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On voit dans quelques coupes, des troncs coupés à deux, trois, et quatre pieds de terre. Certes, ce n'étoit point le vœu de l'ordonnance, qui prescrit positivement de couper les souches, le plus près de de terre que faire se peut.

par

Nous convenons qu'elle n'admet pas le mode d'exploitation qui soit, physiquement parlant, le plus avantageux pour les futaies en massif, c'est-à-dire celui par éclaircies à des époques successives, et tel qu'il est si bien décrit dans l'instruction sur la culture des bois M. Hartig. Mais ce mode tout avantageux qu'il est pour ceux qui exploitent par eux-mêmes n'est-il pas sans inconvénient pour l'administration, et peut-on l'appliquer en grand dans nos forêts, où l'on a tant de peine à prévenir, ou à vérifier les abus dans les exploitations? On pouvoit le tenter, et on l'a fait pour quelques portions de bois, mais il seroit peut-être dangereux d'en faire usage dans de grandes étendues des forêts, et sous des agens des talens desquels on ne seroit pas assuré.

que

Revenons à l'ouvrage de M. Fanon. Il y est dit la méthode des futaies sur taillis, est sans contrela meilleure, et la plus productive. L'auteur devoit faire une distinction, et ne pas proscrire ainsi les futaies en massif, sur toute espèce de terrains. Car il est prouvé qu'il y a de l'avantage à former des futaies pleines sur les bons terrains, et qu'il faut au contraire exploiter en taillis, les bois situés sur des fonds médiocres, ou de mauvaise qualité. D'après les expériences faites par l'auteur allemand que nous venons de citer un arpent de futaie, essence de hêtre, en bon terrain et bien conduit peut, dans l'espace de 120 ans, procurer un produit en nature, et en argent, presque double de celui d'un arpent de taillis. Joignons à cela l'avantage d'avoir du fort bois de

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construction, et d'excellens bois de chauffage. On ne peut donc partager l'opinion de l'auteur, et proscrire, comme il le fait, les futaies en massif, dans tous les endroits indistinctement.

Il indique ensuite les terrains qui conviennent aux différentes espèces de bois, et l'inconvénient qu'il y a de planter les arbres à racines pivotantes dans un sol qui manque de profondeur, et il trouve la preuve de cet inconvénient dans les plantations exécutées par M. Pannellier d'Annel, dans la forêt de Compiegne. Il n'est pas de l'avis de cet économiste, qui, vouloit que les taillis ne fussent pas coupés avant 20 ans, ni après 40 ans. « L'expérience, dit M. Fanon, démontre «qu'il y a des terrains, où passé 10 à 12 ans, le bois << cesse de croître, et que si on attendoit au terme de "20 ans, non-seulement le produit de 8 années seroit

en pure perte pour le propriétaire, mais que le « taillis dépériroit, et cela parce que le terrain en << est si pauvre, qu'il ne peut fournir de substance «à un plus grand volume que celui auquel les tro«<chées sont parvenues à cette époque. »>

Tout ce que dit l'auteur, relativement à l'inconvénient de planter les arbres à racines pivotantes dans les terrains sans profondeur, et d'y réserver des futaies, est exact, et l'ordonnance elle-même prescrit de faire les quarts de réserve dans les meilleurs fonds et lieux plus commodes. Mais si son opinion sur la nécessité de couper les taillis à 10 ou 12 ans dans les mauvais terrains, semble juste pour les bois des particuliers, elle seroit dangereuse pour les bois des communes; l'expérience ayant démontré qu'à cet âge les baliveaux sont trop foibles, résistent difficilement à l'effort des vents et du givre, et ne peuvent, par la suite, fournir de belles pièces de service; c'est par cette rais

que tous les règlemens portérieurs à l'ordonnance ont défendu d'exploiter les taillis des ecclésiastiques et des communautés, avant 25 ans.

Plus loin, il combat l'opinion de M. de Buffon qui dit, dans sa partie expérimentale relative au bois, qu'il faut bien se garder de planter le chêne avec le hêtre, parce qu'ils ussent tous deux de grosses racines dans la profondeur du sol. Mais tout le monde a reconnu l'erreur où étoit tombé ce grand homme, et l'on sait que le hêtre et le chêne s'accordent très-bien ensemble, parce que le hêtre enfonce moins ses racines que le chêne, et qu'il trouve à la surface du sol les sucs que l'autre va chercher dans sa profondeur.

