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Mais de tous les précurseurs, celui qui a le plus contribué à tirer de l'hypnotisme les éléments d'une méthode thérapeutique est M. le Dr Liébeault, de Nancy. En 1866, il en formulait les indications dans son livre sur Le Sommeil et les états analogues.

Ses théories développées là longuement, étaient appuyées sur quantité d'observations précises. On y a bien peu ajouté depuis.

Indiquant les procédés employés pour obtenir le sommeil hypnotique, il le distinguait en sommeil léger et sommeil profond, y rattachant les faits de catalepsie et de léthargie, de fascination et de somnanbulisme. Dans cet état hypnotique, la volonté du sujet disparaissait, on pouvait le suggestionner, lui inculquer les idées qu'on voulait. A ce propos, Liébeault rappelait l'importance psychologique de l'imitation qui régit les sociétés animales et humaines. .

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Il expliquait par l'état hypnotique les tables tournantes, la baguette divinatoire, le spiritisme, les possessions et les hallucinations.

Liébeauit a formulé une ingénieuse théorie sur la production du sommeil provoqué. Il place tous les phénomènes de l'hypnotisme sous la dépendance de l'attention qu'il envisage comme une force nerveuse, rayonnante, circulante et susceptible de s'accumuler sous l'influence de la suggestion dans des régions déterminées de l'organisme. Nous reproduisons avec plaisir une vue de la clinique dans laquelle M. Liébeault a donné ses soins avec désintéressement, pendant plus de trente ans à des milliers de malades. C'est là qu'il a poursuivi ses études sur l'hypnotisme et enseigné l'art de la psychothérapie à un grand nombre de médecins venus de tous les pays du monde.

M. Liébeault qui fut président d'honneur du premier Congrès de l'hypnotisme est également de ceux dont le patronage donne le plus d'éclat à notre deuxième Congrès.

Mais tout cela n'était pour lui que l'avant-propos de l'œuvre décisive à laquelle il voua sa vie. Toutes ses expériences devaient aboutir à la psychothérapie.

Tels sont les titres à notre reconnaissance du fondateur de l'Ecole de Nancy, dont les principaux représentants ont été en France: MM. Bernheim, Liégeois, Beaunis, Auguste Voisin et à l'étranger: MM. Lloyd Tuckey (de Londres), Van Renterghem (d'Amsterdam), de Jong (de la Haye), Forel (de Zurich), Schrenk-Notzing (de Munich), Delboeuf (de Liège), Wetterstrand,

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de Stockholm), Tokarsky (de Moscou), Cruise (de Dublin), Van Velsen et Spehl (de Bruxelles), Hamilton-Osgood (de Boston), Moll (de Berlin), etc., etc. Parmi les travaux qui ont eu une grande influence sur l'évolution scientifique de l'hypnotisme il faut citer ceux de Mesnet et de Lasègue.

En 1860, Mesnet publie dans les Archives générales de médecine une remarquable étude sur le somnambulisme pathologique. Ce fut le point de départ de ses recherches sur le somnambulisme spontané et provoqué.

A la suite de quelques communications sur le magnétisme animal et sur le somnambulisme lucide, dont le contrôle scientifique était très difficile, pour ne pas dire impossible, l'Académie avait fermé volontairement ses portes à toutes les études qui se rapportaient de près ou de loin à ces questions. Par

ses patientes investigations sur le somnambulisme naturel et artificiel, par la prudence de ses déductions, par l'éloquence de ses communications, Mesnet. sut regagner la confiance de l'Académie. Non seulement il dompta les préjugés injustifiés, mais se fit écouter et applaudir par tous ses collègues, en leur apprenant que, dans l'état de somnambulisme, le sujet agit avec les apparences d'une liberté qu'il n'a pas.

C'est pour reconnaître les éminents services que Mesnet avait rendus à notre cause que nous l'avions élu président d'honneur du premier Congrès de l'Hypnotisme et de la Société d'Hypnologie. Permettez-moi en votre nom à tous d'adresser à sa mémoire respectée le témoignage de notre reconnais

sance.

