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de constater en fait que les conventions ont présenté ce caractère d'une aliénation de la future liberté du vote » (1).

Quand il s'agit de l'application de la seconde disposition de l'art. 597 et de conventions au moyen desquelles des avantages particuliers sont accordés à un créancier, il n'est plus nécessaire qu'il y ait eu déclaration judiciaire de la faillite; il suffit que le traité soit postérieur à la cessation de paiements régulièrement établie, indépendamment même de toute déclaration judiciaire : la jurisprudence est constante sur ce point (2). Mais, si les tribunaux criminels, ainsi que nous avons eu occasion de le dire déjà, ont tout pouvoir pour décider, même contrairement à un jugement émané de la juridiction commerciale, que le débiteur avait cessé ses paiements, et pour prononcer l'annulation du traité (3), ils doivent, au moins, constater expressément l'existence de cette cessation de paiements; à défaut, ils ne peuvent pas appliquer les dispositions de l'art. 597 (4).

Toutefois, si le traité fait après la cessation de paiements et avant le jugement déclaratif est nul dans tous les cas, la peine ne peut être prononcée contre le créancier qu'autant qu'il avait connaissance de cet état de choses (5), et le seul fait d'arrangements amiables ne constitue pas une preuve légale de l'état de faillite.

Le traité ne pourrait être garanti par un aval ou un cautionnement, puisqu'il est frappé de nullité à l'égard de tous (6). La nullité peut être demandée soit par le failli, soit par un de ses créanciers même postérieur à la convention illicite (7). S'il s'agit d'un traité antérieur même à la cessation de paiements, l'art. 597 est inapplicable, sauf aux créanciers à attaquer le traité conformément au droit commun et en établissant

(1) Cass., 17 avril 1849 (S.V.49.1.389).

(2) Cass., 4 juill. 1854 (J.P.55.1.208).

(3) Cass., 23 avril 1841 (J.P.42.1.382); Id. 3 avril 1846 (D.P.46.1.163); Id. 23 mai 1846 (S. V.46.1.792).

(4) Cass., 8 août 1848 (S.V.48.1.600) et 20 juin 1849 (J.P.50.1.652).

(5) Cass., 12 fév. 1846 (S V.46 1.506). (6) Douai, 3 avril 1843 (S.V.43.2.419). (7) Cass., 4 juill. 1854 (J.P.55.1.208).

dans les termes du Code Napoléon qu'il a été fait en fraude. de leurs droits (1).

L'article fixe le maximum des peines à prononcer et permet aux juges de les abaisser selon leur appréciation; mais il est nécessaire d'appliquer dans une mesure, si minime soit-elle, l'emprisonnement et l'amende, l'art. 463, C. pén., n'étant pas applicable à ce délit spécial (2).

ARTICLE 598.

Les conventions seront, en outre, déclarées nulles à l'égard de toutes personnes, et même à l'égard du failli. Le créancier sera tenu de rapporter à qui de droit les sommes ou valeurs qu'il aura reçues en vertu des conventions annulées.

1959. La loi nouvelle a fait cesser une controverse assez vive, en déclarant d'une manière expresse que le traité est nul, même à l'égard du failli, quoiqu'il ait participé au délit, dont la peine retombe sur le créancier. Il était nécessaire d'intéresser le failli à faire annuler de pareils actes, et l'on a supposé d'ailleurs qu'il n'avait pu agir en pleine liberté.

La Cour de Bordeaux a jugé que la nullité n'est pas applicable à des conventions intervenues après le concordat, et si elles ne nuisent pas au paiement des dividendes promis aux autres créanciers (3). Le concours de ces deux circonstances est indispensable; l'absence de l'une ou de l'autre rendrait l'art. 597 applicable (4).

<< Les sommes ou valeurs reçues en vertu des conventions annulées, disait le rapporteur, seront rapportées par le créancier à qui de droit au failli, si, ayant obtenu un concordat, il a fait ce sacrifice sur l'actif de la masse ou à l'aide de ressources particulières, et cette somme servira alors à remplir

(1) Paris, 30 mars 1843 et 11 janv. 1844 (S.V.43.2.421 et 44.2.479). (2) Renouard, t. 2, p. 485; Bédarride, n. 1288.

(3) Bordeaux, 24 août 1849 (D.P.50.2.102).

(4) Renouard, t. 2, p. 492.

les obligations du concordat; à l'union, si les avantages particuliers proviennent du failli; aux parents ou amis qui auront fourni les deniers, s'il s'agit de sommes données pour prix d'un vote dans les délibérations de la faillite. »

La nullité est absolue, et elle peut être poursuivie par tous ceux qui y ont intérêt, c'est-à-dire, d'après ce que nous venons de dire, par le failli lui-même, ses créanciers, ou les tiers qui y ont concouru. Si l'action en nullité est exercée par la voie purement civile et indépendamment de la constatation du délit, par exemple, contre les héritiers de celui qui a contracté, elle n'est soumise qu'à la prescription trentenaire (1).

