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ARTICLE 589.

Les syndics ne pourront intenter de poursuite en banqueroute simple, ni se porter partie civile au nom de la masse, qu'après y avoir été autorisés par une délibération prise à la majorité individuelle des créanciers présents.

ARTICLE 590.

Les frais de poursuite intentée par un créancier seront supportés, s'il y a condamnation, par le Trésor public; s'il y a acquittement, par le créancier poursuivant.

1930. Ces articles contiennent des règles nouvelles sur le paiement des frais occasionnés par les poursuites en banqueroute simple; règles qui dérogent en partie aux principes du droit commun, en vertu desquels les poursuites intentées à la requête du ministère public ne restent à la charge du Trésor que dans le cas d'acquittement. La dérogation consacrée par l'art. 587 a été admise, afin de ne pas placer les créanciers du failli dans cette position fausse, où une déposition entraînant condamnation doit avoir pour résultat de mettre à la charge de la masse des frais que le Trésor public supportera, si le failli est renvoyé de la plainte. Le Trésor conserve son recours contre le failli, mais ne l'exerce que de manière à ne pas nuire à la masse.

Si la poursuite a été intentée par les syndics avec l'autorisation des créanciers, qui est impérieusement exigée pour que les syndics puissent agir, les frais en cas d'acquittement sont supportés par la masse la délibération rendue à la majorité individuelle des créanciers présents engage même ceux qui sont absents; et en cas d'insuffisance de l'actif, chaque créancier serait tenu pour sa part au prorata de sa créance. Le failli doit être libéré envers ses créanciers de tout ce qui aurait été pris sur la masse pour solder les frais de poursuite (1).

(4) Bédarride, n. 1247.

Si la poursuite est intentée par un créancier, le droit commun est également appliqué et le Trésor ne supporte les frais, sauf son recours contre le failli, que s'il y a condamnation.

CHAPITRE II.

De la Banqueroute frauduleuse.

ARTICLE 591.

Sera déclaré banqueroutier frauduleux, et puni des peines portées au Code pénal, tout commerçant failli qui aura soustrait ses livres, détourné ou dissimulé une partie de son actif, ou qui, soit dans ses écritures, soit par des actes publics ou des engagements sous signature privée, soit par son bilan, se sera frauduleusement reconnu débiteur de sommes qu'il ne devait pas.

• 1951. Il faut dire, pour la banqueroute frauduleusé comme pour la banqueroute simple, que ce crime ne peut être commis que par un commerçant, et non par celui qui se livre accidentellement à des actes de commerce; il faut de plus qu'il soit en état de faillite; mais les tribunaux criminels sont compétents pour constater ces faits (suprà, n. 1926). Il faut donc que le jury ait déclaré l'accusé commerçant et failli; mais une question distincte et séparée ne doit pas être posée sur ce point; elle doit être comprise dans la question principale, cette qualité étant un élément constitutif du crime (1).

Le crime de banqueroute peut résulter de faits qui ont suivi tout aussi bien que de ceux qui ont précédé la faillite (2).

La simple tentative de banqueroute frauduleuse est punissable des mêmes peines que le crime lui-même (C. P., art. 2). Il en est de même du fait de complicité (C. P., art. 423). La prescription de dix ans applicable à la banqueroute frauduleuse (C. Inst. crim., art. 637) ne court que du

(1) Cass., 28 mars 1846 (S.V.46.1.585).

(2) Cass., 5 mars 1813.

jour de la cessation de paiements, ou des faits de fraude commis postérieurement à la cessation de paiements (1).

Les peines applicables sont de cinq au moins et de vingt ans au plus de travaux forcés (C. pén., art. 402).

L'union des créanciers subsiste en cas de condamnation pour banqueroute frauduleuse, et conserve l'administration des biens de la masse; mais il doit être pourvu en même temps, conformément à l'art. 29, C. pénal, à la nomination d'un tuteur au condamné, et c'est en sa présence que doit avoir lieu l'assemblée pour la clôture de l'union dont parle l'art. 537 (2).

La loi nouvelle n'a pas procédé par voie d'énumération, en ce qui concerne les faits constitutifs de la banqueroute frauduleuse; elle a préféré employer une formule générale, qui embrasse tous les cas de dissimulation ou de fraude et ne permet plus au coupable d'espérer l'impunité, parce que le fait qui lui est reproché n'aurait pas été spécialement prévu (3); il suffit qu'il y ait eu soit détournement ou dissimulation de l'actif, soit exagération du passif (4).

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ARTICLE 592.

