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1° Par l'élévation de température qui résulte de la rapidité et du degré de fermentation qu'ils éprouvent;

2o Par la quantité d'eau qu'ils contiennent, absorbent ou res tituent;

3° Par le mélange de parties inégalement dissolubles, qui prolonge leur effet par leur dissolution graduelle;

4° Par les sucs ou les sels contenus dans un grand nombre de matières servant d'engrais, et qui, par leur nature âcre ou sti mulante, paraissent jouer suivant leur dose, le rôle d'excitants ou même de poisons.

Ou a indiqué vaguement la réunion de toutes ces différentes actions à des degrés divers, par la division consacrée en agriculture, des engrais chauds et des engrais froids.

Les premiers sont ceux dont l'action est rapide, à cause de leur disposition fermentescible et de leur grande solubilité, ou des matières excitantes qu'ils renferment, mais qui ne contiennent pas beaucoup d'eau, comme les fumiers de moutons et de pigeons.

Les engrais froids sont tous ceux dont l'action est lente, soit parce que leur tissu est difficile à décomposer ou à mettre en fermentation, soit parce qu'ils renferment peu de matières âcres, ou qu'ils sont trop délayés d'eau.

Si toutes les matières d'origine organique peuvent être comptées au nombre des engrais, on voit quelles ressources immenses, inépuisables, incessamment renouvelées, la nature se ménage à elle-même et offre partout à l'homme, dans la continuelle destruction des êtres organisés, pour la nutrition, l'ac croissement et le développement parfait, tant de la végétation spontanée que de celle qui est soumise à nos cultures.

Il ne s'agit, pour le cultivateur, que de savoir les réunir, les préparer et les employer à propos; et la seule chose à laquelle il ait à prendre garde dans l'économie de son exploitation, c'est que les frais où ces soins l'entraînent, n'absorbent pas entièrement les profits qu'il doit justement en retirer.

La science a fait faire, dans ces derniers temps, de grands progrès à l'art de préparer les engrais organiques. Mais aucun n'est plus remarquable et plus important sans doute que le procédé qui consiste à saisir instantanément dans les corps prêts à

se décomposer, à se résoudre en leurs éléments primitifs, et à se perdre, en grande partie, inutilement ou dangereusement pour l'homme, sous la forme de gaz invisibles, dans l'océan atmosphérique, les principes qui doivent le plus énergiquement contribuer à l'alimentation des races végétales nouvelles.

Les impressions désagréables ou les effets pernicieux qu'exercent sur nos sens ou sur notre organisation les corps en putréfaction, nous disposeraient seuls à les enfouir dans le sol, si l'observation ne nous avait d'ailleurs appris qu'ils contribuaient si fort à sa fertilité. Mais cet enfouissement ne peut pas être utilement pratiqué pendant tous les jours de l'année; et l'art qui, par une sorte d'enfouissement provisoire et portatif, conservera ces matières intactes jusqu'au moment où elles peuvent servir aux opérations agricoles, ne sera pas moins Favorable à la salubrité publique qu'à l'agriculture.

C'est ce qu'a imaginé de faire, à Grenelle, un habile manufacturier, et ce qui peut-être connu de son procédé nous paraît l'autant plus mériter d'être promptement répandu, que son ipplication est de nature à suppléer partout à la disette d'engrais, l'une des causes qui contrarie le plus le cours déjà si lent des améliorations agricoles.

Avant lui, d'heureux résultats avaient été obtenus de l'emploi de la matière connue dans le commerce sous le nom de noir résidu, ou résidu de raffineries, lequel n'est autre chose que le charbon animal fin, qui, après avoir servi à la décoloration des sirops, est aggloméré par l'albumine du sang, (quelquefois des œufs ou du lait) puis lavé pour en extraire le sirop interposé. M. Salmon a suppléé à l'extrême insuffisance de la quantité de noir résidu que les clarifications de raffinerie peuvent offrir, comparativement aux besoins de l'agriculture, par un engrais charbonneux analogue, auquel il donne le nom DE noir animaLISÉ ;-sa vertu résulte des matières organiques et du charbon extrêmement divisé qu'il contient. Ce charbon ralentit la fermentation des matières, et retient en partie les gaz développés.

Suivant un mémoire qu'il a publié en 1831, les matières premières qu'il emploie, après avoir été calcinées dans des fourneaux, sont immédiatement broyées et réduites en poudre 4m

palpable. 40 kilogrammes de substances organiques composées de matières fécales, de sang et de chair musculaire mêlés ensemble forment instantanément une substance noire semblable au noir résidu de raffinerie.

Dans les opérations du mélange, l'odeur des matières fécales et animales est détruite ; et un faible dégagement d'alcali volaul pur a seulement lieu pendant quelques minutes.

Cette découverte paraît destinée à devenir de la plus grande importance, puisque non seulement l'emploi du noir animalisé utilisera, en faveur de l'agriculture, une masse énorme de matières organiques qui étaient perdues pour elle, mais encore. parce que la fabrication de ces engrais assure les moyens les plus efficaces de désinfecter les matières organiques qui corrompent l'air des grandes villes.

