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Mort

miffion

youre des foldats qui la compofoient, elle fut battue; fon ancien Général n'étant plus à fa tête pour la diriger. Les vaincus fe rallièrent, & on les battit de nouveau, quelques-uns difent trois différentes fois, fans ceffer de les pourfuivre jufqu'à Yunnan-fou. (34) Cette Place étoit extraordinairement forte. Tout ce qui étoit du fils d'Oufarefté de bons foldats des deux ou kouei trois actions précédentes, s'y étoit & fourefugié; & l'ombre d'Oufankouei de Yunfembloit encore les animer dans nanfou. la perfonne de fon fils, déterminé à périr plutôt que de s'écarter des vues de fon pere, en traitant avec les Mancheoux. La réfiftance fut par conféquent vigoureuse & longue mais le jeune Prince prévoyant qu'au bout d'un certain temps la Ville feroit forcée ou réduite à capituler, crut devoir fe mettre en état de ne pas tomber vif au pouvoir de fes ennemis. Il

(34) Yunnan-fou, Capitale du Yunnan, fur un grand lac qui porte le nom de mer,

eft au 25 d. 6 m. de
latitude; & au 120 d.
39 m. 40 f. de longi
tude.

fe retira un matin dans l'intérieur de fon appartement, & s'y pendit en défefpéré.

La mort du Prince abbattit le courage des affiégés. Yunnan-fou ne tarda pas à ouvrir fes portes; & le Général Tartare, que cette foumiffion volontaire furprit agréablement, ne fit éclater fa vengeance que contre Oufankouei & fa famille. Tous ceux qui en étoient furent arrêtés & conduits à Pekin, avec les os de ce grand homme que la Cour fit exhumer. On les broya dans un mortier, & on en jetta la pouffière au vent. Quant aux prifonniers parens, alliés, & autres amis particuliers du feu Prince de Yunnan, le Tribunal des crimes, les condamna à mort, & ils furent tous étranglés. Le Yunnan & le Koueitcheou furent en même temps réduits en Provinces, fous le gouvernement de deux Vicerois & d'un Tfongtou.

Bientôt le Foukien eut le même fort. Le Prince qui y dominoit n'avoit donné à la vérité aucun

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Le

Prince

de Fou-

né à la

kien eft

vince.

figne de révolte depuis le pardon qu'il avoit reçu de l'Empereur : mais fa conduite n'en étoit pas kien eft moins blâmable. Hautain, mé- codamchant, & d'un affez petit génie, mort, & ainfi que nous l'avons déjà obfer- le Fouvé, il ne pouvoit que fe montrer réduit dur & fouvent cruel envers fes en Profujets. L'adverfité qui épure & perfectionne les grandes ames, en découvrant au public ce qu'elles valent, fait une impreffion toute contraire fur les petits efprits, & fur les cœurs lâches: elle les rend au moins foupçonneux & vindicatifs à l'excès. C'est l'état où fe trouvoit le Prince de Foukien. Ne pouvant décharger fa mauvaise humeur fur les Tartares, il s'en prenoit lâchement à fes Chinois. Ce n'étoit que véxations de fa part, ou fentences de mort contre les riches, dont la dépouille rempliffoit fes coffres.

Le cri de tant de violences parvint à la fin jufqu'au thrône. Kanghi en fut outré, & dans le premier mouvement de fon indigna

Con

de l''fle

van.

tion il donna ordre d'arrêter ce Tyran avec fa famille. On les traduifit à Pekin, où leur procès fut expédié en fort peu de temps. Le Prince & tous les complices de fa cruauté fe virent punis du dernier fupplice, & le Foukien redevint ce qu'il étoit auparavant, une fimple Province Chinoife.

Il ne reftoit plus que le Souvequête rain de Tayvan à foumettre, pour de Tay- confommer le grand ouvrage de la conquête entière de la Chine. L'Empereur en forma le deffein au commencement de 1681; & la première chofe qu'il fit pour l'exécuter fûrement, fut de nommer Viceroi du Foukien un habile homme, qui entrât parfaitement dans fes vues, & qui fût en état de les fuivre. Le grand Mandarin Yao parut tel au Monarque, & fon choix fe trouva jufte, comme on va le voir.

Dès que le nouveau Viceroi fut arrivé dans fa Province, il mit tout en œuvre pour s'attirer l'affection des peuples. Sa politeffe

envers les Grands, fes attentions pour les petits, fa douceur à l'égard de tous, une vigilance foutenue, & de la générofité même autant qu'un Chinois peut en avoir, le firent bientôt adorer dans le Foukien. Les foins en particulier qu'il fe donna pour relever la marine, lui procurèrent une flotte auffi nombreufe que les circonftances pouvoient le permettre, & que fon projet fur Tayvan fembloit l'exiger.

Ces mefures ainfi prifes, Yao fit répandre de tous côtés un écrit figné de fa main, par lequel il promettoit au nom de l'Empereur une amniftie ample & fans exclufion de perfonne, à tous les Chinois. refugiés en divers lieux, avec les mêmes avantages à peu-pres, rang, prérogatives, honneurs, qu'ils avoient dans leur afyle; s'ils fe rendoient au temps marqué dans le Foukién.

La réputation du fage Mandarin fervant, pour ainfi dire, de garant à fes promeffes, elles firent

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