Lasègue vulgarisa dans ses cours l'oeuvre de Braid et publia une étude sur la catalepsie (1865).

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En suivant l'ordre chronologique, nous devons enregistrer le fait suivant qui mérite d'être rappelé. En 1869, notre collègue Pau de Saint-Martin, qui est membre du Comité d'organisation du Congrès, après de brillantes études à l'Ecole de médecine militaire de Strasbourg, soutint une thèse courageuse, sous le titre Etude clinique d'un cas de catalepsie compliquée, traitée par l'hypnotisme. Pau de Saint-Martin démontrait dans cette thèse l'identité de l'état hypnotique provoqué avec la catalepsie spontanée.

Il nous reste encore à mentionner l'article: Hypnotisme du nouveau Dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques qui fut rédigé en 1874 avec beaucoup de clarté par Mathias Duval, et l'étude très approfondie que Charles Richet, un des présidents d'honneur de notre Congrès, publia en 1875 dans le Journal de l'Anatomie de Robin.

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naître cet insconscient surprenant qui est en nous, et qu'on avait jusqu'ici à peine soupçonné...

Les organisateurs du premier Congrès de l'hypnotisme voulant rendre hommage aux grands services rendus par M. Charles Richet l'avaient désigné comme l'un des présidents d'honneur du Congrès, le second Congrès lui a conféré le même titre, faible témoignage de nos sentiments de respectueuse sympathie et de notre reconnaissance.

Récemment, M. Richet a publié dans la Revue scientifique un remarquable article sur l'Avenir de la psychologie. Il y démontre que le premier problème de psychologie est la physiologie de la cellule nerveuse, mais il entrevoit aussi pour la psychologie de plus vastes horizons. Il envisage la multiplicité de ses applications pratiques, la voyant enfin appliquée à la justice, à l'éducation et à la morale, c'est-à-dire instituée à la base même de la vie sociale. En un mot, selon M. Richet, dont nous partageons absolument l'opinion, c'est la psychologie qui doit fixer la morale.

Après vous avoir exposé à grands traits l'oeuvre des précurseurs, et avant d'aborder la deuxième partie de cette conférence, qui a pour sujet l'œuvre de Charcot à la Salpêtrière et de Dumontpallier à la Pitié, permettez-moi de m'arrêter quelques instants sur une physionomie intéressante. Il s'agit d'un homme qui occupe, par l'originalité de ses travaux, une place à part dans l'histoire de l'hypnotisme. Luys, connu déjà par d'importants travaux sur l'anatomie du cerveau, s'est livré dès 1878 à de nombreuses études sur l'hypnotisme. Il étudia surtout les réactions émotionnelles chez les sujets hypnotisés, et se préoccupa d'augmenter, par la création d'appareils ingénieux, la profondeur des états d'hypnotisme. Dans les dernières années de sa vie, il fit à la Charité de multiples et retentissantes démonstrations d'hypnotisme. Un tableau de Moreau de Tours a reproduit une scène de fascination dans laquelle se trouvent réunis les principaux sujets soumis à ces expériences. Luys fut un des trois membres désignés, en 1877, par la Société de biologie pour vérifier les travaux de Burq sur la métallothérapie. C'est à la suite des rapports de cette commission que l'on commença dans les hôpitaux de Paris les recherches sur l'hypnotisme, et Luys fut, parmi les médecins des hôpitaux, un des premiers à entrer dans cette voie. Deux de ses élèves les docteurs Bottey et Descourtis ont apporté d'utiles contributions à l'étude de l'hypnotisme.

Quelques-uns des travaux de Luys ont donné lieu à des critiques un peu vives. Cela n'empêche pas que par ses recherches, son enseignement et ses publications, il ait joué un rôle appréciable dans l'évolution de l'hypnotisme. Nous lui savons particulièrement gré d'avoir offert à notre musée de psychologie son matériel d'enseignement et les appareils qu'il avait imaginés pour faciliter la production de l'hypnose.

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