Il est d'ailleurs fort supérieur à la poudrette, dont la plus j grande partie des matières organiques sont détruites par la lea teur de la préparation, tandis que dans la fabrication du noir animalisé, une substance pulvérulente contenant du charbon à l'état d'une division extrême, se trouve mêlée avec plus des trois cinquièmes de son poids de matières organiques. Tous les sels cotenus dans la matière fécale sont conservés, la fermentation p tride arrêtée, le sang et la chair musculaire conservés avec tou leurs sucs. Les matières animales mêlées au carbone, fermentest lentement, de manière à ne fournir aux plantes le gaz acide car bonique qui s'en dégage, qu'au fur et à mesure de leurs besoins

Mais ce qui ajoute en ce moment un nouveau degré d'intérêt à ce procédé de M. Salmon, c'est qu'à Boulogne-sur-Mer, un chimiste, M. Damart-Vincent, annonce avoir trouvé dans les cendres de la houille une substance charbonneuse, absorbante et désinfectante, analogue pour ses effets à celle que prépare. M. Salmon, et qu'en la mêlant aux matières organisées, il en a obtenu aussi un excellent engrais.

Partout où l'on peut se procurer des cendres de houille, on pourrait obtenir un noir animalisé qui rapprocherait chaque jour davantage des besoins toujours croissants d'une agriculture plus perfectionnée, la quantité actuellement si disproportionnée des engrais disponibles.

En attendant la réalisation si désirable de ces espérances, now

présenterons ici quelques considérations détachées, propres à diriger les cultivateurs dans la préparation et dans l'emploi des matières qu'ils font journellement servir à leurs engrais.

1° Les matières animales étant en général plus promptes à se décomposer que les substances végétales, leur action est plus rapide, plus énergique, mais aussi moins prolongée; il faut donc apporter un soin particulier à la conservation des fumiers dans lesquels elles dominent. A cet effet, il faut retarder la fermentation autant que possible, et l'on y parvient en les tenant secs, à une exposition aussi froide que possible et garantis du contact de l'air. Quand on s'en sert, il faut s'appliquer à les bien mélanger avec le sol, et à empêcher que leur destruction ne soit trop rapide.

2o Les plantes vertes succulentes venant facilement à fermenter, on ne peut pas les enterrer trop tôt; mais il ne faut pas les enterrer trop avant, de peur d'empêcher tout-à-fait cette fermentation par la compression du sol et l'exclusion de l'air. C'est au moment de la fleuraison qu'il faut les enfouir, attendu qu'elles contiennent alors une plus grande quantité de matière soluble, et que leurs feuillées élaborent plus de matière nutritive. La décomposition s'opère lentement sous le sol, et la légère fermentation qui s'établit rend la fibre ligneuse plus soluble.

La paille sèche des céréales, les tiges des pois et toutes les matières végétales sèches forment un èngrais utile; en général, on les fait fermenter avant de s'en servir, quoiqu'un grand chimiste, Davy, ne soit pas de cet avis, et pense qu'après avoir brisé la paille pour en faciliter l'emploi, il vaut mieux la garder sèche jusqu'au moment de l'employer.

3° La fibre ligneuse pure semble être la seule matière végétale qui ait besoin de fermentation pour devenir nutritive. Elle abonde dans le tan et dans la tourbe, et ne fermente bien que par le mélange avec d'autres matières saccharines, mucilagineuses, et extractives des végétaux. Aussi, mêle-t-on avec succès la tourbe avec le fumier commun des écuries. La fibre ligneuse est encore utilement décomposée à l'aide de la chaux. 4° On peut utiliser dans les campagnes la chair et les débris des animaux morts, en les recouvrant de cinq à six fois leur

volume de terre, mêlée d'une partie de chaux. En les laissant en cet état pendant quelques mois, la terre s'imprègne d'une matière soluble qui la convertit lentement en un excellent engrais. M. Payen a publié à ce sujet un mémoire, et la Société royale et centrale d'agriculture une instruction que les cultiva teurs doivent consulter.

5o Le poisson forme un engrais très énergique, et qu'il faut même, à raison de cela, employer avec modération. On le mêle avec du sable, de la vase, des herbes marines, pour tempérer son action qui s'étend à plusieurs années. Il y a des contrées maritimes où cette ressource serait d'une grande importance. La peau des poissons abonde en gélatine, qui est très soluble dans l'eau; l'huile ou la graisse se trouve sous leur peau ou dans leurs viscères, et leur matière fibreuse contient tous les éléments essentiels des substances végétales.

6o Parmi les substances huileuses qui abondent en carbone et en hydrogène, l'huile de baleine a été employée avec succès. Lord Sommerville la mélangeait avec des tas de terre, qui con servaient pendant plusieurs années leur action fertilisante.

7° On recherche avec empressement les os dans plusieurs provinces de l'Angleterre et de l'Écosse. Les fermiers les achetent, après qu'on les a broyés pour en tirer la graisse par la cuisson. Plus ils sont divisés meilleurs ils sont. Il convient que le sol soit dans un état sec, au moment où on les emploie.

8o Le sang contient certaines quantités de tous les principes trouvés dans les autres substances animales, et est généralement un très bon engrais.

9° La fiente des oiseaux, surtout des oiseaux carnassiers et des oiseaux de mer, est un des engrais les plus puissants. Le Guano, qui paraît être une production de cette nature, donne la fécondité aux plaines stériles du Pérou ; cinquante vaisseaux en enlèvent annuellement chacun 1,500 à 2,000 pieds cubes, dans les petites îles de la mer du Sud. On applique particuliè.ment le guano à la culture du maïs.

10° Les Chinois, qui ont taut de connaissances pratiques en agriculture, mêlent la vidange de leurs latrines avec un tiers de son poids de marne grasse; ils mettent en caisse ce composé, qui, après avoir été séché au soleil, se trouve dépouillé de sa

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