Les frais de poursuite en banqueroute frauduleuse ne pourront, en aucun cas, être mis à la charge de la masse. Si un ou plusieurs créanciers se sont rendus parties civiles en leur nom personnel, les frais, en cas d'acquittement, demeureront à leur charge.

1952. Cet article décide, par exception aux règles admises en droit commun, que les frais de poursuites en cas de banqueroute frauduleuse ne pourront être mis à la charge de

(4) Bédarride, n. 1264; Dalloz, Rép., n. 1479.—Contrà, Mangin, t. 2, n. 328; Cass., 29 déc. 1828; Dalloz, Kép., n. 1402.

(2) Renouard, t. 2, p. 471; Bédarride, n. 1263.

(3) Cass, ch. crim., 7 mars 1839 et 16 janv. 1840; Dalloz, Rép., n. 1449. (4) Bédarride, n. 1252.

la masse, même dans le cas où les syndics se seraient portés en son nom parties civiles (1); il en est autrement à l'égard des créanciers agissant en leur nom personnel. Aussi les syndics n'ont-ils pas besoin, dans ce cas, d'être autorisés par une délibération des créanciers (2).

CHAPITRE III.

Des crimes et des délits commis dans les faillites par d'autres que par les faillis.

ARTICLE 593.

Seront condamnés aux peines de la banqueroute frauduleuse : 1° les individus convaincus d'avoir, dans l'intérêt du failli, soustrait, recélé ou dissimulé tout ou partie de ses biens, meubles ou immeubles; le tout sans préjudice des autres cas prévus par l'article 60 du Code pénal; 2 les individus convaincus d'avoir frauduleusement présenté dans la faillite et affirmé, soit en leur nom, soit par interposition de personnes, des créances supposées; 3° les individus qui, faisant le commerce sous le nom d'autrui ou sous un nom supposé, se seront rendus coupables de faits prévus en l'article 591.55

1933. Cet article prévoit et définit certains crimes indépendants de la banqueroute frauduleuse et pouvant être commis par d'autres que par le failli lui-même.

Il réserve en même temps l'action publique contre les complices; mais à l'égard de ceux-ci, il se contente de renvoyer à l'art. 60 du Code pénal, qui énumère et spécifie les caractères constitutifs de la complicité. Le Code de commerce ne s'occupe donc pas des complices.

Les individus dont parle l'art. 593, de même que les com

(1) Renouard, t. 2, p. 471; Bédarride, n. 1261. (2) Rouen, 23 mai 1840; Dalloz, Rép., n. 1473.

plices, peuvent n'être ni commerçants ni faillis; ces qualités ne doivent exister nécessairement que dans la personne coupable du crime même de banqueroute, et dans l'intérêt de laquelle il y a eu soustraction, recel ou dissimulation (1),

Si la complicité ne peut exister que dans le cas où l'accusé principal lui-même est déclaré coupable, et si son acquittement doit entraîner nécessairement celui des individus poursuivis comme ses complices, il n'en est pas de même des crimes prévus par l'art. 593; et il suffit, pour que la condamnation puisse être prononcée, que la soustraction, le recel ou la dissimulation aient eu lieu dans l'intérêt du failli, sans que celui-ci y ait participé (2). Cette doctrine, cependant, a été trouvée trop rigoureuse, et M. Dalloz ne comprend pas que de simples peines correctionnelles soient appliquées à ceux qui ont volé pour leur propre compte, et que les peines beaucoup plus sévères de la banqueroute frauduleuse frappent ceux qui ont eu l'intention de faire restitution au failli (3). Si le détournement, en effet, n'a pas été accompli dans l'intérêt dụ failli, l'acte n'est plus qu'un crime ou un délit ordinaire.

Le même principe a été appliqué dans le cas prévu par le deuxième paragraphe. « Ce fait, dit un arrêt de la Cour de cassation, s'il ne suppose dans l'origine une participation du failli, ne prend cependant le caractère de crime que par une circonstance entièrement personnelle à son auteur, c'est-àdire par sa persistance dans une simulation qui peut, à l'égard du failli et par suite de circonstances qui lui seraient personnelles, avoir cessé d'être frauduleuse >> (4).

La loi dit expressément que la pénalité est encourue dans le cas même où la présentation et l'affirmation de la créance ont été faites par une personne interposée, telle qu'un mạndataire.

(1) Cass., 26 mai 1838 (S. V.38.1.562) et 18 oct. 1842 (S.V.42.4.953), (2) Cass., 2 mai 1840 et 3 juin 1843 (S.V.43.1.837 et 838); Renouard, t. 2, p. 478; Bédarride, n. 1276.

(3) Dalloz, Rép., vo Faillites, n. 1483.

(4) Cass., 2 mai 1840 (S.V.43.1.837).

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