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répartition doit être faite dans les proportions prescrites par les articles 401 et 417 du Code de commerce;

« Attendu qu'aux termes de l'article 423 du même Code, le jet ne donne lieu à la contribution que s'il a sauvé le navire; que le navire doit être réputé sauvé, du moins au respect des obligations que les chargeurs contractent, lorsque, par le sacrifice volontairement fait d'une partie de sa substance, il a pu continuer sa course et opérer le salut de la marchandise qui lui était confiée;

« Attendu que si, en matière d'assurance, l'innavigabilité est assimilée à la perte du navire, cette disposition, spéciale à ce genre de contrat, où le navire est considéré en lui-même, abstraction faite de son chargement, ne saurail être étendue au navire envisagé comme moyen de transport, comme véhicule des effets chargés à son bord; que si, dans le premier cas, le navire, devenu innavigable par la fortune qu'il a subie, est réputé perdu, c'est qu'en réalité il ne peut plus remplir sa fonction, au moins d'une manière efficace;

« Qu'il en est autrement lorsque, même réduit à l'état d'innavigabilité, il a pu opérer le salut de la marchandise chargée à son bord;

« Que, dans ce cas, le navire qui, au regard des chargeurs, n'avait d'autre destination que de transporter les espèces chargées, a pleinement rempli sa fonction, du moment où il a pu attérir dans un port où le propriétaire a pu les recueillir;

«Que s'il est constant que, sans le sacrifice qu'il a volontairement opéré, le navire eût péri avec les valeurs qu'il

portait, et si, par suite du sacrifice, il a pu tenir la mer et aborder un port de salut, on peut dire que le jet a été efficace, qu'il a sauvé le navire, puisqu'il lui a permis d'accomplir sa destination; que peu importe, en effet, au chargeur qui reçoit sa marchandise, qu'elle lui parvienne sur un navire en possession de toutes ses facultés ou sur la coque d'un navire désemparé;

« Attendu que l'article 425 du Code de commerce, qui dispose dans sa seconde partie que les marchandises ne contribuent point au paiement du navire perdu ou réduit à l'état d'innavigabilité, ne renferme pas une règle générale, mais une disposition spéciale édictée en vue des cas prévus par l'article 424, c'est-à-dire, dans l'hypothèse où le navire sauvé par le jet vient à périr en continuant sa route; que cette seconde fortune de mer, indépendante de la première, n'est plus qu'une avarie particulière qui tombe à la charge du propriétaire du navire; que les dispositions de cet article sont donc sans application dans l'espèce actuelle ;

« Attendu que l'arrêt attaqué a fait une juste application de ces principes, puisqu'il a décidé, d'une part, que les espèces sauvées ne contribueraient au jet que d'après la valeur au lieu du déchargement, c'est-à-dire, en tenant compte du change, et, de l'autre, que la contribution aurait lieu non pour la perte résultant de l'innavigabilité du navire, mais de celle occasionnée par le jet et le sacrifice volontairement fait pour le salut commun; qu'en le jugeant ainsi, l'arrêt de la Cour impériale de Bordeaux, loin d'avoir violé ou faussement appliqué les articles précités, en a fait à la cause une juste application; Rejette. »

66. Nous avons déjà dit que si les marchandises de l'assuré étant sauvées, leur valeur était supérieure au connaissement, l'assureur ne paiera que ce qu'il aurait dû si la valeur réelle eût été la même que celle du connaissement dans aucun cas, en effet, l'assuré ne peut profiter de sa fraude. (Art. 418 du Code de comm.)

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67. Le feu résultant de la force majeure est à la charge de l'assureur; 68. Le capitaine doit prouver qu'il n'a pu éviter le fait qui a donné lieu à l'incendie, dans le cas de capture imminente par exemple; 69. Hors des cas ci-dessus le capitaine doit-il, pour s'exonérer de toute responsabilité, démontrer la cause du feu?

67. En dehors des accidents que nous avons énumérés plus haut et qui sont occasionnés le plus souvent par la tempête, il en est d'autres qui peuvent être à la charge de l'assureur, tels que le feu.

Ainsi l'on doit réputer force majeure à la charge de l'assureur le cas où le uavire a été incendié par ordre de l'autorité (1).

La loi des 3 9 mars 1822 permet de détruire, même par le feu, les objets ou animaux susceptibles de transmettre la contagion.

L'article 5 de la loi précitée porte:

(1) Locré sur l'art. 350; Boulay-Paty, t. III, p. 22.

<< En cas d'impossibilité de purifier, de conserver ou de transporter sans danger des animaux ou des objets matériels, susceptibles de transmettre la contagion, ils pourront être, sans obligation d'en rembourser la valeur, les animaux tués ou enfouis, les objets matériels brûlés ou détruits. Si le capitaine met lui-même le feu au navire pour éviter la capture, la perte doit encore être réparée par l'assureur, qui ne peut se plaindre puisque la capture lui eût causé le même préjudice» (1).

Dans ces cas divers l'assureur est responsable, mais il peut exercer un recours contre le capitaine, s'il est constant et prouvé que celui-ci aurait pu empêcher la contagion ou tout autre accident qui a nécessité l'incendie du navire.

68. On a dit que l'assureur ne serait pas admis à établir, dans le cas de prise, que le capitaine pouvait éviter d'être pris, que la prise devait alors être réputée inévitable (2). Nous avons combattu cette doctrine.

Une telle opinion est, en effet, trop absolue; le capitaine doit évidemment toujours établir qu'il n'a pu agir autrement qu'il a fait. Si donc l'incendie provient de la crainte d'une prise imminente, le capitaine doit prouver qu'il ne pouvait échapper à la prise; il devrait même établir qu'il n'avait aucune chance d'espérer un rachat favorable.

69. Le fait de l'incendie du navire, par une cause incon

(1) Valin, sur l'art. 26, tit. des Assurances; Pothier, no 53; Favard, vo Assurances, § 2, no 3.

(2) Delvincourt, 2-381; Dageville, 3-264.

nuc, est-il à la charge de l'assureur? C'est là une question grave à examiner.

Suivant certains auteurs, tout sinistre de mer doit être réputé fatal, c'est-à-dire indépendant du fait de l'homme, et ainsi ne pas tomber sous l'application des articles 352 et 353 du Code de commerce; les preuves que le capitaine doit faire ne sont régies, dit-on, que par les articles 383 du même Code.

D'après l'avis de quelques autres, au contraire, on distingue entre les faits que l'on appelle intérieurs et ceux qui ont reçu le nom de faits extérieurs : ces derniers sont la tempête, l'abordage sans faute, l'échouement, etc.

Généralement dans ce cas, le sinistre est réputé fatal, le rapport du capitaine fait foi jusqu'à preuve contraire; mais s'il s'agit d'un fait intérieur, la présomption du vice propre, l'incendie, par exemple, l'événement prend un autre caractère; le capitaine doit prouver que le sinistre est indépen dant de lui. En matière d'incendie sur mer, on a compris que le capitaine était tellement maître de l'existence du navire, qu'il devait être astreint à démontrer la cause du feu, afin que l'absence de faute pût être démontrée.

Pour ce cas on rentre donc dans la théorie du droit commun en matière de transport, et, conformément à l'art. 1784 du Code Napoléon et 103 du Code de commerce, le voiturier doit prouver le cas fortuit; le mot voiturier devant être pris ici dans l'acception la plus large, qu'il s'agisse de transport par terre, par rivières, canaux ou par mer.

Tels sont les principes consacrés par la jurispudence; ainsi, en ce qui concerne le voiturier par terre, il a été dé

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