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sans une autorisation nouvelle, émanée de l'autorité compétente, former dans le même local, soit une deuxième fabrique de première classe, soit même un atelier de deuxième ou de troisième classe, chacun de ces établissements doit avoir une permission spéciale, autrement l'autorité a le droit incontestable de les faire fermer. Chaque établissement porte avec lui son genre d'incommodité ou de danger, et il est tel établissement de troisième classe, une féculerie, par exemple, qui n'est convenablement placée qu'auprès de grands cours d'eau, qui présenterait des inconvénients graves dans des constructions destinées à une poudrière. Nous pourrions citer bien des faits qui prouvent combien il est important que l'on ne se méprenne pas sur l'étendue des droits que confère une autorisation.

ÉTABLISSEMENTS DE DEUXIÈME CLASSE.

La demande en autorisation d'un établissement de deuxième

classe doit être adressée au sous-préfet de l'arrondissement qui la transmet au maire de la commune où il doit se former, en le chargeant de procéder à des informations de commodo et incommodo. Ces informations terminées, le sous-pré fet prend sur le tout un arrêté qu'il transmet au préfet qui

statue.

Lorsque l'établissement doit être formé dans la ville cheflieu du département ou dans l'arrondissement qui dépend de cette ville, la demande doit être adressée au préfet, les souspréfets, ayant été supprimés dans ces villes.

Si l'autorisation est refusée, le fabricant peut se pouvoir en conseil d'état contre l'arrêté du préfet. Il a le même droit, si les conditions qui lui sont imposées lui paraissent inutiles ou trop onéreuses, mais ce pourvoi n'est pas suspensif et provisoirement, il doit se soumettre à la décision du préfet.

Si au contraire, l'autorisation a été accordée, et que les voisins de l'établissement veuillent former opposition à l'exécution de l'arrêté du préfet, ils peuvent l'attaquer devant le conseil de préfecture, et si la décision de ce conseil ne leur est pas favorable, se pourvoir contre cette décision en conseil d'état.

Les dispositions de l'article 8 du décret du 15 octobre 1810, n'établissent pas d'une manière aussi positive ces différents pouryois, mais cette interprétation a été donnée à cet article par de

nombreuses ordonnances rendues en conseil d'état, et notamment par celles des 14 novembre 1821, 10 septembre 1823, 6 septembre et 15 novembre 1826, 16 janvier 1828, 29 mars 1823, 5 novembre 1831, et par les instructions du ministre de l'intérieur du 19 août 1825.

Dans le ressort de la préfecture de police, qui comprend, comme on le sait, outre le département de la Seine, les communes de Sèvres, Saint-Cloud et Meudon, de Seine-et-Oise, les demandes sont adressées directement au préfet de police qui statue, après avoir fait rédiger l'enquête dans les communes rurales par les maires, et avoir recueilli l'avis des sous-préfets. Si l'établissement doit être formé à Paris, l'enquête est rédigée par un commissaire de police.

L'enquête est l'un des actes les plus importants dans l'instruction d'une affaire de cette nature. Aucun délai n'est fixé à leur égard; il dépend uniquement de la volonté de l'autorité locale qui doit considérer l'importance de l'établissement, le nombre des propriétaires ou locataires principaux, et une foule de circonstances qu'elle seule peut apprécier, et qui doivent la déterminer à rendre ce délai plus ou moins long. Avant de rédiger l'enquête, les maires doivent prendre une connaissance → exacte des localités, de la nature de l'établissement, et inscrire ces renseignements en tête de leurs procès-verbaux, afin de les communiquer aux parties. Ils doivent consigner ensuite les oppositions et leurs motifs, les adhésions pures et simples ou même conditionnelles; relater les noms et domiciles de ceux qui ne se sont pas présentés, et constater qu'ils ont été mis en demeure et prévenus à temps de la demande en autorisation. L'observation de ces formalités est fort importante, même pour les industriels, car ils ont un grand intérêt à ce que, si leur demande est accueillie, leurs voisins ne soient pas fondés à se faire un titre contre eux de n'avoir pas été appelés en temps utile à soutenir leurs droits. Enfin, l'enquête est terminée par l'avis du maire, et ici, il doit avoir égard, non au nombre des oppositions, mais à leur valeur réelle; il doit avoir soin de conslater la distance où les opposants se trouvent être de l'établissement, la nature et l'importance de leurs propriétés et tous les renseignements propres à éclairer l'autorité supérieure,

L'intervention des maires, en fait d'établissements classés, est de la plus haute importance. Il est essentiel surtout, avonsnous dit dans l'ouvrage où nous avons spécialement traité toutes les difficultés que soulève la législation qui nous occupe (1), qu'ils tiennent sévèrement la main à ce qu'aucun atelier classé ne se forme au mépris des réglements. Il arrive rarement, en effet, que l'autorité locale s'oppose à la formation d'un établis sement qui n'est pas autorisé. Les industriels se reposant alors sur le silence que l'on garde à leur égard, sont fondés à croire qu'ils ne sont pas soumis à une autorisation; il en résulte quelquefois des dispositions vicieuses dans la distribution des appareils, des constructions dans un emplacement qui peut ne pas être convenable, et, par suite, des inconvénients qui appellent, mais trop tard, l'attention de l'autorité, et la mettent dans la nécessité de prendre des mesures sévères à l'égard d'une fabrique qui souvent s'est formée à grands frais. Dès qu'un projet de fabrique èst connu, le maire doit donc s'assurer si elle est classée, et dans l'affirmative, mander l'entrepreneur, lui faire connaître les réglements auxquels il est soumis, lui faire sentir les dangers auxquels ils s'expose en les éludant, et en donner immédiatement avis au sous-préfet, pour que ce dernier puisse provoquer du préfet les mesures nécessaires. Cette surveillance est en oûtre dans l'intérêt public, car un grand nombre de communes sont infectées aujourd'hui par suite de la facilité avec laquelle les autorités locales ont laissé se former des établissements insalubres non autorisés.