Après avoir parlé du mélange qu'il est avantageux de faire des arbres dans les plantations, il dit que pour les plus mauvais terrains, tels que les sables purs, dont la superficie n'offre que très-peu de matière végétale, l'expérience n'a fourni jusqu'à présent que bouleau qui y réussisse assez bien.

le

Le catalogue des arbres qui, d'après M. Fanon réussissent dans les mauvais fonds sableux, est bien court, il nous semble qu'il auroit pu y ajouter le Robinier qui vient si bien dans les mauvais sables, comme on peut s'en convaincre au bois de Boulogne; Le Pin sauvage qui vient partout; le Pin maritime que l'on cultive avec succès dans les sables des bords de la mer; le Genévrier commun, qui croît dans les lieux sableux, incultes, arides, secs, pierreux, sur les collines et les montagnes; le Châtaignier qui réussit dans les terres légères, dans les lieux secs et stériles, sur les rochers, les pierrailles, et les sols sablonneux; les Peupliers d'Italie et de la Caroline, qui se contentent d'un terrain sablonneux et humide; les différentes sortes d'Erables, commun, plane, et Sycomore, qui toutes trois sont peu délicates sur

la nature du terrain, et sont très-propres, surtout les deux dernières, à former des plantations près de la mer; le Mahaleb, ou bois de Ste. Lucie, et le Saule Marceau, qui ne connoissent pas de mauvais terrains, et qui viennent très-bien dans les craies de la Champagne; enfin plusieurs autres arbres et arbrisseaux que l'on multiplie avec succès dans les dunes, les landes, et tous les endroits dont le sol n'est qu'un sable pur, légèrement recouvert d'un peu de terre végétale.

L'auteur avoue cependant que le Peuplier d'Italie a réussi prês de Villers-Cotterets, dans un sable blanc et coulant, qui n'étoit formé que des détrimens et des scories les plus fines des grès dont le terrain est rempli, et sur lequel on ne trouve que quelques touffes de bruyères; mais il pense que si on vouloit meubler de semblables terrains, il ne faudroit le faire que dans les parties les plus unies et les plus basses, parce que ce sable que les vents dispersent dans les grandes sécheresses, laisseroit à decouvert les racines de ceux qui se trouveroient plantés sur les terrains en pente.

Cette opinion fait voir qu'il ignore l'art de fixer les sables, et de les rendre propres à la culture du bois. Il n'eût pas eu la crainte qu'il manifeste sur la mobilité des sables, et la dénudation des racines des arbres dans les pentes sablonneuses, s'il eut eu connoissance des moyens qu'on employe pour raffermir ces sols mouvans. On doit l'engager à les lire, dans le mémoire de M. Brémontier ingénieur en chef des ponts et chaussées, sur les dunes de Bordeaux, et dans les ouvrages de MM. Hartig et Burgsdorff. Il verra qu'on peut, quoique difficilement il est vrai, fixer les sables, soit en les recouvrant avec des branches d'arbres, soit en les arrêtant par des haies ou des clayonnages, et en y plantant des boutures des peupliers d'Italie et de la Caroline. On les fixe encore dans les départemens du

nord, au moyen de plantation en Oyat (espèce Festuca,) et dans ceux du midi, en employant le Tamarisc d'Elimus. Quand les sables sont fixés, n'importe par quel moyen, on y sème du Pin sauvage, du Pin maritime, ou du Bouleau.

On pourroit relever encore plusieurs endroits de l'ouvrage où l'auteur n'a pas donné des preuves de connoissances bien étendues, sur l'économie forestière. Il prétend par exemple, qu'il n'y a que le Chêne et le Hètre qui se sèment sur place, et que tous les autres arbres doivent être en pépinière pour en lever le plant, après la seconde année. D'après cela, le Bouleau, le Charme, le Châtaignier, les Erables, l'Acacia; toutes les sortes de Pins et de Sapins, ne pourroient être semés sur place. Le contraire est trop évident pour le démontrer.

Comme M. Fanon ne suit aucun ordre dans ses dissertations, et que d'un paragraphe à l'autre, il passe brusquement à une question différente de celle qui précède, et sans nulle liaison avec elle, il revient encore au systême des futaies en massif, et rapporte à ce sujet l'opinion de M. de Buffon sur l'or donnance de 1669, en disant en disant que ce grand observateur ne paroît pas avoir été à portée de remarquer l'altération des bois, causée par une trop longue attente; que cependant il a pensé que cela devoit nécessairement arriver, puisque M. de Buffon dit: « que la plus *sage des ordonnances, est celle qui établit la réserve << dans les bois des écclésiastiques, et gens de main<< morte, que nous devons souhaiter qu'on ne se << relâche point à cet égard, que ces réserves sont un << bien réel pour l'état, qu'elles ne sont point sujettes à << l'inconvénient des baliveaux, et qu'on en auroit <<< mieux senti les avantages, si le crédit plutôt que le « besoin, n'en eût pas disposé, qu'on préviendroit ces

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