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phénomènes hystériques et que des liens intimes unissent l'hypnotisme à l'hystérie.

Un remarquable tableau dû au pinceau du peintre A. Brouillet, transmettra à la postérité, avec une grande fidélité, le souvenir des célèbres leçons de Charcot sur l'hypnotisme. Dans ce tableau sont groupés presque tous les hommes éminents, élèves de Charcot, dont les travaux ont contribué à la gloire de l'Ecole de la Salpêtrière.

Charcot qui s'était surtout livré à l'étude des phénomènes somatiques de l'hypnotisme n'avait pas insisté beaucoup sur sa valeur curative et sur son rôle en thérapeutique. Peu de temps avant sa mort, il synthétisa dans une curieuse brochure ayant pour titre : La foi qui guérit, toutes les conséquences thérapeutiques qui se dégageaient des études expérimentales auxquelles il avait donné un si brillant essor.

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Alors même qu'ils appartenaient à des écoles rivales de celle de la Salpêtrière, tous les savants adonnés à l'étude de l'hypnotisme rendaient hommage à la puissance de son esprit et à son immense valeur scientifique.

Il avait été le premier président d'honneur acclamé par le premier Congrès international de l'hypnotisme en 1889, et la Société d'hypnologie et de psychologie l'avait placé au premier rang des hommes dont elle réclamait le patronage.

A la mort de Charcot, l'Ecole de la Salpêtrière était représentée par une pléiade de disciples éminents. C'est à M. le professeur Raymond qu'échut l'honneur de succéder au maître. Nous sommes heureux de reconnaître que

Charcot a trouvé en lui un vaillant continuateur. Sous son impulsion, l'hypnotisme, qui avait été, dans l'œuvre de Charcot, presque exclusivement physiologique et expérimental est devenu franchement psychologique et thérapeutique. En acceptant de présider les assises de ce Congrès, où l'hypnotisme apparaît surtout sous la forme psychologique et curative, notre savant mailre oriente nos travaux dans une voie féconde. M. le professeur Raymond ne s'est pas borné à nous apporter l'appui de son autorité et de sa parole éloquente, il nous convie à visiter les divers laboratoires de son important service, à la Salpêtrière. Demain ses chefs de clinique nous feront les honneurs de la maison où l'illustre Charcot a accompli sa grande œuvre scientifique. Qu'il me permette de le remercier vivement d'une bienveillance dont il m'a déjà personnellement donné tant de marques, et dont sa présence ici est une nouvelle preuve.

DUMONTPALLIER.

Le deuxième Congrès international de l'hypnotisme devait être présidé par le Dr Dumontpallier. Beaucoup de nos adhérents ont assisté au premier Congrès. Ils se souviennent de l'autorité et de l'impartialité avec lesquelles il dirigea les travaux de ces assises mémorables. Les nouveaux venus me sauront gré de leur rappeler la part considérable qu'il a prise dans l'étude de l'hypnotisme :

En 1876, le Dr Burq demandait à la Société de Biologie de vouloir bien nommer une Commission chargée d'étudier les résultats de l'application des métaux à la surface cutanée.

Charcot, Luys, Dumontpallier furent désignés pour composer cette Commission. Nommé rapporteur, Dumontpallier se mit à l'œuvre pendant deux ans, et travailla avec énergie dans le service de Charcot, à la Salpêtrière. Après une étude minutieuse, il affirma l'exactitude des faits avancés.

Mais, en même temps qu'il vérifiait les faits énoncés par Burq, des phénomènes nouveaux lui étaient révélés.

Sur les sujets soumis aux applications métalloscopiques, M. Gellé, qui avait été appelé à collaborer aux travaux de la Commission, remarqua que, du côté où l'acuité auditive était normale au début de l'expérience, cette acuité auditive, à la fin, avait diminué dans une mesure sensiblement proportionnelle à celle dont elle avait augmenté dans le côté malade sur lequel on avait opéré avec le métal.

En présence de ce résultat, Dumontpallier voulut voir ce qui avait lieu du côté de la sensibilité générale. L'application du métal sur le côté anesthésique lui permit de constater que la sensibilité, en même temps qu'elle revenait sur ce côté, disparaissait du côté opposé dans les points homologues. Il proposa à la Commission le mot de transfert pour désigner ces phénomènes, terme qui fut adopté et qui a reçu, depuis, la consécration de l'usage. Les recherches de M. Landolt sur la sensibilité oculaire vinrent confirmer de tous points ce que M. Gellé avait constaté pour l'ouïe, et ce que Dumontpallier avait vu pour la sensibilité générale. Quand on rendait la vue à gauche, on la faisait perdre à droite, et cela suivant des degrés déterminés.

