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des chances de vol, qui s'élevaient, dans le seul port de Londres, à près de dix millions de francs par année, quand les navires étaient amarrés dans la Tamise. La création des docks a remédié à ces graves inconvénients. Aussitôt qu'un bâtiment se présente, il est admis dans un bassin fermé par des portes d'écluse, et dans lequel l'eau est maintenue à un niveau constant. Un quai, généralement couvert et pourvu de machines propres au déchargement, règne le long du bassin où flottent les navires qui y trouvent toutes les facilités désirables pour déposer leurs cargaisons.

L'Angleterre compte aujourd'hui dans ses principaux ports un nombre considérable de docks, dont les uns servent pour l'entrée des bâtiments, les autres pour la sortie, pour les réparations. Plusieurs sont exclusivement consacrés aux bateaux à vapeur ; il y en a qui ne reçoivent que les navires destinés pour l'Amérique, et d'autres qui n'admettent que des bâtiments venant des Indes Orientales. Des magasins immenses établis le long des quais, et dont plusieurs ont jusqu'à dix étages, solidement construits, avec des planchers de fer soutenus par des colonnes en fonte, servent de dépôt aux marchandises. Ici les cafés, plus loin les sucres, ailleurs les indigos, les bois de teinture et de construction, les spiritueux, les chanvres, les objets de toute espèce sont rangés dans un ordre admirable. Des machines ingénieuses suspendues à ces voûtes de fer, des charriots aériens permettent de soulever presque sans efforts des masses considérables. La plus active surveillance s'exerce jour et nuit sur les dépôts. Quelques minutes suffisent pour retrouver et atteindre les objets les plus délicats et les colis les plus gigantesques. Les cargaisons sont distribuées et numérotées par navires, enregistrées au crédit des armateurs ou des consignataires, et entretenues avec une sollicitude de tous les moments. Rien ne se perd, rien ne s'altère et rien n'est plus rare qu'un vol.

Les abords des docks (magasins et bassins) ne sont accessibles que par des portes bien gardées, et il n'y en a jamais plus de denx ou trois par chaque enceinte environnée de murs très éle-vés. On évalue à plus de trois cents millions pour la seule ville de Londres la dépense occasionée par la création de ces importants établissements, qui sont presque tous l'œuvre de l'esprit d'as

sociation. Vingt-sept mille navires y stationnent ou y apparaissent tous les ans et donnent lieu à un mouvement commercial dont il nous est difficile, en France, d'avoir une juste idée. La plupart des bassins de Londres sont situés dans la partie orientale de la rivière, en avant du nouveau pont, du côté de la mer. Le plus ancien porte le nom de dock des Indes Occidentales; il a été fondé en 1800, et ne présente pas moins de 1,200,000 mètres carrés de surface, dont 236,000 mètres en eau et 964,000 en terrains. Tous les bassins ont un tirant d'eau de 7 mètres. Il a coûté 82 millions de francs, et il peut recevoir six cents navires de deux cent cinquante à trois cents tonneaux. Les magasins renfermaient en 1831 près de cent cinquante mille barriques de sucre, quatre cent trente-trois mille sacs de café, trentetrois mille pièces d'acajou et soixante-dix mille barils de liquide. Il n'y a pas de plus belles caves dans le monde que celles du dock dit de Londres; leur aspect a quelque chose de la féerie, et il est impossible de rendre l'effet produit par ces milliers de colonnes supportant des voûtes surbaissées, quand on chemine lentement sur l'aire du sol, chargé de sciure de bois et sillonné de toutes parts par de petits chemins de fer. Le dock de Londres contient, en eau et en terrains, trois cents mille mètres carrés de superficie; il a coûté cent millions. On y entrepose les tabacs, les riz, les vins et les eaux-de-vie. Le dock des Indes Orientales, naguères consacré, comme son nom l'indique, aux navires de la Compagnie des Indes, et dont la physionomie était généralement assez triste pendant une partie de l'année, menace de le devenir davantage encore depuis la suppression du monopole de la Compagnie. C'est là qu'on voyait dans des bassins d'un tirant d'eau de huit mètres et demi, les magnifiques navires destinés au commerce de l'Inde et presque aussi grands que des vaisseaux de guerre, avec leurs vastes emménagements et leurs équipages aguerris.

Mais le plus curieux de tous les docks assurément, celui qui est destiné à servir de modèle aux travaux du même gerre, c'est le fameux dock de Sainte-Catherine, où les Anglais semblent avoir réuni tout ce que le génie du commerce a pu suggérer de perfectionnements utiles et de machines spirituelles. Les édifices dans lesquels sont entreposés les sucres, les indigos, les

grains, sont chauffés au moyen de tuyaux plats en fonte qui permettent d'entretenir en hiver une chaleur constante de douze degrés. Tout y est construit en fer et en fonte ; les colonnes de soutennement sont creuses et servent d'égout aux eaux pluviales. Un navire de mille tonneaux peut y être déchargé en trois jours et sa cargaison mise en sûreté dans le même espace de temps. Ge dock est le plus rapproché de la ville de Londres, et il excite au plus haut degré l'attention des étrangers. Le seul inconvénient qu'il présente provient de la difficulté de ses abords, trop souvent obstrués par l'innombrable quantité de paquebots, bateaux à vapeur et navires charbonniers qui se pressent à l'entrée de la ville, et qui laissent à peine, malgré la vigilance de l'autorité maritime, un chenal fort étroit pour la circulation. Le dock de Sainte-Catherine a été ouvert au mois de novembre 1828; c'est le seul dans lequel les navires puissent entrer la nuit comme le jour.

