes, la nature ne peut opérer la reproduction des forêts.

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L'arrachis des plans, l'une des graines des herbages, a été justement défendu comme nuisible au recru, comme appauvrissant le sol forestier, la même idée attribuée à l'enlèvement des feuilles mortes suffisoit pour qu'il fût compris dans la même prohibition.

C'est dans cet esprit, que la Cour de cassation a rendu le 3 septembre 1807, les trois arrêts que nous allons rapporter en entier.

Ier. ARRET.

Un rapport de deux gardes forestiers, du premier avril 1807, ayant constaté que quatre femmes ramassoient des feuilles dans la forêt de Blois, et les transportoient à l'aide d'ânes, ces femmes et leur maris ont été cités au tribunal de police correctionnelle, qui a renvoyé de l'action, les prévenus, avec dépens.

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