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ments de France et d'Angleterre, cette expression doit s'appliquer à toutes les Puissances qui sont intervenues dans la Réforme judiciaire égyptienne, ou seulement aux cinq Puissances qui ont été consultées avant la promulgation du décret.

Il ne paraît guère douteux qu'en droit strict les Puissances dont le concours a été déclaré nécessaire, à défaut de celui d'une Commission de liquidation spéciale, pour régulariser l'emploi des fonds provenant de l'emprunt Rothschild (autres que ceux qui seraient consacrés au payement des créanciers hypothécaires) ne soient les Puissances mêmes dont l'assentiment était indispensable pour donner force de loi au décret où cette prescription figure, c'est-à-dire non seulement les cinq Puissances préalablement consultées sur la teneur du décret, mais encore celles qui en ont ratifié le texte après qu'il a été arrêté; or, ce sont précisément toutes les Puissances qui ont concouru à la réforme judiciaire.

D'un autre côté, l'on ne saurait méconnaître la difficulté, ou plutôt l'impossibilité pratique qui s'oppose à ce que le Gouvernement égyptien soit tenu de rechercher l'adhésion individuelle de chacune de ces Puissances, chaque fois qu'il s'agira de verser entre les mains des créanciers quelque acompte.

Mais, à vrai dire, ces versements particuliers présupposent une première opération d'ensemble, consistant dans la vérification de la sincérité et du montant de toutes les créances dont se compose actuellement la dette flottante égyptienne, et cette véri fication même se rattache par un lien nécessaire à toute la suite des opérations qui devront constituer le travail de la liquidation financière. On ne comprend donc pas bien que le concours direct des Puissances puisse être réclamé, au sens de l'article 3 du décret du 15 novembre 1879, pour autoriser une première distribution de fonds destinée aux créanciers de la dette flottante, si l'on ne présente en même temps à ces Puissances au moins l'esquisse d'un projet général de liquidation de nature à justifier à leurs yeux la distribution proposée.

Avant de nous prononcer sur la question qui nous est soumise par MM. de Blignières et Baring, il conviendrait de savoir s'ils entendent procéder en effet de la manière que je viens d'indi quer. Au cas où il en serait ainsi, ne vaudrait-il pas mieux tenter un dernier effort pour réaliser le plan primitif d'une commission spéciale de liquidation? L'Autriche, qui avait soulevé les principales difficultés, parait disposée aujourd'hui à faire des concessions, et elle nous demande de reprendre les pourparlers en vue d'arriver à une entente avec nous. En admettant même

que l'idée de constituer une semblable Commission dût être abandonnée, ne serait-il pas naturel d'attendre que le Gouvernement égyptien fût en mesure de soumettre aux Puissances un projet de liquidation élaboré dans toutes ses parties et arrêté dans ses conclusions, plutôt que de recourir à des consultations partielles et successives à propos des différentes opérations de la liquidation générale?

Telles sont, Monsieur l'Ambassadeur, les réflexions que me suggère la communication transmise par les soins de Votre Excellence. Je vous serai reconnaissant de vouloir bien me faire savoir ce qu'en pense le Gouvernement de la Reine. Agréez, etc.

Signé: C. DE FREYCINET.

N° 2

M. de Freycinet, au Baron de Ring, Consul général de la
République Française en Égypte.

Paris, le 12 janvier 1880.

J'ai des raisons de croire que les contrôleurs inclineraient à publier très prochainement le projet de règlement général de la situation financière préparé par eux. D'un autre côté, le Gouvernement austro-hongrois nous a présenté une nouvelle proposition pour l'établissement de la Commission de liquidation. Nous ne pouvons, il est vrai, l'accepter telle qu'elle est, mais le Cabinet de Vienne se montre disposé à tenir compte de nos observations principales. Dans cet état de choses, et à la veille peut-être d'une entente entre l'Autriche et nous, je verrais des inconvénients à ce que le projet des contrôleurs fût promulgué dès à présent. Le Cabinet autrichien et les autres Puissances qui ont marché jusqu'ici d'accord avec lui dans cette affaire pourraient avoir lieu de se plaindre et l'exécution des mesures élaborées par le contrôle pourrait rencontrer, de leur part, certaines résistances. Il me semble prudent de ne point nous y exposer et de faire, tout au moins préalablement, un dernier effort pour nous entendre avec l'Autriche sur une Commission de liquidation ayant l'assentiment préalable de tous les Gouvernements intéressés.

Je l'ai dit à M. de Blignières que j'ai vu aujourd'hui, et je

vous prie de faire en sorte que M. Baring connaisse mon opinion.

Signé: C. DE FREYCINET.

N° 3

Le Baron de Ring à M. de Freycinet.