Mais les maires ne doivent pas oublier que, si leurs fonctions les obligent parfois à user d'une juste sévérité, ils doivent chercher, lorsque les circonstances le permettent, à obtenir par la persuasion ce qu'ils ont le droit de prescrire, et que leur autorité doit, avant tout, être paternelle. Les établissements industriels sont pour les communes une cause réelle de prospérité, et cette considération ne doit pas être perdue de vue; mais il ne faut pas non plus que la propriété en souffre; et c'est dans leurs rela

(1) Voy. LE CODE ADMINISTRATIF des établissements dangereux, insalubres ou incommodes.

tions avec les fabricants et les propriétaires, dans ces discus-, sions qui peuvent souvent entraîner la ruine des uns ou des autres, qu'il importe d'apporter cette influence morale, que le caractère et les lumières de ces magistrats doivent leur assurer sur leurs concitoyens.

ÉTABLISSEMENTS DE TROISIÈME CLASSE,

L'article 2 du décret du 15 octobre 1810, portait que les autorisations pour les établissements de troisième classe, seraient délivrées par les sous-préfets, qui devaient prendre préalablement l'avis des maires; mais l'article 8 du même décret donnait ces attributions au maire seul. Il y avait évidemment erreur dans P'une ou l'autre de ces dispositions et l'ordonnance royale du 14 janvier 1815 (art. 3), est venue trancher toute difficulté en décidant que ces permissions seraient délivrées par les souspréfets sur l'avis des maires et de la police locale. C'est donc aux sous préfets que les fabricants doivent adresser leurs demandes.

Les sous préfets, ainsi que nous l'avons déjà dit, ayant été supprimés dans les arrondissements, chef-lieux de départements, les autorisations y sont accordées par les préfets.

Dans le ressort de la préfecture de police, les autorisations sont délivrées par le préfet de police, conformément à l'article 8 du décret qui lui confère explicitement ce droit, et à l'article 4 de l'ordonnance royale précitée qui confie au directeur général de la police les fonctions dévolues aux sous-préfets en matières d'établissements classés, dans toute l'étenduc du département de la Seine, et dans les communes de SaintCloud, Sèvres et Meudon. L'ordonnance royale du 15 mars 1826 a décidé depuis que le préfet de police était bien légalement investi des fonctions du directeur général de la police, en ce qui concerne les attributions dont il s'agit.

Les enquêtes de commodo et incommodo ne sont point exjgées pour les établissements de troisième classe. Le décret portant que ces ateliers peuvent rester sans inconvéniens auprès des habitations particulières, on a pensé qu'il devenait inutile de consulter les voisins. Cependant dans le ressort de la préfecture de police, il est d'usage de procéder à ces enquêtes comme pour les établissements de deuxième classe. En effet,

ces ateliers sont susceptibles, dans certains cas d'incommoder le voisinage, et nous citerons notamment les féculeries, les teintureries, les vacheries, les ateliers de toiles peintes, les savonneries, la fabrication du salpêtre, les machines à vapeur à basse pression, les lavoirs à laines, les dépôts de fromages, le travail de la corne, les fabriques en grand de caramel, les brasseries, les fabriques de mastics et d'ardoises artificielles, qui certainement donnent lieu à des inconvéniens assez graves soit sous le rapport de l'odeur, soit sous celui du danger du feu pour que les voisins soient consultés. Il y a donc utilité et convenance à consulter les propriétaires voisins et on ne peut disconvenir qu'ils peuvent faire des observations de nature à fixer l'attention de l'autorité. D'un autre côté l'avis du maire et celui de la police locale étant nécessaires pour ces sortes d'affaires, rien ne peut mieux, qu'une information de commodo et incommodo, mettre ces autorités à même de se former une opinion sur le projet d'établissement. Cette marche n'a fait naître au surplus jusqu'à ce jour aucune observation en ce qui concerne l'instruction des affaires dans le département de la Seine, et elle a déjà produit de bons résultats.

Les réclamations qui s'élèvent contre la décision qui a statué sur un établissement de troisième classe, soit qu'elles proviennent des fabricants, soit qu'elles proviennent des voisins, sont jugées en conseil de préfecture. (Décret précité, art. 8.)

Cette disposition apporte une modification importante à ce qui se pratique pour les ateliers de deuxième classe, car les fabricants ne peuvent se pourvoir qu'en conseil d'état, et ici, au contraire, ils peuvent, ainsi que les opposants, attaquer l'arrêté qui a statué sur leur demande directement en conseil de préfecture. On ne se rend pas raison de cette différence, qui ne nous paraît basée sur aucune considération rationnelle.

Quoique le décret ne parle pas des recours en conseil d'état, contre les décisions émanées des conseils de préfecture, sur des établissements de troisième classe, il est évident cependant que ces recours sont journellement admis. En toute matière administrative, les conseils de préfecture ne sont que des juges de première instance, et, par conséquent, le recours contre leurs

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