Quant au délit, dont la punition serait demandée, il est prescrit par trois ans, et avec lui l'action civile qui résulte de la condamnation, aux termes de l'art. 638 du Code d'instruction criminelle (2).

Toutefois, si ces règles sont applicables, quand on poursuit la restitution des sommes payées, elles ne peuvent être suivies lorsque le créancier demande l'exécution du traité; à quelque époque que se réalise la demande en exécution du traité, la nullité pourra en être opposée par voie d'exception (3).

Aucune fin de non-recevoir ne pourrait être tirée contre la demande, de l'exécution totale ou partielle que le traité aurait reçue, si la prescription n'était pas acquise (4).

Des dommages-intérêts pourraient être accordés, s'il y avait lieu; la loi ne contient aucune prescription à cet égard, et c'est le droit commun en pareille matière qui devra être appliqué (5).

ARTICLE 599.

Dans le cas où l'annulation des conventions serait poursuivie par la voie civile, l'action sera portée devant les tribunaux de commerce.

(1) Cass., 28 août 1855.

(2) Renouard, t. 2, p. 493; Bédarride, n. 1298.
(3) Bédarride, n. 1298; Renouard, t. 2, p. 493.
(4) Bédarride, t. 2, n. 1292.

(5) Renouard, t. 2, p. 492; Bédarride, n. 1296.

1940. Le demandeur est libre de choisir, pour poursuivre l'annulation des conventions, la voie criminelle ou la voie civile; dans ce dernier cas, suivant M. Renouard, c'est le tribunal de commerce du domicile du défendeur qui sera compétent, conformément au droit commun, et en l'absence de toute disposition particulière (1); M. Dalloz pense, au contraire, qu'il s'agit d'une action en matière de faillite, et que l'action doit être portée au tribunal du siége de la faillite (2): cette opinion nous paraît préférable.

L'acquittement du prévenu par les tribunaux criminels ne forme point obstacle à l'action purement civile.

ARTICLE 600.

Tous arrêts et jugements de condamnation rendus, tant en vertu du présent chapitre que des deux chapitres précédents, seront affichés et publiés suivant les formes établies par l'article 42 du Code de commerce, aux frais des condamnés.

1941. Cet article est commun aux trois premiers chapitres du titre des banqueroutes, et embrasse tous les crimes et tous les délits qui y sont prévus.

Ces formalités sont remplies aux frais des condamnés.

CHAPITRE IV.

De l'administration des biens en cas de banqueroute.

ARTICLE 601.

Dans tous les cas de poursuite et de condamnation pour banqueroute simple ou frauduleuse, les actions civiles autres que celles dont il est parlé dans l'article 595 resteront séparées, et toutes les dispositions

(1) Renouard, t. 2, p. 494.
(2) Rép., v° Faillite, n. 1520.

relatives aux biens, prescrites pour la faillite, seront exécutées sans qu'elles puissent être attribuées ni évoquées aux tribunaux de police correctionnelle, ni aux Cours d'assises.

ARTICLE 602.

Seront cependant tenus, les syndics de la faillite, de remettre au ministère public les pièces, titres, papiers et renseignements qui leur seront demandés.

ARTICLE 603.

Les pièces, titres et papiers délivrés par les syndics seront, pendant le cours de l'instruction, tenus en état de communication par la voie du greffe; cette communication aura lieu sur la réquisition des syndics, qui pourront y prendre des extraits privés, ou en requérir d'authentiques, qui leur seront expédiés par le greffier. Les pièces, titres et papiers dont le dépôt judiciaire n'aurait pas été ordonné seront, après l'arrêt ou le jugement, remis aux syndics, qui en donneront décharge.

1942. La règle admise par l'art. 601 avait déjà été consacrée par l'ancien art. 600, conformément aux réclamations énergiques d'un grand nombre de corps judiciaires (1). « La loi, dit M. Renouard, a voulu maintenir dans une parfaite indépendance l'une de l'autre la procédure commerciale de la faillite et l'action de la justice répressive. Par le jugement déclaratif, l'administration des biens a cessé d'appartenir au failli et les syndics en ont été saisis. La circonstance que le failli est poursuivi ou condamné comme banqueroutier ne doit donc pas dessaisir les syndics, de même que la saisine des syndics

(1) Locré, t. 7, p. 482.

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