Les Anglais ont trouvé le moyen de donner à leurs docks une utilité particulière, peut-être supérieure aux avantages matériels qu'ils en retirent, par des combinaisons d'entrepôt, trop ingénieuses pour ne pas trouver place dans cet article. Aussitôt qu'une marchandise est mise en magasin dans un dock, la compagnie des directeurs de ce dock délivre à l'importateur ou au consignataire un certificat ou warrant, énonçant qu'il a été emmagasiné pour son compte telle marchandise de tel poids et de telle qualité. Ce certificat lui sert de titre de propriété : il est transmissible par voie d'endossement, et cet endossement, s'il est régulier, prouve à lui seul le fait de la vente. Ces warrants sont divisibles et remis à des courtiers qui s'en servent pour opérer les transactions les plus importantes sans que la marchandise ait changé de place, et par conséquent sans avoir été grevée de frais de transport ou de manutention. On peut comparer ces certificats à nos titres de rente sur l'État, qui passent de main en main par un simple transfert, sans que ni le trésor, ni les porteurs aient d'autres formalités à remplir, le premier pour payer, les autres pour recevoir.

Si le propriétaire de la marchandise désire l'échanger contre de l'argent ou simplement la consigner en garantie d'un prêt, il remet le warrant à un banquier, qui lui fait les avances né

ecessaires, sans avoir besoin de prendre livraison de la marchandise, de la soigner et de la surveiller. C'est la compagnie du lock, qui est chargée exclusivement de ce soin. Ainsi, par l'uage des warrants, la marchandise est en quelque sorte mobilisée; elle devient monnaie, circule sans changer de place, et fait l'office du meilleur papier de commerce, puisqu'on peut le transmettre avec la plus grande facilité, comme une valeur de portefeuille. Le négociant peut de cette manière recommencer de nouvelles expéditions avec les fonds obtenus sur la remise des warrants, qui font de l'entrepôt une véritable banque, et des marchandises qui y sont déposés, un immense fonds social sans cesse à la disposition du commerce.

Les villes du Havre et de Marseille, réclament depuis quelque temps avec instance la création des docks nécessaires au développement de leur commerce. Pour qui connaît l'impor tance de ces deux villes et l'admirable organisation des docks anglais avec leurs résultats, la surprise est grande de voir notre pays demeurer étranger aux avantages qui naîtraient de l'établissement d'un système de docks parmi nous. Un tel établissement consiste à offrir au commerce un point central où il puisse avoir sous les yeux la masse d'approvisionnements existants, où ces marchandises soient manutentionnées avec soin, emmagasinées avec économie, et dont il ait la représentation pour la vente, dans les échantillons délivrés par la compagnie du dock, et pour la circulation, dans les warrants ou récépissés compagnie. Les revenus des docks se composent du produit des droits de station dans les bassins et de ceux de manutention et d'emmagasinement.

de la

L'État ne retirerait pas moins d'avantage que les particuliers de la création d'un système de docks. Il suffit de dire que cinquante employés de la douane font le service du dock de Londres, où circulent plus de trois cent mille tonneaux de marchandises par année. Le jour où cette grande victoire serait remportée parmi nous, il serait indispensable d'envoyer en Angleterre des hommes studieux, pour y observer les méthodes de travail adoptées dans les docks. C'est là qu'il faut voir avec quelle attention les prescriptions les plus minutieuses sont exécutées à la lettre, avec quel silence se font les manœuvres, avec

quelle sollicitude les produits sont manipulés. Les négociants sont ainsi dispeusés d'avoir des magasins en ville, et de se multiplier au détriment de leurs intérêts, certains d'être supplées avec avantage, grâce à l'heureuse division du travail qui règne dans les entrepôts. Quelques échantillons qu'eux-mêmes n'on: point levés, et sur lesquels il y a impossibilité de tromper, suffisent pour servir de base aux transactions les plus importantes. Qui peut dire jusqu'où s'étendraient parmi nous les conséquences de cette mobilisation générale des marchandises, et le mouvement qu'elle imprimerait aux relations commerciales! BLANQUI AÎNÉ.

DOREUR. (Technologie.) Les alliages de cuivre destinés à être dorés ne sont pas composés comme le bronze des canons, des cloches, etc., et ne sont véritablement que des LAITONS renfermant un peu d'étain et de plomb, dont la nature varie beaucoup, parce que les fondeurs ne prennent pas, pour les préparer, des métaux purs; ils se servent de vieux bronzes dédorés, de pièces de rebut, de chaudrons, de chaudières, etc., qui sont connus sous le nom de mitraille pendante; ils les fondent avec du cuivre rouge étamé pour obtenir un alliage qui remplisse à peu près le but qu'ils se proposent ; leur mélange se compose à peu près de 3 4 de cuivre jaune et 1/4 de cuivre rouge, couvert de soudure et d'étamage.

Pour qu'il remplisse les conditions convenables, le cuivre. destiné à la dorure doit être facilement fusible, afin qu'il prenne bien exactement toutes les empreintes du moule : on ne doit y trouver ni piqúres, ni vents, ni gerçures, qui feraient perdre beaucoup d'or. Il doit pouvoir être tourné, ciselé et bruni facilement, se bien dorer sans prendre trop d'or: la dorure doit bien y adhérer et pouvoir prendre une belle couleur au mat, au bruni, à l'or moulu et à l'or rouge.

L'alliage qu'emploient les fondeurs est composé sensiblement de cuivre 72, zinc 25,2, étain 2,5, plomb 0,3, quoique l'on y rencontre quelquefois du fer, de l'antimoine, de l'or ou de l'argent en petite quantité. M. D'Arcet a reconuu que l'alliage qui réunit le plus de qualités importantes, est composé de 82 de cuivre, 18 de zinc, 3 d'étain et 1,5 de plomb, ou des mêmes proportions de cuivre et de zinc, et de 1 d'étain et 3 de plomb,

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