Dumontpallier, poursuivant ses études sur l'anesthésie des hystériques, ne tarda pas à reconnaître que les plaques métalliques de Burq pouvaient, dans toutes ces expériences, être remplacées par différents agents physiques. Les mêmes résultats pouvaient être obtenus au moyen de l'aimant,

de courants électriques faibles, de vibrations sonores et, en un mot, de tous les agents décrits sous le nom d'oesthesiogènes; les excitations mécaniques faibles et répétées ayant également une action analogue.

C'est ainsi que les recherches métalloscopiques de Burq attirèrent l'attention de Dumontpallier sur les modifications de la sensibilité déterminées par les diverses excitations périphériques.

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Les conclusions des rapports de Dumontpallier sur la métalloscopie eurent un retentissement considérable.

Dans le cours de ses expériences, Dumontpallier avait été successivement conduit à étudier le rôle joué par les agents physiques dans la production des phénomènes de l'hypnotisme. Il arriva à cette conclusion que les manifestations observées dans les états profonds de l'hypnotisme procédaient des modifications périphériques déterminées sur la peau et sur les organes des sens par les agents physiques. Il en fit la démonstration dans un grand nombre d'expériences, où il agissait avec le vent d'un soufflet ordinaire, la chaleur, le froid, les courants électriques, la lumière solaire directe ou réfléchie, les raies du spectre, le son, etc., etc. Toutes ces expériences

mettaient en évidence l'extrême impressionnabilité réflexe des hystériques en état d'hypnotisme. C'est ce qu'il exprimait, de la façon la plus expressive, dans un Mémoire à l'Académie des Sciences, en disant : « Il ressort de tous ces faits que les hystériques, en état d'hypnotisme, offrent une hyperexcitabilité nerveuse telle, qu'il n'est pas d'instrument de physique qui puisse arriver à un même degré d'actions aussi infinitésimales déterminées par les divers agents physiques. » C'est la même constatation qui faisait dire à un physicien éminent, M. Jamin, professeur à la Sorbonne, un jour qu'il assistait aux expériences de la Pitié, cette parole que nous avons retenue: «< Dans nos laboratoires, nous n'avons pas de réactifs plus sensibles que ne le sont vos hystériques. >>

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Dumontpallier, secondé dans ses recherches sur les agents physiques chez les hystériques par deux élèves dévoués, MM. Paul Magnin et Bérillon, devint bientôt le chef d'une véritable école d'hypnologie, connue sous le nom d'Ecole de la Pitié. Les travaux de l'Ecole de la Pitié ont été publiés, de 1882 à 1887, dans les comptes rendus de la Société de Biologie. Ils ont fait l'objet de deux thèses soutenues à la Faculté de Paris, l'une par M. Paul Magnin, sous le titre : Etude clinique et expérimentale de l'hypnotisme. Les excitations périphériques chez les hystéro-épileptiques à l'état de veille et d'hypnotisme; l'autre, par M. Bérillon, sous ce titre: Hypnotisme expérimental. La dualité cérébrale et l'indépendance fonctionnelle des deux hémisphères cérébraux.

Pendant quelque temps les expériences de Dumontpallier passionnèrent

le monde scientifique. Les représentants les plus autorisés de l'Académie des Sciences lui prodiguèrent leurs encouragements. Pasteur, Chevreul, Milne-Edwards, Faye, Paul Bert, Brown-Séquard, Henri Bouley et beaucoup d'autres vinrent dans le service de Dumontpallier suivre ses démonstrations expérimentales, et apporter à ses recherches l'appui de leur autorité scientifique.

Lorsque Dumontpallier présenta à la Société de Biologie ses commiunications dans lesquelles il démontrait la possibilité de mettre en action l'activité physique ou sensitive d'un seul hémisphère cérébral, Paul Bert qui présidait la séance s'exprma ainsi : « Depuis près de trente ans, je suis avec le plus vif intérêt tous les progrès de ce que l'on appelait autrefois le magnétisme animal, et que l'on appelle maintenant l'hypnotisme. Eh bien, je ne vois dans les découvertes auxquelles on arrive actuellement rien d'absolument nouveau. »>

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« Les observateurs anciens ont vu, plus ou moins, tous les faits qu'on donne aujourd'hui comme nouveaux, et les ont décrits. Il faut reconnaître, cependant, que les observateurs actuels ont le mérite de les étudier avec plus de méthode. >>

«Le seul fait réellement nouveau, disait en terminant Paul Bert, qui m'a le plus frappé, et que les anciens magnétiseurs n'avaient jamais réalisé, c'est celui de diviser l'homme hypnotisé en deux et d'en faire un individu double. J'estime donc que ces études doivent être poursuivies en raison de l'intérêt exceptionnel qu'elles présentent. »

En résumé, l'œuvre de Dumontpallier en hypnotisme se répartit en deux périodes très distinctes. Dans la première, il ne s'écarte pas du domaine purement expérimental, étudiant, avec la collaboration de ses deux élèves, Ma

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