Le Caire, le 14 janvier 1880.

J'ai dit à M. Baring que vous poursuiviez les négociations avec l'Autriche et que vous en espérez un résultat satisfaisant. Je crois être parvenu à lui faire comprendre vos raisons. Du reste, le Gouvernement égyptien n'aurait pas été en état de publier sa loi de liquidation avant la fin du mois.

Pour ce qui me concerne, j'incline à penser comme Votre Excellence qu'un accord avec le Cabinet de Vienne est désirable. Toutefois, les contrôleurs se disent en mesure de désintéresser les créanciers de la dette flottante; et s'il en est ainsi, l'utilité absolue de la Commission européenne peut paraître douteuse.

Signé N. DE RING.

N° 4

Le Baron de Ring à M. de Freycinet.

Le Caire, le 15 janvier 1880.

Le Gouvernement égyptien demande l'assentiment des Puissances à un décret par lequel il autoriserait, dans le sens de l'article 3 du décret du 15 novembre dernier, la caisse de la Dette publique à disposer immédiatement d'une partie des fonds de l'emprunt Rothschild pour le payement des arriérés du tribut dû à la Porte, ainsi que des traitements et pensions dont l'annuité ne dépasse pas mille livres. La Commission d'enquête et los tribunaux de la Réforme ayant reconnu ces créances comme

privilégiées, je pense que le Gouvernement de la République consentira sans difficulté à la mesure projetée.

Signé N. DE RING.

N° 5

M. de Freycinet à l'Amiral Pothuau, Ambassadeur de la
République Française à Londres.

Paris, le 16 janvier 1880.

Monsieur l'Amiral, je reçois du Consul général de France en Égypte une dépêche dont je crois devoir vous transmettre la copie ci-jointe. M. de Ring m'annonce que le Gouvernement du Khédive demande l'assentiment des Puissances à un décret autorisant la Caisse de la Dette à disposer d'une partie des fonds de l'emprunt domanial pour payer l'arriéré dû sur le tribut égyptien et sur un certain nombre de traitements ou de pensions. Cette disposition impliquerait dérogation au décret sur l'insaisissabilité des biens domaniaux, dont les termes ont été arrêtés de concert avec les Puissances, bien qu'on puisse à la rigueur considérer les charges qu'il s'agit d'amortir comme faisant partie de la Dette flottante de l'Égypte. En outre, ainsi que notre Agent le fait observer, les créances en question ont été reconnues comme privilégiées par la Commission d'enquête et par les tribunaux mixtes.

Avant de répondre toutefois à la demande qui nous est adressée, je désire savoir quelle est, à ce sujet, l'impression du Gouvernement anglais. Je vous serai obligé de vouloir bien vous en enquérir et de me la faire connaître sans retard. Agréez, etc.

N° 6

Signé: C. DE FREYCINET.

L'Amiral Pothuau à M. de Freycinet.

Londres, le 17 janvier 1880.

Lord Salisbury vient de me dire qu'il adhère à la proposition

qui vous a été faite, à la date du 15 janvier, par le baron de Ring, au nom du Gouvernement égyptien, pour la disposition immédiate d'une partie des fonds de l'emprunt Rothschild.

Signé : POTHUAU.

No 7

M. de Freycinet au Baron de Ring.

Paris, le 20 janvier 1880.

Nous ne voyons pas, quant à présent, d'objections à souscrire à la proposition que nous fait le Gouvernement du Khédive d'attribuer une partie des fonds provenant de l'emprunt Rothschild au payement de l'arriéré dû sur le tribut de l'Égypte et sur les traitements des employés. En effet, ce double arriéré constitue une dette privilégiée; il fait d'ailleurs partie des charges dont l'ensemble forme la Dette flottante et à l'acquittement desquels le décret d'insaisissabilité a réservé les fonds de l'Emprunt domanial. Le Gouvernement anglais, que j'ai consulté sur sa manière de voir, se montre également disposé à adhérer à la proposition égyptienne.

Je vous serai obligé de me tenir informé des réponses que le Gouvernement du Khédive recevra des autres Cabinets et des mesures qu'il compterait prendre en conséquence. Cette affaire pourrait être considérée comme préjugeant jusqu'à un certain point la suite qui sera donnée aux opérations de la liquidation générale, et quelques Puissances, se plaçant à ce point de vue, feront peut-être des objections que nous aurions intérêt à connaître avant de donner une adhésion définitive.

Signé: C. DE FREYCINET.

N° 8

M. de Freycinet à Lord Lyons.

Paris, le 20 janvier 1880.

Monsieur l'Ambassadeur, me référant à la conversation que j'ai eue ces jours derniers avec Votre Excellence concernant les

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